L'Europe convalescente
A la frontière du Instantanés.
Sud-Est.
4me ANNEE No 41.
Hebdomadaire 90 cent le numéro.
DIMANCHE 9 OCTOBRE 1938.
Pour qu'une nation soit, U faut qu'une
solidarité nationale existe et qu'elle se
cristallise dans la volonté du pouvoir.
ABONNEMENT, 1 AN 20 FRANCS.
Direction-Administration Ch. van RENYNGHE,
19, rue Longue de Thourout, YPRES. Compte-chèque postaux 1003.43.
Nos aînés liquident le passé pendant
que nous construisons l'avenir.
M. Chamberlain a triomphé du mal,
mais il a pu juger de l'état d'effrayante
faiblesse de la patiente. Faiblesse telle
qu'elle faillit rester dans l'opération.
Mais la vie a repris le dessus, et une
convalescence longue et entourée de
soins délicats s'impose. Car de nom
breux organes sont atteints dans le
corps de cette pauvre vieille Europe,
et d'autres organes ont une telle vita
lité qu'un déséquilibre est craindre.
La paix européenne dépend de nom
breux facteurs. Et le premier de ceux-
ci est la volonté de l'Angleterre. Or,
chose que nous avons soulignée dans
LE SUD, l'opinion publique britanni
que, réaliste, consentirait sans trop de
difficultés intervenir en Europe pour
mettre Hitler la raison, si celui-ci
n'apportait pas dans ses discours et dans
ses actes la preuve bien tangible, de ce
qu'il permettra l'avenir aux hommes
d'affaire de traiter paisiblement leurs
affaires. L'obstacle une reprise éco
nomique,' qui intéresse particuièrement
les hommes de la cité, est 1 insécurité
dans l'avenir, la crainte d'un conflit
continental. Et Hitler a mis les nerfs
de l'homme d'affaires anglais fleur
de peau. Ce qui est tout la fois un
record et un immense danger.
Chamberlain l'a si parfaitement com
pris, qu'avant de quitter Munich il a
signé laccord Chamberlain-Hitler, afin
de pouvoir, en compensation des abdi
cations évidentes devant la force alle
mande, apporter l'opinion anglaise la
certitude qu'à l'avenir tout différend en
tre l'Angleterre et l'Allemagne sera ré-
$lé par voie de discussion et sans faire
appel la violence. Hitler cesse d être
l'homme qui agite le spectre de la
guerre devant les hommes de la Cité.
11 permet que l'Angleterre demeure le
centre financier du monde, et renoue
les relations commerciales longue
échéance avec les pays lointains de
l'Empire britannique.
Et de son côté Hitlelr a également
compris ce que Chamberlain a dû lon
guement lui expliquer. En effet le texte
de son premier discours est incontesta
blement conçu pour frapper 1 esprit an
glais, et ce n'est pas le hasard qui lui
a fait employer cette phrase Main
tenant tout le monde, en Allemagne et
ailleurs, pourra célébrer en paix la fête
de Noël. L'opinion anglaise compren
dra admirablement cette phrase, et il
en résultera une grande détente des
esprits dans l'Empire britannique. Car
d'ici la Noël il faudra discuter et ré
soudre de nombreux problèmes. Mais
ces conversations et ces discussions
n'empêcheront point que dans le mon
de entier on fête avec bonheur un Hap-
Py Christmas.
Nous étudierons dans un prochain
article le problème de l'influence alle
mande en Europe centrale. Mais le se
cond élément immédiat qui doit assu-
rer une heureuse convalescence 1 Eu
rope, c'est le redressement français.
Et là nous nous trouvons devant des
difficultés autrement graves.
Nous nous trouvons devant des chif
fres. Les malheureux idéologues qui ont
gouverné la France pendant deux ans
ont complètement épuisé ses forces. Il
faudrait un régime de fer pour opérer
le redressement français, pour réparer
les erreurs de politiciens irresponsables.
