JOURNAL D'YPRES ET DE L'ARRONDISSEMENT. INTÉRIEUR. ,Ire ANNEE. - N° 84. JEUDI, 17 FÉVRIER 1842. FEUILLETON. On s'abonne Ypres, rue du Temple, 6, et chez tous les per cepteurs des postes du royaume. PRIX DE L'ABONNEMENT, par tri mettre. Pour Ypresfr. 5-00 Pour les autres localités 6-00 Prix d'un numéro 0-35 Tout ce qui concerne la ré- dactiom doit être adressé,/raaro, l'éditeur du journal, Ypres. - Le Progrès parait le Dimanche et le Jeudi de chaque semaine. PRIX DES INSERTIONS. Quinze centimes par ligne. YPRES, le 16 Février. NOMINATION DES BOURGMESTRES. L'article 2 de la loi communale porte Le roi nomme le bourgmestre et les échevins dans le sein du conseil Le ministère propose d'ajouter cet article la disposition suivante Néanmoins le roi peut, pour des motifs graves, nommer le bourgmestre hors du conseil communal, parmi les électeurs de la commune la députation du conseil pro vincial entendue. Faisons remarquer d'abord que d'après les principes les plus élémentaires du droittoute exception une règle générale doit être clai rement définie et spécifiée le paragraphe que l'on propose d'ajouter l'article 2 de la loi tend autoriser une exception au principe gé néral, et pourtant il est .d'un vague effrayant et qui peut par conséquent prêter admirablement l'arbitraire. Le Roi peut pour des motifs graves... Mais qui sera juge de la gravité des motifs Qui décidera si ces motifs sont administratifs ou politiques, s'ils existent ou s'ils n'existent pas Le pouvoir sans doute; mais le pouvoir serait intéressé dans la question, d'abord pareeque la loi lui conférerait le droit de nomination, ensuite pareeque, dans un gouvernement consti tutionnel, il est nécessairement le représentant d une opinion le pouvoir serait donc tout la fois juge et partie, juge dans sa propre cause. C'est là une monstruosité que nulle loi ne peut consacrer. 11 est vrai que la députation du conseil provincial doit être entendue. L'intervention de ce corps serait, sans doute, pour les libertés communales, une puissante garantie, si cette intervention serait de quelque poids, et si un avis favorable était de rigueur; caria députation permanente est du moins une émanation (in directe il est vrai) des volontés populaires; mais comme il suffirait quelle fût entenduecette garantie ne garantirait rien, et cette espèce de restriction ne restreindrait en aucune façon le droit indéterminé dont le gouvernement serait investi. Les auteurs de la loi appréciant l'importance des fonctions communales, ont décidé qu'il ne suffisait pas d'être électeur, pourj être apte les remplir. On peut être électeur 21 ans, (art. 7 1er), mais, pour être éligible, il faut avoir atteint sa 25nie année (art. -47), et pourtant le projet porte que 'le roi peut nommer le bourgmestre parmi les électeurs de la com mune. Il s'en suivrait donc que l'homme qui n'a pas présenté au législateur assez de garanties pour faire partie du conseil communal, pourrait, par la seule volonté du pouvoir, être placé la tête de ce corps, en devenir le chef, et se voir revêtu de fonctions bien plus importantes que celles dont le législateur l'a^reconnu capable. Ne serait-ce pas là une inconséquence révol tante, une injure pour les électeurs, qui, certes, en pareille matière, sont meilleurs juges que le pouvoir quel qu'il soit. Lors des longues discussions qui précédèrent l'adoption de la loi communale, le gouverne ment proposa une disposition analogue celle que nous combattons aujourd'hui la section centrale, au contraire, voulut que le roi nom mât le [bourgmestre dans le sein du conseilet ce système prévalut. D'éloquentes paroles fu rent prononcées danscette circonstance, et, pour démontrer combien ce système est préférable l'autre nous croyons ne pouvoir mieux faire que de reproduire ici quelques fragmens du discours prononcé par Mr Deschamps, [Moni teur du 26 juillet 11134, 2e supplément Il est un fait, c'est que le bourgmestre administre les intérêts collectifs de la commune, c'est qu'il stipule eu son nom, c'est qu'il en est l'agent et le mandataire; or, comment pourrait-il stipuler en son nom, s'il n'en a reçu une délégation expresse comment sera-t-il son mandataire s'il ne tient pas d'elle son mandat? Après avoir combattu l'opinion de ceux qui voulaient que le bourgmestre fut élu directe ment par les électeurs, Mr Deschamps continue Ceux qui soutiennent que le pouvoir du bourgmestre relève du roi seul, sacrifient la commune d l'état, ou plutôt détruisent la com mune au profit d'une unité morte comme celle de l'Orient. Le système de la section centrale concilie les deux principes le bourgmestre devient par l'élection le mandataire de la commune, et le choix du Roi le rend représentant des intérêts nationaux il résulte de cette combinaison, outre la précision logique, un avantage moral