JOURNAL D'YPRES DE L'ARRONDISSEMENT YPRES, Dimanche Sixième année. N0 13. 29 Mars 1868. Lb tout payable d'avance. PItlX U'ABOIXKMGHT POUR LA BELGIQUE 8 francs par an; 4 fr. 50 par semestre. Pour l'Etranger, le port en sus. Un Numéro 25 Centimes. PRIX OES AitSOXCES ET DES RECLAMES 10 Centimes It petite ligne. Corps du Journal, 30 centimes. Paraissant Ie dimanche. Laissez dire, laissez-vous bl&mer, mail publiez voire pensée. On s'abonne a Ypres, au bureau du Journalchez Félix Lambin, imp.-lib., rue de Dixmude, 59. On traite a forfait pour les annonces souvent reproduites. Toutes lettres ou envois d'argent doivent être adressés franco au bureau du journal Correspondance particuliere de I'OPIXIOX. Bruxelles, 27 mars. Les élections approchent. Nos doctrinaires, malgré toute leur jaclance, ue laissent pas que d'être einbar- rassés de rendre compte au pays de leur mandat. De fait, voila bientót onze ans que ces messieurs occu- pent le pouvoir sans autre profit que pour eux- mêmas, leurs amis et connaissances, et en quelque petite estime qu'ils tiennent le corps électoral, en core comprennent-ils que Ie gouvernement du pays ne leur a pas éte confiè exclusivement dans l'intérêt de leurs petites affaires personnelles et que les élec- teurs pourraient bien ne pas se montrer très-satis- faits de leur gestion. II y avail un moyen sCtr de détourner I'attention du corps électoral, c'etait de ressusciter la question clérico-libèrale. Nos doctrinaires n'ont eu garde de le laisser échapper. Depuis hier la Chambre a ouvert, a propos du budget de ('Intérieur, ce qu'on appelie en style de journaux un grand débat politique. Pendant huit ou dix jours, nous allons voir défiler, une a une, a la tribune, toutes les questions qui, depuis 30 ans, divisent nos deux grands partis. Mais ne croyez pas qu'on songe Ie rnoins du monde a en résoudre au- cune. Pas si bêtes. Yous rappelez-vous, Monsieur, l'histoire de ce vieux procureur qui, ayant a tnarier sa fille a un jenne avocat, ne lui donna pour dot qu'un dossier? Un an après la noce le jeune avocat courut tout triomphant annoncer a son beaupère le gain du procés qu'il lui avail confiè. Imbecile, s'écria Ie beau père, tu as étè gagner ce procés? Et inoi, qui en avais vécu pendant vingt ans et qui eomplais que tu le transmettrais a tes enfants! Nos doctrinaires raisonnent comrae le vieux pro cureur. lis n'ignorenl pas que le jour ou ils auront définitivement résolu les questions clérico-liberales, il ne leur restera plus qu'a faire leurs malles et a s'en aller. Aussi n'ont-ils garde d'y toucher. Ce qui ne les empêchera pas de tonner conlre l'Encyclique et le Syllabus et de rouler de gros veux en regardant la droite. Maiscelle-ci sait parfaitement a quoi s'en te- nir sur ces grimaces et ne s'effraie nullement de leur tonnerre en tóle. M. Alph. Vandenpeereboom fait grand cas des fables de Lafontaine. II en est une qui lui sera bien certainement revenue a la memoire pendant qu'il pronongait hier son grand discours pro domo. C'est celle de VAne chargé de reliques. Du temps oü votre représentant était ministreses moindres petits speachs avaient l'heureux privilége d'être écoutés avec une religieuse attention. Ses plaisanteries pro- voquaient sur tous les bancs de la gauche des rires sympathiques. II avait, au plus haul degré, ce qu'on appelle en argot des coulisses parlementaires, l'oreille de la Chambre. Combien les choses ont changé de puis! Ilier, c'est a grand peine qu'il s'est fail entendre au milieu du bruit des conversations particulières. Plus de portefeuille, partant plus d'espritun silence glacial accueillait ces bons gros mots jadis si bien regus. L'orateur, qui doit cependant avoir quelqu'ex- périence des hommes, a été tellement ahuri de ce brusque revirement, qu'après avoir commencé par réciler son discours de mémoire, il a d£i finir par tirer son papier de sa poche et se mettre lire. La loi sur Ie régime postal a été votée dans la séance d'hier l'unanimité des 83 membres présents, moins une abstention. Peul-étre vos leeteurs me sauront-ils gré de leur en faire connaitre ('economie générale. La loi nouvelle reconnait quatre espèces de let tres la lettre ordinaire, dont le poids est porté de 10 a 15 grammes; la lettre exprès, dont les expédi- teurs voudront faire opérer la remise immédiate èi domicilela lettre recommaudée, c'est-a-dire celle dont on voudra assurer la remise au destinataire contre recu, et enfin, la lettre chargée, avec valeur déclarée au bureau d'expédition et indiquée sur la suscriptiou de l'enveloppe. L'administration n'est responsable que des lettres de cette dernière ea- tègurie. L'iusertion de valeurs quelconques dans les lettres ordinaires, exprès ou recommandées, est ri- goureusement interdite et, en cas de perte d'une ou l'autre lettre apparlenanta ces trois premières classes, 11 n'est dü aucune indemnitè a l'expèditeur. Les petits paquets et les articles-finance pourront être transportès par la poste dans toute l'élendue du royaume. De plus, elle est autorisée a débiter des enveloppes oubandes timbrees d'avance. Tel est, dans ses dispositions principales, Ie régime nouveau qui sera prochainement inauguré. 