L'Institut royal de
Messines.
l'Exposition du Progrès
Social de Lille-Roubaix.
LE SUD. dimanche 5 mars 1939.
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La petite ville de Messines, située
quelques kilomètres d'Ypres et du
Mont Kemmel, possédait avant la guer
re un ancien et grand couvent trans
formé en 1776, par ordre de l'impéra
trice Marie-Thérèse d'Autriche, en une
institution pour veuves et orphelins mi
litaires.
Le Roi Léopold I fit changer le nom
de l'Institut qui devint Institution
Royale d'éducation de filles de militai
res décédés ou devenus invalides au
service du pays.
Enclos dans la région du front yprois,
Messines et son institut furent balayés
impitoyablement en 1914-1918 tant et si
bien qu'il n'en restait plus une seule
maison, ni un arbre, ni une seule route...
Durant les hostilités, les dames insti
tutrices et les élèves s'étaient réfugiés
Saint Germain-en-Laye près de Paris.
L'Institut ne fut pas reconstruit et le
pensionnat fut transféré Lede près
d'Alost où les enfants de nos valeureux
combattants jouissent comme autrefois
des bienfaits d'une éducation soignée.
Quoique reconstruite actuellement, la
ville de Messines a perdu sa plus gran
de importance par suite de la dispari
tion de son Institution Royale
Les légendes ont toujours été appré
ciées par le public.
Qu'il nous soit permis de signaler
celle laquelle on attribue l'origine de
Messines et de son Institut.
Vers le milieu du Xle siècle une gran
de forêt s'étendait en ces lieux. Trois
forestiers y veillaient et la gardaient
constamment. Or il advint que trois ber
gères dont l'histoire a conservé les
noms Elwigis, Jutta et Gislendis, y
amenèrent leurs brebis. Les forestiers
tentèrent de séduire les jeunes filles,
mais, celles-ci, confiantes dans le se
cours de la Sainte Vierge, se mirent
genoux pour prier, aussitôt la terre s'en
trouvrit et elles y disparurent toutes les
trois.
Les forestiers épouvantés, s'enfuirent
dans la forêt escomptant l'impunité,
puisque personne ne les avait vus et que
les bergères n'existaient plus.
Trois années après ces événements,
il arriva que la princesse Adèle, fille du
Roi de France et épouse de Baudouin V
de Lille, avait un serviteur nommé Lan-
deric, qui était atteint de paralysie. Il
obtint de la princesse la permission de
visiter les Flandres. A son retour pas
sant par la forêt et fatigué de son long
voyage, il descendit de cheval, l'attacha
un arbre et se coucha. Lorsqu'il se
réveillât il se sentit guéri. De retour
Lille il rendit compte la princesse de
ce qui lui était arrivé. La princesse se
rendit sur les lieux, y fit creuser et fouil
ler et la grande stupéfaction des té
moins on y découvrit le corps des trois
bergères dans une attitude de prière.
Peu après, tout fut raconté par les
trois forestiers on leur accorda le par
don. De ce fait, cet endroit de la forêt
fut appelé désormais Meissens (meis-
jes veut dire en français jeunes filles)
où plus tard fut bâtie la ville de Mes
sines.
La Comtesse Adèle y fit ériger une
chapelle et en 1060 un monastère dans
lequel furent reçues une trentaine de
demoiselles nobles.
Le nombre de religieuses de l'Abbaye
de Messines ayant sensiblement dimi
nué sous le règne de Marie-Thérèse
d'Autriche, celle-ci résolut la date du
30 août 1776, de la transformer en in
stitut comme il est dit, plus haut.
Au cours des siècles, l'Abbaye de
Messines eut souffrir de différentes
dévastations, sièges et incendies elle
fut toujours reconstruite.
