La betterave sucrière
L'agriculture et la Finance,
DE COENE FRÈRES
13
LE SUD, dimanche 17 janvier 1937.
(Suite de /a Ire page)
Cet aveu est un camouflet lancé la
face du régime. Le régime depuis des
annéespouvait intervenir comme l O-
REC tente de le faire actuellement. Le
régime connaissait la situation faite aux
planteurs depuis des années. Pourquoi
ceux qui prétendent maintenant s'occu
per de l'agriculteur le Boerenbond et
le parti socialiste, ne sont-ils pas inter
venus Parce qu'ils étaient pieds et
poings liés par la Finance. Ils étaient
impuissants ou domestiqués. REX ayant
secoué le joug de la Finance permet
au Ministre de l'agriculture et l'O-
REC d'étudier le problème avec une
certaine indépendance. Sans REX cela
n'existerait pas.
Que les agriculteurs lisent cet arti
cle de Delvaux, et ils constateront l'ex
actitude absolue des articles que vous
avons publiés dans LE SUD et dans
REX-AGRICOLE en mettant le doigt
sur la plaie. Les aveux et les coups d'en
censoir de Delvaux n'y changeront rien.
Les planteurs de betteraves doivent
l'action du rexisme l'amélioration de leur
situation... si la comission aboutit.
Nous ne cesserons de suivre, dans l'in
térêt des agriculteurs, l'évolution de cet
te question agricole, qui est une ques
tion nationale.
Si l'action de REX s'affaiblissait la
défaite serait certaine. Il nous suffira
pour le prouver de citer après l'article
optimiste du Vingtième Siècle ce
lui plus critique de la Libre Belgi
que Mais que notre confrère se ras
sure REX veille au grain et les su
criers, cette fois, ne pourront plus ex
ploiter l'agriculteur et le consomma
teur.
Ch. van RENYNGHE
Dans le Vingtième Siècle
Le monde agricole vient d'apprendre,
avec la plus vive satisfaction, que l'O-
rec a décidé de confier l'étude du pro
blème sucrier une commission spécia
le.
Celle-ci est constituée par l'ancienne
commission sucrière élargie. Elle est pré
sidée par M. Pierlot, ministre de l'Agri
culture elle compte de hauts fonction
naires des Finances et des Affaires Eco
nomiques, les. délégués des planteurs de
betteraves et des fabricants de sucre, un
professeur des Instituts agronomiques'
de Louvain et de Gembloux, et quelques
parlementaires. Elle a tenu sa première
réunion le mercredi 23 décembre pour
élaborer son plan de travail.
Ceux qui ont suivi, depuis des an
nées, l'évolution du problème sucrier en
Belgique comprendront immédiatement
importance et la portée de cette déci
sion.
Jusqu ici, seules, les difficultés des
planteurs de betteraves avaient été exa
minées et cette méthode ne pouvait évi-
iemment aboutir qu'à des solutions
fragmentaires et très incomplètes. Pour
la première fois, le problème est posé
dans son ensemble d'une part, la si
tuation des planteurs de betteraves, et
d autre part, celle des fabricants de su
cre. Il sagit de normaliser les rap
ports entre les deux parties.
Il faut dire parce que c'est la vé
rité depuis de nombreuses années,
les fabricants de sucre ont eu une po
sition de force l'égard des planteurs
de betteraves. Or, le gouvernement, qui
consacre chaque année plus de 220 mil
lions de francs la protection du sucre,
a bien le droit d'examiner, dans les
moindres détails, l usage qui est fait de
ces sommes. Il en a même le devoir,
car il est le gardien du bien commun.
On peut supposer et ceci n'est pas
une supposition purement gratuite
que les fabricants de sucre se sont ré
servé la part du lion dans cette protec
tion. On veut, semble-t-il, avoir tous les
renseignements nécessaires une con
naissance très complète de la situation
des fabricants de sucre très peu con
nue, par exemple en matière de prix de
revient comme de celle, bien connue
déjà, des planteurs de betteraves.
Avant de décider de nouvelles mesu
res en faveur de la betterave, comme
une nouvelle ristourne du droit d'accise,
qui affecte le Trésor, le Gouvernement
veut vérifier s'il n'y a pas d'autres
moyens de soutenir les planteurs, par
exemple en leur assurant une part plus
grande des mesures existantes dans
leurs recettes provenant de la vente des
produits, de tous les produits, extraits
d'une tonne de betteraves.
