lie notre Souveraine. Sa démarche est
ondoyante, ses yeux sont profonds,
son regard est altier, ses mains sont
longues et fines et sa voix délicieuse
ment timbrée.
Elle porte avec élégance une déli
cieuse toque noire garnie d'une plume
blanche, une robe en crêpe Georgette
et un manteau en caracul.
Nous l'avons vu tout au long d'une
journée, distribuer avec des paroles
douces qui réchauffaient le cœur des
malheureux, des secours en nature et
en espèces. Son sourire avait le don de
mettre l'aise, elle n'était pas la gran
de dame, la Reine, non, elle était l'en
voyée de Dieu.
Dans une pauvre masure de Wer-
vicq, dans un foyer où la maman était
malade, elle a exprimé le désir d'aller
lui rendre visite sa chambre l'é
tage et là, elle a su trouver les mots
qu'il fallait. En flamand ou en fran
çais elle s'informait des nouvelles de
tous. Et votre mari, Madame, que
fait-il Vos enfants sont-ils toujours
sages
Apprennent-ils bien en classe
Et lorsqu'elle connaissait l'histoire
de leur vie, elle disait Voici pour
vous, de la part du Roi...
En tremblant les pauvres gens pre
naient l'enveloppe qu'elle leur ten
dait.
Après une dernière caresse, un bai
ser aux enfants, une poignée de mains,
un sourire, elle parlait, laissant der
rière elle un peu de joie et de bon
heur.
Nous l'avons vue Menin dans cette
affreuse Campagne Rouge où les
maisons en bois tombent presque en
ruines, où les vitres sont remplacées
par de grossiers morceaux de carton
gris, où les cheminées sont de tristes
goutières en zinc où l'hiver il fait
froid, où l'été la chaleur est insuppor
table
Nous avons vu notre Reine traver
ser bravement et sans aide, les sentes
boueuses et cogner aux portes de ces
masures. Après son passage, un peu de
soleil restait dans la maison. Les hom
mes un peu pâles, les femmes pleu
rant sans honte la regardaient partir
en disant Quand la reverrons-
nous
Et durant toute une journée,
depuis le matin 8 heures, jusqu'au
soir 7 h. 30, sans arrêt, part une
heure pour le déjeuner, notre gracieuse
Souveraine, accomplit sa charitable
randonnée. Le soir comme nous reve
nions, un peu las vers notre home,
nous avons fait route avec un brave
père de famille, un voyageur de com
merce.
Avec des sanglots, le brave homme
nous disait Je revenais de Dinant,
Monsieur, tout fait incidemment, j'ai
vu notre Reine en gare de Cour-
trai. J'ai pu m'en approcher, Monsieur,
et je vous l'avoue sans honte, ce jour
est le plus beau de ma vie
Pour ces braves gens la Reine re
présentait quelque chose d'inaccessi
ble, de divin et voilà que l'ange était
descendu sur la terre pour y réconfor
ter les hommes malheureux et pour y
semer un peu de joie
Théo Meunier.
A COURTRAI
petite toque relevée d'une bordure
blanche où est piquée une plume, et
d'une démarche souple, elle foule le
quai.
M. le bourgmestre Mayeur l'accueille
et sa fillette est présentée la char
mante voyageuse, les bras chargés de
fleurs.
La Reine gagne bientôt les voitures
qui l'attendent. Elle est accompagnée
de la comtesse Délia Faille de Lover-
ghem du général Blampain, chef de
la police royale de M. Vanderlinden,
administrateur de la liste civile du
commandant Vandenheuvel.
Sept enfants, les yeux éblouis
Le premier seuil que franchit la Rei
ne Astrid est celui d'un humble ou
vrier en chômage, M. Jules Ameye, qui
demeure rue de la Fleur de lin et dont
les sept enfants écoutent sagement les
yeux éblouis, la royale visiteuse qui,
très simplement vient eux.
La scène qui se passe alors et qui
se répéta encore une quarantaine de
fois au cours de la journée dans des
cadres qui différaient fort peu, nous
avons pu y assister.
C'est d'abord de douces paroles
l'usage de la maman et des petits et
il est touchant de voir la Reine s'en
tretenir en flamand. Puis, elle recueille
de la bouche du chef de famille les
nouvelles de sa situation présente.
