JOURNAL D'YPRES DE L'ARRQNDISSEMENT
VI* IVES, I)imanche
önzième année. iH° 8.
2£§ Fcvrier 18^3-
PRIX D'AROMXEMEilT
POUR LA BELGIQUE
S francs par an; 4L fr. 50 par semestre.
Pour PEtranger, le porl en sus.
Un Numéro 25 Centimes
Paraissani le dimanche.
JLua Boite du Journal est
transferee a parti i- de ce
Jour rue Close, n° 1.
LE DOCTRINARISME ET LA LOG IQUE.
Que M. Kervyn ou Crevant de Lette n-
hove soit l'orateur le plus emb... assom-
mant de la chrétienté, nous le voulons bien,
etnous sommespayés,belas! pour le savoir.
Que le prestige de sa parole soit tel que
cinquante membres a peine se trouvent
réunis a la Chambre, quand il y a lieu de
redouter un nouveau flux de son robinet
académique, nous en avons eu la preuve
pas plus tard que samedi dernier.
Mais il n'en est pas moins vrai que l'insup-
portable declamateur avait trouvé le vrai
joint, quand il sommait l'autre jour la gauche
d'avoir a se mettre d'accord sur la question
de la loi de 1842,avant de blamer l'attitude
du ministère en presence de petites combi-
naisons comme celles de Renaix et de
Ninove.
Que (liable, messieurs les libéraux, venez-
vous nous chanter au sujet de la funeste
influence de l'enseignemeut clérical, aussi
longtemps qu'une importante fraction de
votre parti demeurera partisan de l'inter-
vention du prêtre, a titrc d'autorité, dans
les écoles de l'Etat?
S'il n'v a point d'inconvénient a cc que le
clergé soit unc autorité dans les écoles, il n'y
en a guère a ce qu'il y soit toute l'autorité.
Et nous ne parviendrons jamais a voir la
difference essentielle qui pout exister entre
une éeolc placée sous le régime de la loi de
1842, et une école placée directement sous
la coupe de messieurs les évêques.
Si les libéraux partisans de la loi de 1842
avaient pour deux sous de logique, ils ne
trouveraient rien a redire a la conduite des
administrations de Renaix et de Ninove, et
si les électeurs qui nomment ces représen-
tants en avaient pour deux liards, ils les
remplaceraient par des catholiques.
Donnez-nous une Chambre ou il n'y ait
que vingt libéraux, que dix, si vous voulez,
mais des vrais des hommes qui sachent
ce qu'ils veulent et pourquoi ils le veulent
des hommes qui rougiraieat de déblatérer
contre les tendances du clergé, en même
temps qu'ils l'appellent a inspector les
propres institutions de l'Etat, et nous vous
garantissons que ce faible noyau d'opposi-
tion sérieuse, carrée et logique aura piutót
fait de mettre par terre le colossc clerical
aux pieds d'argile que tous vos parleurs a
deux visages et tous vos libéraux a com
promis.
Quand on leur montre leur défaut de
logique, a ces bons doctrinaires, ils croient
s'être merveilleusement défendus en s'é-
criant. Et l'Encyclique Et le Syllabus
Mais, maladroits que vous êtes, que nous
feraient L'Encyclique et le Syllabus, si vous
ne vous efforciez pas d'en faire ingurgiter
les doctrines par les jeunes générations
Mais nous n'aurions pas plus a nous pré-
occuper du Syllabus que de la legislation du
Reloutchistan, si vous ne prétendiez pas
donner autorité dans vos écoles aux défen-
seurs patentés de ce beau systèmc, aux
agents directs de son inventeur.
Vous êtcs, vous autres doctrinaires, de
pires ennemis du progrès que les catholi
ques. Vous ètes de pires ennemis, non d'in-
tention, mais de fait. Nous pouvons vous le
dire, au liom de tous les vrais libéraux s'il
ne s'agissait, pour redresser les griefs de
l'enseignement, pour mettre le clergé a la
porte des écoles, que de renverser le minis
tère catholique, cescrait bientöt fait.
Mais comment voulez-vous que nous
trouvions la force de faire un grand effort,
quand nous avons la conviction que la substi
tution de M. Frère a M. Malou ne nous rap-
procbera pas d'un centimètre du but que
nous avons en vue?
Comment voulez-vous que les vrais libé
raux, découragés, éceeurés par tant d'années
de domination doctrinaire, réussissent a
opércr un changement qui ne doit leur
rapporter d'autre satisfaction que eclle
qu'éprouvait Raton en voyant Rertrarul
croquer les marrons qu'il avait tirés du
foyer?
Car, nous en appelons a votre bonne
foi, depuis l'arrivée de M. Malou aux
affaires qu'a-t-il fait que vous n'eussiez
fait comme lui, qu'auriez-vous fait qu'il
n'ait fait également?
Je suppose que vous auriez nommé une
douzaine de bourgmestres libéraux, la ou
on a nommé une douzaine de cléricaux.
Et puis?
Dans la magistrature, dans le notariat,
vous auriez peut-ètre colloqué encore une
douzaine de doctrinaires. Et puis?
Et puis c'est tout.
Mais vous n'auriez pas fait voter l'cxten-
sion du suffrage pour la commune, mesure
insuffisante, sans doute, mais qui n'en a
pas moins appclé aux fonctions électives
un grand nombre de citoyens, et qui a eu
d'excellents résultats au point de vue de la
composition d'un grand nombre d'admi-
nistrations eommunales.
A part cela, vous auriez fait exactement
ce qu'a fait M. Malou. Cela ne vaut réellc-
ment pas la peine de le mettre par terre,
pour vous rouvrir les portos des hotels de
la rue de la Loi
Vous vous montriez bien triomphants,
récemmeut, quand, après avoir prouvé aux
catholiques leur impuissance a faire ceuvro
de réaction, vous proclamiez que malgré
tout le pays est liberal.
Sans doute, il est libéral, mais il ne l'est
pas comme vous; sans ecla, il ne vous cut
pas laissé renverser.
Le pays est libéral, et bien plus que vous
ne le pensez; mais il prcnd le libéralisme
au sérieux. II hausse les épaules de pitié
quand il voit les mêmes journaux doctri
naires faire des gorges chaudes au sujet
des miracles accomplis par l'eau de Lour-
des, et soutenir les hommes qui votent pour
l'introduction, dans les écoles, des commis-
voyageurs chargés du placement de cetto
prodigieuse denrée.
[/OPINION
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