JOURNAL D'YPRES DE L'ARRONDISSEIENT
Le toüt payable d'avance.
YPRES, Rimanche
Huitième année. N° 33.
14 Aoüt 1870
Paraissant le dimanche.
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ou envois d'aryent doivent étre adressés franco au bureau du journal.
Iratte.
La session extraordinaire qui s'est ouverte
mardi dernier ne sera point line session politique.
En présence de Ia gravité des événements qui se
dèroulent, un accord tacite semble s'ètre êtabli
entre les diverses opinions reprèsentées dans Ia
Cbambre pour suspendre provisoirement toute
discussion de nature soulever les passions de
parti. Nous ne nous en plaignons point. Nous
croyons, en effet, que le moment seraitmal choisi
et que des intéréts plus urgents, sinon plus gra
ves, réclament en ce moment notre attention.
Mais autant nous applaudissons l'idée d'une
trève momentanêe, commandée par les circon-
stances, autant nous sommes décidés, dans la
mesure de nos forces, ne pas souffrir que des
connivences intêressées la fassent se prolonger au-
dela du temps rigoureusement nécessaire.
Les événements extérieurs ontété l'éternel pré-
texte avec lequel les divers gouvernements qui se
sontsuccédés en Belgique depuis 25 ans out écarté
les réformes réclamées par l'opinion publique. La
presse progressiste ne doit plus tolérer que cette
comédie recommence. Ellen'a déjè que trop long-
temps duré. Dés que la paix sera signée et la
tournure que prennent les affaires de guerre
semble indiquer qu'elle ne se fera plus longtemps
attendre nous sommes fermement résolus, pour
notre part, a reprendre la lutte et ne pas l'aban-
donner que nous n'ayons enfin obtenu les satisfac
tions pour lesquelles nous luttous et toujours
vainement, depuis tant d'années.
Le parti clérical a Ie pouvoir dans les mains
quelles satisfactions pouvez-vous attendre de lui,
nous dira-t-on peut-ètre.
Notre réponse sera bien simple nous n'atten-
dons rien du parti clérical, absolumentrien.Nous
savons, corame tout le monde, que ses promesses
ne sont qu'hypocrisie pure et que s'il ose tenter
quelque chose, ce sera au détriment de la liberté,
pour laquelle il feint d'éprouver un si ardent
amour. Mais le parti clérical n'est pas fait pour
nous inquiéter sêrieusement. Quoi qu'en disent les
doctrinaires, il n'est pas appelé vivre longue-
rnent au pouvoir. Quoi qu'il fasse ou ne fasse pas,
il dépendra de nous, aux élections prochaines,
de le rejeter dans la minorité.
Et c'est précisément parceque nous avons cette
persuasion que nous pousserons a la lutte de tout,
noire pouvoir....
La lutte seule peut sauver Ie libéralisme pro
gressiste. Car si Ton croit que le doctrinarisme a
renoncé pour toujours k reprendre Ie gouverne
ment, on se trompe. En politique, les morts re-
viennent trés-bien. Ne sont-ce pas des revenants,
que les cléricaux tout puissants d'aujourd'hui
II y a dix ans, ils étaient bien autrement maltrai
tés qu'è présent les doctrinaires. Quiconque eut
prédit alors qu'ils reviendraient un jour au pou
voir aurait passé pour fou. Eux-mêmes dans leurs
moments desincérité, avouaient que, comme ma-
jorité parlementaire, ils étaient devenus tout
jamais impossibles.
lis y sont, cependant, au pouvoir et ils comp-
tent bien, maintenant qu'ils le tiennent, le garder
Ie plus longtemps possible.
Eh bien, ce qui est arrivé pour les cléricaux, nous
ne voulons pas qu'il arrive pour le doctrinaires.
Les doctrinaires sont morts et nous voulons qu'ils
resteut morts, dussiens-nous, pour avoir une cer
titude entière de leur dècès, subir un an de plus
le gouvernement des cléricaux.
Pour cela.qu'avons nous faire? Lutter, c'est-
è-dire affirmer, en toute occasion, nos principes,
éclairer sur nos aspirations, sur nos désirs cette
partie de l'opinion publique qui nous inspirons
encore une certaine défiance et qu'il nous faut
arracher au doctrinarisme. Les doctrinaires, en
nous représentant sans cesse comme des artisans
de désordre, comme des fauteurs d'anarchie, ont
réussi jusqn'è présent éloigner de nous beaucoup
d'honnêtes libéraux qu'il nous importe de rallier
k notre drapeau. C'est 5 cette tèche que Ie libéra
lisme progressiste doit se vouer tout entieraujour-
d'hui, afin que le jour oü les cléricaux tomberont
du pouvoir, celui-ci ne puisse plus échoir aux
mains du doctriuarisme. Telle est sa mission ac-
tuelle. et quant nous, nous n'y faillirons pas.
