JOURNAL D'YPRES DE L'ARRONDISSEMENT
Y Pil ES. Bimancbe
uvième année. N°. 40.
ler Octobre 1871.
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■»8fi3X D'ABOMISBïMEiST
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■Le Père Veuillot et nos petits vicaires.
Le Journal d'Ypres emprunte a YUnivers, son
chef de file, des articles a mourir de rire sur le
droit divin et le libéralisme, qui met Dieu
hors la loi.
Oü, quand, dans quelles circonstances le libé
ralisme a mis Dieu horsla loic'est ce que le père
Veuillot et les bons petits vicaires qui rédigent Ie
Journal d'Ypres se garderont bien de dire. Mais
accuser le libéralisme de mettre Dieu hors la loi,
cela fait bien auprès des imbeciles. Quant 5 le
prouver, c'est bien inutile, ceux a qui l'on
s'adresse étant fü$onnés depuis des siècles a tout
croire snr la parole du Pape.
Le nombre de ces imbéciles a notablement
diminué depuis une centaine d'années, et c'est ce
qui met le clergé catholique si fort en colère
contre le libéralisme, qui a l'audace de discuter
son autorité et de montrer qu'elle n'est faite que
d'imposture et de mensonge. Du jour oü la grande
Kévolntion de 1789 ayant renversé le vieil édifice
clérico-féodal si cher au Journal d'Ypres, la liberté
de conscience fut proclamée, de nouvelles généra-
tions se sont formées, qui, peu peu, ont appris
considérer la raison humaine comme le seul arbilre
de leurs destinées et a circonscrire la religion dans
l'unique domaine qui lui appartienne la con
science individuelle.
Cette doctrine, c'est celle du libéralisme, c'est
la nótre.
Le libéralisme dit l'homme tu es libre de
croire ou de ne pas croire. Nulle autorité sur la terre
n'a droit de t'imposer ur.e croyance religieuse quel-
conque, si tu n'en as pas, ni de toucher ta
croyance, si tu en as une. Sois iibre-penseur, si
tu veux, ou catholique, ou luthérien, ou calviniste
ou israëüte, crois ou ne crois pas, dans le domaine
de ta conscience, tu es souverain souverain
absolu et sans contróle.
Mais cette pleine liberté ne t'appartient pas
toiseul, catholique, pas plus qu'elle n'appartient
au protestant, ni l'israëlite, ni au Iibre-penseur.
Tu es convaincu de la supériorité de ta croyance,
Ie Dieu que tu adores est, tes yeux, le seul
digne d'ètre adoré Soit. Le libéralisme te laisse
entièrement libre de répnndre ta doctrine par tous
les moyens qui sont en ton pouvoir. La chaire ne
te suffit pas Publie des livres, des journaux,
fonde des écoles, crée des associations, encore une
fois, tu es le maitre.
Seulement retiens bien ceci, catholique
ne compte sur l'Etat que pour assurer ta liberté.
L'Etat, c'est tout le monde, ceux qui croient
l'Evangile et ceux qui ne croient rien du tout,
cesderniers sont aussi libres et aossi indépendants
vis-a-visde l'Etat que toi-même.
Cela étant, le róle de l'Etat se trouve tout na-
turellement tracé l'Etat ne sera ni catholique, ni
protestant, ni athée. 11 sera simplement laïque,
c'est-è-dire que, laissant decöté lesquestions reli-
gieuses, auxquelles il ne pourrait se mêler sans
froisser la concience.il nes'occupera que des inté
réts communs tous les citoyens, abstraction
faites de leurs croyances religieuses.
Telle est Ia mission de l'Etat, dans la doctrine
libérale, et nous défions Ie Journal d'Ypres d'en
produire une autre qui donne une plus compléte
satisfaction aux droits de la conscience.
L'Univers reproche au libéra'isme de mettre
Dieu hors la loi. Mais est ce done mettre Dieu
hors la loi que de proclamer la liberté des croyances
et d'assurer la jouissance de cette liberté a tous
les citoyens? Que quelqu'un s'avise done de trou-
bler l'exercice du culte dans uneéglise catholique,
pour voir si le Dieu du Journal d'Ypres est mis
hors Ia loi. II est vrai que le perturbateur sera
égaleruent puni s'il a troublé l'exercice du calte
protestant et c'est sans doute cette égalité qui
blesse si fort le Père Veuillot et, par contre-
coup, les petits vicaires du Journal d'Ypres.