11 realise des améliorations sans doute, mais la taxe uniforme a 10 centimes aurait bien fait mieux nolre affaire. Qu'en pense M. Alphonse Vandenpeereboom, lui qui, jadis, a si vaillamment comballu en faveur de cette reforme II est vrai qu'a cette epoque notre représen tant n'était pas ministre. Le jour oü il l'est devenu, 11 n'en a plus soufflé mot. Puisque j'en suis a vous parler poste, je profiterai de l'occasion pour signaler l'injustice de la critique fréquemment formulée contre l'elevation de l'amende imposée a celui qui regoit une lettre insufflsamment affranchie. Cette critique repose sur la croyance erronèe que, dans ce cas, les timbres apposés sur la lettre sont annulés. Or, il n'en est rien. En cas d'affranchisse- ment insuflisant, la poste n'exige que le complément de la taxe; seulement, elle y ajoute la taxe fixe de 10 centimes qui est exigée pour les lettres non-affran- chies. II en résulte que si le timbre apposé sur la lettre n'est que de 10 centimes, la taxe exigée du des tinataire est précisément celle qui aurait sufii pour affranchir la lettre, et de la vient cette idéeerronee, partagee par beaucoup de personnes, qu'en cas d'af- franchissement insuflisant, les timbres apposés sur la lettre sont entièrement annulés. A Anvers, Ie parti libéral s'est abstenu dans l'élec- tion du 23 mars. Un très-petit nombre d'électeurs se sont présentés au scrutin. Les journaux libéraux de la localité voient dans cette abstention d'une notable parliedu corps électoral le signe certain de l'affaiblis- sement de leurs adversaires. II ne faudrait pas trop s'y fier. II y a un an a peine, M. Watteeu a été élu a Bruxelles par 15 a 18 cents volants. S'il y avait eu lutte, il est certain qu'il aurait eu pour lui au moins autant de voix que M. Hymans qui en avait obtenu 4,800 dans l'élection précédente. La vérité est que l'élecleur qui s'abstient échappe a toute statistique et qu'on n'a pas de raison de le classer plutót parmi ses amis que parmi ses adversaires. Une question qui intéresse au plus haut point le journalisme a été résolue par la deuxième chambre de notre Cour d'appel. M. Ch. Lebeau, membre de la Chambre des repré- sentants, avait intenté une action en dommages et intéréts VUnion de Charleroi, pour un article litté- ralement extrait dela Voix du Luxembourg, avec in dication de la source. L'auteur de l'article du journal luxembourgeois était spontanément intervenu au procés pour se déclarer tel. En présence de ce fait, l'editeur de I'Union avait, se fondant sur l'art. 8 de la Constitution, conclu a être mis hors de cause. Mais le tribunal de Charleroi l'avait d'abord débouté de cette conclusion et condamné au fond. La cour, par un arrêt fortement motivé, et une in terpretation large de la presse, aappliqué l'immunité constitutionnelle a la reproduction d'articles de jour naux, en sorte que, s'étant borné a semblable repro duction par la voix de la presse, on peut toujours, a moins de collusion prouvée, se retrancher derrière le journal dans lequel on a puisé l'article incriminé. Jusqu'ici, la jurisprudence avait admis la doctrine contraire. L'éditeur de I'Union de Charleroi, M. Goeris- Gheubel, a done eté mis hors de cause, et M. Ch. Le beau condamné aux dépens des deux instances,sauf a poursuivre, s'il s'y croit fondé, la Voix du Luxem bourg. Cet arrêt a été rendu sur les conclusions conformes de M. l'avocal Simons. Cet arrêt inauguré une jurisprudence nouvelle, car j'ai souvenance qu'il y a sept ou buit ans VEloile beige fut condamnée a je ne sais combien de centaines de francs de dommages-intérêts pour avoir reproduit une nouvelle a la main extraite d'un journal de Bruges dans laquelle un officier de notre armee se trouvait desobligeamment cité. Le curieux de l'affaire c'est que ce journal ne fut pas mêrne inquiété, le demandeur ayant jugè sans doute qu'il n'y avait rien a en tirer. Félicitons-nousde l'arrêt rendu par la Cour d'appel de Bruxelles, mais n'oublions pas que le meilleur arrêt du monde ne vaut pas une bonne loi. Je rappel- lerai, a cette occasion, que depuis plus de deux ans, la Chambre des représentants est saisie d'un projet de loi relatif aux dommages-intérêts en matière de presse. Le rapport de M. Tbonissen a éfédéposéla

HISTORISCHE KRANTEN

L’Opinion (1863-1873) | 1868 | | pagina 1