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Journal liberal démocratique d'Ypres et de 1'Arrondissement
Science
et eaux alimentaires.
Un parti social.
Samedi, 8 Janvier 1898.
5 centimes Ie numéro.
4e année. IV0 9.
S*araissunt le Hiuncdi.
L UNION FAIT LA FORCE.
PRIX DE L'ABONNEMENT
pour la ville, Par an 3 francs.
pr la province, Par an fr. 2-50.
Pour justifier le lamentable fiasco
des nouveaux travaux d'eau, M. le
Bourgmestre a éprouvé le besoin de
dire, au (Jonseil communal, que les
journaux et M. Vermeulen, qui se sont
occupés de cette question, n'en con-
naissent ni le premier mot, ni la pre
mière ligne.
Précédemment,pour donner le chan
ge, il avait, dans le Journal d'Ypres, an
noncé l'insuccès complet des travaux
d'eau de Laeken dus aux études de
M. l'Iugéuieur hydrologue Oh. Fran-
gois et la fail lite de cette importante
ville, corame conséquence.
C'étaitfaux. Nous l'avons démontré,
et le pieux et véridique Journal a pro-
mis de justifier ses assertions menson-
gères et calomnieuses a Paques... ou a
laïrinité. Nous attendrons longtemps.
11 y a huit jours les journaux de
Bruxelles portaient
Le collége échevinal de Laeken
vient de dénoncer son contrat avec
ji la ville de Bruxelles pour ce qui con-
cerne les eaux que la capitale four-
nissait aux Laekenois.
A partir du 31 courant, ceux-ci
n recevront une eau de source pure et
saine par les soins de leur propre ad-
ministration.
Voila oü en sont ces heureux Laeke
nois. Parions que le Journal de M. le
Bourgmestre n'en dira jamais rien a
ses lecteurs trompés.
Mais, oü en sommes-nous dans notre
malheureux Ypres
II y a dans le marais fangeux de
Dickebusch, en moyenne, lm75 de
vase et 0m70 d'une eau croupissante,
microbienne.
Et il n'y a de cette eau détestable
que pour en donner pendant cinq hemes
sur vingt-quatre
Et cela se passé au coeur de l'hiver,
lorsque l'évaporation est presque nulle
et qu'il pleut fréquemment.
Comment cela se passera-t-il quand
nous aurons une sécheresse de plu-
sieurs mois Et dans un été chaud
Monsieur l'Ingénieur Temmerman
était un homme doué de qualités, pos-
sédant trés bien certaines branches. Mais
on l'accabla de besogne et il eut la
malechance de ne pas suivre les énor-
mes progrès faits en ces derniers temps
par la chimie organique, la bacteriologie
Vhydrologie et Vhygiène. Dans ces condi
tions il était exposé a se tromper et
c'est ce qui est arrivé.
M. le Bourgmestre, qui en connait
encore beaucoup moins, cela est évi
dent, a gobé toutes les méprises de M.
Temmerman; toutes ses hérésies scien-
tifiques, même ses erreurs matérielles.
Pour appuyer cette assertion il me
suffira de citer une petite bévue, entre
tant d'autres, mais une vraie perle.
II y a, de par le monde, de nombreu-
ses applications d'un système d'épura-
tion de l'eau impure par le fer, et qui
rend quelque service.
Or, a Ypres, on a voulu faire la mê
me chose. Mais voici comment on s'y
est pris. C'est cocasse
Prés du chateau d'eau on a construit
trois rigoles parallèles, dans lesquelles
se trouvent, de distance a distance, des
grillages ressemblant a des grillages
d'égout. Ces grillages sont recouverts
d'une êpaisse couche de rouille.
L'eau passe par ces rigoles et par ces
grillages rouillés pour se purifier. Elle
s'y charge, au contraire, de rouille et
d'organate de fer et cette soi-disant
installation pour la purification par lefer
est réellement une installation qui charge
l'eau de rouille et la corrom.pt davantage.
Dans le vrai système de purification
par le fer, après le contact avec le fer
métallique, (notez bien et non avec la
rouille) on élimine ce produit de la
combinaison des matières impuresavec
le fer, par un filtrage soigné.
Ce produit verdatre, eet organate de
ferest tout ce qu'il y a de plus mau-
vais. II se corrompt rapidement en
produisant de l'ammoniaque et en
roussissant l'eau.
Et voila comme quoi, par l'ignoran-
ce de ce détail capital, ce qui devrait
être une amélioration, produit une
aggravation de la qualité.
Cependant le rapport de M. Swarts
de 1888 fait a la demande de la ville
est d'une précision lumineuse sur cette
grave question Cela n'a pas arrêté un
instant l'attention de M. Temmerman
ni de M. le Bourgmestre lis n'ont pas
compris.
