LE SUD DANS LE NORD
Léon Grillet
LE SUD, dim. 1 décembre 1935,
i ABONNEMENT 18 francs français.
DE VAN EYCK A BREUGHEL
L'Exposition d'Art flamand, Paris,
est d'un intérêt considérable.
Après l'extraordinaire Exposition d'Art
italien, espérer un vif succès pour les pri
mitifs flamands était pigsqu'audacieux. Pour
tant, la foule est très nombreuse et de qua
lité, chaque matin, chaque après-midi, au
Musée de l'Orangerie (Terrasse des Tuile
ries). C'est une belle visite, et qu'il ne faut
pas oublier.
Les toiles, toutes représentatives d'une
grande époque, et dont certaines sont d'im
périssables chefs-d'œuvre, ont été prêtées
par des musées de Paris, de Bruges, de
New-York, de Lisbonne, d'Amsterdam, de
Bruxelles, de Florence, de Vienne, de Tu
rin, de Lyon, d'Anvers, de Liège, de Caen,
de Douai de Saint-Germain, et par les col
lections prince de Mérode, Bacri, baron Cop-
pée, Férol, comtesse de Jehay, Steinmeyer,
Wilkinson, Schloss, Van der Elst, Robert
de Rotschild, Jean Schmidt, Herbrand,
Frank, Stuyck, del Bruyer etc... L'exposi
tion close, elles se disperseront, elles ren
treront dans les musées, dans les collec
tions particulières on ne pourra les re
voir que grâce une série de déplacements
difficiles...
Chacune mérite une étude. Mais cet ar
ticle ne peut être qu'un peu plus qu'un
guide en ce pèlerinage artistique.
Le vestibule montre, droite, et notam
ment, le Cortège de la mariée et la Mise
en Croix, de Pierre Breughel (1564-1637),
toujours si émouvant parce que toujours vrai,
toujours sincère, parce qu'il ne groupe pas
ses personnages théâtralement, parce qu'il
ne les rend tragiques ou charmants que
grâce des procédés de peintre. A gauche
Saint Luc peignant le portrait de la Vierge,
de Colyn de Coter qui savait que l'église
de Vieure (Allier) possédait cette œuvre
étonnante
Près d'elle, Les Proverbes attribué Breu
ghel le Vieux obtient, par sa gaieté bien
flamande, un succès de public.
La grande salle présente une série de
Van der Weyden, qui révèle beaucoup
de Parisiens ce grand peintre en effet, le
Portrait de Philip de Croy, la Déposition
de Jésus au Sépulcre, la Messe de saint Gré
goire, diffèrent en facture, en émotion, du
Triptyque Braque que nous pouvons ad
mirer au Louvre.
Je ne crois psa que l'on ait jamais groupé
une aussi grande et belle série de cet extra
ordinaire Jean VAN EYCK. C'est devant
un de ses portraits, le plus beau, celui de
sa femme Marguerite, qu'un grand esthète
anglais émit cet aphorisme Un portrait
est toujours autant celui du peintre que
celui du modèle Van Eyck, inventeur,
dit-on tort, je crois), de la peinture
l'huile, en a trouvé, cela est certain, tous
les premiers représentants. Un grand créa
teur flamand. Il vous retiendra peut-être
davantage que le doux, le suave Hans Mem-
ling dont le Saint Sébastien vous paraîtra
singulièrement distrait devant des archers in
différents leur affreuse besogne, et dont
les vierges ne vous édifieront que moyen
nement, tant elles furent imitées. Un maître,
d'ailleurs...
Vous connaissez de Quentin Matsys, au
moins ce Banquier et sa femme qui est au
Louvre et propos duquel on a disserté
autant qu'à propos de la Joconde vous
verrez deux autres toiles, venues d'Anvers
et de Lyon, aussi fines comme facture, pres-
qu'aussi évocatives.
Près de lui, vous admirerez sous son
aspect mystique le grand peintre religieux
du XVe siècle, Hugo Van der Goes, qui
fut aussi un bien remarquable portraitiste.
La première petite salle contient le plus
étonnant paysage de l'exposition peut-être
même de l'époque qu'elle représente L'es
tuaire, de Breughel le Vieux toute la force,
tout le coloris de Ruysdael et quel sens
de l'atmosphère Dans Paysage avec la chute
d'Icare, quelle poésie Ses personnages, mê
me s'il les prend dans l'Evangile, sont tou
jours des Flamands, des Flamandes. Son
délicieux Dénombrement de Bethléem, vous
en avez vu le décor en plus d'un village
belge ses saintes, ses vierges, ses mar
tyres, sont de robustes Brabançonnes, et il
les groupe parfois avec une plaisante fan
taisie. Vous admirerez son Adoration des
Mages, ses célèbres Mendiants, ses Bûche
rons, ses Douze proverbes.