N'y a-t-il pas là un spectacle odieux.
Des hommes ont le droit, simplement
pour satisfaire leurs ambitions politi
ques, de conduire un peuple la ruine,
en bourrant le crâne aux électeurs. Ils
ont le droit de tuer leur pays coups
d'arguments démagogiques. Et quand
la patrie se traîne lamentablement,
épuisée par leurs agissements criminels,
ces Messieurs offrent au Président de
la République leur démission, et vivent
luxueusement de leurs plantureux re
venus personnels. Splendidement et cri
minellement irresponsabes
Les chiffres sont là. La fortune fran
çaise a perdu 60 de sa substance.
Le déficit budgétaire dépasse 50 mil
liards. L'Etat continue augmenter ce
déficit la cadence d'un milliard par
semaine. Le gouvernement a demandé
les pleins pouvoirs pour opérer ce re
redressement. La paix européenne pos
tule une France saine. Il n'est plus ques
tion d'une France forte, car il faudra
plus d'une génération avant de cicatri
ser les plaies profondes de la facilité
démagogique de l'après-guerre et de la
folle gabegie du Front Populaire. Mais
une France troublée, dont le budget ne
serait pas en équilibre, une France qui
servirait de dernière carte dans le jeu
révolutionnaire de Moscou, serait une
cause certaine et immédiate de guerre.
Pour sauver la France il faut de
l'audace, beaucoup d'audace. Il faut une
volonté inébranlable. Il faut une disci
pline de fer. Le gouvernement français
aura-t-il le courage et l'énergie d'im
poser au pays les mesures indispensa
bles son salut Aura-t-il le courage
d'utiliser éventuellement la force? Aura-
t-il le courage de pratiquer, sous un
quelconque euphémisme, un régime de
dictature pour remettre la France au
travail.
Nous pourrons fêter la Noël en paix,
condition que l'ordre règne en France.
Le problème économique et social y est
devenu d'une acuité telle que tout délai
est exclu il faut le résoudre. Et cette
révolution se fera-t-elle dans l'ordre
Enfin N"»ëi se fêtera dans la Paix
condition que le monde offre Adol
phe HitEr un magnifique pudding les
colonies Les colonies Il est rare de
voir les grandes puissances offrir ce qui
leur appartient un de leurs comparses.
Cette règle connaîtra-t-elle une noble
exception Ou bien seront-ce les pe
tits pays qui apporteront les matériaux-
pour confectionner ce beau pudding de
Noël. Nous n'aurons que trop l'occa
sion d'en reparler.
par Louis HABRAN.
La semaine historique de la fin sep
tembre 1938 mérite que se constitue dès
maintenant le dossier des témoins ocu
laires des événements. Nous estimions
la semaine dernière, devant l'incertitude
des événements et étant donné le fait
que nous étions rappelé en service, qu'il
ne nous était pas permis de publier ce
document intéressant qui nous avait été
envoyé par notre excellent collaborateur
Louis Habran.
Ce document n'a rien perdu de son
intérêt, et aujourd'hui nous le publions
volontiers.
26 septembre 1938.
Dans les heures troublantes que
L'Europe traverse, cela intéressera les
populations de l'Ouest du pays de con
naître l'état d'esprit des populations
belges les plus proches de deux bel
ligérants éventuels, la France et l'Alle
magne, et celui des populations étran
gères qui avoisinent cette partie de nos
frontières. J'ai passé le mois de sep
tembre dans le pays de la Semois, où
je suis né. J'ai parcouru la contrée com
prise entre Luxembourg et Sedan, par
Arlon, Virton, la Chiers, Florenville
et Bouillon .et au moment de rejoindre
Bruxelles, la récapitulation de ce que
j'ai vu et entendu en-deçà et au-delà
des frontières belges laisse mon esprit
et mon expérience de soldat de 1914-
1918 une impression de gravité.