M. Pierlot, ministre de l'Agriculture,
a déclaré, en ouvrant les travaux de la
commission En réunissant cette com
mission et en entreprenant ces travaux,
le Gouvernement affirme sa volonté de
prendre toutes les mesures qui, pour
autant que cela dépende des pouvoirs
publics, sont de nature rendre la cul
ture betteravière rénumératrice dans des
conditions normales de production.
Ceux qui connaissent M. Pierlot sa
vent ce que peuvent signifier sur ses
lèvres avoir la volonté de réaliser
quelque chose.
Certains paraissent déjà l'avoir très
bien compris. Il nous, revient que, de
puis quelques jours, des fabricants de
sucre offrent aux planteurs, des prix
et des conditions pour la prochaine ré
colte. nettement supérieurs ceux des
années antérieures.
Est-ce une première conséquence de
la création de la Commission de l'Orec,
ou encore une des manifestations de l'a
dresse consommée de ceux qui dirigent
de main de maître le monde sucrier
belge L'avenir nous le dira. Nous y
voyons en attendant, la meilleure preuve
de l'importance de la commission et
de la conception, complètement nouvelle
et adéquate aux réalités, qu'elle se fait
de son travail.
D'aucuns penseront peut-être que
nous exagérons. Ce n'est pas dans nos
habitudes. En effet, est-il exagéré de
définir comme suit la sucrerie belge de
puis plusieurs années prendre les bette
raves, faire du sucre, déduire tous les
frais et un certain bénéfice ou plu
tôt un bénéfice certain et donner le
reste aux planteurs. Les frais de report
du sucre sont même la charge des
planteurs. Est-il exagéré de dire, qu'au
cours de la dernière campagne, les fa
bricants de sucre n'ont pas payé aux
planteurs, par tonne de betteraves li
vrées, l'équivalent de la protection su
crière En effet, la tonne de betteraves
contient peu près 135 kgs. de sucre,
et comme la protection est de 100 fr.
par 1.000 kilos de sucre, la protection
sucrière est de 135 francs par tonne de
betteraves. Or, les planteurs n'ont pas
reçu, ou ne recevront pas. des fabri
cants de sucre, 135 francs par tonne de
betteraves. La matièœ première les
betteraves est donc livrée pour rien
par les planteurs aux fabricants...
N'est-ce pas paradoxal
Il y aurait beaucoup dire sur ce
sujet, et nous devons, aujourd'hui, nous
limiter quelques remarques caracté
ristiques.
Il est anormal, par exemple, de voir
actuellement des sucreries la frontière
hollandaise ou française par exemple
celes de Lillo, Moerbeek et Quiévy
destinées travailler des betteraves
étrangères, alors que le Gouvernement
doit les soutenir avec la collaboration,
lourde et ckc-? des planteurs belges.
Il y a là une réforme qui s'impose au
point de vue industriel. Et que dire au
point de vue de la modernisation des
usines Il ne faut pas que le produc
teur de betteraves qui l'on conseille
toujours de réduire son prix de revient
supporte la déficience des usines. Il
finirait par croire, et il aurait en grande
partie raison, qu'il joue un jeu de du
pes, car l'opinion publique le rend comp
table de l'odieux d'une protection, dont
il ne recueille, en définitive, qu'un
mince bénéfice.
Cette situation doit cesser la com
mission qui vient de commencer ses tra
vaux peut, si elle veut, mettre de la
clarté dans ce domaine de notre vie
économique et de notre économie agri
cole. De la clarté et de la justice dis-
tributive chacun son dû.
Ce que les planteurs de betteraves ont
toujours demandé avec insistance, c'est
d'établir une collaboration avec les fa
bricants de sucre. Leurs intérêts sont
communs. Ils constituent ensemble un
secteur important de notre vie écono
mique. Mais cette collaboration doit être
réelle et équitable. Elle n'a pas été réa
lisée encore. Les rapports des deux par
ties doivent être normalisés
Il ne faudrait pas croire que la Bel
gique est le seul pays qui soutienne et
qui défende son marché sucrier. L Alle
magne, la France, la Hollande, la Tché-
co-Slovaquie, et même l'Angleterre,
nous montrent l'exemple. Nous suivons,
et de loin.
