L D'YPRES DE L'ARRONDISSEMENT
Le toüt payable d'avarck.
Y Pil ES. Di manche
28 Mai 1871.
POUR LA BELGIQUE
8 francs par an; 4 fr. 50 par semestre.
Pour I'Eiranger, le nocJ^CftS^us.
Ur Numéro 25j
1*11 IX HES AilHOHCES
ET DES RECLAMES
10 Centimes la petite ligne.
Corps du Journal, 30 centimes»
Paraissant le dimanche.
Laissez dire, laissez-vous blSmer, mais publiez votre penae*
On s'abonne a Ypres,
au bureau du Journal, rue de Oixmude, 59.
On traite a forfait pour les annonces souvent reproduces. Toutes lettres
ou envois d'aryent doivent étre adressés franco au bureau du journal.
YS'EES, sa Mal **33.
Vous n'êtes pas sans avoir entendu parler du
tonneau des Danaïdes. C'était, au dire de !a
mythologie grecque, un certain tonneau sans
fond que les cinquaute filles du roi Danaüs furent
condamnées a remplir éternellement dans le Tar-
tare, pour avoir coupé le cou a leurs cinquante
maris, la nuit de leurs noces.
Si la mythologie grecque a dit vrai, a l'heure
présente, les cinquante malheureuses sont encore
occupées a remplir ce fameux tonneau, ce dont
il faut les plnindre malgré leur crime, car, après
tout, a tout péché miséricorde, et leur chètiment
dure depuis assez longtemps pour que maitre
Jupin, s'il n'a pas le coeur fait de marbre et de
glacé, songe leur pardonner. y
L'antiquité grecque n'est pas seule posséder,
un tonneau des Danaïdes. Depuis une quinzaine
d'années, le catholicisme ultramontain nous en
fait connaitre un autre auprès duquel celui du
bonhomme Jupiter n'est que de la saint Jean.
Comme son atné, le tonneau caihofique, autre-
ment dit le budget de notre saint Pere le Pape,
communique tout droit avec un gouffre inson-
duble, avec cette difference que ce n'est pas avec
de l'eau, mais avec de l'or, que les croyants sont
invités ne disons pas condarnnés a le com-
bler.
Invités, non condarnnés. I! est vrai que les ré-
calcitrants, en attendant les peines éternelles qui
ne peuvent manquer de les atteindre, sont vus
dans Ie troupeau comme des brebis galeuses et
traités avec le mépris qne mérite leur indiffe
rence mais, a p.irt ce léger inconvéiiient, ils
sont parfaitemerit librgs et personne ne songe a
contraindre les mouvements de leur charité ab
sente.
Un vrai tonneau des Danaïdes. Les croyants
ont donné des millions et des millions, tantót
pour une chose, tantót pour une autre, toujours
croyant que le pape allait leur dire un beau ma-
tin Assez, mes enfants; vous m'avez tellemerit
gorgé d'or et d'argent que loutes mes caisses pu-
bliques et privées en sont pleines jusqu'au ca-
denas.
Ah! bien oui Plus ils donnent, et plus Ie
pape et son entourage sacré crie misère. Ils avaient
expédié a Rome des millions a bouche que veux-
tu pour les zouaves ponlificaux. Puis, ga a été le
tour des étrennes pontificates, qui sont de rudes
dragèes, soit dit en passant. Puis encore le
denier de saint Pierre un joli denier, ma
foi
Pour le coup, s'étaient dit les bonnes ómes, le
saint Père doit nager dans des trésors d'abon-
dance. Nous sommes a moitiè ruinés, mais le
vénérable chef de la catholicité ne doit plussavoir
que faire de son argent. C'est tout ce qu'il peut
chrétiennement nous demander.
Eh bien non, le pape n'est pasriche, le pape
ne nage pas dans des trésors d'abondauce. Le
père commun des fidèles est, au contraire, plus
pauvre, plus misérable que jamais, et si les
bonnes ómes ne viennenl pas bientót a son se-
co'urs, il est a craindre qu'il ne soit réd uit a
metlre sa montre d'argent au clou pour ne pas
mourir de faim. Le pauvre homtae!
Vous direz que c'est incompréhensible, qu'il
c-st inexplicable que la papauté ne sache pas se
suffire a elle-mèrne, ayant absnrbê depuis quel-
ques années des sommes colossales venues des
quatre coins du monde...
