JOURNAL D'YPRES DE L'ARRONDISSEMENT
YPIIES, üi manche
Onzicme annéc. i^'0 1(1.
20 At ril 1873.
Prix D\*ieo\\i:m:vi
POUR LA BELG [QUE
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Ua Numéro 25 Centimes
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n° 1
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L'INSTRUCTION PUBLIQIJE
ET LE NOUVEAU PALAIS DE JUSTICE DE BRUXELLES.
Malgré toutes les declamations officielles
sur la prospérité de nos écolcs, la Belgique
doit être classée parmi les pays les plus
arriérés, en matière d'instruction publique.
Yoici des cliiffres officiels, qui prouvent
cette assertion nous les puisons dans l'ex-
cellent ouvragc de M. Emile Delaveleye,
intitule L'instruction du peuple.
Le nombre des habitants ne sachant ni
lire, ni écrire,s'élève a 2,548,752. Le nom
bre des habitants sachant lire et écrire,
s'élève a 2,279,081Eu défalquant le nom
bre des enfants, ages dc moins dc 7 ans, il
reste plus d'un million et demi de Beiges
absolumcnt illcttrés.
Quant a ceux qui savent lire et. écrire, la
Irès grande majorité ne sait que ccla son
instruction peut être évaluée a un degré cen
tigrade.
Voila pourquoi les moines et les couvents
prospèrent en Belgique voila pourquoi
notre pays est le paradis terrestre des jé-
suitcs et de leurs alliliés.
La Belgique croupit dans 1'ignorance la
plus profonde c'est ce que les chiffres pré-
rappelés démontrent avec uiie sinistre elo
quence.
Au lieu de décupler les écoles publiques,
au lieu de former de bons instituteurs, au
lieu de créer partout et sous toutes les for
mes des foyers de science, rayon nant sur
foute la surface du pays, on se croise les bras
ou ce qui revient au même, on agit avec
mollesse on lésine sur la dépense a faire
on vote des budgets insuffisantson paie
mal les professeurs on enseigne dans des
locaux déplorables au point de vue de l'hy-
giène.
Et pendant ce temps, on dépense cin-
quante-deux millions de francs pour con-
struire a Br uxelles un nouveau palais de jus
tice, qui ne devrait coüter qu'un million.
Oui, 52 millions, voila la somme énorme
qu'on est en train de gaspiller a Bruxelles,
comme le constate le rapport de la section
centrale de la Chambre des représentants.
Ce rapport vient d'etre publié dans les
Annalcs Parlementaires. (Documents page
253.
Avec ces 52 millions, consacrés a la
réforme de l'instruction publique, on pour-
rait changer la face du pays on pourrait
arracher les classes ouvrières a l'ignorance
et a 1'ivrognerieon pourrait sauver de
l'abrutissement des milliers de victimes, ou
plutót des eentaines de mille.
Quel aveuglement frappe done les classes
élevées de la SociétéConstruire des monu
ments de 52 millions sur un volcan qui
peut faire explosion a tout instant, a cause
de l'ignorance des masses populairesA-t-on
done oublié l'histoire de la Commune de
Paris
Civilisez d'abord ces masses ignorante s
rendez-leur justice faites tout ce que 1'hu-
manité inspire aux ames généreuses secou-
rez ces ménages désolés, oü la misère et la
maladie exercent leurs ravages et après
tout cela, construisez des monuments de 52
millions, si vos ressources excèdent vos
besoins.
Agir autrement, c'est commettre un
crime
L'ABSOLUTION, S. V. P.
Les doctrinaires ont de la
doctrine comme les poitri-
naires ont de la poitrine.
(Sagesse des Nations.)
Dans les derniers jours de mars se faisait a
Ypres rinstallation du nouveau curé de St-Pierre.
Naturellement toutes les dévotes de I'endroit
étaient a Penversde bonne heure la rue do Lille
était pavoisée de drapeaux, de banderolles et
d'oriflammes de toutes les couleurs. Ces decora
tions étaient peut-être moins un symbole de la
piété des fidèles qu'une preuve nouvelle de la
propension naturelle qui pousse beaucoup d'hom-
mes, comme les quadrumanes, a singer ce qu'ils
voient.
