JOURNAL D'YPRES DE L'ARRONDISSEMENT
VPRES, Dimancbe
Septième anoée. N" 20.
16 Mai 1869.
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61a demission de S3. Elara.
Justement froissé de l'opposition systémaüque
qu'il rencontre au Sénat, M. Ie ministre de la
Justice a remis sa démission entreles mains du Roi.
Certes, on ne peut qu'applaudir S celte résolution
qui témoigne, chez M. Bara, d'un sentiment de
dignitê personnelle dont ses prédécesseurs n'ont
pas toujours donné l'exemple. Nous comprenons
très-bien aussi quel'opinion, reconnaissante envers
M. Bara des tentatives de réformes dont il s'est
fait le promoteur, l'engage retirer sa démission
et continuer la lutte. Ce que nous comprenons
moins, ou plutót, ce que nous ne comprenons pas
du tout, c'est que certains journaux, trés sympa-
thiques M. le ministre de la Justice, 1'engagent
a faire a 1'opposition du Sénat des concessionsaux-
quelles il ne saurait évidemment consentir sans
déchoir dans l'estime publique.
Nous n'avons pas a examiner, avec YEloile beige
et le Précurseur d'Anvers si certains tempéra-
ments apportés au principe de I'abolition pure et
simple de la contrainte par corps ne seraient pas
de nature h apaiser le conflit qui a surgi, sur cette
grave question, entre Ie Sénat et la Chambre des
représentants. II se peut que le Précurseur ait
raison quand il dit qu'un amendement limitaot
l'exercice de la contrainte par corps aux seuls faits
domroageables résultant de délits judiciairement
constatés rencontrerait probablemen t'assentiment
des deux Chambres. Nous ne nierons pas non
plus qu'il soit grandement désirable qu'un accord
S'étabüsse au plus tót entre les deux Chambres
législatives, les détenus actuels ne pouvant pas
souffrir plus longtemps, sans une criante injustica,
d'un dissentiment qui ne porte pas sur eux. Ce
que nous soutenons, c'est que ces concessions,
possibles peut-être dans le cours de la discussion,
ne peuvent plus ètre consenties par M. Bara, au-
jourd'hui qu'il a donné sa démission pour avoir
refuse d'y souscrire.
A quels justes reproches ne s'exposerait il pas
si, après avoir défendu avec tant de persévérance
et d'énergie le principe de I'abolition pure et
simple, après avoir combattu tous les amendements
de 1'opposition et disputé, pied a pied, le terrain
de la libertê la coalition réactionnaire, le mi
nistre qui a noblement quitté le pouvoir plutót
que d'abaisser son drapeau, a'-lait tout coup se
raviser et offrir lui mème les concessions aux-
quelles il s'était obstinément refuse? On ne man-
querait pas de dire que ces concessions, il les a
proposées pour garder son portefeuille, et vrai-
raent le Précurseur et YÉtoile beige auraient fort
faire pour prouver que ce n'est pas vraicar
touics les apparences se réuniraient contre lui.
Et que ceci soit bien entendu nous ne de-
mandons pas que M. Bara persévère dans sa réso
lution de quitter le ministère, Qu'il maintienne
ou qu'il retire sa démission, la résolution qu'il
pourra prendre lè-dessus ne nous préoccupe guère
ce que nous tenons pour certain, c'est que s'il la
retire, il ne peut, sans compromettre sa dignité
et encourir les plus graves suspicions, consentir
aux concessions que d'imprudents amis lui sug-
gèrent.
Mieux avisé, YÉcho du Parlement résumé toute
la situation dans cette alternative
i Ou bien detacher du projet de loi les disposi-
lions adoptées par les deux Chambres et décréter
d ainsi l'élargissement des prisonniers pour detces;
d Ou bien attendre que le pays ait envoyé au Sé-
nat une majorité disposée a adopter le projet de loi
voté par la Chambre des représentants.
On peut, sans se piquer du don de seconde vue,
prévoir que c'est au premier de ces deux partis
que M. le ministre de la Justice s'arrêtera. Car
nous ne pensons pas qu'au fond il tienne beau-
coup a abandonner le pouvoir. II est de ceux qui
pensent, et le nombre en est graad dans le camp
doctrinaire, que ce qui est bon prendre est bon
a garder. Et pourtant, si l'on veut regarder les
choses d'un peu prés, la proposition de YÊcho du
Parlement et l'idée du Précurseur ne reviennent-
elles pas exactement au mème Si les deux
Chambres se bornent ratifier les dispositions du
projet de loi qui concernent la contrainte par corps
en matière civile et commerciale, n'est-ce pas
comme si elies rejettaientexpressément les autres?
Et de fait, la contrainte par corps continuera
subsister pour le recouvrement des dommages-in
téréts en matière de presse. C'est ce que deman-
daient les amendements de M. Watteeu. C'est tout
ce que réclamait l'opposition au Sénat.
Et la dignité du ministre de la Justice sortirait
sauve d'un tel compromis? C'est ce que nous ne
pouvons pas admettre. Si M. Bara veut conserver,
aux yeux de l'opinion publique, l'estime h laquelle
il a sacrifiê son portefeuille, il faut qu'il main
tienne sa démission et qu'il laisse son successeur
Ie soin de vider le conflit ou bien qu'il la retire et,
comme le dit YÊcho du Parlement, qu'il attende
que le pays ait envoyé au Sénat une majorité
disposée adopter le projet de loi voté par Ia
Chambre des représentants. II est vrai qu'il
pourra attendre longtemps si le ministère dont il
fait partie continue patroner Ia candidature de
libéraux tels que M. Mazeman de Couthove.
Le Progrès reste muet sur les questions que
nous lui avons posées propos du vote de M. Ma
zeman au Sénat, vote qui maintient la contrainte
par corps et a eu pour effet d'amener la démission
de M. le ministre de la Justice. Ce silence n'a
rien qui doive étonner. Le cas est embarrassant
même pour la mauvaise foi du compère. Mentir,
quelque exercé que l'on y soit et nier le vote
serait malaisé, le justifier impossible. Se taire est
Ie seul parti prendre, mais ce parti pour être
sage ne dissimule nullement la défaite. Au sur
plus, si le Progrès nous refuse son opinion du
jour, nous trouvons dans sa collection celle de la
veille.
Un cas presque identique s'est présenté déjè.
Le Sénat en rejetant Ie budget de Ia Justice a
failli provoquer une crise ministérielle. Or, voici
dans quels termes le Progrès jugeait les sénateurs
qui, alors comme aujourd'hui M. Mazeman,
avaient voté contre le ministre de Ia Justice
C'était un incroyable coup de parti que, dans
un moment d'étourderie, venait de commettre le
Sénat.
L'unanimité touchante du vote rappelait celle
du corps des inquisiteurs qui, masqués, étran-
glaient pieusement leur victime. Ce vote était
surtout ped PATRioTiQUE et opportun, au mo
ment ou le cabinet était presque parvenu a calmer
les émotions du dehors provoquées par Ia loi sur
les concessions de chemins de fer.
L'opinion publique (saue les crétins) protes-
tait contre 1'inqualiOable procédé employé par des
votants seniles et que la jeunesse de l'enfance ou le
grand dge de ceux qui s'en rapprochenl, explique.
Assez, assez, Progrès, le public vous a compris
depuis longtemps et votre candidat pourrait vous
entendre. 11 n'est pas sénateur, pour si pis-aller
laissez dire, laissez-vous blAmer, mais publiez votre pensèe.
l'n cas embarrassant.