JOURNAL D'YPRES DE L'ARRONDISSEMENI
YPRËS, ili manche
iYeimème année. 12.
19 Mars 1871.
PK IX D'ABOXXEMEilT
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Ine explication nécessaire.
Les vieux doctrinaires nous la bóille belle, en
vérité! On se rappelle si, pendant les tieize an-
nées consécutives qu'ils ont occupé le pouvoir, ils
se sont montrés hostiles a toute révision de la loi
de 1842. Quiconque avait l'audace d'exprimer,
ne fut-ce qu'un simple voeu en faveur de cette ré-
forme, était mis anssitót au ban du libéralisme et
xiüpendé de la belle fatjon par les organes attitrés
de la doctrine. Un jour, il y a peine deux ans
de cela, un jeune représentant de Mons, M. de
Thuin, se mit en tète de recueillir des signatures
au bas d'uue proposition de révision de cette loi
chérie tous ses collègues de la gauche, sauf
quatre ou cinq, lui lournèrent le dos et il dut
renoricer a son dessein.
Mais voilé qu'un beau jour, un reviremenl de
fortune ramène le parti clérical aux affaires. Aus-
sitót nos vieux doctrinaires changent d'attitude
else roettent a battre en brêche.avec nne énergie
et un ensemble saus pareils, cette mème loi de
1842 qu'ils avaient si vaillamment défendue na-
guèreconlre les attaques des progressistes.
La séance de la Chambre des représentants
d'avant-hier nous offre, sous ce rapport, un cu-
rieux enseiguement.
On sait qu'aux termes de la loi d 1850, le
clergé n'intervierit pas, a titre d'autorité, dans les
écoles moyennes. A la difference de la loi de
1842, celle de 1850 s'est bornée a inviter le
clergé donner l'enseignement religieux dans ces
écoles; et comme, dans beaucoup de communes,
le clergé n'a pas pu s'entendre avec l'autorité ci
vile sur les conditions de sou concours, il est ar
rivé que, par le fait, ces écoles se sont trouvées
absolument affranchies de ['influence cléricale.
On sait encore que cette mème loi de 1850
autorise la création de cours préparatoires aux
écoles moyennes. Or, ces cours appartenant, en
réalité, h l'enseignement primaire, il s'ensuit
qu'en ce qui concerne l'intervention du clergé
dans eet enseignement, la loi de 1850 établit une
sorte de dérogation a celle de 1842. El le auto
rise, en eff t, sous prétexte de cours préparatoires
aux écoles moyennes, la création de véritables
écoles primaires échappa'nt l'autorité directe du
clergé.
Dans la séance de vendredi dernier, un repré
sentant de Liége, M. Muller, doctrinaire enragé
s'il en fut jamais, a développé a la Chambre une
proposition ayant pour objet de majorer de 10
milles francs le crédit porté au budget pour sub
sides aux écoles moyennes. Le but de cette propo
sition était évident, et M- Muller n'a pas cherché
a le dissimuler ce but était de renforcer Taction
de la loi de 1850 et de diminuer d'autant celle
de la loi de 1842.
Le parti clérical, qui tient beaucoup plus la
loi de 1842 qu'5 celle de 1850, a naturellement
repoussé la proposition de M. Muller et, ce fai-
sant, il est resté parfaitement conséquent avec
lui-mème. Mais que dire de ces doctrinaires qui,
après avoir défendu mordicus la loi de 1842 aussi
longtemps qu'ils ont été le gouvernement, cher-
chènt a la ruiner subrepticement, dés que Ia
fortune adverse les a rejetés dans Topposition?
Notre représentant, M. Vandenpeereboom, a
voté pour la proposition de M. Muller. En vérité,
ceci est admirable, li y a trois ou quatre ans,
M. Vandenpeereboom, alors ministre de Tinté-
rieur, professait un tel amour pour la loi de
1842, qu'il allait jusqu'a prétendre l'appliquer
aux écoles d'adultes, pour lesquelles elle n'avait
pas été faite; et tel était son désir de mainfenir
ces écoles sous la lutelle du clergé, que, plutót
que de retirer sa circulaire, il donna sa démis-
sion.
