JOURNAL DTPRES DE L'ARRONDISSEMENT YPRES, Bi manche Cinquième année. 31 4 Aoüt 1867. PUIX POUR LA BELGIQUE 8 francs par an; 4 fr. 50 par semestre. Pour l'Etranger, le port en sus. Un Numéro 85 Centimes. PRIX DES Aft NONCES ET DES RECLAMES 10 Centimes la pelite ligne. Corps du Journal, 30 centimes. Paraissant le dimanche. Laissez dire, laissez-vous bl&mer, mais publiez voire pensée. On s'abonne a Ypres, au bureau dv Journal, chez Félix Lambin, imp.-lib., rue de Oixmude, 59. On traite d forfait pour les annonces souvent reproduites. Toutes lettres ou envois tfaryent doivent étre adressés franco au bureau du journal. Ea contrainte par corps. Qu'est-ce que la contrainle par corps II n'est pas besoin d'insister longtemps pour dé- montrer que la contrainte par corps ne peut pas être considérée comme une peine, non pas seulement a raison de la juridiction qui est appelée Ia prononcer mais aussi a raison de son caractère aveugle et ab- solu. Jamais une peine n'est appliquée sans qu'on exa mine la bonne foi ou l'intention coupable de celui contre lequel on la prononce, tandis qu'au contraire la contrainte par corps est prononcée tout aussi bien contre le débiteur malheureux et de bonne foi que contre le débiteur qu'on sait et qu'on prouve n'être ni malheureux ni de bonne foi. Ce ne peut être une peine, parce que son exécution et sa durée sont abandonnées a un simple citoyen; ce n'est pas le souverain qui peut faire grace, mais le créancier lui-même. Le tribunal ne peut pas mêrne prendre en considération la position des parties et reconnaitre ou ne pas reconnaitre 1'existence de cir- constances atténuantes. Ainsi, la contrainle n'est pas une peine. Qu'est-ce done On dit que e'est une coaction, une épreuve de sol- vabilité, une incitation au paiement ernployée contre le débiteur. L'incitation au paiement exercée contre une per- sonne qui ne peut pas se défendre, qui est entre quatre murs, qui voudrait bien en sortir et qui ne le peut pas, une pareille incitation peut être qualifiée de véritable torture, mais enfin, c'est une incitation. Eh bien, si cette incitation est bonne, louable et ho norable, pourquoi ne pas s'en servir a l'égardde tous les débiteurs? Pourquoi ce privilége, si c'en est un, en faveur d'une certaine nature de dettes Est-ce que le principe de Ia foi jurée n'existe pas, avectoutesa pureté, avec toute son importance dans les obligations civiles aussi bien que dans les obligations commer- ciales? Appelons les choses par leur nom Ia contrainte par corps n'est que la mise en gage du débiteur au profit de son créancier. Or, la liberté d'un citoyen n'étant pas dans le com merce, il est impossible qu'elle soit donnée en gaae a l'un de ses créanciers par uneopéralion quelconque. II est impossible de mettre la personne du débiteur sur la même ligne que sa maison, son troupeau, son mobilier. Voila des gages qui peuvent être donnés, parce que les objets qui les constituent sont dans le commerce, parce que le créancier peut les faire vendre et en tou cher le prix. Mais, quant a la personne du débiteur, puisque nous n'en sommes plus, grace a Dieu, au temps oü le débiteur pouvait devenir la chose de son créancier, oü le créancier pouvait l'employer comme travailleur, elle ne peut plus être assimilée aux choses susceptibles d'être données en gage. Si elle ne peut pas être donnée en gage, que faites- vous par la contrainte par corps? Vous saisissez le débiteur, malheureux ou non, coupable ou non, comme vous saisiriez une béte de somme, avec une différence toutefois, c'est que cette béte de somme peut être ven due, que le prix peut servir a acquitter la dette, tan- dis que, du débiteur, vous ne pouvez lirer aucun parti. Vous ne pouvez que Ie mettre en prison et l'y retenir aussi longtemps que bon vous semblera, dans les limites, bien entendu, du maximum de temps dé- terminé par la loi. Vous voyez la une stipulation licite Non, personne ne peut le soutenir, car nous avons, dans le Code ci vil, un article, l'article 2060, qui déclare que la con trainte par corps ne peut jamais être conventionnelle. Pourquoi cela Prócisément parce que la personne du débiteur n'est pas dans le commerce, parce qu'elle n'appartient pas a l'individuqui voudrait en disposer, parce qu'elle est inaliénable. Or, si vous ne voulez pas que la personne du débiteur puisseêtre l'objet d'une stipulation,si vous reconnaissez par la même son ina- liénabilité, il faut que vous reconnaissiez qu'une loi qui permet d'user, d'abuser de la personne du débi teur ne repose pas sur un principe légitime, sur un principe qui soit en rapport avec notre droit public et les idéés de notre temps. Mais, dit-on, ce n'est pas dans I'intérêt particulier du créancier, c'est dans I'intérêt général que la loi a établi la contrainte par corps I'intérêt général veut que les debiteurs paient leurs dettes. 