La Société Royale de
Musique de Bruges.
ch. van Renynghe.
LE SUD, dimanche 13 novembre 1933'
A l'occasion des trois concerts organi
sés par la Société Royale de musique,
le concert André Dumortier le diman
che 20 novembre, le concert des Petits
Chanteurs de Vienne le 12 février, et le
concert Arrigo Provedi, nous avons in
terviewé la dévouée présidente de la
Société, la Baronne Kervyn de Vol-
kaersbeke. La tâche laquelle la Baron
ne Kervyn s'est mise avec courage et
ardeur, en succédant après la guerre
la Baronne Albert van Zuylen, était
une tâche ardue. Les difficultés énor
mes qui ont été rencontrées et surmon
tées par la Baronne Kervyn, malgré le
peu d'appuis officiels accordés, témoi
gnent de son optimisme et de sa té
nacité autant que de sa compétence
dans l'art musical.
Comme il se doit notre première
question eut comme objet de demander
la Baronne Kervyn un historique de
la Société Royale de Musique.
Celle-ci a été fondée en 1907 par
Madame H. Otto de Mentock. Elle s'ap
pelait au début Les Intimes déno
mination dans laquelle nous découvrons
un dernier vestige de l'époque roman
tique. Le but de la Société était de dé
velopper la connaissance et le goût de
l'art musical Bruges. Depuis 31 ans
son activité a été inlassable. Evidem
ment la vie de la société avant la guerre,
et son évolution actuelle sont bien dif
férentes. Que de souvenirs attachés la
Société de Musique.
Quels furent les principales mani
festations historiques avant la guerre
Nous avons connu des concerts
remarquables, avec l'exécution d'oeuvres
importantes telles que La Création
de Haydn, et des concerts de Schu-
mann ou de Massenet, avec choeurs, so-
li et orchestres. Les choeurs mixtes se
recrutaient parmi les membres de la
Société. L'orchestre était placé sous la
direction de M. Willemot, professeur
au Conservatoire de Gand, et nous
comptons parmi nos amateurs des pia
nistes très appréciées D'abord notre
seconde Présidente, la Baronne Albert
van Zuylen van Nyevelt, qui fut vrai
ment l'âme de la Société avant la guer
re et d'autres pianistes telles que Ma
dame L. Fraeys de Veubeke, Mademoi-
moiselle van Haverbeke.
Avez-vous conservé quelques sou
venirs de ces fêtes
Ne croyez-vous pas que vos lec
teurs détacheraient avec curiosité cette
page du passé Il s'agit du concert de
charité, organisé le 21 janvier 1909 la
Salle des Concerts, dans l'intention de
venir en aide aux sinistrés du tremble
ment de terre de Messine. Les Brugeois
voulaient ainsi témoigner de leur sym
pathie l'égard de l'Italie, et de la part
qu'ils prenaient dans cette terrible ca
tastrophe. Voici une découpure d un
journal de l'époque.
Et la Baronne Kervyn de nous re
mettre des renseignements et une des
cription de la fête qui nous reportent
trente ans en arrière.
carmé, président MM. le Dr De Coo-
man et le Baron Van Zuylen, vice-pré
sidents MM. Milissen et Steinmetz, se
crétaires MM. J. Schramme, A. Gans-
hof, Lud. Fraeys, L. Beyaert, P. Dau
que nous n'avions pas entendue 1 autre
jour, a mérité largement la réputation
de cantatrice qui l'avait précédée et elle
fut applaudie avec chaleur.
Pourtant le grand succès fut pour la
tricourt, R. Coppieters t Wallant, P. baronne Albert van Zuylen, qui, dans
Verté, A. Jacqué, W. Dumon, A. Van-
neste, L. Pavot, Maur. Geûens, J. Van
Houtryve, L. Van der Meersch, W. Pa-
peians de Morchoven, E. Van Drom-
me, A. de Schietere de Lophem, B.
