Hebdomadaire Catholique d'intérêt Général
ABONNEMENT UN AN 15 FRANCS
Direction Ch. van RENYNGHE, Ypes. Rédaction-Administration A. BREYNE, 16, rue d'Eiverdinghe, Ypres. Compte chèques postaux 4086 97
Ire ANNEE No 9.
PRIX 35 centimes le rsméro.
PAROLESD
DIMANCHE 4 MARS 1934.
En donnant le texte du discours inaugural de
S. M. Leopold III, nous avons comme but de re
mettre sous les yeux du lecteur, et de soumettre
sa réflexion les paroles admirables qui venant
du chef de la Nation sont pour le peuple entier
une consigne.
L'émotion de la semaine dernière n'a pas per
mis de peser toute la portée de ce discours. Notre
intention était de le commenter. Tout commen
taire l'affaiblirait.
Paroles de Roi, paroles de chef, paroles d'un
homme qui regarde l'avenir en face, d'un regard
fait de clarté et de volonté
Mesdames, Messieurs,
Je ne me dissimule ni l'étendue ni la gravité
des responsabilités que j'assume, au moment où,
dans la cruelle souffrance que m'inflige la mort
tragique d'un père profondément aimé, je prends
devant vous l'engagement solennel qui, aux ter
mes de la Constitution, scelle un pacte de con
fiance réciproque entre le Souverain et la Nation.
Je sais les devoirs difficiles que ce serment m'im
pose. Pour les accomplir sans défaillance, je ne
pourrai mieux faire que de m'inspirer des exemples
de mes trois grands prédécesseurs.
Selon la tradition qu'ils ont solidement établie,
la dynastie belge est au service de la Nation. J'ai
la ferme volonté de ne jamais l'oublier.
Le dévouement la chose publique a toujours
été, depuis le fondateur, la marque de l'institu
tion monarchique. Ce fut le constant souci et la
vertu de mon père. Tous les Belges comprennent
les bienfaits de cette étroite association entre la
Nation et ses Rois. Ainsi s'expliquent l'unanimité
et la spontanéité des témoignages d'attachernsnt
qui montent de toutes parts autour de nous.
J'exprime la Nation la profonde reconnais
sance que m'inspire l'hommage universel et sans
précédent rendu la mémoire du Roi, mon père.
Ma mère bien-aimée s'associe mes sentiments de
gratitude. Sa peine immense trouve un précieux
réconfort dans la tristesse de tout un peuple.
De l'étranger, nous sont venues d'innombrables
condoléances. Au nom de mon pays, je remercie
tous ceux qui ont pensé nous, et spécialement
les Souverains et Chefs d'Etat qui, par leur pré
sence personnelle ou par l'envoi de représentants
de haute distinction, ont eu l'affectueuse pensée
de s'associer au deuil national.
La participation des vaillantes armées et ma
rines de France et de Grande-Bretagne nous a
vivement émus. Elle rappelle et resserre la noble
fraternité fondée dans des jours inoubliables mêlés
de douleurs et de gloire.
Ce souvenir évoque l'image du chef héroïque
d'une armée de héros qui nous devons d'être
restés nous-mêmes. Le Roi défunt portait ses
anciens compagnons d'armes, au milieu desquels
j'ai moi-même vécu, les sympathies les plus pro
fondes. Que ceux-ci soient assurés de ma part de
la même cordiale affection. Je l'étends l'armée
actuelle qui trouvera toujours en moi un chef dé
voué et décidé.
Les institutions dont nous a dotés la sagesse
du Constituant et qui ont subi l'épreuve de plus
d un siècle sont assez larges et assez souples pour
s'adapter, dans l'ordre et la légalité, aux néces
sités variables des temps.
Le Roi en avait l'intense conviction et moi-
même, son exemple, j'en suis profondément pé
nétré.
La paix sociale était au nombre de ses préoccu
pations les plus pressantes. II faut tout mettre en
œuvre pour la réaliser dans la conciliation des
intérêts et dans l'union des cœurs.
La tâche du gouvernement est difficile dans les
temps de crise que nous traversons. Les obstacles
se multiplient sur tous les chemins des échanges
entre les peuples. En plus d'une circonstance, le
Souverain défunt dénonça le péril et fit entendre
des cris d'alarme. Mon appui le plus actif sera
donné aux efforts qui tendront entretenir la
richesse de la terre, raviver le travail, l'industrie
et le commerce et qui nous aidera sortir de la
situation pénible qui atteint si durement les classes
moyennes et la classe ouvrière.
Je me suis spécialement attaché, depuis plu
sieurs années, l'étude des problèmes coloniaux.
Comme l'a si bien compris le Souverain génial
auquel nous devons le Congo, les solutions qu'ils
appellent sont étroitement liées la grandeur de
la Patrie. Ils continueront retenir toute mon at
tention.
Les forces intellectuelles et morales fécondent
ROI
le développement d'un peuple.
Jamais le Roi n'a cessé d'encourager les œuvres
qui mettent en action l'esprit de création et de
désintéressement et qui en favorisent l'expansion.
L'élan magnifique, qui a suscité la création du
fonds national de la recherche scientifique, ré
pondit l'une de ses plus belles initiatives.
Mon plus vif désir, dans ce domaine encore,
est de suivre la voie qu'il a tracée avec tant de
clairvoyance.
L'indépendance du pays et l'intégrité du terri
toire sont inséparables de l'unité nationale. La Bel
gique indivisible et indépendante est un facteur
historique de l'équilibre européen.
La concorde et l'union qui se manifestent en
ce moment me permettent de fonder cet égard,
pour le présent et pour l'avenir, les espoirs les
plus réconfortants.
La Belgique continuera de s'associer l'orga
nisation de la paix, qu'elle aspire voir se pro
longer dans l'honneur et le droit, par le rappro
chement des peuples. Elle demeure aussi résolue
tous les sacrifices nécessaires pour assurer la sau
vegarde de son sol et de ses libertés.
Mesdames, Messieurs,
Je me donne tout entier la Belgique. La Reine
m'assistera de tout son cœur dans l'accomplisse
ment de mes devoirs. Nous eleverons nos enfants
dans l'amour de la Patrie.
Puisse la divine Providence nous assister.
Je forme des vœux ardents pour que la Bel
gique, qui a traversé glorieusement tant d'épreu
ves, poursuive heureusement ses destinées de pro
grès, de grandeur et de prospérité.