M
t
JOURNAL D'YPRES ET DE L'ARRONDISSEMENT.
lre ANNÉE. N° 79.
DIMANCHE, 30 JANVIER 1842.
ye
INTERIEUR.
Exposition.
BUDJET DE LA VILLE D'YPRES.
FEUILLETON.
On s'abonne Ypres, rue du
Temple, 6, et chez tous les per
cepteurs des postes du royaume.
PRIX DE L'ABONNEMENT
par trimestre.
Pour Ypresfr. 5-00
Pour les autres localités 6-00
Prix d'un numéro 0-25
Tout ce qui concerne la ré
daction doit être adi franco,
l'éditeur du journal, Ypres. -
Le Progrès paraît le Diraanohe
et le Jeudj^d^chaque semaine.
AUX DES INSERTIONS.
Quinze centimes par ligne.
YPRES, le 29 Janvier.
Les organes avoués du clergé, en attaquant
les établissements d'enseignement des commu
nes et de l'état, ont coutume de s'apitoyer sur
le sort des contribuables. Si l'on nous confiait
l'instruction publique, font-ils, leur charge
serait bien plus légère nos chefs se charge
raient de veiller ce que l'enseignement fût
convenablement donne partout'sans exiger
aucune augmentation des traitements du clergé
portés au budget de l'état.
Pour nous, qui croyons que l'organisation
de l'instruction publique donner aux frais de
l'étatest un des premiers devoirs de tout
gouvernementun pareil argument nous tou
che peu. L'enseignement du clergé n'est pas
meilleur nos yeuxparce qu'il est bon
marché et le gouvernement qui, par esprit de
l'ésinerie, répudierait cette importante mission,
et la laisserait aux mains d'un parti dont les
tendances ne sont que trop connuesmériterait
le blâme sévère de tous les hommes instruits
et indépendants.
Mais d'ailleurs cette allégation des organes
du clergé est loin d'être confirmée par les faits.
11 y a quelques jours nous avons trouvé dans
les journaux une délibération du conseil de
régence de Malines concernant le collège com
munal de cette ville. Cet établissement, qui se
trouvait sous la surveillance immédiate de la
commune, a été cédé l'archévêque de Malines.
La ville doit entretenir les*bâtimentsfournir
des ustensiles de ménage du pensionnat, payer
les contributions, et donner un subside de
douze mille francs, sans qu'on lui tienne compte
des sommes payées par les élèves.
A ces conditionsl'archévêque de Malines
daigne protéger cette institution et y placer
des membres du clergé comme professeurs
le conseil communal par contre, renonce tout
droit de surveillance.
Eh bien le collège communal d'Ypres est
loin d'être une charge aussi pesante pour la
ville. L'allocation portée au budget pour cet
établissement, est de fr. 15,050. Eu déduisant
les sommes payées par les élèves et portées en
recette au compte de la ville, le subside donné
cette institution n'est en réalité que de
fr. 10,538-06 cs.
C'est dimanche, 30 de ce mois, que doit
avoir lieu l'hôtel de ville la distribution des
médailles décernées par l'administration com
munale aux industriels qui ont "obtenu des
récompenses lors de la dernière exposition de
l'industrie nationale Bruxelles.
Le même jour, 5 heuresles musiques des
deux régiments en garnison en celle ville don
neront une Soirée musicale au bénéfice des
pauvres. Chacune d'elles exécutera quatre mor
ceaux. Durant la pauseon commencera le
tirage au sort des objets qui ont été exposés.
Le prix d'entrée pour cette soirée sera d'un
franc. Le tirage continuera lundi 31. Le public
y sera admis sans rétribution. Nous espérons
que la commission fera imprimer le résultat de
la loterieafin de lui donner le plus de publi
cité possible.
Nous apprenons avec plaisir que la biblio
thèque de notre ville n'a pas été oubliée dans
la distribution des ouvrages de littérature
sciences, etc., faite par le gouvernement aux
diverses bibliothèques des villes de province.
Une collection de documents publiés par le
ministère des travaux publics vient également
de lui être envoyée.
Ces envois, les subsides accordés par la ville,
et les symphaties de tous les hommes instruits,
présagent, cette utile institution, le plus
brillant avenir.
Dans sa séance du 27 de ce mois, le conseil
communal a voté le budget pour l'exercice 1842.
Le total des recettes s'élève fr. 303,333-94
Recettes ordinaires
Recettes extraordinaires
fr. 181,863-68
fr. 121,470-26
Parmi ces dernièresfigurent: l°une somme
de fr. 61,186-69 reverser par l'administra
tion de la caisse d'amortissement, pour com
pléter le crédit de remboursement de la dette
activearrêté par résolution du 7 mai dr.
2° fr. 50,000 emprunter pour l'exécution de la
route d'Ypres la frontière de France par
Kemmel et pour servir les intérêts pendant
deux exercices.
Ces deux sommes étant destinées couvrir
des dépenses extraordinaires, le revenu réel de
la ville s'élèverait fr. 191,147-25.
Au nombre des recettes ordinaires, l'indem
nité de casernement figure pour fr. 24,820.
Le montant des recettes de l'année précédente
a été pour cet objet, de fr. 29,200 le
départ d'une partie de la garnison est cause
sans doute, de celte diminution.
Produit des taxes municipales fr. 119,000.
