ma foi, puisque je suis instruil, et qu'ètaot ioslruit je puis arriver a tout, je vais m'arranger pour choisir des hommes un peu pluszéleset ayant un peu plus de conscience, quand viendront les éleclions cotnmu- naies prochaines. Ah 1 bien oui, va-t'en voir s'ils viennent, Jean, et coiame Jean est mon nom, le proverbe s'adresse parfaitement moi. Je sais lire, c'est vrai, je sais écrire, c'est encore vrai, je sais même un pen compter, mais je ne paie pas l"impót ou la taxe qu'exige la loi, pour, disons le mol, pourêlre électeur. C'est vexant, cela, trés vexant. J'ai rnême le droit de dire que c'est décourageant et peut-êlre un peu malhonnêle. Car, enfin, on m'a dit que j'arriverais a tout et je ne puis même pas être l'égal d'un tas de baudets qui, en fait de lecture, savent justement tirer les grosses potmnes hors des petiles, et rien de plus. Ces bourriques comme on dit a la campagne participetil aux affaires du pays, et c'est sans doute pour cela qn'elles tparchent si bien, et moi je n ai qu'a me croiser les bras et a constater mon impuis- sance et ma compléte inutililé. Comment veut on, après cela, qtie j'encourage mes voisinsa s'instruire? Mais, Monsieur, ils me répondronl qu'on leur promet plus de beur re que de pain et que les hommes auxquels j'ai accordé ma confiance les tromperont comme ils m'ont trompé. Je sais bieu que je pourrais leur répondre, et me dire a moi-même comme fiche de consolation Mais, l'inslruction n'a pas été inventée pour devenir électeur seulement, elle rond d'autres ser vices et donne d'autres joies. C'est vrai, mais qu'on ne nous fasse pas entrevoir la plus belle de ces joies, celle d'être utile avson pays. Voila ce qui grandit le citoyen et le rend plus homme paree qu'il comprend mieux ce qu'il vaut et qu'il acquiert le droit, bien agréable et bien légi- time, je vous l'assure, de dire aux ignorants Vous n'êtes bons a rien, qu'a être menésau scrutin comme on mène le bétail a la pêture et a l'abreuvoir. Les gens de la Chambre savent cela, pourquoi done nous refusent-ils cette satisfaction, cette récom- pense a l'aquelle nous avons droit, puisqu'on nous l'a promise, qu'on nous l'a monlrce comme le prix de nos veilles. Oui, de nos veilles, car nous autres, pauvres paysans, nous sommes comme les ouvriersdeja éreintés par le travail du jour, nous nous meltons a l'étude pour ne pas oublier ce qu'on nous a appris, déja si péniblement, et cela, hélas, il me le faut bien dire, soutenus par une espérance que détruisent ceux-la mêmes qui nous l'avaient donnée. Je ne comprends lieu tout cela. Ceux qu'on appeile la jeune gauche, parlent pour nous, pour la justice, mais la vieille gauche, voyez-vous, me parait avoir autant peur des gens instruits que les catholi— ques. Tous les libèraux auraient été peur eux s'ils avaient donné la main auxjeunes, et je me demande si ce sera encore ainsi quand lout le monde saura que s'ils aimenl l'instruction, ceux qui 1'ont recue leur font peur et qu'ils accordent leur preference aux paresseux a qui il suffit d'être riche pour avoir le pas sur ceux qui out eu le courage, si mal récompense, de chercher a s'élever pour devenir des hommes, Excusez moi, si j'ai dit ce que j'avais sur le coeur, mais ca me pesait de me taire quand je vois se sou- cier si peu de nous, des gens en qui on espérait et qui nous ont abando'nnés comme ca, juste au moment oü on comptait le plus sur eux. C'est fait, c'estjtriste et peut-être nurais-je mieux employé mon temps a en rirë, dans l'espoir de temps meilleurs mais, ma foi, je n'y tenais plus, et j'ai compté sur votre complaisance pour me soulager un peu. Pardonuez-moi et recevez mes compliments. Nous lisons dans le Précurseur d'Anvers a Tous les bouohers d'Anvers out augmeuté de 4 0 centimes par kilo le prix de la viande. Cliaque foisque le bétail renchérit momentanemenl, les