LA RUBANERIE A COMINES.
Infirmières
de Geurre
LE SUD, dimanche 27 novembre 1938"
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Parmi les industries du Sud de la
Flandre, l'industrie textile a acquis une
renommée mondiale. Les esprits cha
grins riposteront en nous disant que
cette renommée ne l'empêche pas d'être
en pleine crise. La crise est un fait, mais
l'esprit d'initiative des industriels en est
un autre, et les chefs d'entreprise qui
cherchent s'adapter et trouver des
débouchés parviennent toujours re
dresser leur affaire.
Les circonstances actuelles, l'orienta
tion psychologique des Etats-Unis, la si
gnature de l'accord économique anglo-
américain mis en relation avec l'accord
commercial belgo-américain, permettent
d'affirmer que l'industrie textile du Sud
de la Flandre est la veille d'un re
dressement sérieux.
Ce qui est curieux constater c'est
cette localisation dè l'industrie textile,
et de certaines de ses spécialités. Par
exemple la rubanerie Comines. Mal
gré la proximité d'un canal important,
Comines-Betgique n'est pas redevenue,
après la guerre, ce centre industriel qui
était accompagné dans les dictionnaires
géographiques de toute une équméra-
tion d industries. Ôn peut dire qqe
seule, l'industrie traditionnelle de la ru
banerie a conservé son importance,
puisgu'açtqellement trois firmes bien
connues existent Comines Léon Ber-
ghe d'Ennetfères Frères et Plovier Jo
seph et O'.
Nous avions visité, il y a quelques
années, l'usine Plovier, lorsque LE SUD
avait pris l'initiative d'inviter M. le
Gouverneur Baels rendre visite aux
différentes usines de la zone frontière.
Et comme nous avions été fort aimable
ment reçu par le regretté et si sympa
thique fondateur de la manufacture Plo
vier, M. Joseph Plovier, nous commen
çons par la même firme notre enquête
Comines.
Cette affaire a été fondée, par M. Jo
seph Plovier en 1908, et mise en so
ciété en nom collectif en 1913, au mo
ment de l'association du fondateur avec
un industriel du Nord, très compétent
et fort connu, M. Edouard Bonduel,
de Roncq. En 1920. M. Adolphe Van-
der Mcrsch se joignit aux deux associés.
Reconstruite après la guerre, l'usine
Plovier connut de très belles années en
travaillant exclusivement pour le pays,
et agit comme tous les industriels bel
ges en pleine prospérité économique
elle augmenta considérablement ses pos
sibilité? de production par d'importants
agrandissements. Le résultat fut pour
toute la rubanerie belge une surproduc
tion s» le marché national. Il fallut en
même temps découvrir des débouchés
nouveaux et lutter contre l'entrée de
produit? étrangers.
Nos industriels connaissent l'art de
s'adapter aux circonstances, et malgré
un certain bradage des prix, dès 1936
Invité par le Directeur du SUD, M. le Gouverneur Baels
visite les usines de la région. Il est reçu la Rubanerie Plovier.
par le fondateur de l'affaire, M. Joseph Plovier, et parcourt en
sa compagnie tës vastes ateliers de la rubanerie.
le cap était franchi. Aussi cette épo
que l'usine Plovier tourne plein ren
dement, en occupant ses 130 métiers et
une centaine d'ouvriers.
Evidemment il faut être constamment
sur la brèche pour lutter contre la con
currence étrangère, et, particulièrement
dans le département du ruban de soie,
contre la concurrence française. Il existe
un droit d'entrée sur le ruban de soie
fabriqué en France, mais c'est un droit
au poids et non un droit ad valorem.
Ce qui a comme conséquence que ce
droit pèse, peut-être, sur les articles les
moins intéressants et les plus ordinaires,
mais devient dérisoire pour l'article de
prix et de qualité. Il est évident que
de pareilles mesures douanières ne pro
tègent guère l'industrie nationale
Mais l'exportation, condition qu'elle
soit étudiée et organisée, ouvre d'énor
mes possibilités la rubanerie belge.
Combien de fois n'avons-nous pas ré
pété dans LE SUD qu'il fallait étudier
systématiquement, industrie par indus
trie, la question de la résorption du chô
mage et de la réadaptation des chô
meurs. Voilà la méthode pratique et
créatrice de richesse. Tandis que celle
des grands travaux et de l'OREC n£
fait que déplacer des difficultés et non
les résoudre. Il est vrai que par l'ÔREC
on peut plus rapidement obtenir un ré
sultat spectaculaire... et électoral.
Il y a des débouchés pour là ruba
nerie. Il y en a en Hollande il y en
a en Amérique du Sud il y en a en
Scandinavie. Et il y en a d'importants
aijleurs, et nous nous tenons la dis
position des industriels pour les leur in
diquer.
La rubanerie est une industrie vrai
ment cominoise. La main-d'œuvre em
ployée est une main-d'œuvre locale,
spécialisée, traditionnelle dirions-nous.
C'est ce que comprennent parfaitement
les industriels cominois, et c'est ce qui
établit une réelle collaboration entre le
patron et l'ouvrier. Nous avons senti
cette collaboration en étudiant l'évolu
tion de la Rubanerie Joseph Plovier
Cu, et nous remercions les enfants de
M. Plovier et M. Adolphe Vander
Mersch pour les renseignements qu'ils
ont bien voulu nous communiquer.