et un élément d'ordre inappréciable. Ceux qui ne veulent pas d'élection préalable, se trompent donc étrangement, s'ils veulent par là donner plus de force au pouvoir exécutif la force, ce n'est pas l'arbitraire légal, ce n'est pas la con trainte qui enchaîne au lieu d'unir, mais c'est avant tout la con fiance et I9 justice. Non-seulement la modification que l'on pro pose détruirait toute l'économie de la loi, mais encore elle serait de nature rencontrer dans l'exécution de graves inconvénients, en jetant la discorde dans bien des communes. Tout gouvernement représentatif repose sur la confiance or, si un citoyen jouit d'assez peu de confiance pour n'avoir pas été élu membre du conseil, il serait dangereux que le pouvoir exécutif pût le mettre la tête de l'administratiou communale. Un tel choix ne tendrait qu'à amener du trouble dans la communeD'ailleurs le bourgmestre pris en dehors du sein du conseil n'aurait que voix consultative dans le sein de cette assemblée; mais qu'est-ce qu'un bourgmestre consultatif; un magistrat qui n'est pas le pair de ses collègues ne peut jamais avoir leur confiance. (l#r Rapport de la section centrale,y Non-seulement un magistrat communal qui n'est pas le pair de ses collègues ne peut avoir leur confiance, mais encore il n'obtiendra jamais celle des électeurs communaux qui ont formé le conseil il n'obtiendra jamais la confiance des habitans de la commune dont les électeurs sont la partie la plus notable. Il sera considéré comme un intrusun surveillantun ennemi et, fut-il aimé de tous, l'origine seule de sa no mination suffirait pour exciter contre lui des défiances et des préventions. Dan? le collège même, un bourgmestre nom mé directement par le pouvoir, obtiendrait peu de sympathies; les échevins verraient en lui un LA JEUNESSE D'UN HOMME POLITIQUE. Nous avons rencontré un vieux juge de paix, jadis minutant chez le même avoué avec M. Dupin, quand lous deux étaient petits clercs et fort loin de prévoir l'un la grandeur, l'autre la médiocrité où ils devaient arriver. M. Dupin, nous dit le vieux juge de paix, était alors extrêmement gai. Il est facile de s'en apercevoir son amour du coq-à-lâne et des jeux de mots, dont il lui est impossible de se défaire entièrement, même dans les circonstances les plus graves et les plus sérieuses. Si nous disons notre pensée entière, nous avouerons que le vieux juge de paix, dans les récits qu'il nous a faits, nous a semblé un peu mû par un autre motif que celui qui nous fait les recueillir. Parti du même point que M. Dupin, son camarade pen dant plusieurs années, laissé de si loin en arrière, peut-être né gligé et oublié, il n'est pas fâché d'attribuer au hazard, ou pis encore, la distance qui s'est faite entre eux, et qu'il se plaît rap procher en raeontant de ses étourderies de jeunesse qui pour nous, loin d'être un titre au blâme, sont au contraire l'indice d'une nature riche et généreuse. Il faut avoir été enfant et jeune sous peine de n'être jamais qu'un homme ordinaire. Nous laisserons parler le vieux juge de paix. Dupin n'était pas joli. Encore frotté d'études classiques, nous l'avions surnommé Thersite. Et beaucoup d'entre nous auraient été fort embarrassés de dire son véritable nom. Il ne se passait pas uu jour sans quelque nouvelle plaisanterie. C'était le soir la sortie dç l'étude qu'il mettait exécution les charges qu'il avait méditées tout le jour. Un soir, il décrochait les enseignes de deux boutiques et les remplaçait l'une par l'autre. Et le lendemain malin, on voyait au-dessus d'un boucher: Madame Leroy blanchit les chapeaux de paille, et Martinboucher, au-dessus de la boutique de le mercière. Une autrefois, il frappe uueporte; on ouvre, il s'adresse au portier M. Desfonandrès? Ce n'est pas ici. Comment ce n'est pas ici Non, monsieur. Le numéro 13 Oui, monsieur. Et M. Desfonandrès ne demeure pas ici Non, monsieur. Vous ne connaissez pas ce nom-là dans le quartier -h Qu'est-ce qu'il fait ce monsieur C'est un fabricant de perruques d'osier pour les chevaux du roi. Plaît-il? C'est un fabriquant de perruques d'osier pour les chevaux du roi. Le portier, interdit, le regarde. M. Dupiu était dun sérieux de glace. Le portier hésite, puis répond Je ne connais pas. Pardon de vous avoir dérangé. 14 n'y a pas de quoi. Une autre fois il entre chez une marchande de gants fort célèbre par sa beauté. Il y avait plusieurs dandys dans la boutique et la jolie marchande leur essayait elle-même des gants qu ils ne payaient que pour se les faire essayer. M. Dupin salue la marchande et dit Mon dieu, madame, je vous demande un million de pardons. Je suis étranger, nouvellement arrivé Paris. Je ne sais pas un mot de français. Je crains de ne pas me faire comprendre. Je voudrais avoi

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