L'abbaye, située l'ombre de la vieil
le église de Messines, forma un com
plexe magnifique d'architecture, cha
que coin en était pittoresque, ses longs
cloîtres inspiraient un silence respec
tueux. Elle possédait une salle d'archi
ves renfermant une collection précieuse
de souvenirs et de documents histori
ques, entre autres la truelle avec la
quelle la Princesse Adèle posa la pre
mière pierre de l'Abbaye en 1060, le ta
blier qu'elle porta en la circonstance, la
crosse abbatiale, etc., Cette salle oui
avait résisté aux premiers bombarde
ments, fut saccagée par les Allemands
en 1914. Ceci est confirmé d'abord par
une lettre d'un commerçant allemand
offrant de vieux documents de Messi
nes la municipalité de cette ville en
suite par le fait que le gouvernement
belge a reçu de l'Allemagne différents
documents anciens provenant de Messi
nes la municipalité de cette ville, en-
chives puisque celles de Bruges ont reçu
récemment une charte, datant de 1065,
concernant Messines et émanant de
Mgr Nogo, évêque de Thérouannes.
Il existe aussi aux Archives Nationa
les de Paris trois documents des Xle.
Xlle et XlVe siècles relatifs l'Abbaye
de Messines.
Comme la ville légendaire d'Ys dans
les profondeurs de la mer, le Messines
d'antan est enseveli sous les prés, les
champs et les ruines. De fondation pres
que millénaire, il fut tué par la plus
atroce manifestation de la folie et des
mauvais instincts des hommes, la guer
re.
Qu'il repose en paix dans la vénéra
tion de notre souvenir.
H. Levecque.
Les Cloîtres Messines
avant la guerre)
Nous complétons la documentation
que Le Sud a donnée sur l'exposi
tion du Progrès Social en publiant cet
extrait d'un article du Consul-Général
de Belgique Lille, M. Valcke.
L'Exposition du Progrès Social se
tiendra Lille de mai octobre 1939.
Elle sera complétée Roubaix, pendant
la même période, par un centre régional
très étendu. Cette exhibition est patron
née par 1' Association des Maires du
Nord et de l'Est de la France que
préside M. Albert Mahieu, Vice-Prési
dent du Sénat, ancien Ministre de l'In
térieur.
L'Exposition du Progrès Social cou
vrira plus de 50 hectares, dont 20
Lille et 30 Roubaix.
En plus de ses quarante palais et pa
villons, l'Exposition du Progrès Social
comprend un Centre rural où l'on trou
vera une ferme modèle avec ses dépen
dances et ses animaux, une halle où se
ra présentée une sélection de produits
régionaux, une église, une mairie, une
gare routière d'où partiront des circuits
d'autocars qui parcourront l'Artois, la
Picardie, la Champagne, la Lorraine,
l'Alsace, l'Ile de France, la Belgique et
le Luxembourg. Ce sera probablement
un des endroit les plus pittorestques de
l'Exposition.
Quant aux industries du Nord et de
l'Est de la France, elles seront groupées
en sections minière, métallurgique et
textile dans un palais de 120 mètres de
longueur sur 100 mètres de largeur, où
elles pourront présenter leurs produc
tions et mettre en valeur leur effort so
cial.
L'Exposition de 1939 aura un carac
tère spectaculaire, toutes les techniques
y seront évoquées d'une manière vivan
te et les organisateurs s'efforceront de
justifier la formule instruire en amu
sant.
La classe des télécommunications où
l'on pourra voir les plus récentes appli
cations des sciences électriques et radio-
électriques sera dotée d'un puissant pos
te de télévision.
Sans parler des fontaines lumineuses
et des miroirs d'eau où évolueront des
esquifs commandés distance par les
ondes, des fêtes diurnes et nocturnes,
des galas artistiques, des manifestations
folkloriques, des compétitions sportives,
des kermesses et des concours entretien
dront Lille et Roubaix, pendant tou
te la durée de l'Exposition, une con
stante et joyeuse animation.
Efc*
Le centre régional de Roubaix
Ainsi qu'il a été mentionné au début
de cette étude, l'Exposition de Lille se
ra prolongée et complétée Roubaix
par un Centre régional aménagé dans
le parc Barbieux qui servit de cadre
l'Exposition de 1911. Avec ses arbres
harmonieusement alignés, ses larges
avenues, ses immenses pelouses, son
cours d'eau et ses lacs, il constitue l'un
des plus beaux jardins publics de Fran
ce. Ses 32 hectares en font également
un parc des plus étendus et cette an
nexe constituera, en réalité, une seconde
exposition. On y rassemblera les pa
villons départementaux qui doivent syn
thétiser l'aspect architectural, le carac
tère économique et les possibilités tou
ristiques des quatorze départements du
Nord et de l'Est. Ils voisineront avec la
s^-tion des habitations bon marché et
des jardins ouvriers, avec une auberge
de la jeunesse agrémentée de terrains de
jeux et de camping, un parc d attrac
tions. une rue marchande et de nom
breux stands d'exposants.
