Supplément
illustré du
25teptembre
1938
Dans l'artisanat: LA FOURRURE.
L'atelier Vandevoorde
Ypres.
No 7.
Parmi les différentes formes de l'acti
vité économique, il est certain que l'éco
nomie belge doit s'orienter avant tout
vers la production artisanale. Et la ré
gion du Sud de la Flandre, plus que
toute autre, a comme fondement écono
mique le courant commercial qui s'éta
blit tout naturellement entre la popula
tion agricole et l'artisanat urbain. Faut-
il une fois de plus insister sur le dan
ger des faiseurs de plans, qui, l'esprit
orienté vers la théorie, détournent leur
activité des solutions fragmentaires,
mais pratiques.
L'artisanat a de grands avantages
économiques, et aussi d'heureuses con
séquences sociales. C'est ce que nous
nous efforcerons d'exposer nos lec
teurs au cours des nombreux interviews
que nous prendrons chez ceux, qui sont
les moteurs de la vie de nos cités, les
chefs des petites industries artisanales,
qui transforment dans leurs ateliers la
main d'oeuvre locale en main d'oeuvre
spécialisée, et ajoutent ainsi une valeur
incontestable au travail.
Commençons par l'artisanat de la
- -J
répond-il. J'ai débuté en ouvrant un
petit magasin, 7, rue de la Station, et
en ayant comme tout personnel trois
garnisseuses non stylées. Car j'ai été
obligé de former moi-même tout mon
personnel. C'était en 1922 presque
dans les ruines d'Ypres. Trois ans plus
tard, étant parvenu former un pre
mier noyau d'ouvrières je me suis in
stallé l'adresse actuelle, 31, rue au
Beurre.
La main d'oeuvre locale n'était
cependant pas facile trouver cette
époque de reconstruction et en plein
épanouissement de l'indusrtie fronta
lière.
De fait. Mais c'est précisément
la valeur et la solidité de l'entreprise
artisanale l'embauchage y est lent et
méthodique. Notre atelier n'a embauché
que petit petit la main d'oeuvre né
cessaire, et l'a complètement formée.
Ce sera d'ailleurs l'objet de ma fierté
d'avoir ainsi créé ce noyau de techni
ciens qui déjà en 1930 a emporté la
plus flatteuse des distinctions le di
plôme au Concours National de l'ar-
Deux aspects de l'atelier de Vandevoorde.
fourrure, si vous le voulez bien. Car
nous avons ainsi l'occasion d'interroger
homme qui par son esprit d'initia
le et sa ténacité est parvenu faire
naître et grandir une solide affaire de
famille. II s'agit de M. Florimond
vandevoorde.
Port aimablement accueilli par M.
vandevoorde, dans un home logique
ment approprié l'article de luxe qui
la base de son commerce, nous
'ni demandons d'abord quelles sont les
0riginea de son affaire.
tisanat, où notre atelier fut seul pou
voir mettre en ligne les trois équipes
nécessaires, pour assurer le cycle com
plet du travail les coupeurs, les pi-
queuses et les garnisseuses. A ce con
cours huit membres de notre personnel
ont été diplômés.
C'est là tout le mérite et le pres
tige de l'industrie artisanale arriver
la maîtrise, au beau travail, la pièce
finie. Rien n'ennoblit plus le travail.
Mais si je ne me trompe vous avez eu
des dépôts dans toute la province.
moments jusqu'à neuf dépôts. Ceux-ci
n'ont jamais été destinés subsister.
C'était une méthode de prospection de
la clientèle, qui s'est montrée très effi
cace. Une fois la clientèle acquise la
maison, et connaissant le chemin de la
maison-mère, nous pouvions supprimer
le dépôt, et la clientèle nous est fidèle
ment restée acquise.
br!':s pièces pour la clientèle d'élite.
Ces modèles sont particulièrement étu
diés, et non seulement nous nous assu
rons la collaboration des créateurs con
nus, notamment de ceux de Paris, mais
nous veillons même avoir des modè
les qui restent notre exclusivité, et qui
garantissent par conséquent aux ama
teurs de belles pièces, de ne pas re-
L atelier de Vandevoorde.
Elles sont bien modestes, nous Oui. Nous comptions certains
Je vois que vous avez des con
ceptions commerciales up to date et
je vous en félicite. Permettez-moi de
vous poser une question peut-être in
discrète. Dans toute industrie l'élément
premier du succès réside moins dans
l'art de vendre, que dans celui de bien
acheter la marchandise que l'on trans
forme. J'ai l'impression qu'il doit sur
tout en être ainsi dans la fourrure.
Cette question n'est pas indis
crète, car c'est même le principal argu
ment que nous utilisons pour faire com
prendre notre clientèle la valeur de
la marchandise que nous lui offrons.
Voyez ce que nous écrivions dans un
de nos prospectus La maison s'ap
provisionne directement sur les marchés
européens de la fourrure. C'est par bal
lots entiers que les peaux brutes les
plus précieuses et les plus variées, ache
tées par nous-mêmes aux conditions les
plus avantageuses, arrivent dans nos
ateliers. Travaillées sur place, elles sont
ensuite directement livrées notre clien
tèle. C'est le secret de la prospérité
de la maison, ...mais un de ces secrets
que nous divulguons bien volontiers
Une dernière question. Votre ar
ticle est fortement soumis la mode.
Cela doit poser deux problèmes celui
du renouvellement de vos stocks et ce
lui de la création des modèles.
Le renouvellement des stocks
n'est pas un problème trop compliqué,
quand le courant d'affaires est suffi
sant car une grande partie des mar
chandises r— daris 1a caténorie
classique Evidemment il faut avoir
les nouveautés et les beaux modèles.
trouver le même modèle venant d'au 1res
maisons.
Je crois, M. Vandevoorde, que
votre effort tenace et couronné de suc
cès est une précieuse indication, et
prouve, aux jeunes qui désirent travail
ler, que l'industrie artisanale apporte
le succès condition que l'on s'y con
sacre avec compétence et avec toute son
énergie. Vous avez certainement con
staté que le commerce yprois dépendait
essentiellement de deux facteurs la
prospérité de l'agriculture et l'activité
touristique.
Vous avez mille fois raison. On
peut tout entreprendre et tout réus
sir Ypres, condition que l'on ne
oerde pas de vue ces vérités essentielles.
En parcourant le dernier supplément du
SUD consacré au houblon, je faisais
cette réflexion le houblon et la four
rure deviennent dans une région comme
la nôtre quasi des industries complé
mentaires Quand le houblon va, la
fourrure va et quand le tourisme, et
surtout le tourisme français s'oriente
vers Ypres. tout le commerce yprois ea
profite largement.
Et nous quittons M. Vandevoorde en
le remerciant non seulement pour cet
interview ou'il a bien voulu nous accor
der au seuil de la saison de la four
rure. mais aussi pour les beaux clichés
qu'il nous a aimablement offerts pour
illustrer un numéro, qui plaira surtout
aux charmantes lectrices du SUD.
i C. v. R.