I
1937.
La Patrie.
Léonard de Selliers.
3e ANNEE No 52.
Hebdomadaire 50 cent, te numéro.
DIMANCHE 27 DECEMBRE 1036.
Pou: une nation soir, il faut qu'une
solidarité nationale existe et qu'elle se cris-
talli-i'» - >ns la volonté du por-oir.
ABONNEMENT 1 AN 20 FRANCS
Directsoo-Admènktrntion Ch. van RENYNGHE,
19, rue Longue de Thonroui, YPRES Compte-chèques postaux 1003.43.
Nos aînés liquident le passé pendai#
que nous construisons l'avenir.
En relisant non seulement ies articles du
SUD, mais ceux que nous écrivions, il y a
dix ou quinze ans dans l'Autorité, comme
ceux de la Revue Catholique, de la Vie
Intellectuelle, de l'Esprit Nouveau, et d'au
tres encore nous constatons que la courbe
<ie l'évolution politique de notre pays est
fatale, logique, et nous ne comprenons pas,
première vue, que des hommes que nous
supposons sincères et loyaux, puissent y faire
-obstacle.
Et puis la réflexion nous devons recon
naître, que cette opposition est salutaire.
On ne peut affirmer sa force que dans la
lutte. Une évolution politique profonde qui
ne rencontrerait pas une opposition violente,
qui ne connaîtrait pas l'épreuve du feu
qui n'aurait pas vaincre des adversaires dé
cidés, n'aurait pas l'entraînemeht nécessaire
pour prendre son tour la direction des af
faires publiques normales si elle accomplit
son devoir... d'opposition.
Les partis politiques ont mille fois raison
de se défendre, et de tirer chaque instant
leur dernière cartouche. Ils défendent une
mauvaise cause, mais ils la défendent avec...
un esprit corporatif que nous ne pouvons
qu'admirer. Ce n'est pas LE régime, mais
LEUR régime qui fait l'objet de toute leur
tendresse. Ce régime que nous décrivions en
décembre 1934 Quand l'égoïsme a pu
s'emparer de toutes les ficelles d un systè
me queUu'il soit, et quand les hommes qui
occupent le pouvoir ne rencontrent plus
aucune opposition susceptible de freiner cet
•égoïsme, on a coutume de dire que ce ré
gime est pourri.
Les politiciens des partis traditionnels
doivent reconnaître que depuis lors le rex-
isme leur a rendu le service immense de
•créer une opposition vigoureuse, et le mee
ting de vendredi dernier la Madeleine,
■où Bovesse, Rubbens et Spaak se lancèrent
mutuellement des fleurs, témoigne des ver
tus miraculeuser, d'après l'Indépendance
et qui certes n'eussent jamais vu le jour
sans l'action de REX.
Après avoir opposé les Belges en clans
ennemis, après avoir dressé haineusement
les libéraux contre les catholiques, les dé
mocrates-chrétiens contre les socialistes, les
Flamands contre les Wallons, après avoir
exploité pendant un siècle les luttes partisa
nes. les chefs politiques viennent candide
ment dire la masse Tout cela n'était
que sabotinage. Il a suffi que REX inter
vienne dans le débat pour que nous nous
sentions tous frères, et comme l'a déclaré
Edmond Rubbens Notre collaboration est
réellement étroite et intime homogène et
cordiale, et sur le plan que nous avons choi
si (la frousse?), nous communions dans
un même esprit, nous possédons une même
volonté, nous sentons un même désir et
nous travaillons pour un même devoir.
Nus conseillons nos lecteurs, pour leur
soirée de réveillon, de mettre en scène les
dirigeants catholiques, libéraux et socialis
tes de leurs arrondissements respectifs, et
d'imaginer ce que pourrait cette communion
spirituelle dont parle ingénument ce brave
Edmond Rubbens.
Nous écrivions fin décembre 1935 Le
pays est miné par ce petit orofiteurisme et
cette triomphante médiocrité qui paralyse
oute vie dans la Nation. Et nous ajoutions
au point de vue économique Le redresse
ment économique n'aura de stabilité que
quand les individus s'organiseront par mé
tiers, par professions, par production, par
corporation. La corporation organisée et libre,
dans un Etat fort.
