!A PROFESSION, mercredi 5-10-'38."
LES ARTISTES AIMES
DES BRUXELLOIS
ANDRE BERNARD ET SON PETIT
ORCHESTRE DE L'EVO
LE THEATRE.
LA MUSIQUE
Le violoniste André BERNARD.
En passant le long de La Bourse,
nous voyons, près de la vitre de
l'Evo un orchestre que nous con
naissons bien, pour l'avoir entendu, au
même endroit, la saison dernière et
l'avoir retrouvé, cet été, la Poti-
nière Coxyde l'orchestre d'André
BERNARD. Sur le séuil, le sympa-
pathique gérant Mr. Deverdenne, sou
rit de notre surprise Oui dit-il
ils sont revenus... nous entrons,
l'orchestre joue une sélection nuan
cée et nerveuse souhait... nous étions
Aabitué entendre des exécutions im
peccables conduites par le prestigieux
archet d'A. Bernard, mais, vraiment
'ensemble a encore gagné... qu'y a-
t-il Ah deux nouveaux éléments
dans l'orchestre nous comprenons en
voyant au piano le virtuose bien connu
Henri MAILLY, (le fils de l'ancien pro
fesseur d'orgue du Conservatoire de
Bruxelles). Inutile d'en dire davantage,
Henri MAILLY est trop connu des
amateurs de musique pour nous don
ner le ridicule de le présenter nos
lecteurs. Nous aurons, tout l'heure,
e plaisir de l'entendre dans la Hme
de Liszt (il est un des rares pianistes
d orchestre qui joue la série com
plète de même qu'il joue les Cho
pin et les Debussy ainsi que des
oeuvres comme Prélude-Choral et
Fugue» de César Franck... et les
oeuvres modernes de jazz)..
Décidément, oui, il y avait quelque
diose de changé dans l'orchestre, et
tout son avantage A la contre
basse aussi, il y a du nouveau, nous
^connaissons MOENS, l'excellente
basse» du Kursaal d'Ostende et de
•La Monnaie», professeur «l'Ecole
ostrumentale de Schaerbeek avec
u> l'orchestre a de «l'assiette». Les
autres, ce sont les anciens de For-
oestre Bernard le compositeur Daniel
'VAN (dont les oeuvres figurent au
répertoire de l'orchestre) 1er Prix
|e violon du Conservatoire Royal de
|ruxelles et qui seconde A. Bernard,
'e tout son talent de compositeur
Maurice BAYEZT, dont le violoncelle
1 des accents de vox humana d'une
k"e profondeur il faut dire que. lui
Ussi, est Prix de Conservatoire de Ma-
*®es- et qu'il se produit de même sur
•axo-ténor. Nous (l'avons également en
tendu, ailleurs sur banjo où il ex-
tout autant. Encore un élé
ment de choix.
Nous sommes surpris de constater ce
1Ue peut tirer d'un accordéon un mu-
Jlcien de la valeur de Louis LOGIST,
est de l'harmonium pur, par instants,)
Rien d'étonnant que le Théâtre Royal
de Ja Monnaie ait fait appel Logist,
quand il fut nécessaire d'avoir un accor
déoniste pour jouer Les Trois Val
ses de Strauss. Louis LOGIST est
1er Prix de Basson du Conservatoire
de Bruxelles et manie, en virtuose, le
saxo-alto et la clarinette... rien que ça
Enfin que dire du Chef et Violon-
Solo André BERNARD 1er Prix
avec Grande distinction au Jury Supé
rieur de Belgique Ex-remplaçant of
ficiel du Maestro Franz ANDRE
Radio-Belgique (Ancêtre de l'I.N.R.),
ex-violon de l'orchestre de 1 Agora
(...au temps où l'Agora s'imposait par
son orchestre), ex-violon des concerts
Désiré DEFAUW Ex-Chef d or
chestre du Marigny (Pte de Na-
mur), du «Victoria» (Bourse), du
Théâtre de La Louvière et du Parc
de Bruxelles des Tournées du sympa
thique «Ritche»»... ajoutons qu'A.
BERNARD a fait 35 fois la traversée
Europe-Amérique en qualité de violon
solo de la RED STAR qu'il a été
12 fois en Egypte, 13 lois dans le Midi
de la Frapce et visité... 4 continents...
ouf...
Il a, également, comme référence,
la direction d'un Concert où se produi
sait le célèbre violoniste DARDENNE,
Soliste de l'Opéra de New-York, dans
le 3e Concerto de Saint-Saëns.