Or, nous voyons aujourd'hui ce mème M. Van
denpeereboom voter en faveur d'une proposition
dont le but tendait visiblement soustraire, non
pas des écoles d'adultes, mais de véritables écoles
primaires, Taction du clergé.
Que faut-il penser de ce reviremenl? Est-ce
une conversion? M. Vandenpeereboom, après
avoir baltu les buissons pendant trente ans, a t-il
enfin compris que la ligne droite est encore ia
meilleure? C'est un point sur lequel il est impor
tant que l'arrondissement soit éclairé, et nous
osons compter Jque le Progrès s'empressera de
nous satisfaire.
Si le Progrès se tait, nous serons amenés h
conclure de son silence que le vote de M. Van
denpeereboom n'est qu'une inconséquence de plus
a ajouter au chapitre, déja si long, de ses varia
tions parlementaires et que notre représentant est
adversaire ou partisan de la loi de 1842, seion
qu'elle est une arme dans les mains de ses enne-
mis on de ses amis politiques.
Si le doctrinarisme ne nous avait, de longue
date, plongé dans Témerveillement par sa poli
tique a facettes et ses programmes a double fond,
nous aurions pu nous étonner encore de Tattitude
qu'il a prise pendant les débats consacrés a l'exa-
men du budget de Tintérieur.
Aujourd'hui que MM. Frère, Bara et Pirmez
n'ont plus d'hypocrites restrictions apporter
I exécution du programme de 1846, qu'ils ne
sont plus forcés de tendre piteusement la main,
comme ministres, aux doctrinaires de la droite, il
est curieux de voir avec quel aplomb et avec quel
entrain les chefs de comparses, cóté gauche,
cherchent tomber les Kervyn, les Cornesse, les
Jacobs, etc.
Ah comme ils font gatment Ie coup de poing,
ces poltrons de Ia veille!
A les voir fièrement campés a Ia tribune,
montrant d'un doigt accusateur leurs prétendus
adversaires cléricaux, on jurerait que ces farceurs
politiques n'ont pas la moindre peccadille sur la
conscience; que, sans peur et saus reproche, ils
ont le droit de signaler toutes les défaillances, de
dénoncer a la vindicte publique tous les trafi-
quants de réformes, tous les renégats du pro
grès
lis nous la bèillent bonne, en vérité! Est-ce
qu'ils se figurent, ces preux chevaliers qui font
aujourd'hui mine de s'élancer, armés de toutes
pièces, a la rencontre des champions du vieux
régime, que le pays prend encore au sérieux leurs
démonstrations belliqueuses
Allons done! Elle a trop duré la comédie clé-
rico-libérale! Tout patient qu'il soit, le public
beige en a assez, et c'est pour varier un peu Ie
spectacle qu'il a déplacé la majorité. Cela, parait-
il, ne lui a pas trop réussi. Soit il la changera
encore. Mais retenez bien ceci, grands pourfen-
deurs de cléricaux aussi bavards aujourd'hui que
vous étiez muets sous le règne de vos amis, ce
n'est pas a des hóbleurs de votre acabit que Ie
pays confiera le som de ses destinées, ou bien, s'il
commet encore cette bêvue, c'est qu'alors vous
aurez mis un masque moins transparent que celui
que vous portez actuellement
Un journal de Liége rapporteque les membres du
haut clergé vont faire de vives instances auprès du
gouvernement, afin de le decider a présenter une loi
qui protégé la religion contre les attaques de la
presse. II va sans dire que cette loi servirait de
bouclier aux évêques et élablirail leur inviolabilité.
Toute monslrueuse que serail cette prétention,
toute attentaloire qu'elle serait a nos libertés, elle
nous parait en harmonie avec les idéés qui ont cours
dans le monde épiscopal.
De quelle extravagance ne sont pas capables ceux
qui, forts de Tiufiuence incontestée qu'ils possè lent
sur les populations ignorantes, malheureusement en
inajorité, peuvent so croire lesmailres de la Belgique,
i.