JOURNAL D'YPRES DE L'ARRONDISSEIENT YPRE8, Dimanche Cinquième année. N° 18. 5 Mai 1867. Paraissant le dimanche. AVIS A HOS ABONNÉS. PH1X W'lBOXXEMEXT POUR LA BELGIQUE francs par an; 4 fr. 50 par semestre. Pour I'Etranger, le port en sus. Un Numérj 25 Centimes. PRIX RES MSOICES1 ET DES RECLAMES 10 Centimes It petite ligne. Corps du Journal, 30 centimes. Le tout payable d'a vance. Laissez dire, laissez-vous blSmer, mais publiez votre pensée. On s'abonne a Ypres, au bureau du Journal, chez Félix Lambin, imp.-lib., rue de Uixmude, 59. On traite a forfait pour les annonces souvent reproduces. Toutes lettres ou envois d'aryent doivent être adressés franco au bureau du journal. Les quittances d'abonnement S VOpinion seront mises en recouvrement partir de demain. Nous saisissons cette occasion pour annoncer h nos Abon- nés qup, dans le but d'éviter les complications resultant du système d'abonnement que nous avons suivi jusqu'S ce jour, tous les abonnements ont été ramenés Ji des échéances tri- mestrielles communes fixées aux 1«r février, Ie' mai, 1" aoüt et 1er novembre de chaque année. Bien que l'application de ce nouveau système ne doive exercer aucune influence sur le prix de ('abonnement lui-même, nous avons cru nécessaire d'en avertir nos abonnés, qui s'expliqm rout ainsi fort aisé- ment Ia difference de la quittance qui va leur être présentée avec celles qu'ils ontpayées anlérieurement. Ee serment. Nous voici revenus au beau temps de l'Inquisition. Oui, vraiment, nous y sommes, car qu'est-ce autre chose qu'une sentence du Saint-Office, eet arrêt de la Cour de Liéiie qui vient de condamner a l'amende uu citoyen dorit le seul crime était de ne pas croire en Dieu? Ce citoyen, Torquemada l'eüt livré au bficher. Nos magistrals d'aujourd'hui se contentent de lui in- fliger une amende de 10 francs. A la rigueur du chÊi- timent prés, nulie difference entre les deux justices toules deux partent du méme principe pour aboutir aux mêmes consequences. Car e'est uniquement, qu'on le sache bien, pour avoir refusé d'nflirmer l'existence de la d: vinite que le témoin Maurice Michel a été condamné. Maurice Mi chel, appelè a déposer dgvant ie tribunal correction- nel de Namur, n'avait pas conteste a ce tribunal le droit d'exiger de lui une affirmation solennelle de la veracitè de son létnoignage il s'etait bornè a refuser de prendre Dieu a temoin et c'esl ce refus seul qui lui a valu sa condemnation. II y a done, en lielgique, une loi qui oblige les ci toyens a croire en Dieu et la iiberte de conscience, sous ce rapport, n'estpas sans limites. C'est la Cour de Liége qui l'affirme, en s'appuyant pour soutenir celte enorinité, sur Partiele 127 de la Constitution qui maintient le serment dans notre législation. Soit; mais alors, qu'on ne vienne plus nous dire que l'Etat est laïque. Si l'Etat oblige les citoyens a professer une religion, c'est bien le moins qu'il en ait une lui-même, car dé quel droit nous imposerait-il l'obligation de croire a quelque chose, si lui-même ne croil a rien L'Etat croyant, l'Etat religieux, telle est la consé- quence fata e, ineluctable des principes proclamés par la Cour de L ége. Nous defións tous les jurisconsultes du Bien Public et de la Paix d'echapper a ce di- lemme ou bien l'Etat est purement laïque el, dans ce cas, il n'a aucune qualité pour obliger les citoyens professer une croyance religieuse quelconque, ou bien, s'il faut lui reconnoitre ce droit de coaction, il doit se proclamer lui-même croyaut, reiigieux et ces ser d'èlre laïque. La Paix ne recule pas devant cette consequence. Nous serions loin de desapprouver, dit-elle, une loi qui chasserait des cornices les gens jmmoraux, méme ceux qui nient ouvertemenl Dieu. A la bonne heure, voila qui s'appelle parler net.Mais pour- quoi s'arrêter en cheminSi l'athéisme est hors la loi, il ne faut pas se borner a exclure les athees des cornices electoraux, il faut les declarer indigues d'oc- cuper aucune function publique, poursuivre en jus tice les ecrivains qui toni profession d'athéisme et pro clamer, une fois pour toutes, que les libertés consti- tulionnelles n'existent que pour les citoyens croyant en Di'eu. Au moins, si l'on est fèroce, on aura été logique. Voila cependant oü nous en sommes, après trenle- six années de pratique de notre libérale Constitution 1 Que nous comprenons moins la liberté qu'au temps oü MM. Vilain XIIII et De Haerne défendaient la tribune nationale les St-Simoniens menaces d'ostra- cismeet réclamaient ponr toules les opinions le droit de se prodoire au grand jour I On ne redoutait pas alors la propagation des idees anti-sociales, on avait foi dans la liberté. Aujourd'hui, on a peur et l'on ne songe pias qu'a la rogner autant qu'on peut. Oui, les temps sonl bien changès, et les hommes aussi. Ea réforine electorale. L'affaire est faite 61 voix contre 45 viennent de déclarer solennellement, Ia face du pays, que la réforme proposée par le gouvernement est, sous tous les rapports, une oeuvre d'une perfection rare et qu'on ne pouvait nous donner rien de plus, sous peine de meUre en péril toutes nos institutions les plus précieuses. Un seul membre s'esl abstenu. App'elé a motiver son abstention, M. Vanhumbetk s'est exprimè dans ces