JOURNAL D7PRES DE L'ARRONDISSEMENT
YPflES, Dimanche
Onzième anoée. j\° 15.
13 Ayril 1873.
PRIX I»\VlSO\\EUE\T
POUR LA BELGIQUE
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LE PARTI DE L'ORDRE... DES JÉSUITES
Le grand parti de l'ordre et la prcsse qui
se dit conservatrice font grand bruit d'une
manifestation burlesque organisée par les
cléricaux d'Anvers contre la garde civique.
Un habitant de cette ville, installé autrefois
a Borgherout, nommé Pittoors, avai t été
récemment incorporé dans la milicc ci-
toyenne. 11 avait refuse de se procurer la
tenue, puis d'assister aux excrcices, puis
de payer les amendes qui lui avaient été
infligées. Finalemeut il avait été, en vertu
de la loi, condamné a trois jours de prison.
De ce bleu récalcitrant, les défenscurs du
tróne, de 1'autel, de l'ordre, de la familie et
de la propriété, ont jugé bon de faire un
martyr. Le jour oü le Silvio Pellico de Ror-
gherout vovait tomber ses fers et quittait le
noir cacliot oü il avait gémi trois fois vingt-
quatre beiircs sur la paille humide, les clé
ricaux anversois et leurs bons amis les stock-
slaegers, couvoqués a grand orchestre par
la presse pieuse, se sont portés en foule a la
porte de la prison et out fait une ovation
enthousiaste a l'illustre Pittoors, désormais
rangé parmi les plus célèbres martyrs de la
liberté.
Laissons l'organe du trés honorable sieur
Delaet, 1'Escaut, narrer cette scène gran
diose il constate d'abord que quatre bou
quets ont été remis a Silvio Pellico-Pittoors,
puis il entame la description du cortege
1° La musique jouant l'air Ou peut-on
ètre mieux 2° une voiture découverte sur
le siége delaquelle se tenaitun commission-
naire public portant une pancarte rouge,
entourée de fleurs et sur laquelle on lisait
Trois jours de prison pour la garde civi
que 3° une voiture découverte sur le
siége, a cóté du cocher» était assis le ven
deur du Lanhe Wapper portanl uue carica
ture représentant un individu de grande
force musculaire, habillé en officier de la
garde civique, et recevant un coup de pied
cn sortant du cabinet de certain haut per-
sonnage. Suivaient eucore plusieurs voi-
tures couvertes et découvertes.
Arrrivée dans la rue des Escrimeurs,
la musique entama l'air de la Grande-
Duchesse de Gérolstein Voici le sabre de
mon père.
Devantl'estaminetle Roitelet, rue aux
Laines, le cortége a fait halte et l'on a offert
le vin d'honneur au héros de la manifesta
tion. Ensuite on a pris le chemin de Ror-
gherout.
Nous u'aurons garde d'accorder a cette
polissounerie plus d'importance qu'elle ne
mérite. Nous pensons, avec 1'Etoile, que ce
n'est pas l'institution de la garde civique
qui a été ridiculisée dans cette manifesta
tion. Nous feronsrcmarquer seulement, que
les cléricaux s'enfoncent fatalement, et dc
plus en plus, dans la voie révolutionaire et
anti-constitutioimelle oü ils se sont enga
ges.
Depuis longtemps déja,tous lespouvoirs,
toutes les institutions, toutes les libcrtés
sont cn butte a leurs attaques, a leurs sar-
casmes, a leurs injures,
Le Roi a été appelé par eux une ma
chine a signer, et le peuple a pu lire, dans
les orgauesdu grand parti de l'ordre, qu'un
expéditionnaire a trois mille francs ferait
avanfageusemeut la besogne du souverain.
Les gouverneurs qui représentent le Roi
dans nos provinces, sont.u des bipèdes plus
on moins cliajfiarrés.