Cela se passé vingt-cinq ans après les
prodigieux travaux de Pasteur
Trente ans après les géniales décou-
vertes de Bishof
Est-ce croyable
M.Vermeulen, qui croit avoir étudié
les branches scientifiques aftérentes au
problème des eaux alimentaires et qui
asuivice qui s'est fait et publié sur
cette matière,est d'avis que ce qui s'est
fait a Ypres, a la porte d'Elverdinghe,
a été codqu et établi en dépit de ia
science, en dépit de l'expénence déja
acquise ailleurs, en dépit du sens com-
mun.
Cette opinion, M. Vermeulen sera
toujours heureux de l'exposer, de la
discuter ici, ou ailleurs, même en pu
blic, avec M. le Bourgmestre ou qui-
conque voudra bien s'occuper de
cette si intéressante et importante
question. P. V.
La nouvelle société libérale VAllian
ce, fondée par MM. Solvay, Féron, Go-
biet d'Alviella, Finet et Buis, s'est as-
signée, entre autres missions, celle
d'étudier en dehors de tout parti pris
les moyens d'arriver a la reconstitution
d'un parti libéral unique, dont le pro-
gramme serait assez large ponr donner
satisfaction a toutes les revendications
sociales légitimes tout en respectant et
renforgant le principe fondamental du
parti libéral la liberté la plus com
pléte pour tous les individus.
M. Solvay a voulu être le premier a
donner a ce sujet un avis étudié et so
lide, capable de servir de base aux
échanges de vues d'oü VAlliance veut
voir sortir un parti libéral reconstitué.
Dans la Revue de Belgique et les Annates
de VInslitut des sciences socialesM. Sol
vay recherche, avec sa hauteur de
vues habituelles, des formules du
progrès économique et de la morale
sociale pouvant correspondre aux né-
cessités de notre époque et aux besoins
d'un parti social.
Voulant contribuer, dans la mesure
de nos moyens, a l'oeuvre nécessaire
entreprise par VAlliance, nous allons
analyser par voie de citations au-
tant que possible les remarquables
études de M. Solvay. Elles sont dignes
de l'attention de nos lecteurs; ceux qui
y réfiéchiront ne pourront en mécon-
naitre la noble inspiration, a laquelle
on pouvait s'attendre d'ailleurs de la
part de M. Solvay, préoccupé des plus
hauts problèmes de la philosophie des
sciences et de son application a la vie
sociale.
Le cóté économique des choses, dit
M. Solvay, est entièrement dominant
dans la société, et on peut dire qu'il
constitue le fond même du mouvement
social de notre époque a chaque pas
que l'on fait, il s'i'mpose a lapensée.
Par tant de cette constatation de fait,
M. Solvay recherche, au point de vue
théorique, les éléments essentiels de
l'organisation économique de la socié
té, telle que doit la concevoir le parti
social qu'il voudrait instituer.
8 Si l'on examine l'homme au point
de vue social, mais indépendamment
de toute organisation existante, on
doit a première vue constater que s'il
voit le jour, si on le laisse naitre, c'est
pour qu'il vive que pour vivre, il doit
se nourrir, se vêtir, se loger, se proté-
ger que pour se nourrir, se vêtir, se
loger, se protéger, il doit travailler, et
que s'il travaille, il doit non-seulement
se reposer mais aussi se distraire
done, que, théoriquementtout homme
normal est forcèment oblige de produire di-
rectement ou indirectement et sous peine de
déchéance vitale, tout ce qui est indispensa
ble a sa nourriture, a son vêtement, a son
logement, a sa protection, a sa distraction
en quanlité et en qualité approprièes a son
tempérament, a son état de santé, au lieu et
a la contrée qu'il habitè et d son genre de
travail.
Tout ce nécessaire a la vie tant ma-
ténelle qu'mtellectuelle de l'homme,
M. Solvay le nomme production inte
grale. Elle est a la base de toute société
humaine. Elle y est tellement que,
du moment oü l'on range dans la pro
duction tout ce qui est relatif a la dis
traction normale de l'homme, on est
en droit de se demander si réellement
il existe autre chose que la production
a envisager comme étant une nócessité
dans la société si, en un mot, le bien,
au point de vue social, n'est pas tout
ce qui favorise la production intégrale,
le mal tout ce qui la contrarie.
Il ne peut être question de réduire
la production intégrale sans réduire
en même temps la vie moyenne de
l'homme.
Si l'on recherche comment s'est ef-
fectuée jusqu'ici la production inté
grale, il apparait aussitót qu'en gé-
néral et grace aux avantages y atta
chés, elle a été obtenue par la volonte
et le travail d'un certain nombre
d'hommes possédant des capacités spé-
ciales pour^ taire travailler mieux que
par eux-mêmes d'autres hommes de
moindres capacités, ou pour faire tra
vailler des machines ou appareils spé-
ciaux qui peuvent s'y substituer.
