$Barai$s(int Ie Hamedi. l'umü.n fait la force.
Journal libéral démocratique d'Ypres et de 1'Arrondissement
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OE L'IMPERATRICE O'AÜTRICHE.
Samedi, 17 Septembre 1898.
5 centimes Ie numéro.
4 6 année. i\T° 45.
L'assassinat
Les affaires de Crète.
Ph. de C.
A propos
du mouvement flamand.
PRIX DE L'ABONNEMENT
poue la ville, Par an 3 francs.
Pr LA province, Par an fr. 2-50.
L'impératrice Elisabeth d'Autriche
a été assassinée Samedi, a Genève, par
un anarchiste italien. Le crime est
d'autant plus lache et plus inexplica
ble qu'il a été commis sur une femme
qui ne jouait aucun röle politique, et
que son caractère et ses bienfaits au-
raient mis a l'abri de toute tentative
criminelie, s'il n'existait des individus
en qui Ie désir de se distmguer dans le
mal étoufte tout sentiment humain
Get horrible assassinat remet a l'or-
dre du jour la question de mesures
spéciales propres a éviter le retour des
drames sanglants dont plusieurs pays
ont été le théatre depuis plusieurs an-
nées.
Nous ne pouvons qu'applaudir a des
mesures préventives efficaces.
Mais il faut espérer, cette fois, que
les gouvernements songeront a faire
usage des armes qu'on propose de met-
tre en leurs mams pour frapper les
vrais coupables et les mettre hors
d'état d'exécuter leurs crimmels pro-
jets.
A la suite de l'assassinat du président
Carnot, les Chambres frangaises ont
voté une loi spéciale qui devait couper
court aax menées anarchistes. 11 n'en a
guère été fait usage que pour faire
poursuivi'e et renfermer des malheu-
reux publicistes coupables d'écrits li-
bertaires, mais innocents de toute
propagande par le fait Quant aux
vrais propagandistes par le fait, on les
a peu inquiétés.
Ce sont des errements auxquels il
faut mettre fin, si l'on veut réprimer
efficacement les projets des assassins
de chefs d'Etats.
II faudrait aussi réformer un mode
de surveillance des anarchistes qui
ressemble autant a de la provocation
qu'a toute autre chose.
II parait que dans une réunion anar
chiste tenue a Zurich, il y a trois se-
maines, l'assassinat de plusieurs chefs
d'Etats avait été résolu. Des policiers
de diverses nations assistaient a la réu
nion, oü ils s'étaient fait admettre en
feignant des opinions anarchistes.
Au lieu de provoquer des mesures
préventives, les gouvernements avertis
ont laissé venir les évènements, avec
une résignation vraiment inexplicable.
Quand done se résoudront-ils a baser
leur conduite sur l'axiome qu'il vaut
mieux prévenir que punir Si telle
avait toujours été leur regie de con
duite, que de sang et de deuil n'au-
raient-ils pas épargné Ph. de C.
Le sang coule de nouveau en Crète,
et il est impossible de ne pas en faire
retomber la responsabilité sur i'inac-
tion de la diplomatie européenne.
On se souvient que l'an dernier, pour
mettre un terme a la malheureuse si
tuation de l'ile de Crète, la Grèce y
avait envoyé un corps d'armée qui
avait pour mission l'expulsion des
Turcs.
L'intervention des puissances fit
échouer l'initiative généreuse des Grecs.
Les diplomaties se chargèrent de la
solution de la question crétoise.
Elles laissèrent dans l'ile les troupes
irrégulières turques, cause de tout le
mal. L'administration de l'ile fut pla-
cée sous la haute surveillance des ami-
raux anglais, russe, italien et frangais
(l'Allemagne et l'Autriche, quoique
d'accord avec les autres puissances,
avaient refusé de participer directe-
ment a l'administration de l'ile}.
Puis le provisoire se perpétua, sans
qu'une solution définitive apparut
comme prochaine aux Crétois anxieux.
La population musuimane des cam
pagnes, réfugiée dans la ville de Can-
die en attendant que la diplomatie dai-
gnat prendre le temps de statuer sur
son sort, s'est fatiguée d'une situation
misérable, et s'est soulevée. Lesbachi-
bouzouks turcs ont pris part au mou
vement, et les troupes réguhères du
sultan l'ont favorisé de leur complicité.
Cette fois, ce n'est plus'aeulement le
peuple grec de l'ile qu'a payé de son
sang l'inaction des diplomates. La ville
de Candie a été toute a feu et a sang
Les consulats européens ont été pil lés,
et de nombreux Européens, des An
glais surtout, ont perdu la vie dans le
soulèvement.