J'ai une prédilection, toute personnelle,
pour Jérôme Bosch. Peut-être parce que
j'ai commis un certain nombre de contes
fantastiques auxquels il eût donné, en les
illustrant, tant de valeur. Le sombre Phi
lippe II aimait, dit-on, les diableries de ce
visionnaire qui a parfois un côté rabe
laisien fort curieux autour de sa Tenta
tion de Saint Antoine, le public de l'Oran
gerie se masse et s'esclaffe. Ses dessins,
dans la deuxième petite salle, valent le prix
d'entrée, eux seuls mendiants, démons,
gueux, fous, montrent son extraordinaire sû
reté de dessin et son imagination. Exami
nez longuement ses toiles, ses dessins étu
diez-les et, mesure, votre admiration
croîtra.
N'oubliez pas Jean Gossaert, dit Jean
de Mabuse un maître au chaud coloris
et dont la manière vous fera quelquefois
penser au Vinci Gérard David, encore un
grand peintre religieux Dierik Bouts, dont
le réalisme vous semblera peut-être tiède
le charmant paysagiste Patinier, Mathias
Cock, et le Maître la vue de Sainte-
Gudule dont la Visite aux prisonniers
est une leçon de mise en scène théâtrale.
La dernière salle renferme des tapisseries
dont la représentation symbolique est
d'une grande beauté, et dont, aussi, les
bordures ont une valeur technique rare.
De magnifiques heures passer...
J. JOSEPH-RENAUD.
Journal de Roubaix.)
LES SEIGNEURS DE FLÊTRE.
(Suite).
Balthasar-Pierre-Félix de Wignacourt,
comte de Flêtre, perdit son épouse, damoi-
selle Constance-Caroline de Ghisthelles, le
31 août 1747. Il devait lui survivre vingt-
cinq ans. En 1756, il manifesta de sérieuses
velléités matrimoniales qui mirent en émoi
toute sa famille et, en particulier, son gen
dre, l'époux de Constance-Polyxène-Reine-
Stanislas de Wignacourt, messire Adrien-
Jean-Baptiste, comte de Clairvaux, gouver
neur du Luxembourg, etc... Ne se dispo
sait-il pas prendre pour épouse légitime
sa servante Catherine Celle-ci avait soi
gné la mère du Comte, se trouvait au châ
teau depuis son jeune âge et était la fille
d'un cordonnier». (Chanoine Damman).
Quelle mésalliance pour un de Wigna
court On eut recours la manière forte
pour parer un tel coup porté l'honneur
d'une famille illustre. La jeune fille fut
enlevée et mise dans un couvent inconnu
du comte. Quant celui-ci il dût prendre
les arrêts de rigueur Ypres
Telle fut la fin de cette aventure.
Balthasar-Philippe-Emmanuel-Charles, fils
du précédent, fut donc le dernier comte de
Flêtre. Plus ou moins atteint dans ses fa
cultés mentales, il dissipa la plus grande
partie de sa fortune. Mais le comte de Lan-
noy, son beau-frère que nous connaissons
déjà, veillait encore. Il le fit interdire par
la Cour de Cassel et placer sous tutelle.
L'acte est du 30 novembre 1786. A la Ré
volution, le comte fut obligé de quitter son
château. Il se retira chez une de ses an
ciennes locataires pour laquelle il avait
toujours éprouvé une grande affection. C'est
chez elle qu'il mourut le 17 octobre 1810.
Sa fortune n'était plus que d'environ trois
mille francs de revenu.
Ainsi s'éteignit sans le moindre rayon 'e
gloire pour l'auréoler une dernière fois, le
nom de Wignacourt dans la troisième bran
che.
On a eu cependant raison de donner la
commune de Flêtre les armes de cette fa
mille d'argent trois fleurs de lis au pied
nourri de gueules (Statistique archéologi
que du département du Nord, Arrondisse
ment d'Hazebrouck, Lille 1863 Armoriai
de l'Arrondissement d'Hazebrouck, par le
chanoine Th. Leuridan, Lille 1907). Elles
rappellent, en effet, tant de siècles de son
histoire, surtout si l'on tient compte que
c'est par alliance et succession que la sei
gneurie passa de la famille van Houtte
la famille de Wignacourt.
ECHO BIBLIOGRAPHIQUE
COMMENT LES SEIGNEURS DE
FLETRE ÊENDAIENT LA JUSTICE.
Nous sommes la fin du XVIe siècle.