Et en partant elle glisse une grande
enveloppe armoriée qui contient quel
que secours.
troupe d'enfants et de religieuses, les
Dames ds Saint-Nicolas, qui font ou
blier par un compliment et des fleurs,
cette entorse au programme.
Rue des Gourmands, la Reine pro
longe sa visite chez M. Van Sleteren,
qui a sept enfants, car elle y trouve
de grands invalides de guerre et des
groupements d'anciens combattants qui
lui font fête. Rue Sion, une élève des
Sœurs de la Charité accueille, avec des
fleurs, la Reine qui est reçue dans l'in
térieur de M. Vanhamme aux six en
fants. Avenue Bauduin, M. Vanbams-
hede présente avec fierté ses treize en
fants et rue Bruyning, chez M. Kint-
Verhelst, qui élève neuf enfants, la
gracieuse souveraine embrasse l'une des
petites filles âgée de quatre ans et qui
est la filleule de la Reine Elisabeth.
A travers la campagne encore re
couverte de neige, les voitures gagnent
Mouscron et respectueusement tout le
long de la route, dans les villages, ac
clamations et saluts se succèdent.
A MOUSCRON
Au-delà du passage niveau de la
gare d'Aelbeke, le cortège des autos
stoppe brusquement. Les autorités
mouscronnoises attendent S. M. la
Reine, M. Joseph Vandevelde, bourg
mestre, Les mots de bienvenue rom
pent l'habituelle et rigide forme proto
colaire pour être prononcés par une
gracieuse jeune fille, Mlle Vandevelde.
Le cortège bientôt gagne les premiè-
S. M. LA REINE EN VISITE
CHEZ LA FAMILLE LOGIE-DURNEZ A WERVICQ.
Depuis la visite du regretté Roi Al
bert 1er en 1 929, Courtrai n'avait pas
encore eu l'honneur de recevoir de
membre de la famille royale. Aussi, en
dépit de l'heure matinale il n'est
pas encore 8 heures la foule est-
elle nombreuse sur la place de la gare
et sur les quais...
Une longue acclamation salue l'ar
rivée du train de 8 heures, qui, parti
de Bruxelles 6 h. 50, conduit dans
la cité du lin, la jeune Reine. Celle-ci
descend du wagon royal, attelé au
train. Elle est vêtue d'un manteau de
caracul qui drape élégamment sa très
fine silhouette elle est coiffée d'une
Ailleurs, c'est un bébé que la Reine
Astrid embrassera ou encore la grand'-
maman qui pleure d'émotion et les
longs fuseaux de ses mains de fée
ont le don de faire éclore le sourire
sur les lèvres d'enfants qu'elle caresse
avec une tendresse toute maternelle.
Au dehors, là foule se masse et,
malgré les cordons de police entoure
la Reine qui gentiment envoie des sa
luts de la main.
Dans les rues que paroèurent les
autos de l'escorte, les drapeaux qui
pendent aux fenêtres se multiplient
des milliers de petits exemplaires dans
les mains des enfants des écoles qui
acclament le passage de la longue auto
où, souriante, la Reine fait de petits
signes.
Dans les foyers peuplés
Tour tour la Reine visite les de
meures de MM. Degrandé, cinq en
fants Depré, six enfants Goethals,
six enfants.
En pleine rue Loge-Saint-Pierre, le
cortège doit stopper, bloqué par une
res maisons de Mouscron. Au coin de
l'avenue du Château, la foule est déjà
dense, et crie son enthousiasme sans
arrêt. Les maisons sont pavoisées aux
couleurs nationales, tandis que la po
pulation se presse sur les trottoirs, ac
clamant sans fin l'^iguste visiteuse.
Place de la Station, c'est la très gran
de foule pour une fois, tout le per
sonnel de la gare a déserté ses fonc
tions la Reine est Mouscron, et
comme c'est la première fois que pa
reil événement se produit, les Mous-
cronnois ne se font pas faute de venir
l'acclamer.
Aux côtés de la population, ce se
ront les écoles, les enfants des pen
sionnats, conduits par des religieuses,
et par des prêtres et des Frères, qui
formeront une double haie compacte
de laquelle émergent les cris de Vive
la Reine tandis que des petits dra
peaux sont agités.