Nos lecteurs comprendront qu avec des
artistes d'une telle valeur l'orchestre de
«L'EVO», dirigé par André BER
NARD est le favori des amateurs de
vraie musique (la musique légère figure
aussi au répertoire, titre de délasse
ment) et ils comprendront que LA
PROFESSION toujours soucieuse de
mettre en relief les talents qui en va
lent la peine (même s'ils se cachent,
modestement en brasserie la vie
a ses exigences que La Profes
sion disons-nous, aie tenu leur con
sacrer le présent article, bien bref, pour
énumérer leurs qualités, mais qui, es
pérons-le. pourra inciter le public
rendre justice de purs artistes, des
professionnels de tout premier plan.
Henri de CHASTELET.
Nous avons posé M. André GUISE,
le jeune comédien bien connu du public
bruxellois, quelques /questions relatives
l'état actuel du théâtre.
Vous me donnez la parole, mais je
n'ai rien dire qui soit nouveau. Je
ne puis que répéter certaines opinions
d'autrui. La seule utilité de mon témoi
gnage sera donc qu'il fera nombre, et
c'est assez pour que je vous réponde
André GUISE.
Que pensez-vous du théâtre (avons-
nous demandé.M. Guise nous dit
Je pense que le théâtre est un des
moyens les plus efficaces d'éduquer un
peuple, parce qu'il éduque en amusant.
Aussi convient-il que ceux dont le rôle
est d'assurer cette éducation se servent
le plus souvent possible du théâtre pour
atteindre leur but.
C'est ainsi que l'art théâtral, avili
depuis quelques années par des mar
chands de spectacles qui. dans l'espoir
d'un gain rapide et disproportionné,
flattent les bas instincts de la popula
tion ou qui, par l'étendue de leur in
compétence dilapident les subsides du
gouvernement, pourra s'épanouir, pour
le plus grand profit et l'agrément de
tous. C'est pourquoi un acteur qui pré
tend vivre de sa profession afin de lui
consacrer toute son activité, ce qui est
pour lui le seul moyen d'atteindre
la maîtrise, souhaite que (la pratique du
théâtre soit confiée des artistes pro
bes et expérimentés sous le contrôle de
quelques esprits élevés absolument in
dépendants.
wue pensez-vous du répertoire des
théâtres de notre époque 1 fut notre
seconde question
Je ne le connais pas suffisamment.
Il est certain, toutefois, qu'il comporte
des pièces d'analyse psychologique qui,
sous prétexte de raffinement, sont fai
tes de cheveux coupés en quatre, ce
qui n'attire que les snobs, ou de cas
trop particuliers qui n'éveillent dans le
public qu'une curiosité malsaine. C'est
regrettable. Ces oeuvres se vantent de
s'appuyer sur des réalités, mais il ne
faut pas oublier que te vrai peut quel
quefois n'être pas vraisemblable, or, au
théâtre, le vraisemblable seul importe,
et c'est par lui qu'il faut mener les
esprits sur le chemin d'un idéal. Le
théâtre n'est pas une clinique.
Comment rendre au théâtre son lustre
d'antan Question délicate laquelle
M. Guise répond
C'est une question de prestige et
d'économie.
Un grand coup est porté au prestige
du théâtre par les sociétés d'amateurs,
pour la raison qu'elles sont trop nom
breuses il y a pléthore. Le théâtre
n'a nullement besoin d'être vulgarisé,
et da plupart des sociétés le galvaudent.
Il convient donc d'en limiter le nom
bre. Régiférer en conséquence, serait-
ce besogne trop futile pour l'ambition
des députés
Ce qui fait tort aussi au prestige du
théâtre, c'est le peu de mystère qui en
veloppe les acteurs. De cela encore,
l'amateurisme est en partie responsable.
En effet, il est peu de familles dont un
membre au moins ne soit affilié un
cercle dramatique et ne donne ainsi
ses proches, par ses ridicules et ses
mesquineries journellement observés, et
nul de nous n'est exempt de défauts
analogues, une idée décevante de ce
qu'est un acteur.
En un mot, le comédien profession
nel. vu travers l'amateur, garde trop
sa mesure humaine, souvent exacte mais
si amoindrissante pour sa force attrac
tive
Et ce n'est pas toujours la publicité
qui arrange les choses O Publicité,
dit Chasterton, vjle Publicité, toi qui
n'es qu'un pilori où le profane passant
peut nous souffleter... Bien entendu,
les comédiens eux-mêmes se sont par
fois remarquer de façon regrettable.