On doit applaudir cette initiative
de l'Orec. Elle constitue une des pre
mières manifestations des réformes pro
fondes et nécessaires, qui doivent avoir
pour résultat de normaliser, le plus tôt
possible, les rapports de l'agriculture
avec les industries, qui utilisent et trans
forment ses produits ou qui l'approvi
sionnent en matières premières. C'est
une condition essentielle au renouveau
économique en agriculture.
Louis DELVAUX
Et dans La Libre Belgique
La culture de la betterave est actuel
lement peu rémunératrice. Elle a comme
compensation le fait d'être jointe nor
malement celle des céréales, actuelle
ment bénéficiaires. Néanmoins, on in
siste, dans les milieux agricoles, pour
que les pouvoirs publics augmentent la
protection sucrière.
Mais aavnt d'agir il importe que les
milieux responsables ne cèdent aucune
pression, d'où qu'elle vienne et qu'ils se
défient surtout des manœuvres auxquel
les ne manqueront pas de se livrer quel
ques hommes politiques ayant des atta
ches étroites avec les fabricants de
sucre.
Selon ce que nous apprend un cor
respondant occasionnel, il serait ques
tion de permettre aux sucriers de ven
dre leur sucre raffiné vingt francs plus
cher sur le marché belge qu'à l'expor
tation. Le seul profit en restera quel
ques magnats sucriers qui ont établi
leurs usines dans le sable des dunes ou
des polders hollandais.
Depuis qu'a été tranchée dans un
sens absolument contraire aux intérêts
des planteurs belges, la question des
sucres congolais, nous avons de bonnes
raisons de nous défier.
UN PANNEAU DE DENTELLE
L'art de la dentelle est un des plus
anciens, des plus renommés parmi tous
ceux qui ont fait la gloire des artisans
belges. Les fragiles chefs-d'œuvre ont
traversé les siècles, par un miracle iden
tique celui qui les fit naître. Et de-
tant la délicatesse s'y marie la per-
res nuptiales, ces aubes, ces jabots
tant la délicatesse s'y marie la per
fection on hésite croire que ces
merveilles sont dues des vieilles fem
mes, maniant leurs fuseaux au seuil de
leurs logis, des jeunes filles assises
dans la tiédeur quiète d'un béguinage.
Pour représenter la dentelle l'Ex
position de Paris 1937, le commissa
riat général du Gouvernement belge
a confié la Chambre Syndicale des
Dentelles, des Tulles, etc., l'exécution
d'un panneau de dentelle l'aiguille.
Ce travail, de la qualité la plus fine,
mesure 1 m. 80 sur 1 m. 20 le des
sin, créé par M. Victor Stuyvaert, a été
conçu pour sa destination, c'est-à-dire
en tenant compte de la technique (la
même depuis des siècles) qu'emploie
la dentellière de nos provinces.
C'est un jardin féerique, une ma
nière de paradis terrestre, que Victor
Stuyvaert propose comme thème l'a
dresse de nos artisans. Un grand arbre
jaillit au centre du panneau nés de
son tronc robuste, des rameaux s'ou
vrent en bouquets, fleurissent en éven
tail de palmes. Des végétaux.fantas
tiques poussent alentour des merveil
leux oiseaux animent la forêt de leurs
aigrettes légères, de leurs ailes décou
pées, de leurs queues ocellées comme le
manteau des paons. Des animaux gra
cieux bondissent sous les branches
tels des daims ou des gazelles leurs
cornes sont pareilles des aigrettes
aussi.
Des canards, des poissons naviguent
sur les eaux d'une riivière qui sourd
d'entre les racines les fleuves de
l'Eden sortent ainsi du pied de l'Arbre
de la Science. L'artiste s'est inspiré des
légendes orientales que les livres de
tous les peuples nous ont transmises et
qui hantèrent les songes des ouvrières
brugeoises, l'ombre de l'étrange église
de Jérualem, élevée jadis par deux
frères qui s'en revenaient, éblouis, d'un
pèlerinage en Orient.
Trente dentellières, choisies parmi les
plus habiles, travailleront, ce pan
neau qui sera sans nul doute
l'un des clous de la Section belge
l'Exposition de Paris 1937.
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