La participation étrangère.
Le Palais des Nations sera mis la
disposition des pays d'Europe Septèn-
trionale qui présenteront successivement
leurs réalisations sociales les plus carac
téristiques. Une innovation consiste, no
tamment, dans le fait que chaque nation
participante ne pourra exposer que pen
dant trois semaines, il en résultera un
changement constant des exhibitions
dans ce palais. Pendant toute la durée
de chaque participation, des manifesta
tions artistiques, sportives et chorégra
phiques seront données par la nation
étrangère représentée, dans l'enceinte
de l'Exposition, dans les salles de spec
tacles ou sur les terrains de sport de
Lille et de Roubaix.
Une exception au principe du roule
ment des exhibitions étrangères a été
faite pour le Grand-Duché de Luxem
bourg et la Belgique. Ces deux pays
vofsins ont été favorisés du fait qu'ils
ont été autorisés construire chacun
un pavillon permanent.
La Belgique occupera une place im
portante car un bâtiment de 1.500 mè
tres carrés abritera les apports de nos
exposants.
Le programme belge groupe 49 clas
ses en trois sections
1) Le travail du progrès social, com
portant l'organisation du travail, l'orga
nisation industrielle et commerciale, les
transports et communications.
2) L'hygiène créatrice du progrès so
cial, comprenant santé, hygiène, pré
voyance sociale, vie communale, urba
nisme, grands travaux, habitations ur
baines et rurales.
3) L'éducation créatrice du progrès
social, qui groupe l'enseignement tech
nique, l'éducation physique et les sports,
la jeunesse et le plein air, tourisme,
sciences, lettres et arts.
Le pavillon belge sera également
pourvu d'un cinématographe permanent
projetant des films relatifs au progrès
social.
Notre participation est placée sous
la haute direction de M. Jean Materne.
Bourgmestre de Jambes, Commissaire
Général, et de M. Paul Lacoste. Com
missaire Général adjoint. Malgré les
crédits limités dont ils disposent. M.
Materne et ses collaborateurs font de
grands efforts afin que cette participa
tion soit en tous points digne de notre
pays. II faut également qu'elle ait l'im
portance et l'éclat que justifient nos at
taches la nation voisine et amie.
Il est agréable de pouvoir mentionner
qu au cours d'une visite des dirigeants
de l'Exposition du Progrès Social
leurs collègues de l'Exposition Interna
tionale de Liège, il a été décidé que les
deux organisations prendraient des me
sures leur permettant de bénéficier l'une
et l'autre de l'afflux des touristes et
coordonneraient leur action de manière
ce que la Belgique et la France puis
sent profiter toutes deux des congrès
qui seront tenus Lille et Liège.
Cet exposé serait incomplet si l'on
omettait de dire que les promoteurs de
l'Exposition du Progrès Social ne bor
nent pas leur ambition montrer ce qui
a été réalisé jusqu'à ce jour.
Nous nous refusons, déclare M. le
Sénateur Mahieu, assigner notre en
treprise d'aussi étroites limites. Nous
nous tournons hardiment vers l'avenir et
nous voulons que l'enseignement qui se
dégagera de l'Exposition de 1939 ne
soit pas perdu. Les travaux des savants,
des médecins, des hygiénistes, des édu
cateurs, des techniciens qui auront par
ticipé nos Congrès permettront de
franchir, sur la voie du progrès social,
une étape nouvelle. Quand l'Exposition
aura clos ses portes, il n'en restera pas
seulement le souvenir des joies qu'elle
aura dispensées ses visiteurs. Il fau
dra que ses bienfaits soient durables et
se manifestent sous une forme précise.