Mais un jour pourrait venir où ceux
d'entre eux qui font cela se verront soi
gneusement écarter de la scène.
Encore faut-il, toutefois, pour se mon
trer justement exigeant envers les co
médiens, qu'il leur soit possible de vivre
de leur profession.
Et voici que nous en arrivons la
question de l'économie.
Celle-ci sera favorablement résolue
par l'application progressive des quel
ques points ci-après énumérés.
1 Limiter les admissions au Conser
vatoire et le nombre des lauréats en pro
portion des emplois vacants dans les
théâtres réguliers et les tournées pro
fessionnelles permanentes.
2) Rendre obligatoire pour l'acteur
l'obtention d'une licence et pour les di
recteurs l'emploi exclusif d'acteurs li
cenciés et d'élèves du Conservatoire. La
licence pourrait s'obtenir en deux
temps 10 licence provisoire non renou
velable permettant son possesseur de
tâter sérieusement du théâtre, et cela
sans condition, et d'y peser ses chan
ces pendant deux ans. On ne pourrait
plus l'obtenir passé l'âge de vingt-cinq
ans. 2° licence définitive accordée aux
comédiens qui, l'expiration de leur li
cence provisoire, s'engagent n'exercer
aucun autre métier.
3) Rendre obligatoire l'assurance
chômage.
4) Créer, pour lier directeurs et co
médiens, le contrat-type assurant, no
tamment, le minimum vital.
5) Exiger un contrôle plus sévère des
Pouvoirs publics sur la façon dont les
subsides qu'ils accordent sont dépensés.
6) Eviter que l'argent, qui doit pas
ser du public aux auteurs, directeurs et
comédiens professionnels rte s'égare
dans la caisse d'intermédiaires inutiles
tels que imprésarii, ou bureaux de pla
cement, et directeurs incompétents, ou
dans la caisse de la concurrence déloya
le, alias certaines sociétés d'amateurs.
Tous ces parasites, il faut les supprimer
radicalement. En ce qui concerne seu
lement les sociétés d'amateurs, il suffit,
comme je l'ai dit tantôt, d'en limiter le
nombre.
Nous remercions le jeune artiste des
réponses précises qu'il a bien voulu don
ner nos questions et le félicitons de la
clarté de ses vues sur un sujet bien fait
pour passionner tous les amateurs de
théâtres tout autant que les profession
nels de la scène parmi lesquels Mr An
dré GUISE s'est affirmé brillamment
déjà.
Nous espérons que les artistes qui
auraient d'autres points de vue sur le
même sujet nous en feront part, afin
que nous puissions les confronter... car
du choc des idées...
H. de C.
Ht
LE DEJEUNER EN L'HONNEUR
DES LAUREATS DU CONSERVA
TOIRE est remis une date ultérieure
les événements internationaux de la
semaine dernière nous ont dicté cette
décision.
Le R. P. Loslever, Président, était
rappelé titre d'Aumônier Militaire de
Réserve. Notre Directeur, Mr Ch van
Renynghe, également Officier de Ré
serve était aussi mobilisé... la plupart
des assistants éventuels étaient dans le
même cas. Nous avons donc décomman
dé le déjeuner et réexaminerons la
question.
H. de C.
La question de la Musique Belge
l étranger et... de la musique et des
musiciens étrangers en Belgique est de
brûlante actualité.
Notre bon confrère Polinet écrit,
ce sujet, un article, dans Le Pays
Réel De cet article nous ne pouvons
mieux faire que de donner un important
extrait.
Nous avons esquissé la semaine der
nière un tableau général fort peu bril
lant de la situation musicale en Belgi
que aujourd hui nous allons voir l'ac
cueil réservé par nos grands concerts
nos virtuoses. Accueil chaleureux, com
me vous allez voir. Ne faisons pas de
phrases, prenons des chiffres que tous
peuvent contrôler en s'arrêtant pendant
quelques minutes devant les affiches
pour la saison qui s'ouvre ils seront
d une merveilleuse éloquence, et après
les avoir transcrits nous pourrions lais
ser la plume et nous abstenir de tout
commentaire
A la Philharmonique, neuf virtuoses
engagés aucun Belge.
Au Conservatoire, quatre virtuoses
engagés deux Belges.