II ne semble pas que le sang répandu
ait eu le don d'émouvoir beaucoup les
diplomates en vacancesdix jours
après les massacres, aucune represen
tation n'avait encore été faite au Sul
tan rouge, qui semble décidément l'en-
fant gaté des grandes puissances au
cune démarche n'avait encore été faite
pour obtenir ce qui est le prélude né
cessaire d'une solution pacifique des
difficultés crétoises le rappel des
troupes turques.
Cette longanimité est d'autant plus
étonnante que les avertissements n'ont
pas manqué aux amiraux qui représen-
tent en Crète les puissances européen-
nes.
a Les fausses solutions ont rendu
dans Ie pays la situation intolérable
disait aux amiraux le président du
comité insurrectionnel crétois, appelé
pour aider les amiraux a maintenir
l'ordre.
La seule vraie solution serait la sé-
paration absolue de l'ile et du gouver
nement, turc, déshonoré par le meurtre
et le pillage.
Vous verrez qu'avant de s'y résoudre
on s'arrêtera encore a une cote mal
taillée qui ne satisfera persoime et qui
durera... jusqu'au procham massacre.
Le Tijdschrift van het Willems-Fonds
(n" d'Aoüt 1898, pp. 234-248) contient le
compte-rendu d'une conférence faite
a Bruxelles, le 7 Avnl dernier, par M.
Pol de Mont. Elle est intitulée een
keerpunt in de Vlaamsche bewegingles
idéés qu'elle contient méritent, nous
semble-t-il, quelques reflexions.
Pour M. Pol de Mont, le mouvement
flamand ne peut plus être considéré
comme une lutte pour le redresse-
ment d'une série de griefs, comme une
querelle entre les deux races qui habi
tant notre pays.
Sans insister maintenant sur cette
notion de races, nous y reviendrons
nous pouvons nous demander s'il est
exact de considérer le mouvement fla
mand comme une querelle de races
entre Flamands et Wallons.
Depuis 1830, les Flamands ont été
les victimes d'une situation inégale
dont les "Wallons recueillaient les avan-
tages mais ni les uns ni les autres
n'étaieüt les auteurs de cette inégalité,
résultante des circonstances politiques
que notre pays avait subies depuis des
siècles. Vers 1840, les Flamands ont
commencé a protester centre leur si
tuation légalement inférieure, et ils ont
eu cent fois raison; mais ont-ils jamais
donné a leurs protestations un carac
tère de haine pour leurs compatriotes
wallons D'autre part, ces derniers,
qui n'ont opposé aucune resistance sé-
rieuse nous parions de la masse du
peuple, et non de quelques politiciens
aux revendications flamandes, ont-
ils jamais manifesté de l'animosité
cqrtre les flamands
On répondra oui, si on considère les
actes et paroles de quelques individus
ilya des exaltés et des fanatiques dans
tous les partis. Mais on n'aura aucune
crainte de voir briser violemment l'u-
nité de notre patrie si on regarde les
choses d'un point de vue plus général
et plus exact.
Nous n'en voulons pour preuve
que ce qui s'est passé récemment, a
propos de la loi Coremans-Devriendt.
Le plus grand nombre des députés wal
lons l'ont votée, du moins les socialis-
tes et les progressistes. Quelques Wal
lons leur en ont fait grief, et ont mené
contre eux, aux elections de Mai. une
violente campagne le résultat en a
été nul.
II serait done inexact de dire que les
Wallons nourrissent contre les Fla
mands une animosité de race qui, si
elle existait, devrait remonter autre-
ment haut que les divergences politi
ques qui les divisent, et serait par con
séquent plus pröfondément ancrée au
coeur du peuple.
Regardant les choses de beaucoup
plus haut, dit-il,M, P. deMonténonce
ainsi la signification que, suivant lui,
il faut donner maintenant au mouve
ment flamandNotre mouvement
n'est pas autre chose qu'un épisode,
e'est le combat d'avant-poste de la
lutte sans trève pour la domination du
monde entre la race germanique et la
race latine.
S'il est bon de s'élever jusqu'a per-
dre de vue les petits aspects des cho
ses, encore ne faut-il pas aller jusqu'a
la zóne oü les choses apparaissent in-
distinctes et oü l'imagination a toute
latitude pour se substituer aux réali-
tés. Or, il nous parait bien que M. de
Mont, en poète qu'il est, n'a pas su
modérer son coup d'aile et s'est élevé
jusqu'a la zóne du rève.
Restant dans le domaine des faits,
nous voudrions voir citer ceux d'oü
l'on peut conclure que la race germa
nique ou la race latine aspire a la do
mination du monde. On pourrait nous
parler de Napoléon Ir, c'est-a-dire de
l'ambition d'un homme, puis on serait
au bout de son rouleau.
II faut d'ailleurs être fou pour pen-
ser a la domination du monde par un
peuple, pour la croire possible.