C. v, R.
par Jeanne
(Suite de la page 2)
L'homme est grand et gros. La cuisse
lourde, et la traction opérer, tout en
tenant, ne facilite pas le mouvement qui
nécessite un tel effort. Après deux ou
trois minutes, la sueur perle au front
de la Reine qui rougit... le brancardier
se précipite et doucement lui dit: Vous
ne croyiez pas, n'est-ce pas Madame
que c'était si lourd Non vraiment
avoue la Reine, qui repasse la jambe
entre les mains du brancardier avec un
soupir de soulagement... Un jour, la
Reine fit en salle d'opération un tel
effort, qu'elle tomba presque en syn
cope... On aime de telles Reines.
La nuit rien. Matin 7 h. un
entrant... de la boue... du sang en
masse Ecume rouge la bouche, mort
sans qu'on puisse opérer.
1917 23 AVRIL. Alerte la nuit.
Un dispositif spécial actionnant une si
rène nous signale maintenant les atta
ques au gaz... nous ne pouvons plus
criculer sans nos masques. A Saint-
Idesbald, quand il y a des émissions la
de LAUNOY
nuit les gendarmes patrouillent et aver
tissent de maison en maison... Pour les
bombes il faut en général descendre
la cave, alors que pour les gaz on monte
au grenier, suivant les chiens, les chats
etc... Pour les torpilles aériennes on
monte également parce qu'elles traver
sent tout le tout serait de savoir d'a
vance ce qui serait lancé
Aujourd'hui attaque allemande.
Nombreux Belges tués et blessés par
des éclats de grenades. Obus. Bom
bes sur Furnes et obus asphyxiants
aussi Journée très fatiguante, tout l'hô
pital est en ébullition. Les six salles
d'opération sont sous pression et Papa
Depage d'une humeur de chien Qu'a-
t-il donc Non seulement l'entourage
encaisse, mais il fait chercher plusieurs
médecins pour les morigéner la salle
Léopold où il travaille en hurlant, en
jetant ses instruments dans les seaux
etc. Les ciseaux ne coupent pas... les
aiguilles ne piquent pas... les médecins
ne comprennent pas... les infirmières
sont trop bêtes... et la petite figure cris
pée de la Reine indique parfaitement
qu'elle craint que son tour vienne Le
major H..., déjà tout petit, se recro
queville sous la bourrasque. Entrants
en masse, mais on voudrait bien en
tendre la fin de ces cris inutiles... Ça
ne va pas... alleï me chercheï... Et
les malheureux médecins entrent en
courbant l'échiné
Cette semaine bombardement de
Dunkerque par la flotte. Aveuglantes
lueurs de tir qui laissent apercevoir les
unités allemandes en action.
Début de mai affreux.
Ce soir après le souper, Mlle Baus
me demande de l'accompagner au vil
lage. Je ne sais vraiment pourquoi je
refuse. Ma compagne rit, me disant que
probablement j'ai peur des Taubes, et
elle s'en va. Pas dix minutes après, on
tire et on nous amène, précisément de
l'endroit vers lequel elle se dirigeait,
un groupe de blessés. C'est peut-être la
plus horrible vision de la guerre que
celle que nous avons sous les yeux. La
mère... un ou deux soldats et tous les
enfants dînaient dans une petite mai
son de pêcheur la vieille route. Un
shrapnel perça la table et éclata sur le
sol arrachant toutes les jambes des mal
heureux La mère nous arrive dou
ble amputation des soldats am
putations et trois petites filles qui
ont cinq de leurs petites jambes arra
chées ou broyées. J'ai travaillé toute la
journée, mais je n'attends pas qu'on
rappelle et je cours vite aider B. Mut-
saert et notre équipe du pavillon Eve-
rymean qui fait la nuit pour le mo
ment la réception... Jusqu'à minuit
nous luttons On sauve les hommes, on
sauve la mère... mais deux petits cada
vres tout noirs et sanglants sont côte
côte sur le même lit. On les photo
graphie pour faire de la propagande
contre la guerre injuste et contre l'Alle
magne en Amérique (Une des petites
martyres a une jambe arrachée la se
conde trois ans les deux jambes,
et, dans sa petite bouche ouverte, se
voit la minuscule bouchée de pain
qu'elle n'a pu avaler). La troisième eA-
fant vit encore. On tâche de la réchauf
fer... laparotomie... et amputation dou
ble et de tenir ce petit corps... et de
soutenir ces lanières de chair rugueu
ses, remplies de débris de briques, de
boue on se sent frémir Une jambe
fracassée... un pied en bouillie. Ça aussi
c'est la guerre... Un aumônier mili
taire a rapporté les trois enfants dans
sa voiture. Sept Cinq et trois ans.
Au milieu de tout cela Christine B...
rentre... elle était tout près... elle n'a
rien. Maintenant on sonne l'alerte aux
gaz. La sirène hurle lugubrement cel
les qui n'ont pas leur masque sur elles
sont secouées d'importance par le doc
teur Depag*. il ne faudrait jamais être
nulle part sans vos masques, vocifère-
t-il... Les clairons dans les camps son
nent aussi l'alerte. Quelle férice soi
rée.