JOURNAL D'IPRES DE L'ARRONDISSEMENI
YPRES, S)imanche
Sixième année. N° 42.
18 Octobre 1868.
Paraissant le dimanche.
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CorrcKpondance particuliere de 1'OPIilIOS.
Bruxelles, 16 0ctobre.
Pas de changement sensible dans la situation géné
rale du Prince royal. Les nuits sont plus ou moins
calmes, selon les dispositions du moment, mais l'état
general reste lemême, c'est-a dire extrêmemenl grave,
pour ne pas dire absolument désespéré.
C'est ce qu'ont constaté les médecins appelés a |a
consultation qui a eu lieu mercredi dernier au cha
teau de Laeken. Mais Ie Moniteur ne dit rien de 1'avis
que ces messieurs ont été appelés a émettre sur le
poiDt de savoir si le malade est en état de supporter
les fatigues d'un voyage dans le Midi et l'on interprète
défavorablement le silence gardé par le Mouiteur sur
cette intéressante question.
Ce qui épuise surtout le malade, vous le savez, c'est
la toux et la difficulté de respirer. Aussi longtemps
que la douceur de la teinpérature l'avait permis, on
avait allégé ses souffrances en le tenant coustamment
au grand air pendant le jour et en laissant ouvertes
les fenêtres de son appartement pendant la nuit.
Mais voila l'hiver qui arrive les nuits deviennent
plus fraiches et les promenades plus courtes. C'est
alors qu'on a pensé a faire respirer au malade l'air du
Midi. Reste a savoir si le malade était en état de sup
porter les fatigues d'un aussi long voyage, et !a-dessus
le Moniteur reste absolument muet, ce qui donne as-
sez a croire que l'avis des médecins n'est point favo
rable.
Le silence du Moniteur ne fait, du reste. que con-
firmer les bruits qui circulent sur l'affaiblissement
toujours croissant du royal enfant. Déja, i! y a huit
jours, on disait qu'il en était arrivé au point de ne
pouvoir se tenir un moment debout sans être soutenu
sous les aisselles et de refuser toule espèce d'aliment
fortifiant.
Notons pourtant que le journal officiel constate
qu'il y a amélioration depuis la consultation tenue
le 23 aoüt dernier. Ce n'est pas grand chose,
mais c'est moins que rien.
Onremarqueque lenomdeM. Reyer, l'uromancien-
homéopathe ne figurait plus, cette fois, parrni ceux
des médecins appelés en consultation ce qui fait sup-
poser qu'il y a bien quelque chose de vrai dans ce que
l'on a dit d'une discussion qui s'était élevée, lors de la
première consultation, entre M. Reyer elsescollègues.
Les angoisses morales et les fatigues ont compromis
la santé de la Reine au point de faire craindre qu'elle
ne devienne sérieusement malade. Les personnes
qui l'ont approchée dans ces derniers temps ont été
frappées de la profondealtération de ses traits. La se-
maine dernière, au service célébré en l'honneur do la
feue Reine, elle était a peine reconnaissable.
La Princesse Charlotte, au contraire, se porte de
mieux en mieux. On la rencontre fréquemment en voi-
ture,aux environs de Laeken,accompagnée d'une dame
du Palais et rien, dans son attitude, ne trahitte moin-
dre trouble de ses facultés intellectuelles. Toutefois,
elle persiste a ne recevoir personne, sauf les membres
de la familie royale, et, de temps a autre, l'arche-
vêque de Malines, pour qui elle a une estime et une
affection toute particulière'.
La commission chargée de réviser le Code de pro
cédure civile a terminé ses travaux, mais il s'en faut
de beaucoup que le projet de révision soit en état
d'ètre soumis aux délibérations des Chambres. Pour
en arriver la, le projet aura passer par bien des
examens encore et nous devrons nous eslimer pour
très-heureux si le projet est déposé l'année prochaine.
Quant au vole, c'est une autre affaire, et s'il en est
qui sont öésireux de voir supprimer le ministère des
avoués,qu'i!s se rappel lent ce qu'a duré la discussion
du Code pénal.
Des journaux ont mis en doute que le gouverne
ment ait l'intention de réclamer, dans le cours de la
session prochaine, la discussion du projet de loi sur
le temporel des cultes. Rien n'est pourtant plus cer
tain et je suis en mesure d'ajouter que ce projet figu-
rera parmi un des premiers a l'ordre du jour après
le vote des budgets.
