JOURNAL D'YPRES DE L'ARRONDISSEMENT
YPRES, Dimanche
Sixième année. N° 12.
22 Mars 1861
P1I1X D'ABOillMEiT
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La tolerance dcs doctrinaires.
Les membres de 1'Association libérale se sont
réunis samedi 14 mars en assemblée générale
pour procéder au renouvellement intégral du co
mité. Nous disons intégralen effet, malgré Par
tiele 9 du règlement qui dit formellement que
1'Association procédera tous les ans au renou
vellement par tiers de son comité, aucune élec-
tion de ce genre n'avait eu lieu depuis le 6 mai
1865; les deux tiers du comité étaient consè-
quemment dépourvus de mandat régulier. Mais
qu'est-ce que la régularitê, le règlement, le droit
en face de la volonté des mattres Une vétille
On s'est demandé quel péril en la demeure,
quelle nécessité pressante de renouveler tout-è-
coup le comité Beaucoup de personnes ont cru
que, touchés de la tristesse et de l'abandon de
notre foire,émus de l'absence des paillasses et des
saltimbanques, nos grands hommes, toujours sou-
cieux des plaisirs et de la prospérité de leurs con-
citoyens, quand cette prospérité et ce plaisir ser-
vent leurs intéréts, ont voulu combler Ie vide par
une représentation de leur fagon.
II est une autre raison encore déblayer !e
terrain de tous les obstacles, écarter du comité la
surveillance qui gêne les intrigues et combat les
illégaütés. II faut pouvoir, a l'approche des élec-
tions et grèce la complaisance d'un comité ser
vile, introduire dans l'Association toutes les créa-
tures, renforcer l'élément non-électeur composé
des commis de toutes les administrations, pour en
écraser au besoin l'élément électeur.
Jusqu'ici eet abus et d'autres ne s'étaient pas
produits sans protestations ceux qui étaient si
volontiers leur libéralisme... en paroles ont donné
samedi une nouvelle preuve de leur respect pour
la liberté de discussion et de la tolérance qui les
anime, en éliminant du comité le seul membre
que l'opposition y comptait encore.
On nous raconte k ce propos qu'il y a prés de
vingt ans, les meneurs firent élire du comité celui
qu'ils excluent aujourd'hui sans qu'il fut même
membre de leur Société et que le chef du libéra
lisme yprois, alors président de 1 Association, fit
une démarche personnelle, même des instances,
pour engager l'élu accepter. Depuis cette époque,
parait-il,
En un plomb vil l'or pur s'est changé
M. Capron n'a pas répondu aux espérances de
docilité qu'on fondait sur lui. Indé iree! Samedi
on l'a remplacé par M. Auguste Brunfaut.
Nul ne convenait mieux d'ailleurs pour entrer
au comité que M. Aug. Brunfaut. II est l'homme
de la situation.
Proposé, il y a peu d'années, M. Brunfaut al-
légua, pour motiver son refus,les taquineries qu'il
appréhendait de Ia part du clergé dans ses rela
tions commerciales avec les écoles dentellières. A
cette époque, du reste, il n'était pas précisément
en odeur de sainteté auprès de notre coterie. De
puis devenu conseiller communal et parfois con-
seiller intime, fêté, cho.yé, M. Brunfaut est con-
quis. Non pas que nous peusons qu'il se soit laissé
gagnernous préférous croire une conversion
raisonnée.
Toutefois, quelle que soit la chaleur de ses
nouvelles convictions et quoiqu'il crie aujourd'hui
vive mon ami Alphonse! vive notre honorable
sénateur baron Mazeman de Couthove avec le
même enthousiasme qu'en 1847 il criait vive
Malou! son ardeur de néophyte ne lui fait pas
négliger complétement ses dieux d'autrefois.