Envisageant les élections de 1936, au
moment où il n'était pas encore question
•pour le rexisme d'entrer dans la compétition
électorale, nous ajoutions Politiquement
c'est le chaos. Les grands partis politiques
sont ébranlés. La coupe des mensonges élec
toraux déborde. Les mandataires n'ont plus
aucun contact avec les électeurs. On attend
le chef, ou l'aventurier audacieux et volon
taire. C'est la fin logique de toute décom
position politique. En 1936 nous aurons
des élections. Les partis sont ouverts, et tous
se p>enchent avec curiosité au-dessus de cette
boîte aux surprises.
Le personnel politique sera renouvelé
Importance toute relative d'un problème
mal posé. Il s'agit moins des hommes que
du régime. Or le régime ne peut se transfor
mer en remplaçant 20, 30 ou 40 du
cadre actuel. C'est un cadre nouveau, aux
idées neuves, complet, qui doit se substituer
au cadre ancien déformé.
Et dans le premier numéro de cette année,
déterminant l'attitude du SUD, nous écri
vions cette phrase que les événements ont
admirablement illustrée Notre programme
en Westflandre en 1936 de la netteté.
Et au nom de qui Du Pays réel de l'élec
teur contribuable, du belge exploité sans
vergogne par le politicien professionnel
Avons-nous, oui ou non, tenu promesse
1937 sera la lutte épique du syndicat des
politiciens contre ceux qui veulent libérer
le pays de l'emprise des comitards. Mais
cette lutte fatale ne doit pas nous faire per
dre notre temps. Laissons nos aînés le
soin de liquider ce p>assé, mais avant tout
construisons l'avenir. Travaillons d'arrache-
pied l'organisation corporative du pays
en tout et partout n'ayons qu'un objectif
la grandeur du pays, la création de cette
solidarité nationale, que les politiciens sou
haitent actuellement, mais qu'ils ont ren
due irréalisable cause de leurs querelles
et de leurs dissensions.
Les politiciens se sont trop longtemps
imaginés que le pays était une chasse réser
vée quelques messieurs d'opinions diver
ses, qui se querellaient pour la forme, mais
qui en fin de compte se retrouvaient tou
jours autour de l'assiette au beurre. Pour
conserver leurs places ils entretenaient des
querelles stériles et fratricides. Pour conser
ver les mêmes places ils déclarent s'aimer
soudain, miraculeusement, d'amour tendre.
On ne les croyait plus quand ils étaient
divisés. On ne les croit guère plus quand
ils se disent unis. Le peuple belge a une
éducation politique suffisante que pour se
passer des conseils de ces hommes qui n'ont
leur actif que leurs discours et... leurs
erreurs. La volonté nationale se cristallise
autour d'un homme et d'un programme pour
la conquête du pouvoir conquête légale,
constitutionnelle, volontaire et joyeuse.
Dans chaque arrondissement une petite
En Belgique, il existe une notion de
patrie propre certains milieux, étroite,
fabriquée, abstraite et conformiste. Elle
coïncide assez exactement avec l'orga
nisation présente de l'Etat belge et elle
a pour effet ou tout le moins pour
objectif de préserver cette or
ganisation de l'Etat de toute atteinte
et de tout bouleversement. Celui qui,
tout en portant beaucoup d'intérêt
ses concitoyens et en manifestant un
extrême respect de la haute Réalité de
la Patrie, ose prétendre qu'à cette pa
trie, il conviendrait de donner un autre
statut juridique et administratif, est aus
sitôt honni par ces bien-pensants du pa
triotisme. Il devient un traître et on le
voue aux gémonies.
Sans doute convient-il de faire preuve
de beaucoup de circonspection, lors-
qu on s'en prend des objets aussi im
portants que l'organisation de l'Etat. Il
ne s'agit pas, pour un caprice ou une
insatisfaction sentimentale, de vouloir
tout chambarder. Mais la prudence
n'exclut évidemment pas le souci d'a
dapter de plus en plus fidèlement l'or
ganisation juridique de la Patrie la
réalité vivante et concrète de la Patrie.
