les conditions actuelles de Ia société, ne négligeons
pas, du moins, de choisir a vee soin ceux que nous
chargeons de nous suppléer et surveillons-les atlen-
tivement pendant qu'ils s'acquittent de leurs de
voirs.
Quoi que vous fassiez, quoi que vous puissiez dire,
vous ne détruirez pas Ie goüt, le besoin, la néces-
sité, pour vrai dire, de la politique. Au fur et a me
sure que l'intelligence des générations s'élève, la no
tion des conditions essentielies a leur existence subit
un accroissement analogue. C'est a la somme acquise
des connaissances politiques que se mesure le degré
de civilisation conquisc'est de la diffusion de ces
lumières, trop longtemps renfermées dans un cercle
étroit, que dépend l'amélioration du sort de tous.
N'excluons done pas la politique.
Lies chemins de fer.
Nous marchons de progrès en progrès!
Le 6 de ce mois le train du soir est arrivé de
nouveau Ypres avee un retard d'une heure.
Et qu'on ne nous demande pas pourquoila rai-
son en est des plus comiques.
En effet, ce n'est ni une locomotive détraquée,
ni un essieu brisé, ni un déraillement sur la ligne
de la Flandre occidentale qui a causé ce retard;
le train de l'Etat était arrivé son heure Cour-
trai. Qu'était-ce done alors? Celui de Renaix
était en retard et pour ce motif les voyageurs de
Gand atlendaient dans la station d'Andenarde
tandis que d'autres croquaient le marmot pendant
cinq quarts d'heure Courtrai. II était dix heures
moins un quart lorsque le train qui doit partir de
cette ville 8 h. 35 m. se mit en marche pour
Ypres.
On voit d'ici les conséqnences du système pra-
tiqué par la Société d'exploitatioo et pour pea
qu'on en étende l'application, il suffira d'un re
tard sur une ligne quelconque pour enrayer le
mouvement sur toutes les lignes du pays.
Le gouvernement n'a t-il done rien voir dans
les faits et gestes de la Société d'exploitation et
s'il a le droit de surveillance, pourquoi tolère t-il
de pareils abus? A voir comment vont les choses
on croirait que le vovageur qui met le pied sur
une ligne de la Société d'exploitation devient la
propriété, la chose de cette société et qu'il lui est
livré pieds et poings liés pour qu'eile en dispose
son gré. Pareils faits sont intolérables et toutes
les reclamations de la presse, des chambres de
commerce, des autorités, des représentants et des
sénateurs ne les ont pas modifiés jusqu'ici.
A propos de chemins de fer, signalons une
autre particularité bien inconcevable. Ajoutons
toutefois que ce n'est pas a la Société d'exploita
tion, mais a l'Etat qu'en incombe la responsabi-
lité cette fois. On sait que la Société d'exploita
tion a organisê un train direct de Poperinghe a
Gand, celui de 11 h. du matin. C'est lè une
excellente mesure non-seulement pour les voya
geurs en destination de Gand, mais aussi pour
ceux qui se rendent Bruxelles et dans l'intérieur
du pays. Croirait-on qu'au lieu de faciliter au
public l'usage de cette nouvelle voie, l'adminis-
tration de l'Etat, par un étroit esprit de jalousie,
accumule comme plaisir les obstacles? Croirait-
on, par exemple, que Ia Société d'exploitation
n'est pas autorisée délivrer au train de 11 h.
des coupons pour une localité située sur la ligne
de l'Etat? C'est ainsi que la plupart des voyageurs
sont mis dans l'impossibilité de profiter du train
direct sur Gand, car ils n'obtiennent leur coupon
que jusqu'è eet endroit et lè le temps leur fait
absolument défaut pour en prendre un nouveau.
Que faire quand on a des bagages? C'est par
cette rouerie hypocrite que l'Etat force les voya
geurs pour Bruxelles suivre sa ligne par Deynze
et enlève aux populations de I'arrondissement
d'Ypres tout le bénéfice d'uo train direct sur
Gand. Et pourtant aucun de nos hommes poli
tiques, si soucieuxen parolesde l'inté-
rêt de leurs commettants, n'a élevé jusqu'ici la
moindre réclametion.
Cela changera, nous dit-on, quand la nouvelle
section d'Audenarde Denderleeuw sera mise en
exploitation. Nous n'eu sommes pas bien con-
vaincu. Et déjè dès a présent des difficultés re-
tardent l'inauguration de la nouvelle section.
Des chicanes sansnom, des intrigues inavouables
se produisent. Quelques esprits étroits, toujours
les mêmes, essaient dans leur intolérance de
parquer les chemins de fer comme les électeurs en
deux troupeaux libéral et clérical. Ils ont dé-
couvert qu'un financier dont il a été beaucoup
question dans ces derniers temps aurait quelque
intérèt dans la nouvelle ligne. Indé irce.
Et voilé pourquoi, Monsieur, votre fille est
muette. Voilé pourquoi Ie chemin direct de
Courtrai Denderleeuw, chemin qui place Ypres
deux heures et demie de Bruxelles et qui devait
être inaugurê d'abord le 1" décembre, puis ie
10, ne le sera probablement pas de si tót.
Nous avons déjè signalé les dangers que pré
sente a l'entrée de notre station une seule voie et
un seul excentric pour servir de raccordement
deux lignes ferrées. On a essayé de contester le
fondement de nos appréhensions.
Tout récemment cependant un événement qui
heureusement n'a occasionné aucun accident grèce
une circonstance fortuite, est venu corroborer
nos observations.