Adme'ttons que la race germanique
et la race latine cherchent toutes deux
a la réaliser a leur profit. Comment
l'une d'entre elles peut-elle y parve-
nir
Ou bien la race qui vaincra détruira
l'autre par une extermination com
pléte, a laquelle il est impossible de
songer depuis que les temps barbares
sont passés ou bien encore le vain-
queur s'assimilera le vaincu jusqu'a
lui faire perdre ses caractères de race,
jusqu'a le rendre identique a lui.
Or, d'après les ethnographes comme
d'après l'opinion commune, ces carac
tères de race sont des caractères physi
ques la forme et la couleur, et des
caractères sociauxle langage, la filia
tion historique, les moeurs, la religion.
II suffit de les énumérer pour se rendre
compte de l'absurdité qu'il y aurait a
vouloir les détruire tous.
On pourrait nous riposter par un
exemple que M. Pol de Mont cite lui-
même (p. 237)celui des Francs qui
transportèrent le siège de leur domi
nation de Tournai a Soissons, puis a
Paris, et dont les descendants, au mi
lieu d'une population gallo-romaine
beaucoup plus nombreuse, furent gra-
ANNONCES
Annonces 10 centimes la ligne.
Réclames25
Annonces judiciaires 1 fr. la ligne.
duellement latinisés, dégermanisés
(veriatijnscht, ontduitscht).
A la prendre comme M. Pol de Mont,
il ne serait guère flatteur pour ceux
qu'il nomme des géants de santé, de
force et de probité d'avoir été ainsi
absorbés par ces frivoles Gallo-Ro-
mains, corrompus jusqu'a la moëlle
des os
Mais le fait est que les Francs, con-
quérants de la Gaule, y subirent l'in-
fluence d'une civilisation plus avancée
que la leur et qui s'imposa a eux. Ge-
pendant elle ne les absorba pas com-
plètement, elle n'anéantit pas leurs ca
ractères de race par exemple dans la
couleur des cheveux, dans la langue,
les lois et les moeurs des Frangais d'au-
jourd'hui, on retrouve bien des parti-
cularités qui leur proviennent des
Francs.
Ceci nous amène a dire ce que nous
pensons de cette notion de race, dont
nous avons fait usage jusqu'ici dans le
sens vulgaire.
Get ensemble de caractères physi
ques et sociauK par lesquels les ethno
graphes déterminentlesraces ne répond
plus actuellement a aucune réalité il
est devenu une pure abstraction. Et
qui consentirait a, ensanglanter le mon
de pour une abstraction
Autrefois, avant les premières mi
grations et les premiers mélanges de
peuples, il y avait sans doute en Euro
pe des races, c'est-a-dire des groupes
d'individus ayant en commun une sé
rie de caractères de l'ordre de ceux
énumérés plus haut.
Mais si l'on considère tous les mélan
ges qui se sont produits dans les temps
historiquesseulement les documents
manquant pour les migrations préhis-
toriques on ne peut méconnaitre
que l'idée de race ait cessé d'être adé-
quate a une réalité.
Prenons pour exemple la France.
Gesar y distmguait les Aquitains, les
Gaulois et les Beiges, différents par le
langage, les moeurs et les institutions.
Les Beiges, habitant entre la Seine et
la Marne, d'une part, et le Rhin, d'au
tre part, avaient refoulé les Gaulois
vers le IVe siècle avant J.-C. eux-mê-
mes avaient dü passer le Rhin sous la
pression des Scythes ou Teutons, chas-
sés de leur pays, au VIIs siècle, avant
J.-C., par les Perses conquérants. Ce
sont ces Scythes ou Teutons quë l'on
considère comme les ancêtres des Ger-
mains.
Après les Romains, qui se mélangè-
rent aux Aquitains, aux Gaulois et aux
Beiges vinrent les grandes invasions
de barbares. Sans parler de ceux qui
ne firent que passer, en laissant cepen-
daDt des trainards quand ils quittèrent
le pays, ne citons que ceux qui, du
temps de Clovis, y avaient fondé des
royaumes les Visigoths et les Bur-
gondes. Joignons-y les Francs, puis les
Normands, puis les Sarrasins de la Nar-
bonnaise, puis enfin tous les éléments
qui, depuis douze siècles, se sont infil-
trés parmi ceux-la. II nous sera impos
sible de reconnaitre dans ce mélange
les caractères d'une individualité eth-
nique, d'une race ce qui ne nous em-
pêchera pas d'ailleurs d'y voir une
unitê politique aussi parfaite que possi
ble.
Repassons de la France, pays latin,
a l'Allemagne, pays germanique, nous
y trouverons aussi un mélange peut-
être moins disparate, mais assez com
plexe cependant pour nous conduire a
la même conclusion Teutons et Ger-
mains y sont confondus avec les Slaves
de la cöte baltique (Prnsse, Poméra-
mie,Mecklembourg), avec les Polonais
de l'Est, et les uns ne font pas de moins
bons Allemands que les autres. La,
aussi, l'absence d'unité ethnique coin-