Fraeys, Chr. Papeians de Morchoven,
A. Claeys.
La salle des Concerts revêtait son as
pect des grands jours. Des toilettes élé
gantes et riches montraient ce que la
mode, avec ses mille variations d'aujour
d'hui et ses caprices, a trouvé de plus
ingénieux, de plus original, de plus joli,
et déjà la vue des robes était une fête
pour les yeux. Pas d'habits officiels,
rien que le frac, que revêtaient égale
ment Mr le Gouverneur, président
d'honneur du Comité d'organisation, et
son hôte, Mr Attilio Ferra, premier se
crétaire d'Ambassade, délégué par S. E.
le Ministre d'Italie, le Comte Bonin
Longare.
A 8 y2 h. précises, le diplomate ita-
l'interprétation, parfois fougueuse et en
thousiaste, parfois délicate et légère,
mais toujours très personnelle des mor
ceaux qu'elle jouait, s'est montrée une
artiste incomparable.
Aussi, après la fête, Monsieur le Gou
verneur a-t-il tenu lui exprimer ses
félicitations, ainsi qu'à Mme Offergeld
et au vaillant directeur, Mr Willemot,
qui est l'auteur de ce succès auquel il a
généreusement travaillé.
Mme la présidente eut sa part d'élo
ges pour s'être dévouée avec tant d'ab
négation au succès d'une si belle fête de
charité.
Car, et c'est ce qu'il ne faut point ou
blier, la recette, qui parviendra toute
entière la Reine-mère d'Italie, a été
des plus fructueuses, et c'est l'important.
Cette page du passé n'est-elle pas
évocatrice d'un temps qui nous parait
Le pianiste-virtuose André Dumortier.
Le comité d'honneur comprenait MM.
le Baron Ruzette. gouverneur de la pro
vince de la Flandre Occidentale, le
comte Visart de Bocarmé, bourgmes
tre de Bruges le Colonel Ruwet, com
mandant la province présidents
MM. Dumont de Menten, président
du Corps Consulaire, le Colonel Cuve-
lier, du 4e Régiment de Ligne, le Co
lonel Proost, du 3e Régiment de Lan
ciers, le Colonel Dhondt, commandant
la garde civique, et le Baron H. Kervyn
de Lettenhove, vice-présidents.
Le Comité organisateur était consti
tué comme suit M. Et. Visart de Bo-
lien fait son entrée, ayant au bras Mme
la Baronne Ruzette, suivi de Mme la
Comtesse Visart qui donne le bras au
Baron Albert van Zuylen. Puis au pre
mier rang prennent encore place Mme
Henri Otto de Mentock, présidente du
cercle, Mr et Mme Etienne Visart de
Bocarmé, Mr Dumon de Menten, pré
sident du corps consulaire, etc. Mr Jo
seph Schramme, échevin, et la plupart
des membres du Comité organisateur,
.ainsi que ceux du corps consulaire as
sistaient la fête.
Quant au concert en lui-même, il fut
aussi merveilleux qu'on pouvait le dé
sirer, et le public fut autant surpris que
ravis d'entendre une Société d'amateurs
exécuter musique et chant avec une telle
perfection.
Nous n'avons pas redire ici les élo
ges que nous avons eu déjà l'occar3ion
de décerner ce propos disons que le
programme, semblable celui de l'autre
jour, ne comportait qu'un numéro de
plus A la Muse Gauloise ce qui
nous a valu de réentendre la jolie voix
de Mlle Nuytemans.
Mme Offergeld, encore une soliste
si lointain, et il n'y a que trente ans
peine
Mais nous reprenons notre interview,
et la Baronne Kervyn nous résume l'ac
tivité de la Société, depuis qu'elle en a
pris la Présidence.
Dès 1920 la Société se remettait
l'œuvre et donnait une exécution de la
Fête d'Alexandre de Haendel, avec
chœurs, soli et orchestre sous la direc
tion de Willemot. Et puis se succédè
rent sous la direction du Profeseur au
Conservatoire de Bruges, M. Jooris,
deux auditions de Franciscus de Ti-
nel, l'une en français et l'autic en fla
mand Rédemption 4e César
Franck le Déluge de Saint-Saëns
Stabat Mater de Pergolèse.