A la suite de la journée du 2 aoüt a surgi entre le
Progrès et le Journal d'Ypres une polémique fort
curieuse dont noussomraes le sujetinvolontaire, quoi-
qu'elle n'offre aueun intèrêt pour nous.
Le premier de ces journaux se demande s'i! est vrai
que les progressisles, en refusant de porter plus long
temps lejoug ont déterminé la chute de notre coterie
doctrinaire? A cette question le Journal dl Ypres,
ivre encore d'un succès inespéré, répond:
Tout le monde sait que chez nous MM. les radi-
caux sont d'une radicale impuissance. II y a deux ans
Ie Progrès leurdémontraitbel et bien qu'ils ne dispo-
saient pas de plus de douze voix.
Nous jugeons inutile de répondre a cette fiére dé-
claration fiigne d'un preuxdu moyen-ége, sinon nous
ferions remarquerau Journal d'Ypres qu'il était plus
modeste avant le 2 aoüt et lui rappellerions que, lors-
que nous avons comraencé ia résistance aux prélen-
tions intolérables de votre coterie, lui, Journal d'Ypres,
n'était pas encore né; mais, nous le répétons, la polé
mique souievée entre les deux journaux ne nous
touche pas. Nous savons d'ailleurs, la victoire énivre
tout autant que les répailles électorales.
Un dernier mot sufïira done.
Dans l'élection du 2 aoüt les progressistes se sont
inspirés uniquement, comme ils continueront de le
faire a l'avenir de l'intérêt exclusif de leur parli. Et
jamais les cléricaux qu'ils l'entendent bien pas
plus que les doctrinaires, ne pourront compter sur
leur concours pour édifier quoi que ce soit de durable.
Pour rlre.
Bonum vinum loetificat cor...
sacerdotis.
Avont'ils ri. Avont'ils bu
Le jour des élections était un bien beau jour!
Quelle magnifique victoire pour les catholiques! Le
ciel se réjouissait les fidèles se réjouissaient et
les prêtres doneG'étaient des hommes cette fois.
Oui, de véritables hommes avec toutes leursfaiblesses
Nous en avons vu, dans les cabarets oü le matin, ils
gardaient étroitement leur troupeau vue, si étroi-
tement que pour satisfaire certain besoin de Ia na
ture, un moulon devaitdemander Ia permission de...
se rendre a la cour nous les avons vus Ie soir la
porte de ce même cabaret la soutaue déboutonnée,
les mains dans les poches de la culotte et la jambe
fièrement campée en avant, avaler le verre de bière
d'un air provocateur. Le tricorne marquait tempête
alors. L'un d'eux s'est perdu la nuit, un autre a perdu
la raison fou de bonheur, mais fou pour de bon!
Un vénérable grisé par le suceès commandait quatre
bouteille de vin de Champagne, comme coup de
l'étrier, avant de monter en voiture 11 est rentré
dans son village fait comme étaient faits les Polonais
quand Auguste avait bu, et la nuit on Ie reconduisait
titubant a travers les rues et criant a tue-tête. 11 avait
communié sous l'espèce liquide, pendant toute la
soirée, dans le cabaret de son fidéle adepte. Le jour
desélections était un bien beau jour!I!
II eu est, parmi ces oints du Seigneur, qui ont le
vin très-mauvais et ce ne sont pas les moins dröles.
Un de ces vieux farceurs annoncait en chaire sa
victoire dans des termes tellementénergiques que les
libéraux vaincus n'étaient ni plus ni moins que des
voleurs el des canailles. Sa perruque frissonnait sur
sa tête et ses yeux semblaient des mitrailleuses.
Pauvre vieillard! Pourquoi tant de colère?
Qu'un homme consciencieux me réponde. N'est-ce
pas trés dröle tout cela et bien fait pour vous dé-
sopilerla rate, si malheureusement derrière le comique
n'apparaissait l'ignoble? Comment! voilé des ètres
qui doivent représenter, dans notre société, la morale,
l'honneur et la vertuqui se disent pétris d'une autre
pète que le commun des mortels, et marqués du doigt
de Dieu pour enseigner et guider l'humanité? Fi, les
vilaines figures! La brutalité suinte sur la grossièreté
de leurs traits.
Nous ne pourrons jamais nous faire a l'idée que
Dieu qui est toute perfection qui créé le beau et
ordonne le bien ait pu choisir le laid pour faire
apprécier son oeuvre. A moins que ce ne soit
comme rep oussoir
c