bou- chers aogmentent le prix de la viande mais nous n'en- tehdons jamais parler d'une diminution lorsque le bétail est abondant et a bas prix. II en est peu pres de mèine des boulangers. Cei tes la liberté commerciale est une chose excel lente, mais elle peut, comme toute liberté, conduire a des abus. Le correclif de ces abus se trouve dans la liberté même. Si les consommateurs sont exploités qu'ils s'entendent entre eux et qu'ils organisent la concurrence qui constitue le veritable régulateur des marches quand elle est loyale. Pourquoi cerlaines denrées de première nécessité se vendent-elles a des prix excessifs? Paree que les vendeurs se coalisenl contre les consommateurs. Que les consommateurs opposent coalition a coalition qu'ils créent des bou- cheries et des bouLingeries économiques, les prix redescendront bientót a leur taux normal. II suffit de vouloir et c'est l'apathie des consommateurs qui est la cause véritable de ['exploitation dont ils se plaignent. A Ypres plus qu'ailleurs peut-être on doit s'apercevoir combien les observations de notre confrère anversois sont fondées. Et il faut bien le confesser, c'est ti peine si on y a le droit de se plairidre. II fut un temps ce temps n'est pas loin de nous oil un homme de cceur et de dévouement créa dans notre ville une boucberie économique. Ce n'était pas i'esprit de lucre qui l'inspirait, mais un sincère désir de venir en aide a ses conci- toyens. Cependant l'indifférence, le dédain, Ie sarcasme même accueillirent la création nou velle. Elle disparut et aujourd'huion sait ce qui arrive. lAbabit ne fait pas le moine. Le procés ignoble qui va amener devant les assises du firabant les fréres de la Doctrine chrelienne, de l'école de Saint-Josse-ten-Noode, soulève déja une curiosité dans le public. On demande quel privilége vaut aux prêtres qui eomparaissent devant la justice le droit de quitter l'habit religieux pour prendre l'habit civil. S'il y a une honte a subir, et Dieu sait si, dans cette affaire, il y aura une honte infamepour quoi l'ir.ff ge-t-on au costume civil C'est la robe qui est en jeu. C'est sous la robe que le crime a été commis. C'est la robe qui doit comparaitre en justice. Mais cela pourrait faire de la peine aux bons fréres... Heureusement, le public ne se laisse pas tromper a ce travestissement, et il se souvient, a l'occasion, que ce n'est pas l'habit qui fait le moine... ni Ie laïque. Les bons Hvres. On nous assure que ie noble baron de Lettenhove vient d'adopter pour les écoles prirnaires de demoi selles un livre publie par la librairie Casterman sous le titre allechant de Laliment journalier DES AMES DEVOTES A LA PASSION DU SAUVEUR Extrait des ouvrogès des Saints Pères PAR UN PRÊTRE PASSIONNISTE. C'est un ouvrage essentiellement pratique, dans l'intérieur duquel or, trouve même des recettes de menage, par exemple celie-ci, pour faire bouiilir l'eau sans allumer de feu S. Catherine de Genève. 11 est incroyable jusqu'n quel point cette Sainte d aima son Dieu sa vie tout enlière fut un exercico i) continuel d'amour. lequel se communiquail même a son corps el l'embrasait tellement qu'en mettant v la main dans l'eau froide, elle la faisait bouiilir, comme si c'eüt été un tison ardent. Une gaillarde, comme vous voyez, cette sainte Catherine. Appliquée au chauffoge des locomotives, cette re cette ferait réaliser a l'Etat de notables economies. Avis au déiicieux M. Wasseige. On lit sur la même page rludit volume Pratique L'amour de Dieu est ia vie de l'ame faites done i) souvent des aetes d'amour, el que l'amour soit le mobile de toutes vos actions. lis vont bien, les prêtres passionnisles 1 Chronique Correspondance particuliere de l'OPISIOS. Bruxelles, 12 Mai 1871. Deux événements récents dominent en ce moment Ia situation C'est d'abord la conclusion de la paix entre la France et