JOURNAL D'YPRES DE L'ARRONDISSEMENT
YPRES, Dimanche
Neuvième année.
iV 44.
29 Octobre 1871.
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Les petitss-frères.
Le Journal d'Ypres veut bien nous apprendre
que le haut clergé n'a que faire de nos remon-
trances et qu'i! n'en tiendra aucun compte. Nous
rious en doutions bien un peu. L'Eglise infaillible.
impeccable, donne des lemons tout le monde et
n'en regoit de personne. C'est one chose que nous
savions depuis longtemps.
Aussi n'est-ee point dans l'espoir ridicule de
convertir !e haut clergé a nos idéés que nousavons
pris la peine de signaler le mal hideux qui dévore
ses congrégations de petits-frères, mais précise-
ment pour constater, une fois de plus, 1 incurable
immoraüté de ses renseignements et de sa disci
pline. L'Eglrse ne fera rien et ne peut rien faire
pour arrêter les progrès de cette épouvantable
lèpre. Yoila ce que nous tenions mettre en
lumière. Le Journal. d'Ypres, en nous invitant 5
garder pour nous nos avis, nous donne raison plus
qu'il ne pense.
Nous laisserons nos petits vicaires exalter a
loisir la sublime vertu de la continence. Leur
sermon fiui, nous sommes certains d'exprimer Ie
sentiment de tous les gens de bon sens en répé—
tant que si les petits-frères pouvaient se marier,
nous ne verrions pas plus de ces horribles scandales
dans leurs écoles que nous n'en voyons dans les
écoles laïques.
Voyons, chers petits vicaires, quittons pour un
instant les hautes regions de la philosophie et
examinons froidement, tranquillement les faits.
Une chose certaine, incontestable, c'est que les
infamies que vous savez sont infiniment plus fré-
quentes dans Les écoles de petits-frères que dans
les écoles laïques, oü l'on n'en cite que de trés rares
exemples, tandis que, chez les petits frères, elles
tendent passer l'état chronique.
D'oïi provient cette difference A coup sur,
elle tient une cause quelconque. II n'est pas
naturel que cette horrible maladie se développe
de préférence précisément chez des hommes que
leur caractère religieux devrait en préserver. Avez-
vous une explication a donner de ce fait étrange
Donnez-lh, rious l'examinerons, nous la discute—
rons, mais vous n'en avez pas, nons vous défioris
de dire que vous en avez une.
Nous vous avons donné la nètre. Pour nous,
notre profonde conviction est que si les petits frères
étaient autorisés prendre femmes, comme les
instituteurs laïques, leurs écoles ne donneraient
plus ces fréquents spectacles d'immoralité qui
commencent épouvanter le monde.
Avons-nous tort Prouvez-le nous, chers petits
vicaires, nous ne demandons pas mieux que de nous
éclairer sur cette grave et délicate question. Mais
quoi bon nous accuser, a ce propos, de prêcher
['incontinence et de pousser a Ia dêpravation des
mceurs Nous ne sachons pas que ce soit faire
oeuvre d'immoralité que d'engager Ie haut clergé
a permettre aux petits-frères de se marier. Si la
virginité est une belle chose, n'oubliez pas, chers
petits vicaires, que le mariage est un sacrement et
qu'il a droit tous vos respects.
Après cela, chers petits vicaires. vous nous
amusez fort quand vous assurez avec ce superbe
aplomb qn'on acquiert au séminaire qu'il n'y a
que la continence volontaire et sacrée pour
m faire admettre et pour faire pratiquer la conti-
nence forcée et nécessaire commnndée k
la jeunesse non liée, aux époux absents, aux
ft soldats, a tous ceux enfin, comme vous dites,
qui la nature ou la société impose ce sacrifice.
Vraiment, chers petits vicaires, c'est pour cela
seulement qu'on vous impose, a vous et k vos
pareils, de ne pas prendre femme Eh bien, fran-
chement, vos évêques ont bien tort, car dans les
pays protestants, ou le pasteur est autorisé a se
marier, la continence est beaucoup plus sévère-
ment pratiquée que dans les pays catholiques.