Car enfin, la Patrie est plus qu'un
mot ou qu'une idée. C'est, avant tout,
des hommes vivant ensemble. Aimer la
Patrie, c'est aimer ces hommes et ména
ger le cadre de leur existence de la fa
çon qui convient le mieux leurs aspi
rations profondes. Cela peut déplaire
aux détenteurs exclusifs du patriotisme
abstrait et fabriqué. Mais il faudrait
examiner d'abord leurs titres au mono
pole. Ils ont déclaré la patrie, c'est
ceci et tout ce qui n'est pas conforme
leur image de la patrie, est rejeté.
Heureusement, la réalité finit tou
jours par l'emporter sur les chimères et
les ersatz la patrie vivante sera plus
forte que les abstractions priori des
idéologues.
Certains poussent plus loin le souci
de la conservation. Ils veulent identifier
la Patrie au misérable régime qui gou
verne l'Etat. Ce régime leur étant pro
fitable, ils le proclament sacré, intan
gible et prétendent rejeter hors de la
communauté nationale ceux qui se pro
posent de le transformer.
L'homme conclut ainsi volontiers des
pactes avec les créations les plus fra
giles de l'histoire. Il refuse de consi
dérer les réalités dans leur plénitude
pour s'attarder amoureusement leurs
reflets passagers.
Mais, toutes les époques, des hom
mes se lèvent qui se font les artisans
de l'Histoire et conduisent les peuples
leurs destins. De tels hommes ne man
queront pas la Belgique dans le temps
présent.
Quelques-uns ont déjà répondu
l'appel.
José STREEL
Le Musée de la Ville d'Ypres vient
d'acquérir des aquarelles, que nous
avions exposées plusieurs reprises au
Merghelynck. Avouons-le le jour où
nous découvrions chez ce charmant et
délicat gentilhomme qu'est l'aquarel
liste de Selliers, ces documents évoca-
teurs de vieil Ypres, qui par leur facture
fidèle et leur frais coloris sont des piè
ces de valeur, nous étions convaincus
de la joie que les Yprois éprouveraient
en retrouvant dans les murs de leur
ville ces évocations du passé.
Cette joie contemplative est devenue,
après plus d'un an, active Les visiteurs
oligarchie tient tout en mains. Contre ces
dicateurs locaux des trois grands partis le
peuple se révolte. En 1938 ce peuple émettra
son verdict. Mais cette fois le coup de ba
lai sera le dernier acte d'un longue et mé
thodique préparation, et non plus une sou
daine réaction. Au nom d'une tradition sé
culaire de liberté, en 1938 nos communes
de Westflandre secoueront le joug des par
tis politiques. En 1937 les citoyens indépen
dants se consacreront la préparation de
cette œuvre libératrice, devenant ainsi, en
plein vingtième siècle, les nouveaux com-
muniers flamands
C. v. R.
du Musée de la Ville d'Ypres s'arrê-
teront volontiers devant cette série de
neuf aquarelles, et seront reconnaissants
la commission du Musée de cette ac
quisition, qui fut facilitée grâce la
participation d'un généreux anonyme.
Léonard de SELLIERS,' frère du
Lieutenant-Général de Selliers de Mo-
renville s'est formé lui-même. Depuis
son tout jeune âge, il dessina'it. Ses
études et sa carrière d'ingénieur ne par
vinrent pas étouffer la vocation de
l'artiste.
Vers la quarantaine, la fin du siè
cle dernier, il reprit les pinceaux, et
depuis lors se consacra tout entier
son talent. Une de ses premières œuvres
existe encore c'est une aquarelle de
l'Abbaye /de Part près de Louvain.
exécutée dix-sept ans, et qui est déjà
d'une facture remarquable.
Tour tour, il passe du dessin
l'eau forte de la peinture l'huile
l'aquarelle, ou même la gouache. Mais
il s'attarde plus volontiers l'aquarelle
dans laquelle il est passé maître.
Appartenant l'école minutieuse
d'avant-guerre, il cherche avant tout
serrer la réalité de près, produire
exactement la nature, avec le plus de
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