Nous devons faire remarquer que le produit de
ces taxes diminue depuis quelques années. Le
retrait d'une partie de la garnison et le défaut
de surveillance de l'administration ne peuvent
être cause de cette diminution, car nous avons
la preuve que la consommation loin de dimi
nuer, tend, au contraire, s'accroître, et jamais
la surveillance n'a été ni plus active ni plus
vigilante. Le fait que nous signalons ici doit
HISTOIRE A.NECDOTIQUE DU DIX-NEUVIÈME SIÈCLE.
LES AVENTURES
ET LES MÉSAVENTURES D'UN TAILLEUR, (Fin.)
II. UN DONJON.
Jacques Rifolé, anéanti, s'afTaissa sur une chaise qui se trouva par
bonheur derrière lui', sans cela, il serait tombé de son haut sur le
parquet."
Prisonnier Entre les mains de la gendarmerie Par ordre du
ministre! Avec les injonctions 1rs plus sévères Pourquoi!
Quel motif a changé lout coup, en paroles terribles, l'accueil
bicuveillant du duc d'Otrante? En quoi Rifolé a-t-il pu lui dé
plaire 11 faut qu il l'ait gravement ofTensé! Sans le vouloir, il aura
manqué aux lois de l'étiquette C'est pour cela que monseigneur a
déchiré la mesure d habit avec des témoignages si visibles de mau
vaise humeur et d'agitation.
Mon Dieu, queVa-t-il advenir de tout ceci, et quel sera le dénoue
ment d'une épreuve qui commence par un si redoutable début
Cependant, de temps autre, l'espoir se glissait dans le cœur du
pauvre Tourangeau. Le père Lombuis lui avait parlé souvent de
J humeur facetieuse de Fouohéquand ilétaitoratorien, et de sou goût
pour les mystific.t lious Tout cela est une espièglerie, pensa-t-il-
Tandis que le pauvre diable se livrait ainsi aux suppositions les
plus absurdes et les plus alarmautes, l'officier de gendarmerie, qui
n'avait cessé de tenir lesyeux attachés sur le prisonnier, reçut une
lettre dont il déchira aussitôt l'enveloppe. Quand il eut achevé la
lecture du papier qu'elle contenait, il donna tout bas des ordres
ses gens et fit signe Rifolé de le suivre. Rifolé obéit, croyant que
le ministre, après s'être amusé de sa frayeur, allait le faire mettre
en liberté. Ilélasi loin de là, un des gendarmes le saisit par le
collet, tandis qu'un autre lui présentait une paire de poucettes.
Quand les doigts du tailleur furent emprisonnés dans l'instrument
de géhenne, on l'emmena vers une chaise de poste qui stationnait
l'entrée d'une des cours intérieures de l'hôtel on hissa le pauvre
hère dans la voiture qui partit immédiatement, au milieu d'une
escorte de dix chasseurs cheval et quatre gendarmes en tête
chevauchant l'officier sous la responsabilité duquel se trouvait le
captif.
La chaise de poste prit le chemin de la rue Montmartre. Rifolé
crut qu'on le ramenait chez lui car il se rattachait obstinément
la seule idée qui lui parût vraisemblable et qui lui montrait, dans
son arrestation, une mystification de Fouché, dont l'humeur es
piègle et joviale, je vous l'ai dit plus haut, avait laissé beaucoup de
souvenirs drôla tiques au collège de Joigny.
La voiture passa rapidement devant la boutique du tailleur. A
peine eut-il le temps d'apercevoir, en se précipitant la portière
Agathe qui épiait par la fenêtre le retour de son mari. Il voulut l'ap"
peler et tâcher de se faire remarquer d'elle, mais les deux agens de
police qu'on lui avait donnés pour compagnons déroute, le rejetèrent
durement au fond de la voiture.
Rifolé vit tour tour le boulevard, la place de la Bastillele fau
bourg Saint-Antoine et la barrière du Trône disparaître derrière lui
La chaise de poste traversa ensuite, au galop, Je pont-levis de Viû-
cennes. Après quoi, le prisonnier, descendu de voilure, fut remis au
directeur de la forteresse qui, lui-même, le transmit un geôlier.
Ce dernier commença par dépouiller le nouveau venu de tous ses
vêtements qu'il visita jusque dans les doublures après quoi il lui
permit de se rhabiller.
La toilette de Rifolé terminée, il lui fallut montrer les deux cents
marches d'un escalier étroit et tournant sur lui-même. Cette vis de
pierre aboutissait un petit cachot aérien, meublé d'une paillasse.
Le geôlier fit signe au tailleur d'entrer et ferma sur lui le double
tour d'une grosse serrure j trois énormes verroux grincèrent dans
leurs anneaux de fer j quand ils se furent tus ils laisséient enten
dre le pas régulier d'une sentinelle qui allait et venait sur le seuil.
Agathe elle-même eût hésité reconnaître, dans le prisonnier
pâle et défait, qui habitait le donjon, la physionomie joviale et la
plantureuse figure de son mari. L'anxiété et la terreur du malheu
reux étaient parvenues au plus haut degre d excitation. Fiévreux
et engourdi la fois, il parcourait sa cellule comme une bête fauve
parcourt sa cage, flairant les murs et tachant d'apercevoir la cam
pagne par les meurtrières. Mais des auvens eu bois empêchaient de