Le Peintre
HENRI THOMAS
L'opinion du
Ministre Heymani
L'ORGANISATION
PROFESSIONNELLE.
LA PROFESSION, mercredi 2-ll-'38.
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Quand on parle, entre artistes, du
peintre Henri THOMAS, il y a tou
jours quelqu'un qui prononce le nom de
Félicien ROPS et ouf proclame que
THOMAS est son disciple. Il y a
dans cette affirmation une part de vé
rité l'admiration d'Henri Thomas pour
le maître ruosan et. peut-être, les su
jets traités mais il ne faut pas oublier
que Thomas est, avant tout, un peintre
alors que Roos était le prestigieux ma
gicien du blanc et noir
No'-s avons connu, l'ami et continua
teur de R003. son fils soirituel si
l'on peut dire (encore que les œuvres de
l'un se différencient terriblement des
œuvres de l'autre) et nous nous re-
vovons. en pensée, il y a vingt ans. dans
l'atelier liégeois, tout en haut de St Gil
les. du maître Armand RASSENFOS-
SE, héritier des traditions et des techni
ques de Rops et pourtant aussi différent
de Rops... que d'Henri Thomas. Un
seul "oint commun l'amour du beau
travail du métier probe que ce soit
en maniant la pâte, comme Thomas ou
l'acide, comme Rassenfosse.
La vérité est que Henri Thomas est,
avant tout, lui-même et qu'il serait vain
de chercher en lui la part de Rops et
cel'e de Stobbaerts, son initiateur pas
plus que la part que son atavisme an
glais pourrait faire la lignée des Law
rence ou des Gainsborough. Il est telle
ment lui-même qu'il s'est fait une place
part dans la peinture belge contem
poraine moderniste par les suiets trai
tés, la mise en page traditionnaliste
par la perfection de sa technique et de
sa couleur qui en fait un peintre de la
lignée des grands coloristes qui ont
porté la gloire de notre art pictural
son apogée.
A côté de cette nartie métier
dont la perfection suffirait déjà éta
blir se,n renom. Henri Thomas possède
un don particulier de pénétration psy-
choloaigue d'une acuité hallucinante, et
quand il peint des filles de joie on
sent chez ses modèles toute la lassitude
et l'amertume de leur triste métier dans
un décor de luxe clinquant et criard.
Nous n'avons jamais mieux compris
la peinture d'Henri Thomas que l'hiver
dernier, lorsque faisant, sous l'aspect
d'un pianiste de jazz, une étude-repor
tage sur les conditions de travail des
musiciens de bar, nous avons pu sur
prendre les modèles du peintre dans la
sincérité de leurs préoccupations jour
nalières, quand la présence du client
n'est pas le déclancheur du sourire
professionnel
Nous avons alors, souvent, pensé aux
œuvres d'Henri Thomas, qui extériori
sent si bien lame un peu veule, inquiète
et lasse de ces marchandes d'illusions.
Nous avions, d'ailleurs, ses œuvres
fraîchement en mémoire cette époque
car, rendant compte dans La Profes
sion du 15-12-37, d'une exposition
la Galerie Royale nous écrivions
Que dire de H. Thomas sinon que
le corps féminin n'a plus de secrets
pour lui. Il en évoque la grâce et le
charme, avec un amour de la forme par
faite et la lumière fluide qui n'appartient
qu'à lui. et nous venions de dé
couvrir chez un petit encadreur, proche
de l'Hôtel de Ville, une superbe toile
que l'on pouvait identifier première
vue deux femmes, dans une chambre
garnie une solide gaillarde venant
tout droit de sa campagne, qui une
copine a offert l'hospitalité. Aucun
réquisitoire contre le vice ne vaut
cette antithèse féroce des deux nudités
l'opposition de ces formes pleines et co
lorées, aux carnations blêmes du corps
hâve de la courtisane citadine.