l'Allemagne, dont la signature vient d'avoir lieu a Francfort, et ensuite l'occupation du fort d'Issy par les troupes versailiaises. A l'heure oü j'écris. on ne connalt encore rien des conditions definitives de la paix; on ignore notamment, et c'est ia cependant le point capital, si les Allemands con- senlironl a livrer ies forts qu'ils occupenl au Nord de Paris avant le paement des cinq cent millions stipu les dans les conditions préliminaires de paix qui ont mis fin aux hostilités. La prise du fort d'issy rend la position de la Com mune pour ainsi dire intenable, d'autant plus que i'entente est loin de régner parrui les défenseurs de Paris. o- Et qu'on ne croie pas que si la zizanie règne a Pa ris, la plus parfaite union règne a Versailles tant s'en faut. La aussi on se chamaille a propos des plus misérables vétilles.Parceque le ministre de ia guerre, se conformant a un usage génèralement recu dans les assemblees dèlibérantes, a cru pouvoir donner a uu député de Paris la qualification d'honorable, toute l'assemblée s'esl, insurgée et livrée a des in- tempérances de langage dont rougiraient nos mee- tinguistes les moins familiers avec les régies de la bonne compagnie. Je l'ai déja dit et je le répète Si ia France ne se compose que descommunnux de Paris et des ruraux de Versailles, c'est a désespérer a tout jamais de la France. Nos aimables voisins sont arrivés au pa- roxysine de ['aberration. Mais laissons la ce triste sujet et permettez-moi de vous parler quelque pou de nos petites affaires inté- rieures. Les discussions de la Chambre des représentants sont trés peu suivies depuis le vote de Partiele 1" de la loi de réforme électorale. C'est a peine si, le jour oü l'on prévoit une lutie un peu chaude, les tribunes se garnissent de quelques curieux désosuvrés. De la loi elle même, on s'en occupe peu ou prou. Les divi sions qu'elie a fait éclater au sein du parli libérai ont découragé tout le monde. M. Rogier aura beau dire qu'en principe toute la gauche adhere au syslème de la eapacité prïs comme base du droit electoral. Le resultat des votes est la pour prouver que, sur aucun des amendements partis de ses bases, la gauche n'est parvenue a s'entendre. C'est vraiinent desespè- rant. La question de la reorganisation de la garde-civi- que embarrasse cousidérab'ement le ministère et les chefs de la droite. La commission chargée do eet examen a conclu, comme vous savez deja, a l'arme- ment gènéral de la nation. Or, l'armement général de la nation est une idèe qui n'a guère de chance de devenir populaire dans Ie pays, et Ie ministère qui le proposera peut compter qu'il aura fourni a ses adversaires un texte redoutable deposition. On s'occupeau departement de l'intérieur, de doler la garde-civique actuelle d'un nouvel uniforme. Un nouvel uniforme, c'est trés bien, car ['uniforme dont nous sommes harnachés depuis 1848 est bien tout ce qu'il y a de plus incommode au monde. On l'aurait imaginé tout expres pour nous rendre ridicules qu'on n'aurait pas pu mieux rèussir. Mais ne trouvez- vous pas absurde qu'on songe nous pourvoir d'un nouvel uniforme juste au moment oü il est question de notre reorganisationLe plus simple bon sens ne dit-il pas qu'avant d'imposer cetie dépense aux citoyens, il faut d'abord que le service de la garde- civique soit nettement defini Supposez ce qui est assez vraisemblable que ''organisation nou velle divise Ia milice citoye^ino en différents corps, a l'instar de l'armèe. 11 est clair que ces différents corps devrout avoir chacun son uniforme approprié a la nature parliculière de leur service. II faudra done que, quand cette nouvelle organisation sera décrétée, nous nous pourvoyions d'un troisième uni forme? En vérilé, cela n'a pas le sens commun.

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L’Opinion (1863-1873) | 1871 | | pagina 2