C'est vrai, la chose est absolument inexpli
cable, mais précisément paree qu'elle est inexpli
cable, vous devez, en bon chrélien, vous incliner
avec respect et ue point thercher a pénétrer mali-
cieusement un mystère que la sagesse du vicaire
de Jesus-Christ a ju gé utile de dérober a une cu-
riosité malsaine. II suffit que vous sachiez que
c'est un mystère. On ne vous en dit pas davan-
tage.
Doric, il faut de I'argerit au saint Père. De
I'argent, encore de l'argent, et toujours de I'ar-
gent, telle est la devise du Vatican, devise excel
lente quand el le ne veut pas dire toujours de
I'argent... a donner, et qu'elle s'applique seule-
ment a I'argent que I'on rc^oit.
Le difficile était de justifier ce nouvel appel de
fonds. Mais de tels obstacles ne sont pas faits
pour embarrasser les homines forts qui siêgent
dans !es conseiis du soinerain Ponlife. Au bout
de cinq minutes de réflexion, monsignor Anto-
nelli un financier qui rendrait des points a
MM. Nothomb et Langrand - Dumonceau
avait arrèté son plan et ce plan était tout sim-
plement un trait de génie.
Yoyons, s'était dit I'homme fort. Mon glo-
rieux maitre va bientót cêlébrer Ie 25m' anni-
versaire de son pontificat. C'est bien Ie moins
que les fidèles saisissent cette occasion pour lui
faire un petit cadeau. Si j'engageais toutes les
femmes catholiques de la chrétienté se dé-
pouiller de leurs bijoux pour lui offrir une
tiarel Pour peu que l'idée ait de succès, je
ramasserai pour une dizaine de millions d'or,
d'argent, de pierreries et de perles; et j'achè-
terai au saint Père, qui n'est pas exigeant,
une tiare d'nne vingtaine de mille francs, avec
laquelle il sera superbe.
Aussitót dit,aussitót fait, car, entr'autres excel-
lentes qualités, monseigneur possède cel le de ne
pas remettre les bonnes choses au lendemain, et
des Ie mois suivant, sous l'inspiration du clergé
fidéle, toutes les dames chrétiennes de Ia calholi-
cité se réunissaient en petits groupes pour solliciter
jusque dans les moindres villages la gênérosité de
la plus belle moilié du genre humain.
Les dames catholiques de notre bonne ville
d Ypres ne pouvaient pas rester étrangères a ce
pieux mouvement. La plupart de nos lecteurs ont
pu lire le touchant appel qu'elles viennent
d adresser leurs cltères sceurs en Jésus-Christ.
Nous croyons done iuutile de le reproduire in
extenso dans nos colonnes. Nous n'en citerons que
quelques passages, pour ia récréation des ama
teurs.
o üne inspiration a surgi, lumineuse et rapide
comme l'amour t c'est d'imiter la sainte prodigalité
de Madeleine c'est de sacrifier comme elle, sans
écouter les murmures d'une fausse prévoyance,
quelques-unes des superduités de notre vie, pour
parfumer d'amour, de respect et de tidélité le Chef
du corps mystique de Jésus-Christc'est, en un
mot, de déposer aux pieds du Vicaire du Christ une
partie, du moins. de nos parures, pour lui en tresser
une couronne, une tiare, emblèmedela triple royautó
de son suprème Pontificat. Quelle éloquente affirma
tion en présence des négations et des attentats de
l'impiété contemporaine Quelle vivante profession
de foi devant les indifferences de la politique 1 o
Et plus loin
Que celles d'entre nous qui possèdent de beaux
bijoux songent done a l'honneur qu'elles ont de pou-
voir en faire un si noble usage. Nous sommes süres
qu'on verra les femmes et les jeunes filles du peuple
faire joyeusement et pour l'amour de Jesus-Christ,
l'offrande d'une croix, d'une bague, d'un petit mé
daillon dont elles se parent. Pour toutes, le sacrifice
de la va ui té sera doublement agréable a Notre-Sei-
gneuret a son Vicaire.
A notre Seigneur, c'est douteux, mais son
vicaire, la chose est incontestable.
Ceci pour le bouquet
a Tout sera reju avec reconnaissance or, argent,
émaux, brillants, pierreries; bijoux même démodés
pieces d'orfèvrerie ou d'argenterie quelconques,
même cassées et hors d'usage; croix, médailles,
médaillons, jetons de présence, etc.
Avec beaucoup Aetccelera, car monsignor
tient surtout la quantité. On lui en verra i t
pitlX D'AKOIIEIIGIT
fjni y.\'<
60» i