Après avoir signé une adresse au Pape dans la-
quelle il protestait de son absolu dévouement au
saint-Père, il cumule encore aujourd'hui avec une
désinvolture parfaite et un aplomb réjouissant la
sainte mission du marguiller et les fonctions libé-
rales. Politique de l'école éclectique, il prend dans
chaque opinion, dans chaqueparti, selon les lieux
et les circonstances, ce qui s'approprie le mieux
ses vues et nous ne désespérons pas de lui voir un
jour tenir le cierge bénit d'une main, de l'autre la
truelle maijonnique.
Pour le reste, charmant homme, il est le type
le plus accompli de ce libéralisme.... conciliant,
de cette politique d'équilibristes qui règne et gou-
verne Ypres. Sa place était marquée d'avance
dans le comité entre M. Auguste Beaucourt qui
retire ses fils de notre Collége communal pour les
placer cbez les Jésuites et ce magistrat, ancien
membre de la Députation permanente, que cha-
cun connalt, deux libéraux de la meilleure
trempe
Tout excellent libéral qu'il se persuade être,
M. Brunfaut est néanmoins grand admirateurdu
régime napoléonien. A un homme ordinaire, cela
semble dróle. L'honorable conseiller communal
n'est pas arrêté pour si peu il est de taille con-
cilier l'inconciliable. Même il ne s'est pas fait faute,
dans plus d'une circonstance, de détailier complai-
samment et avec une franchise qui l'honore, les
bienfaits que procurerait a la Belgique une an
nexion avec ses bons amis les Francais.
Ainsi, libéralisme inébranlable, patriotisme dé-
sintéressé, tels sont les deux principaux titres po-
litiques de M. Auguste Brunfaut. Ses opinions se-
ront une bonne enseigne pour une association
beige, se disant libérale et constitutionnelle. En
se l'adjoignant, le comité a fait preuve de tact.
Société «Ie l'Union libérale et Association
constitutionnelle de l'arrondissement d'Ypres.
Assemblée générale du Samedi 14 Mars 1868.
Les membres de la Société étaient convoqués
pour trois heures. Le billet de convocation n'avait
oublié qu'une chose, assez essentielle, il est vrai,
le lieu oü devait se faire la réunion. II parait que
trois heures étaient bieii sonnées lorsqu'il fallut
députer le portier de la Société de cabaret en ca
baret pour aiguillonner le zèle chancelant des
membres qui n'arrivaient pas.
Les comédiens étaient en scène, les spectateurs
faisaient dèfaut.
La représentation, nous voulonsdire la séance,
s'est ouverte par un discours de M. Carton, fils.
Nous employons le mot discours pour n'être pas
accusés d'un manque de courtoisie nous prions
cependant nos lecteurs de ne pas exagérer la portée
de ce mot dans l'espèce.
Depuis quelque temps nous avons fréquemment
occasion d'entendre M. le commissaire d'arron-
dissement. Organe c'est un mot qu'il af-
fectionne, de la commission au cercle La Con
corde, organe du comité l'Association li
bérale, son propre organe au cornice agricole,
M. le commissaire débite son róle de ténor uni-
versel dans un francais qui lui est propre et dont
la haute saveur littéraire donne une grande origi-
nali]té k son style. On dit qu'il s'exerce l'élo—
quence parlementaire. En ce cas, bon courage,
il lui reste beaucoup k faire.
M. Carton nous apprend que lorsqu'il était
secrétaire de 1'Alliance, quantum mutatus ab
UloEst-ce calcul ou erreur, il a dit de l'Asso-
ciation libérale de Bruxelles, c'était pourtant bien
de Alliance qu'il fallait dire, on inscrivait les
noms des votants et qu'on laissait le scrutin ouvert
pendant quelque temps.
Oui, cela se pratique encore aujourd'hui a
1'Association libérale de Bruxellesmais ce que
M. Carton a oublié d'ajouter, c'est que nul n'est
admis dans le local de réunion sans avoir signé le
registre des entréesce qu'il a oublié aussi, c'est
que l'inscription des votants sert de contróle a
l'appel nominal.
Ici, rien de tout cela.