Et le petit encadreur rendit l'artiste
le nlus bel hommage que nous ayons en
tendu en nous disant Cette toile-là,
je ne tiens pas la vendre parfois
quand je suis fatigué de dorer ou de
patiner, je m'arrête et je la regarde...
je ne m'en lasse jamais... et je me dis
que nous avons quand-même des ar
tistes en Belgique
Nous nous en voudrions d'ajouter
mtefgue chose l'appréciation du mo
deste artisan qui l'artiste qu'est Hen
ri Thomas, apporte semblable régal.
C'est, notre avis, la plus belle récom
pense d'une vie toute consacrée un
Idéal artistique.
Henri de Chastelet.
P S. Signalons que le peintre H. Tho
mas exposera ses oeuvres la Petite
Galerie Avenue Louise, dater du
11 novembre. Belle occasion pour nos
lecteurs d'aller les admirer.
H. de C.
M. le Ministre Heymans, invité par
la Chambre de Commerce de Bruxel
les, a donné son opinion sur les ques
tions économiques de l'heure. Décou
pons un large extrait de son discours.
La guerre mondiale vint aggraver la
situation dans le domaine du libre
échange en fait l'appauvrissement éco
nomique général et l'épuisement presque
total de certains pays vinrent superpo
ser leur action celle que je viens de
vous décrire.
De graves crises politiques et finan
cières acculèrent des pays comme la
Russie et l'Allemagne l'isolement éco
nomique.
Pour la fourniture sur les marchés
extérieurs, oiï continuent subsister cer
taines possibilités d'exportation, nous
voyons se substituer la concurrence
entre des entreprises isolées, la concur
rence entre des trusts ou même entre
nations qui s'affirment comme entités
économiques dirigées ou contrôlées
d'une façon directe u indirecte par
leurs gouvernements.
La Belgique ne peut, la Belgique ne
veut pas succomber dans pareille lutte.
Elle est décidée affronter ses concur
rents en prouvant qu'au besoin elle peut
s'organiser d'une manière aussi puis
sante qu'eux. C'est la tâche du Gouver
nement de permettre et d'aider l'écono
mie belge s'organiser de la sorte.
Dans une concurrence internation-1"
libre, l'assiduité et le rendement du tra
vailleur et des entreprises belges au
raient peu craindre et ne nécessite
raient guère de protection douanière et
encore moins de mesures de contingente
ment. Toutefois, lorsque nous voyons
notre marché national envahi par des
produits dont le prix de vente n'a plus
qu'un rapport extrêmement éloigné avec
son prix de revient, il nous incombe de
protéger l'activité industrielle, agricole
et commerciale belge.
Ne nous dissimulons toutefois pas le
danger inhérent de pareilles mesures.
Il importe d'éviter tout prix qu'à
leur abri, notre industrie, notre agricul
ture et notre commerce, ne se cristalli
sent et que dans quelques années nous
ne les trouvions dans un état de déve
loppement de perfectionnement arriéré.
En ce qui concerne le marché exté
rieur, il importe de veiller ce que les
mesures de protection que nous prenons
pour notre mâché intérieur, ne viennent
pas mettre définitivement en péril les
possibilités qui nous restent sur certains
marchés étrangers.
Je crois même devoir aller plus loin
en disant que nous devons être dispo
sés certaines concessions sur le mar
ché intérieur, de façon continuer
nous assurer le maintien ou le dévelop
pement de nos exportations.
Il importe également qu'en face des
concentrations puissamment organisées,
nous opposions sur notre marché inté
rieur et sur les marchés extérieurs, une
organisation correspondante.
Reconnaissons qu'à cet égard il est
urgent que la Belgique fasse un parti
culier effort.
Mais je suis pleinement d'accord avec
notre président pour affirmer que, pour
que cette collaboration soit véritable
ment salutaire, il faut qu'elle s'exerce
sans étouffer cet esprit d'initiative qui
est la base de tout progrès.
Les chefs d'entreprises, industrielles
et commerciales, tant de classes moyen
nes qu'autres, les agriculteurs et les tra
vailleurs ont déjà créé de nombreux
groupements, mais ceux-ci se sont déve
loppés de manière inégale et souvent
incomplète.
(Voir suite page 8)
Deux œuvres connues
du peintre Henri Thomas
gauche Bobette
droite La Môme
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