N'éprouviez-vous aucune difficul
té trouver après-guerre les amateurs
De très grosses difficultés, au
point que nous avons été obligés d'aban
donner la section des chœurs, et
d'orienter notre action musicale vers la
musique de chambre. Et ainsi, nous
avons pu faire connaître au public bru
geois des formations réputées le Qua-
tor Pro Arte le Quator Zimmer le
Trio de la Cour la Quator Weynandt
le Trio Scapus, etc...
Voilà une liste imposante Et
comme solistes
Dans le chant que de noms célè
bres Panzera, Rogatchewsky, Crabbé,
Ritta Ciampi, Clara Clairbert, et tant
d'autres. Parmi les violonistes je vous
cite au hasard Carlo Van Neste et Lo
la Bobesco, lauréate du Concours Ysaye
1937 et les pianistes Yves Nat, Schar-
res. Van Roy, Arsenieff et Mary Jonh-
stone lauréate du Concours Ysaye 1938.
Avez-vous également donné des
concerts philanthropiques
Outre le concert de 1909 dont je
vous ai parlé, nous avons donné en mars
1913 un grand concert de charité, au
profit de la Ligue Nationale belge con
tre la Tuberculose, avec au programme
l'Oratorio La Vierge de Massenet.
Le 9 mars 1920 nous donnâmes une se
conde éxécution de la Fête d'Alexan
dre au profit de l'Œuvre des Orphe
lins de Guerre. Une série de tableaux
vivants furent présentés par les ama
teurs de la Société en avril 1929, et
l'Œuvre Nationale des Asiles des Sol
dats Invalides bénéficia de la recette.
Enfin nous avons donné un concert le
27 janvier 1935 au profit de l'Institut
royal des Aveugles 4e Bruges.
Une telle activité mérite 4'être
encouragée.
Nous avons reçu un précieux en
couragement lorsque la Société a obtenu
l'autorisation le 2 décembre 1932, de
s'intituler Société Royale. Et le second
encouragement nous est apporté chaque
année par les Brugeois, qui assistent
nombreux aux concerts, dont l'abonne
ment ne revient qu'à 25 francs pour les
trois concerts. Et permettez-moi de re
mercier LE SUD pour l'appui qu'il veut
bien apporter la Société royale de Mu
sique.
D'autant plus volontiers que vous
mettez votre programme du 20 no
vembre un artiste de chez nous, An
dré Dumortier.
En effet, André Dumortier est
né Comines, et j'ai appris avec plaisir
que sa ville natale lui avait ménagé un
fort bel accueil cet été. Comme je vous
l'ai fait savoir ie serais fort heureuse
de voir de nombreux Yprois et Cominois
assister au concert du 20 novembre, et
ce sera avec plaisir que la Société fera
des conditions spéciales pour ces sym
pathiques concitoyens d'André Dumor
tier. Je n'ai rien ajouter la notice
que vous avez donnée il y a quinze jours
dans LE SUD- au sujet de Dumortier.
Et vous avez encore votre pro
gramme...
...un spectacle de choix la pha
lange bien connue des Petits Chanteurs
de Vienne. Nous avons dû consentir de
gros sacrifices pour monter cette mati-
tée au Théâtre de Bruges, le dimanche
12 février, et j'espère avoir une salle
comble. Enfin le violoncelliste Arrigo
Provedi, directeur du Conservatoire de
Musique de Sienne, accompagné de sa
fille Graziella, pianiste de grand talent,
donnera le troisième concert. Vos lec
teurs ne m'en voudront pas de terminer
cet interview en rappelant que le Maître
Provedi a donné un concert Bruges
en 1924, et qu'une jeune brugeoise de
17 ans accompagnait le maître italien.
Cette jeune fille est actuellement... la
femme du Directeur du SUD
Et nous quittons l'aimable Présidente
de la Société Royale de Musique de
Bruges, toute heureuse d'avoir terminé
cet interview par cette réflexion que
nous transcrivions en fidèle reporter.