La multiplication des hommes capa
bles, des machines et appareils spé-
ciaux en activitó dans la production,
telle est pour M. Solvay la condition
de l'obtention facile et économique du
travail de l'homme moyen.
La lonction de la société, représen
tant l'ensemble des hommes, est de fa-
voriser cette multiplication mais sans
jamais entraver la production existante.
L'intervention des hommes capables
ou des machines a pour elfet de dimi-
nuer le temps nécessaire a la produc
tion intégrale. Le temps économisé de
vrait être consacré a l'instruction de
nouveaux hommes capables defaciliter
la production intégrale, et ce jusqu'au
moment oü- les capacités productrices
ainsi créées seraient devenues un excès
par rapport aux nócessités de la pro
duction.
8 Alors viendrait le moment oü le
temps économisé dans la production
intégrale pourrait être franchement et
intégralement employé a accroitre la
dose du repos ou de la distraction nor
male de l'homme ce serait alors de la
distraction et du repos excédants par rap
port aux nécessités de la production in
tégrale.
ANNONCES
Annonces 10 centimes la ligne.
Réclames25
Annonces judiciaires: 1 fr. la ligne.
Ces lois économiques établies, M.
Solvay constate combien elles sont
profondément troublées dans la société
actuelle. D'abord, chaque homme
valide est loin de tournir directement
ou indirectement, son quantum a la
production intégrale les uns travail-
lent trop et se distraient trop peu, les
autres travaillent trop peu et se dis
traient trop. Ensuite, il y a des inca-
pacités qui s'occupent de la production
8 paree que ces mcapacités sont capi-
talistes et que le capital a pouvoir d'ac
tion dans la société, pouvoir d'action
qui domine même celui des vraies ca
pacités productrices et qui, en outre,
se transmet souvent d'incapables a in-
capables pendant des générations.
L'hérédité capitaliste apparait done
a M. Solvay comme un mal économi
que qui trouble la production, base de
toute société humaine. Ce mal doit
être réduit progressivement, par l'im-
pót sur les successions, progressif par
génération, de fagon a amener l'extinc-
tion graduelle du capital transmis par
héritage.
M. Solvay reconnait que la fortune
acquise par le travail personnel et dont
on jouit légitimement ne doit pas être
frappée par l'impöt mais la fortune
transmise est un bien délaissé par son
édificateur et par conséquent éminem-
ment taxable.
Accroissement général du capacita-
riat producteur utile, élimination gra
duelle de ce qui s'oppose a la loi de
production normale de l'homme, enfin
réforme des impóts dans le sens de leur
plus juste proportionnalisation possi
ble a la fortüïrerréefêê et avec objectif
final l'impót unique sur les transmis
sions de fortunes tels sont les prin
cipes esseDtiels que doit adopter le
parti social tel que le congoit M. Sol
vay.
M. Solvay indique encore dans quelle
rnesure le parti social doit vouloir
l'intervention de l'Etat dans les ques
tions qui ont pour objet de limiter et
de taxer ofliciellement l'activité de
l'homme.
8 II doit tout faire pour éviter l'abus
et l'oppression il doit protéger l'en-
fance, la vieillesse, l'incapable et le
vrai sans-travail s'ils sont indigents il
doit aller franchement jusqu'a recon
nait re dès a présent a ces derniers le
droit a la vie tel qu'il existe pour tout
autre homme et il doit chercher le plus
vite qu'il pourra a leur assurer l'exis-
tence mais il ne peut d'une fagon gé
nérale intervemr officiellement dans
des questions relatives a la production
intégrale qui est libre et contrairement
aux lois qui dérivent de cette liberté
même. Son principe doit être de ren-
dre la production la plus économique
possible et c'est dans ce but qu'il crée
un maximum des capacités spéciales
intellectuelles et matérielies dans tou
tes les directions et a tous les degrés
de l'activité productrice. Son principe
doit étre ainsi d'avantager le travailleur,
quel qu'il soit, non pas en le payant
cher en tout et en produisant par suite
a haut prix toutes les choses qu'il em-
ploie, ce qui ne peut l'avancer, mais
bien en faisant intervenir de plus en
plus des machines et des capacités dans
la production, de fagon a lui ofirir tou
tes choses sans cesse meilleur marché
et a réduire de plus en plus son temps
de travail en accroissant celui de sa
distraction et de son repos...
Quant au domaine intellectuel, la
considération première sur laquelle M.
Solvay veut, avec raison, appuyer le
vrai parti social, c'est le principe du
libre examen ne rechercher que la vé-
rité positive et rejeter l'arbitraire.
A ce titre comme a bien d'autres,
M. Solvay assigne au parti libéral la
mission de devenir le vrai parti social
car il a sans trève défendu le principe
du libre examen, enseigué et propagé
la science, favorisé l'industrie, éclairé
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