Un riche cultivateur de Flêtre nommé Jean
Van Naerden, y exploitait une grande fer
me citée comme modèle de culture. Aussi
Van Naerden était-il fier de la considéra
tion dont il jouissait. Il n'y avait plus nulle
retenue dans son langage, quand il parlait
de son seigneur et surtout de son bailli. Un
jour, il eut avec ce dernier une discussion
des plus vives. Au paroxisme de la colère,
Jean donna un soufflet au bailli, et cela
en présence de plusieurs témoins stupéfaits
de tant d'audace. Peu de temps après, Van
Naerden dut comparaître devant la justice
seigneuriale pour s'entendre condamner
1° se présenter devant le bailli et lui
demander publiquement pardon genoux,
la tête découverte et les mains jointes en
suppliant 2° de plus, faire placer dans
l'église un vitrail représentant l'injure et la
réparation. Le vitrail dont le sujet était la
Résurrection, avait dans sa partie infé
rieure, trois panneaux représentant ce fait
local. Il a été détruit pendant la dernière
guerre. Dans le premier panneau, droite,
on voyait le farouche cultivateur, habillé
d'un justaucorps rouge, donnant un coup
de poing en pleine figure du bailli, revêtu
d'une robe verte sous un manteau violet
revers couleur de fauve dans la baie cen
trale, en voyait la scène du jugement
gauche, c'était l'acte de réparation.
(d'après M. VANHOVE).
FIN
Jules JACQUES L'HEURE H.
Bruxelles, l'Edition Uuniverselle. Paris,
Desclée-De Brouwer et Cie 12 frs belges.
Nous sommes heureux de signaler aux
lecteurs du Sud ce remarquable ouvrage
d un auteur belge qui fait honneur notre
pays et son clergé.
C'est un livre courageux, la documen
tation solide et scrupuleuse, une fresque
brossée larges traits. Toute l'histoire de
l'Humanité, du Paradis Terrestre nos
jours s'y trouve résumée. Ceux qui vou
draient des précisions complémentaires iront
aux ouvrages spéciaux, le but ici était une
synthèse. Il a été supérieurement atteint.
Trop d'historiens nous dit l'auteur
ont donné, sous couleur d'histoire de
l'Eglise, une histoire politique de l'Egli
se. Entre d'une part la prédication des apô
tres, les persécutions, les hérésies des pre
miers siècles et, d'autre part, la grande
crise protestante et les missions, qu'on ne
date tort que de Christophe Colomb, ils
ne voient, dirait-on, que les interminables
difficultés intérieures et extérieures issues
du pouvoir temporel des papes.
L'Eglise est une institution religieuse
sa vraie histoire est son histoire «religieuse».
De quoi s'agit-il aurait dit Foch. II
s'agit de sauver les âmes. L'histoire de
l'Eglise est avant tout l'histoire de son ac
tion surnaturelle, de son influence sur les
idées et les mœurs, de son efficace péné
tration dans les âmes.
Les trois derniers chapitres envisagent nos
devoirs du moment présent.
Quelques politiciens s'ils compren
nent feront leur mea culpa. Nous pour
rions tous faire le nôtre, en quelque façon.
Les ecclésiastiques y trouveront des idées
méditer, tant en vue de sermons pro
noncer que du bien réaliser dans leurs
ouailles.
Bien, un livre extrêmement attachant que
tous tant laïcs que prêtres auront
intérêt posséder dans leur bibliothèque
et relire de temps en temps.
LE SUD est en lecutre dans plus
de cent hôtels et cafés et vous recom
mande
ARMENTIÈRES
A la Douane Française.
Café de la Bourse.
Au Coq Gaulois.
Café Moderne.
Au Prophète.
Estaminet du Bu eau.
BAILLEUL
Café-Restaurant de l'Epi de Blé.
Café Français.
Café de la Paix.
Café de Belle-Vue.
STEENVOORDE
Hôtel de Flandre..
LILLE
Hôtel-Restaurant Alcide.
Hôtel Terminus.
Hôtel Continental.
Hôtel-Restaurant Taverne Lilloise.
HONDSCHOOTE s
Hôtel-RestauTant Corion.
NIEPPE
Estaminet Saint-Eloi.
Café de l'Hôtel-de-ViUe.
m DUNKERQUE
Hôtel des Arcades.
Au Brave Jean Bart.
Café-Restaurant du Vingtième Siècle
Café du Commerce.
BERGUES
La Tête d'Or.
HAZEBROUCK
Hôtel du Nord.
Hôtel St Georges.
Café du Centre.
Hôtel Gambrinus.
au MONT-CASSEL
Hôtel du Sauvage.
Taverne Flamande.
PARIS
Hôtel LUTETIA.
BOURSE CHANGE
COUPONS
31, Rue de Menin YPRES
Téléphone 144.
Bureau ouvert la semaine et le
dimanche.