Les ministres, a l'époque oü l'opimon
libérale était au pouvoir, étaient qualifiés
tous les jours dc voleurs et de coupeurs de
bourses, paree qu'ils appliquaient une loi
que les ministres cléricaux d'aujourd'hui
maintiennent et font appliquer comme au
trefois. Et ce sont des écrivains du parti
conservateur qui voulaient faire croire au
pays que Rogier, l'homme intègre, le grand
citoyen, était un fils de bourreau, un con
cussion naire et un traitre.
La magistrature elle-même a été vilipen-
dée et insultée. Après la mascarade d'An
vers, la garde civique ne se portera pas plus
mal. Mais qui dira jamais l'effet produit sur
les populations flamaudes, lorsqu'on vit les
hommes les plus importants du parti cléri-
cal, d'anciens membres de nos assemblees,
le clergé, faire des ovations a des individus
que la justice avait justement frappés, glo-
rifier les condamnés, organiser pour eux
des cortéges et des receptions triomphales,
au moment oü la presse de l'ordre bafouait
les magistrats qui avaient rendu la sen
tence, et mettait en doute leur honneur et
Jeur intégrité
Après quoi, lorsque Roi, Cham bres, auto
rités, magistrature, institutions nationales,
lois du pays, libertés constitutionnelles,
lorsque tout, enun mot, a été insulté, ridi-
culisé, amoindri, trainé dans la boue, les
paladins de la bonne cause se lamentent a
l'aspect des progrès que l'esprit de révolte
et les doctrines dirverses font dans les
masses. Ou les entend s'écrier sur tous les
tons: cc Quel siècle! Oü allons-nous? On
ne croit plus a rien Le respect s'en va
Et ils ne s'apercoivent pas, avcuglés qu'ifs
sont, les insensés, par le fanatisme et par
lahaine, qu'eux-mêmes sont les premiers et
les principaux artisans de cette oeuvre de
destruction.
LE PAPE-POISON.
Un des clichés que la presse cléricale réédite
avec le plus de bouheur, c'est celui qui consiste a
annoncer au monde que tous ceux qui ont mangé
du pape en sont morts. Le Courrier de VEscant
dans un article intitulé Pie YII et Pie IX fait
ressortir, mathématiquement, pour la dixième
fois, la vérité absolue de cette sentence
Napoléon, s'écrie la sainte gazette, tout-puis
sant et terrible, fut excommunié par l'humble et
cbétif Pie YII jprisonnier au Vatican. Quatre ans
après, jour pour jour pour ainsi dire, leNabu-
chodonosor du XIX siècle, voyait périr sous les
Neiges de la Russiela plus formidable des
arinées que l'Europe eut vues jusqu'alors. En
1821, le 5 mai, Napoléon expirait Sainte-Hélène.
II avait mangé du pape et le pape vit sa mort
Moins affirmatif que la feuille cléricale,nous ne
pourrions préciser au juste si Napoléon est mort
pour avoir mangé du pape, nous serions plutöt
enclins a croire qu'il faut attribuer les derniers
désastres du premier empire aux ménagements
qu'il a eus pour la papauté mais ce qu'il y a de
certain, c'est que tous les souverains qui, après
lui, ont fait des concessions au despotique pouvoir
du Vatican, loin d'en recueillir le moindre avan-
tage, se sont vus tour a tour chassés de leurs
Etats et forcés de chercher un asile sur la terne
étrangère.
Nous ne sachions pas queMaximilien ait jamais
songé a persécuter Pie IX et cependant le mal-
heureux empereur est tombé a Querétaro, sous
les balles mexicaines, dument muni de la béné-
diction pontificale qu'il était allé chereber a Rojne
avant son départ.
Et sans franchir les mers, nous pourrions en
core citer sa majesté la reine Isabelle, qui au lpn-
demain de la Rose d'Or perdait son tröne, et
Napoléon III, le fils ainé de l'Eglise, qui après
d'incroyables désastres s'est éteint dans l'exil.
Nous en passons et des meilleurs, mais ces
simples citations demontreront suffisamment que}