11 nous semble avoir répondu cette remarqueen disantPourquoi tous les débiteurs ne sont-ils pas placés dans la même situation, car I'intérêt général veut que les débiteurs civils paient leurs dettes tout comme les débiteurs commerciaux? Aussi on arrive a dire que c'est un moyen de crédit mis a la disposition des petits emprunteurs. Un moyen de crédit I J'ai l'honneur d'être régent de la Banque de France depuis bien des années, di- sait M. Schneider au Corps législatif et je déclare que lorsque j'ai examiné les bordereaux soumis a l'es- compte, jamais je n'ai regardé si la contrainte par corps était derrière les effets. II est, en effet, impos sible d'admettre que, entre la personne qui fait es- compter un effet et eelle qui va I'escompter, la con trainte par corps se dresse comme pouvant être éventuellement un gage, une garantie, et qu'elle dé- cide davantage a prêler a un homme qui n'a pas de solvabilité, qui, par sa position et sa moralité, n'in- spire pas la confiance. L'honnêteté, la bonne conduite, l'énergie au tra vail, l'intelligence, voilé les véritables éléments du crédit commercial. La contrainte par corps n'ajoute rien a la confiance qu'inspire le commercant qui réu- nit ces conditions. On veut que tout au moins elle soit un moyen puis sant d'intimidation. Quoi, tout ce monde de petits commercants ne tiendrait ses engagements, n'acquitterait les dettes qu'il contracte que parce qu'il est sous le coup de la contrainte par corps? Quoi, si cette contrainte était abolie, si cette voie de coaction cessait d'exercer son action comminatoire, a l'instant même les débiteurs ne seraient plus que des gens malhonnêtes, succom- bant a Ia tentation, dissimulant leur actif, frustrant leurs créanciers avec une insultante impudence? En vérité, il faut avoir meilleure opinion de tous ces petits commercants, il faut avoir foi en leur hon- neur, en leur courage, en leur conscience, car ils ont derrière eux, comme chacun de nous, une familie qui leur est chère et a laquelle ils sont nécessaires, des enfantsauxquels ils veulent laisser un nom honorable, tout un passé de probité qu'ils veulent garder pur de souillure. Que l'on veuille considérer, d'ailleurs, que l'intimi- dation exercée par la contrainte par corps est bien moindre qu'on ne se l'imagine généralement. Le débiteur n'a-t-il pas un moyen tout simple d'échapper son créancier en déclarant sa faillite? Et si l'emploi de ce moyen doit répugner a quelqu'un, n'est-ce pas au débiteur honuête et malheureux, tandis que le débiteur de mauvaise foi n'hésitera pas a y recou- rir? Espérons done que cette législalion barbare, in- juste autant qu'inutile, aura bientöt disparu de nos Codes, comme elle a disparu tout récemment du Code francais, et que s'il ne nous a pas été donné de pré céder la France dans la conquête de cette libérale ré- forme, nous nous haterons de la suivre. Le Journal de Rome annonce que la commission sa nitaire, après s'être entendue avec les autorités ec- clésiastiques et municipales, s'occupe d'empêcher la diffusion du choléra et d'assainir les quartiers pau- vres qui en ont grand besoin. Le pape a donné cinq mille livres, sur sa cassette, pour le soulagement des victimes, et a fait remettre une somme de vingt mille livres, prise tant sur le trésor public que sur le co mité des subsides, au ministre de l'intérieur. Le car dinal vicaire a été chargé de distribuer cette somme aux families indigentes parmi lesquelles le choléra sévit. On a vu souvent les cléricaux exploiter au profit de leur parti les fléaux ou les infortunes privées. Un roi était-il frappé dans ses enfunts, loin de s'associer ses douleurs, ils disaient que c'était le chatiment de son ambition. Un pays était-il submergé, c'était a les entendre, parce qu'il avait pour habitants des libres- penseurs. Lisez leurs articles, leurs brochures Ie genre hu- main y est menacé des vengeances célestes; le dieu qu'ils dépeignent est loujours prêt a envoyer l'ange exterminateur et les sept plaies d'Egypte en punition de nos egarements. II faudra désormais renoncer a ce langage, et re connaitre que les fléaux ne sont point des pénalités décrétées en haut contre les pécheurs. Le choléra est a Rome; et dans quel moment y a-t il éclaté? Quand la ville éternelle avait le bonheur de possèder, outre sa population habituelle, cinq cents prélals, cinq ou six mille prêlres accourus de toutes les parties de la chrétiente. A moins de soutenir, ce qui serait absurde, que tous ces pieux personnagessont coupables, les feuilles cléricales ne sauraient voir dans l'apparition du cho léra h Rome, un signe de la colère divine. Les voilé done forcés de perdre un de leurs moyens oratoires; d'avouer que les épidémies sont dues des causes Le TOUT PAYABLE D'A VANCE.

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L’Opinion (1863-1873) | 1867 | | pagina 1