A en croire certains organes de l'opposition, le mi
nistère ne saurait trop quelle altitude prendre vis-è-
vis du nouveau gouvernement espagnol, surtout
raison de la conduite qu'il a tenue, l'année dernière,
a l'égard de Prim.
J'avoue que, pour ma part, je ne concevrais rien a
l'embarras que l'on suppose chez les membres du ca
binet. Le ministère a proclamé, lors de la reconnais
sance du royaume d'Italie, des principes qui doivent
le mettre fort a l'aise vis-a-vis de l'Espagne. 11 n'y a
pas penser, du reste, qu'il se montre aujourd'hui
plus ernpressé qu'il ne l'a été alors. It attendra
l'exemple de la France, de l'Angleterre et des autres
grandes nations européennes.
La Patrie de Bruges annonce que M. Vandenberghe,
éditeur du Jaer dertig, vient d'être assigné comme
prévenu devant le juge d'instruction de Courtrai.
Le journal qui nous apporte cette nouvelle négligé
de dire quelle est la prèvention qui pèse sur M. Van
denberghe. La chose certaine, c'est qu'il ne peut pas
être question d'un délit de presse, puisque le vicaire
Van Eecke étant reconnu pour être l'auteur des ar
ticles publiés dans le Jaer dertigil n'y a plus lieu
a mettre l'édileur en cause.
C'est le 22 de ce mois que sera appelée devant le
tribunal correctionnel l'affaire de M. Doulton. On croit
assez généralement que, pas plus cette fois que les
deux fois précédentes, Ie prévenu ne se présentera
devant la justice et cette opinion rencontre d'aütant
plus de gens pour la partager, que M. Doulton vient
de faire vendre tout le mobilier de I-appartement qu'il
occupait a Bruxellijp.
Les commercants de Bruxelles se plaignent très-
vivement de la multiplicité des ventes au rabais,
soi-disant pour cause de décès ou pour cause de
changement de domicile et ils voudraient que Ia loi
ou des règlements empêchassent ces petites ma
noeuvres. Mais oü irions-nous, si la loi inlervenait,
de cette facon, entre Ie vendeur el l'acheteur? Après
tout, c'est Ia liberté. Le vendeur est mattre de vendre
sa marchandise au prix qu'il veut, et quant a l'ache
teur, il n'a droit qu'a une chose, c'est a n'être pas
trompó sur la nature de la chose vendue. Après cela,
que cette chose lui soit vendue paree que le vendeur
va cesser son commerce, ou pour toute autre raison,
que lui importe
La Compagnie anglaise qui s'était formée pour la
reprise de Sexploitation des Omnibus vient de renon-
cer son projet. Voila une entreprisequi s'annoncait
sous les plus brillants auspices et qui menace de dis-
paraltre au milieu des ruines.
Quelle que soit l'opinion que l'on professe sur la
valeur politique el morale de la familie des Bourbons,
on ne peut disconvenir que le peuple espagnol, dans
la pratique révolutionnaire, ne se montre aussi sage
que résolu.
Débarrassé, parun coup de la destinée, d'un gou
vernement exécré, il ne s'est pas mis, comme tant
d'autres l'eussent fait a sa place, a la recherche d'un
gouvernement meitleur; il s'est occupé de décréter
l'abolition de toutes les entraves qui le gênaient.
Le gouvernement définitif viendra bien assez tót
pourquoi perdre son temps a disputer de lui et de ses
formes possibles? L'heure presse, il faut agir.
Et pendant que les prétendants sonnent a la porte,
le peuple espaguol, sans paraitre les entendre ou se
soucier d'eux, fait de la matière républicaine. Les
milices s'arment, les administrations se constituent.
Sous la pression de l'opinion publique, les juntes par-
ticulières prennent des mesures d'ordre général qui
seront des faits établis lorsque viendra l'heure de la
réunion des cortès. Ici on abolit la peine de mortla
on abaisse les tarifs des douanes; ailleurs on expulse
les jésuites, on ferme les couvents, on proclame la li
berté des cultes, et comme sanction, a Séville par
exemple, on pose Ia première pierre d'un temple pro
testant.
Revenant sur toutes ces décisions provinciales et
les accentuant dans un sens plus largement politique,
la junte de Madrid, dans une déclaration des droits,
qui est comme le manifeste de la révolution tout en-
tière, proclame Ie suffrage universel, Ia liberté des
cultes, de i'enseignement, des reunions et des asso
ciations, la liberté de la presse sans législation spé-