teru.es J'ai eu l'occasion de déclarer a plusiéurs reprises dans la discussion, que je ne considerais comme réforme sérieuse et utile que cel le qui aurail pour resuhat d'initier a la vie politique l'élile de nos classes ouvrières. J'ai fait des tentatives pour donner cette exten- sion au projet du gouvernement. De mes proposi- tions, les unes ont pu pareitre trop radicales; mais d'autres, fortnulées en ordre subsidiaire, étaieut cei taiuement modérées. Cependant ni anx unes ni aux autres on n'a fait l'honneur de les discuier sérieusement. De nos dé- bats a surgi enlin le projet tel que vous le connais- sez, ayant, a nos yeux, comme caractère dominant, l'insignifiance. Un projet réduit ces proportions, selon moi, ne méritait ni l'excës d'honueur d'un vote d'approba- tion, ni l'indignitè d'un vote negatif. Je me suis done abstenu. lnsignifiant, le mot était dur. M. le ministre a voulu le relever sur-le-champ et montrer qu'il était peu mérité. J'ai voulu, a-t-il répondu a M. Vanhumbeek, me rendre compte du nombre d'electeurs que le projet adopté par la Chambre devait donner, a ne cousi- derer que le eens. Eh bien, messieurs, en De tenant compte que de la condition du eens, il doublerait et au-dela le nombre des électeurs. Le nombre s actuel des électeurs serait porté a prés de 500 mille 1 M. Ie ministre peut avoir raisou, mais il oublie de nous faire connaitre a quel chiffre la condition des trois annees d'etudes moyennes réduit en realité les 500 mille électeurs qu'il fait sonner si haut. Or, il resulte de ealculs bases sur la population actuelle des écoles moyennes, que le projet adopté par la Chambre n'aecroitra pas méme de a p. c. le nombre actuel des électeurs comuiuuaux et qoe, quant aux electeurs legislanfs, le resuhat sera plus msignitiant encore, car c'esl a peine si deux ou irois cents citoyens de plus seront inscrits sur les listes electorales pour les Chambres. Mais ces chiffres n'ètaient pas bons a citer et l'orateur a pris soiu de n'en point parler. II ne nons reste plus qu'un vceu former, c'est que le Sénat refuse la part de complicité qu'on veut lui faire dans cette mystification. Nous croyons devoir livrer a l'appréciation de l'opi- nion publique un acte posé par le département de l'intérieur et qu'on croirait impossible sous une admi nistration libérale et sous l'égide d'une Constitution qui consacre pour chaque citoyen le droit de s'abste- nir de participer aux cérémonies d'un culte quel conque. Nous aurions dèja entretenu nos lecteurs de cette déplorable affaire, si nous n'avions pensé que des interpellations énergiques auraient été adressées ce sujet au gouvernement dés la rentrée des Cham bres. Encore une illusion perduel Nous avons été dècus dans notre attente aucun de nos représen- tants ne s'est jusqu'a présent levé pour protester contre la conduite inqualifiable de M. le ministre de l'intérieur. Cette coupable indifference des manda- taires du pays ne rend que plus impérieux le devoir de la presse, vraiment indépendante. Voici les fails dans toute leur cruditéils pour- raient a la rigueur se passer de commentaires. Dans le courant de l'année 1865, M. Lagage, nou- vellement nommé instituteur a Nimy-Maizières, recut du curé de cette commune l'ordre de surveiller, le dimanche, ses élèves a l'église et de les conduire a la procession. M. Lagage, fort de son droit, refusa, avec raison, d'obéir a cette injonction. Invoquer un droit constitutionnel est, paralt-il, un crime irreinissible dans les spheres gouvernementales lorsqu'on est insti tuteur communal, et quand on remplit ces modestes mais utiles fonctions on doit renoncer ses droits de citoyen d'un pays fibre. C'est du moins I'opinion que professe l'inspection ecclésiastique du canton de Mons, et en cela elle est conséquente avec ses principes, mais qui le croirait? l'intolérance a trouvé dans l'in spection laïque un appui solide et a vu ses prélentions approuvées par M. Vandenpeereboom, ministre de l'intérieur. Les obsessions de tout genre, les vexations indignes dont M. Lagage avait été l'objet, aussi bien de la part des inspecteurs ecclésiastiques que des inspecteurs iaïques, ayant été rendues publiques par YOrgane de Mons, eet honorable instituteur, victime de l'intolé rance cléricale et de la coupable condescendance de l'autoritè civile, fut accuse par M. Courtois, inspec teur provincial laïque, d'être l'auteur de l'article pu- blié par YOrgane de Mons. M. Lagage n'eut pas de peine a se disculper d'un fait qui, après tout, était parfaitemeot légal. M. Massart, bourgmeslre de Nimy- Maizières, iudigné des procédés que l'on employait a l'égard de l'insiituteur communal, déclara être l'au teur de l'article incriminè. L'innocence de M. t.agage était done evidente. Nïmportel II fal.ait une victime; il fallait que l'autoritè civile courbat humblemeut l'échine sous le goupillon clerical et M. Vandenpeere boom, ce liberal a tous orins, infligea a M. Lagage un bldme trés sévère pour avoir manqué de loyauté, mé- connu les régies de la subordination et avoir livré les conseils qui lui avaient été donnés dans son propre intérét a la critique d'un journal de Mons.

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L’Opinion (1863-1873) | 1867 | | pagina 1