Le 25 novembre, ie train qui part d'Ypres
pour Roulers a 6 li. 30 m. du soir s'est engagé,
par suite d'une fausse manoeuvre, sur Ia route de
Courtrai et n'a pu être arrêté qu'a proximité de
la route pavée de Lille. Par une exception fort
rare, le train de marchandises qui arrive vers Ia
même heure de Courtrai ayant eu ce jour la une
avance de quelques minutes, était en gare, sinon
une rencontre était inévitable et l'on frémit a ses
conséquences.
En présence de ce fait nous devons plus que
jamais maintenir nos précédentes réfiexions et ré-
clamer des mesures efficaces pour la sécurité des
voyageurs. II est impossible que la Société d'ex
ploitation refuse de se rendre i'évidence.
On nous assure qu'a Poperinghe on s'occupe
déjè du choix du successeur de M. Van Merris au
Conseil provincial. II paralt que c'est M. le no-
taire Yandenboogaerde qui réunit aujourd'hui
toutes les sympathies du parti libéral.
Le Progrès revient dans ion n" du 10 sur le
décret de 1809. Nous lui rappelons que nous
l'avons prié de nous dire comment Particle 3 de
ce décret peut recevoir une interprétation diffé
rente selon qu'il s'agit d'un ami ou d'un adver-
saire de ses patrons. Nous avons de rechef trés
humblement recours ses lumières pour éclairer
notre ignorance.
On dit que le gouvernement est sur le point
d'acquérir Merxplas, grand et vaste domaine situé
au-delè de Turnhout, pour en faire un dépót de
mendicité destiné remplacer celui de la Cambre.
Correspondance particuliere de 1'OPINIOS.
Bruxelles, 11 Décembre.
A l'heure oü je vous écris, le grand débat politique
soulevé par les interpellations de M. Reynaert com
mence a peine, mais déja l'on peut prévoir qu'il oc-
cupera longtemps la Chambre et qu'il donnera lieu,
de part et d'aulre, a de violenles recriminations.
Une foule considérable assiste aux séances. Dès une
heure de l'après-midi, bien que les tribunes ne s'ou-
vrent qu'a deux, des ceDtaines de personnes se ser-
rent contre la porte d'entrée, et quand arrive le mo
ment de l'ouverture, c'est une telle poussée, une lelie
cohue sur les escaliers que beaucoup préfèrent se
ranger le long du mur et laisser passer le torrent.
Les tribunes sont, d'ailleurs, fort paisibles. II est
facile de voir qu'il n'y a Ié que de simples curieux,
désireux d'assister a une joute oratoire et nullement
des hommes de parti. Je serais fort élonné, pour ma
part, que l'on parvint a leur arracher le moindre ap-
plaudissement dans un sens ou dans un autre, a
moins que ce ne soit de purs applaudissements d'ar-
tistes.
C'est bien M. Reynaert, comme je vous l'avais an
noncé, qui a été chargé d'ouvrir le feu. M. Reynaert a
porté contre le ministère de la justice et principale-
ment contre Ie parquet de Courtrai des accusations
d'une extréme violence. C'est un réquisitoire en régie.
Je ne pense pas qu'on ait d'exemple d'une magistra-
ture ainsi foulée aux pieds dans un Parlement. M. le
ministre de la Justice a protesté avec une grande
énergiemais, au moment oü je vous écris, il n'a pas
encore abordé l'historique de la procédure suivie a
Saint-Génois. Ce sera l'objet de la seconde partie de
son discours, qui prendra probablement toule la
séance d'aujourd'hui.
On a remarqué que M. Reynaert a évité de se pro-
noncer sur les questions de presse soulevées par les
journalistes catholiques. C'est qu'en effet il devient
trés difficile de soutenir que les visites domiciliaires et
les arreslations preventives ordonnées par le parquet
de Courtrai sönt contraires au décret de 1831. II n'en
est pas moins certain, et le rapport de M. Bouvier l'a
reconnu lui-même, que la loi actuelle autorise envers
la presse des rigueurs inutiles, et, par exemple, qu'il
est absurde que l'imprimeur, l'éditeur et les distri
buteurs d'un écrit imprimé puissent être détenus
préventivement quand l'auteur est connu et pour-
suivi comme tel.
La Chambre voudra-t-elle s'occuper un jour de
modifier cette disposition de la loi dans un sens plus
conforme a la liberté? Oui, si toute la presse s'unit
pour réclamer cette réforinemais aussi longtemps
que celle-ci se bornera a des protestations isolèes, il
n'y a pas a attendre que la Chambre se mette en de
voir de faire droit a ses réclamations. Voila plus de
vingt ans que la presse demande la juridiction du
jury, sans laqueile il n'y a pas de veritable liberté.
La question a-t-elle fait un pas depuis lors? Non. On
en est toujours au même point et même il semble
qu'eile soit entièrement abandonnée.
La Chambre a renvoyé a l'examen des sections la
proposition de M. Delcour ayant pour objetd'exclure
du eens électoral pour la province et la commune le
droit de dèbit sur les boissons alcooliques et les ta-
bacs. Je u'ai pas besoin de vous dire que cette propo
sition n'a absolument aucune chance d'adoption. Je
suis même trés disposé a croire qu'eile lardera fort
longtemps avant d'être remise en discussion. On peut
redouter l'infiuence prépondérante des cabaretiers
dans le corps électoral mais enfin, puisqu'on les
oblige a payer l'impót, leur exclusion du scrutin de
vient assez difficile a justifier. Si l'on veul qu'ils ne
soient plus électeurs du chef du droit qu'ils paient, la
jusKice exige, semble-t-il, qu'ils soient affranchis du
paiement de ce droit. Mais, d'un cóté, les soumetlre a
l'impót et, de l'aulre, leur enlever les droits inhérents
aux contribuables me paraitrait d'une équité dou-
teuse.
tt