Si vous consultiez un pen plus souvent la sla-
tistique, chers petits vicaires, au lieu de vous
abrutir dans la lecture d'un stupide bréviaire oü
vous n'avez rien a apprendre, vous sauriez, comme
tout le monde, qu'en Allemagne, par exemple, le
nombre des naissances illégitimes est infiniment
moindre qu'en Belgique, preuve péremptoire que
Ia continence y est mieux observée, bien que ie
protestantisme n'impose pas l'obligation du cé-
libat a ses posteurs et qu'il les engage, au con
traire, 5 se marier pour donner Ie bon exemple.
Ne venez done pas nous dire qu'il faut le célibat
dans le clergé pour qu'il reste un peu de chas-
teté dans le peuple. a C'est tout simpiement Ie
contraire qui est démontré par les faits les plus
irrécnsables.
Uurleraents de la chair, hennissements de
béte que tout cela, diles-vous. Evidemmqnt,
chers petits vicaires, vous confondez ici deux
choses complétement distinctes i'incontinence et
le mariage. Personne, que nous sachions, n'entend
que Ie prètre catholique soit autorisé a vivre dans
le libertinage, comme vos déclamations passionnées
sur les hurlements de la chair tendent a le faire
supposer. Nous demandons ce qui est bien
différent que l'Eglise lui accorde le droit de se
marier et de procréer des enfants qu'il êlèvera
dans la crainte du Seigneur. Franchement, quand
vous qnalifiez de bennissement de béte |e
vceu d'un honnute homme qui désire prendre
femme, vous faites sourire le genre humain.
Mais nous avons tort, chers petits vicaires, de
vous suivre sur ce terrain, qui n'est pas du tout
celui de la discussion. II ne s'agit pas entre nous
du célibat du prètre, mais de celui du petit-frère,
qui n'est pas prètre, lui, et h qui l'Eglise impose
|a loi du célibat sans aucune néccesité visible, au
péril de ses mmurs ei de la demoralisation de l'en-
fance dont l'éducation lui est confiée.
Vous ne voulez pas qua !e prètre pu/sse se
marier, vous considérez que la legen de chasteté
qu'il donne au monde est un bon exemple Soit,
nous vous ferons cette ccucesaion, pour en finir.
Mais aceordez-aous, en retour, que ce bon
exemple-la, les petits-frères ne le dennent pas, au
contraire, et qu'ils vous scandalssent comme nous-
mêmes par le spectacle de leur dêpravation
immonde. Nous ne vous en demandons pas davan-
tage, céiibataires forcés
A quelle kfaillibllUé fant-il crolre
A cette question que se pose le Bien public,
reproduit par le Journal d'Ypres, la réponse est
bien simple II ne faut croire k l'infaiilibilité de
personne, ni k la sienne propre ni a celle d'au-
trui.
On ne veut pas, dit le Bien public, que
1 État puisse, au nom d'une loi supérieure ses
propres lois, être rappelé k la modération,
la morale, k la justice.
Cerlainement non, que nous ne voulons pas
cela. L'État, c'est nous tous, et nous n'entendons
pas du tout que qui que ce soit se mette au-des-
sus de nous pour nous imposer sa volonlé de haut
en has.
On répudie l'infaiilibilité dn pape, continue
Ie Bien public, parce qu'on se proclame soi—
même infaillible, impeccable, ft
Pas du tout, nous répudions l'infaiilibilité du
pape comme nous répudierons celle de quiconque
se prétendrait infaillible, précisément parce que
nous ne croyons n l'infaiilibilité de personne.
N'est-ce pas, pnursuit le journal gantois, le
césarisme payen dans tout le délire de son ab-
solutisme
Non, Bien public, mon ami, ce n'est pas Ie cé
sarisme payen, partant du principe que i'empe-
renr était Ie représentant de Dieu sur la terre.
4
Le tout payable d'avancb.
Laissez dire, laissez-vous blamer, mais publiez votre pensèe