A chacun son instinct d'ailleurs, et ce n'est pas
de cela que nous voulons nous occuper en ce mo
ment. II est d'autres particularités de cette céré
monie plus curieuses a noter. Nous ne voulons
pas même signaler que la plus belle décoration et
le plus splendide drapeau furent de nouveau ar-
borés par l'illustre Beaucourt, le conseiller libé-
ral, l'élu de l'Association, le protégé de la coterie
Carton et Cie. Nonce triste sire ne vaut pas
qu'on s'occupe de lui. A défaut d'estime, ses
agissements lui rapporteront sans doute grands
profits. Espérons-le du moins pour lui et pas
sons.
Mais que dire de la commission des Hospices
qui permet a, la musique des orphelins de jouer
devant le presbytère
Que dire de M. le bourgmestre qui laisse arbo-
rer le drapeau sur la tour St-Martin comme pour
une fête nationale? Comment, Messieurs des Hos
pices, vous vous plaignez d'être injuries, vilipen-
dés par les cléricauxvous soutenez en ce mo
ment un proces en calomnie cont're le Journal
d'Ypres, le f'anatique organe du clergé yprois,
qui vous a accusés de tripotcr avec l'argent des
pauvres, de soudoyer, avec cct argent, la mau-
vaise presse, et lorsqu'il plait a ce clergé qui
vous insulte journellement de faire fête, vous ne
trouvez rien de mieux que de vous prosterner
devant lui, d'envoyer de pauvres orphelins faire
de la musique devant un presbytère ou l'on fait
ripaille et pour le plus grand amusement de
jjrêtres en goguetteFi done, messieursA dé
faut de convictions, tachez d'avoir au moins un
peu de dignité
Voila bien pourtant les doctrinaires, toujours
les mêmesEn théorie, ils énoncent des prin
cipes magnifiques qu'ils ne mettent jamais en
pratique. Ils prêchent la séparation de l'Eglise
et de l'Etat et trainent l'autorité civile a la re-
morque du clergé ils déclament contre l'influence
du prêtre, contre son despotisme, la soif de do
mination universelle qui le dévore, et courent se
prosterner a ses pieds. Ils vantent les bienfaits de
l'instruction et exaltent la sublime mission des
pionniers de la civilisation, mais destituent
impitoyablement l'instituteur qui n'est pas l'es-
clave du curé, et tandis que dans toutes les villes
intelligentes du pays, on améliore la position du
corps enseignant, au conseil communal d'Ypres,
la majorité, doctrinaire toujours, refuse aux pro
fesseurs une légere augmentation de traitement
de 10 p. c.; elle ne trouve pas d'argent, cette ma
jorité servile, pour le nécessaire, l'indispensable
mais elle en a de reste pour satisf'aire les caprices
de M. Alphonse Vandenpeereboom et placer ses
protégés. Ne l'avons-nous pas vue récemment
créer une sinécure pour complaire au grand
homme d'Elat, et voter un traitement annuel a
un archiviste-adjoint, une nullité, un fruit sec de
plusieurs universités, donner, en un mot, un cré
tin pour aide a un paresseux. Nous la verrons
encore, cette intelligente majorité, voter des
fonds considérables pour couvrir de- peintures
les murs des Halles, quand la ville d'Ypres at
tend impatiemment depuis tant d'années les amé-
liorations les plus urgentes.
Ah les doctrinaires, ils n'ont rien appris, rien
oublié! Ce sont eux qui affrontent les ricaneries
des abbés pour avoir l'insigne honneur de saluer
Monseigneur de Brugesce sont eux qui arborent
le drapeau pontifical et illuminent pour l'Imma-
culée Conceptionce sont eux encore qui, mar-
guillers de leur paroisse, portent un cierge dans
les processions et participent a l'installation des
curés.
Pourquoi tant d'inconséquences, tant de con
tradictions Paree que soit indifférence, soit cal-
cul, habitude ou hypocrisie, ils ne savent se passer