La population française des Vallées
de la Chiers et de la Meuse, longeant
notre Luxembourg, de Longwy Sedan,
est franchement belliciste. Puisqu'il
est inévitable d'en découdre un jour
(Voir suite page 8)
mage la valeur de Paul van Zeeland
en tant que technicien des questions mo
nétaires et des problèmes économiques.
Depuis lors le technicien compétent
a prouvé qu'il était un très mauvais pra
ticien. Il n'a ni la psychologie ni le ca
ractère d'un homme d'Etat. Aussi, ac
tuellement, quand nous voyons un cou
rant se formet pour embarquer M. van
Zeeland dans des congrès ou des com
missions internationales pour l'étude des
problèmes économiques, nous ne pou
vons qu'approuver et nous réjouir de ce
que la Belgique soit représentée au
cours de ces palabres par un homme in
contestablement documenté.
Mais nous espérons que des amis trop
zélés ne vont pas prendre ce prétexte
pour essayer de faire rentrer M. van
Zeeland dans l'équipe gouvernementale.
Ce serait une faute psychologique énor
me, car, vraiment, Paul van Zeeland n'a
pas eu le don de conquérir la confiance
de l'opinion publique belge. Conseil
ler, soit technicien écouté, d'accord
mais gouvernant, non
PAUVRES PARTISANS
On crée de nombreuses ligues du
souvenir, et l'occasion du moindre
centenaire on ne manque d'organiser
une fête de commémoration. Et cepen
dant la vertu la plus précieuse n'est-
elle pas l'oubli
Comment des hommes politiques
pourraient-ils résister l'opinion publi
que, si celle-ci n'oubliait pas les pro
messes faites et les termes des discours
prononcés Que d'exemples nous vien
nent l'esprit ces temps-ci. Conten
tons-nous de rappeler les affirmations
de milieux de la démocratie politique
contre le traité de Versailles, et les in
nombrables interventions d'Emile Van-
dervelde en faveur de la malheureuse
Allemagne.
Ne sont-ce pas les démocrates qui ont
proclamé 1a légitimité de l'Anschluss
Ne sont-ce surtout pas les démocrates
qui ont affirmé dès 1920 qu'il fallait
voler au secours des minorités oppri
mées en Tchécoslovaquie. Et actuelle
ment les mêmes démocrates auraient
souhaité mettre l'Europe feu et
sang... parce que leurs revendications^
d'il y a quinze ans, ont abouti.
ET, PAUVRES COMMUNISTES
Mais les plus plaindre sont, certes,
les communistes. Le communisme, héri
tier de toutes les Internationales, des
théoriciens du pacifisme internationa
liste, des hommes qui proclamaient que
les premières balles étaient pour les gé
néraux, des objecteurs de conscience, ce
communisme obéissant aux ordres de la
dictature sanglante de Moscou proclame
la guerre sainte contre Hitler et Mus
solini. Au moment où, dans tous les
pays, les masses prolétariennes aspirenfc
la paix, les meneurs communistes res
tent les seuls défenseurs du parti de la
guerre...
Il est vrai qu'ils sont payés pour dé
fendre aveuglément les thèmes imposés
par leur chef hiérarchique le bureau
de la politique internationale de Mos
cou.
QUESTION DE PROCEDURE
Nos lecteurs se souviennent peut-être
d'un procès intenté par M. Paul van
Zeeland la Nation Belge et au Pays
Réel. Malgré les discours des officiels
qui proclamaient la nécessité de pouvoir
poursuivre rapidement en justice les dif
famateurs, ce procès avait été remis au
10 octobre, l'avocat du diffamé van
Zeeland n'étant pas prêt.
Nous attendons avec une certaine cu
riosité l'échéance du 10 octobre. Ce
procès sera-t-il nouveau remis
A PROPOS DE
PAUL VAN ZEELAND
Et comme nous ne demandons pas
nos lecteurs l'oubli, nous leur rappelons
les articles que nous écrivions il y a
quatre ans. Ces articles rendaient hom-