La Reine, inlassablement, reprend
Mouscron sa visite parmi les familles
qui lui furent désignées comme étant
les plus méritantes. Elle commencera
par la rue Verte, au-delà de la gare,,
rue essentiellement ouvrière, pour visi
ter la famille Vanlancker, où il y a.
trois enfants, et dont le père est ma
lade. Puis ce sera dans le populeux
quartier du Mont-à-Leux, rue du Pe-
tit-Courtrai, chez Mme Vve Hofman,
mère de six enfants, dont le mari fut
tué le 20 avril 1932 au cours d'une
explosion de chaudière aux usines de
la Tossée, Tourcoing. C'est ensuite
chez M. René Vangrootenbruel, qui,
chômeur depuis trois ans, élève avec
peine cinq enfants.
Le quartier de la Planche retentit
son tour des clameurs de cette foule
désireuse de saluer cette grande da
me qui prend plaisir venir appro
cher les plus humbles de ses sujets-
D'abord chez M. Marcel Vanoosthuyse,
65, rue du Roitelet, où les quatre jeu
nes enfants sont tout intimidés en pré
sence de leur hôtesse.
La Reine intercède
La sortie de cette humble maison
nette sera toutefois marquée d'un in
cident dont nous avons parlé en tête
de cette relation.
A quelques pas de là, square Louis-
Crombecke, la Reine s'arrête chez M.
Octave Hanssens, père de quatre en
fants, chômeur depuis 3 ans, dont la
femme est malade. Elle va encore chez
M. Priesse-Neyrinck, 34, rue du Pro
grès, ménage de 6 enfants, où le père
est chômeur depuis 2 ans puis chez
M. Albert Rogge, 141, rue du Caster,
père de 4 enfants.
Et la Reine va regagner Courtrai,
lorsqu'à ce moment on lui présente
un jeune enfant, de Mme Vandestien-
ne, veuve depuis une quinzaine de
jours, et mère de 9 enfants un di
xième est attendu. La Reine, tout e»
essayant de cacher son émotion, fouille
son sac tapotant en tremblant le vi
sage du petit enfant, elle remet un bil
let qui ne peut manquer d'être le bien
venu dans ce pauvre logis.
La Reine Astrid quitte alors Mous
cron pour Courtrai, où elle déjeuna
chez M. Goethals, commissaire d'arron
dissement.
A MENIN
A 1 3 h. 45, la Reine fend la foule,
qui s'est massée devant la demeura
BILLET DE BRUXELLES
Je lisais dans le SUD qu'Y près comptait'
élever un monument au Roi Albert 1er-
Excellente initiative, c'est l'endroit tout in
diqué pour rappeler aux futures générationr
ce qu'a été notre grand Roi en 1914-18
et je souhaite de tout cœur que ce monu
ment projeté soit digne de lui et de votre-
chère ville. Les monuments aux grands-
hommes n'y abondent heureusement pas*
Je dis heureusement, car depuis la guerre-
il y a partout pléthore de monuments, par
fois même grotesques. Ici Bruxelles il'
y en a tous les coins de rues et cela-
pas depuis la guerre seulement, mais de
puis bien avant. Il y en a de savoureux F
Je ne m'attarderai pas au plus connu Le
plus vieux bourgeois de Bruxelles, Man-
neken-Pis dont je n'ai jamais compris la
vogue Une garde-robe a rendu un mi
nistre jaloux Le monument situé derrière
la Société Générale, représente le Baron
Beyens nu... et désarmé Est-ce assez sym
bolique de le mettre dans cet état derrière
la Banque dont il fut gouverneur Peut*
être même les banquiers partent nus et dé
pouillés dans l'autre monde. Ernest Solvay
devant l'Université libre, tenant la tête en
main comme en proie une violente mi<-
graine Réclame pour les comprimés Vé-
ranémone Notre grand roi Léopold II,
statue équestre au Boulevard, fier sur sa
monture mais... sans képi Je ne savais
pas qu'il était le précurseur de la mode des
sans-chapeaux. Et ainsi de suite... ma pro
menade serait trop longue si je devais tous
vous les décrire. Mais quand vous viendrez
ici pour l'Exposition vous ferez peut-être
des découvertes encore plus amusantes que
ces dernières Attention au monument
qu'on vous érigera diY.pres
Oncle BEP.