Ce qui est certain, c'est que, sans mettre Dieu
hors la loi, le libéralisme ne le met pas dedans,
et il a pour cela d'excellentes raisons. Quel Dieu
y meltrait-il le Dieu du Journal d'Ypres n'est
pas le nétre, le nótre pas celui de notre voisin le
protestant. La préférence que l'Etat accorderait a
une religion serait évidemment un amoindrisse-
ment pour toutes les autres, et dans {'obligation
oü il se trouve de les traiter toutes sur le même
piedson devoir de maintenir la loi en dehors de
toute influence religieuse devient manifeste.
Mais cette fagou de comprendre et de pratiquer
Ia liberté ne convient pas au parti clerical, qui vise
ouvertement a dominer le monde par la prétention
qu'il affiche d'introduire son Dieu, a lui, dans la
loi et de l'y faire règner en maitre. Ne parlez pas
au parti clèrical de Ia liberté d'autrui il necon-
natt, il ne veut connaitre qu'une seule liberté, la
sienne, qu'il appelle carrément la liberté du
bien, celle des autres ne représentant a ses
yeux que la liberté du mal, acceptée par lui a
titre de simple tolérance momentanée, mais essen-
tiellement révocable. Moi seul je suis la vérité,
dit il, et tous ceux qui ne pensent comme moi
sont dans Terreuril est done tout naturel que
moi seul je gouverne et que les autres obéissent,
C'est contre cette prétention exorbitante que Ie
libéralisme lutte depuis 1789 et, Dieu merci,
qu'il lutte victorieusement. Mais, répétons-le
encore une fois, le libéralisme n'est pas nécessai-
rement hostile au sentiment raiigieux ce qu'il
entend empècher, c'est que telle ou telle religion
déterminée pénètre dans la loi pour Ia tourner
son profit exclusif et s'en ftire une armq contre
sesadversaires. Telle est sa mission il n'en a pas,
il n'en peut pas accepter d'autre.
Après cela, que le père Veuillot et les petits
vicaires du Journal d'Ypres revendiquent pour
1 Eglise catholique le droit de présider, comme au
moyen-ége, aux actes les plus importants de Ia vie
civile, de pareilles absurditês ne méritent pas
qu on sy arrête. On hausse les épaules et on passe
outre.
Les journaux de la Flandre et même quelques-
uns de la capitate se sont beaucoup occupés de
['installation récente du glorieux abbé du couvent
de Saint-Sixte, de l'ordre de La Trappe. Mais il
estun détail de la fète qui leur a échappé et qui
pourtant vautson pesant d'or c'est la participa
tion cette fête de quelques libéraux mar-
quants de notre arrondissement.
Citons en première ligne M. le sénateur baron
Mazeman de Coufhove qui a fourni les vins et les
fruits pour le banquet des pauvres et sobres Trap
pistes. Puis M. Van Merris qui a fait don l'abbé
d'une crosse d'or.
On connalt le vieux dicton
Crosse d'or, évêque de bois
Crosse de bois, evêque d'or.
De plus, M- Van Merris nssistait aux agapes
fraternelles auxquelles M. Mazeman nous le
disons son honneur a eu le bon goüt de ne
pas paraitre.
Nous n'insisterons pas surce qu'offre d'ét.range,
pour ne rien dire de plus, l'intervention de libéraux
dans une noce de Trappistes, non ces messieurs
appartiennent h l'école de M. Carton, celle de bi
politique pratique, et leur libéralisme nous est
sucpect depuis longtemps. Mais que penser de
M. Van Merris qui ne rougit pas d'aller s'asseoir
au milieu de tous ces gens qui cha jue jour l'in-
suitent, lebafouent, lui jettent la bone au visage?
M. Van Merris voudrait-il done demander
gróce a ses insulteurs La brebis égarée va-t-elle
Laissez dire, laissez-vous blamer, mais publiez voire pensee
53. Van Merris chez les Trappistes