3 EXTERIEUR. FRANCE. -Le roi de Prusse était le 20 juillet Kœ- nigsberg. On disait Berlin que S. M. prussienne en verrait Paris l'un des princes de sa maison pour complimenter Louis-Philippe, l'occasion de la mort du prince royal. C'est le prince Charles qui serait désigné pour celte mission. M"e Rachel est allée hier Bôitsfort où M. le représentant Verhaegen lui a fait les hon neurs de sa belle propriété. Le conseil communal de Gand, s'est réuni le 26 juillet, en séance publique. Sur la proposition de M. VànToersy une lettre de condoléance sera adressée Mme veuve Van Belle, au nom du conseil. Dans sa séance secrète, le conseil commu nal de Gand, a rejeté les propositions faites par la Banque de Flandre, tendant être constituée caissier de la ville. Les offres de la Banque étaient très-avantageuses et auraient procuré la ville une économie annuelle de 5 6 mille francs, mais il paraît que les dispositions de la loi communale n'ont pas permis au conseil d'y accéder. Le conseil a réduit de huit mille cinq mille francs le traitement du receveur communal, en stipulant qu'il serait donné avis de cette résolu tion ceux qui demandent l'emploi, aujourd'hui vacant par la démission de M. Van Bosterhout. Le roi de Prusse en apprenantàKœnigsberg la mort du duc d'Orléans, a ordonné qu'on conlremandât tous les préparatifs de fête faits pour sa réception. S. M. Guillaume IV avait une estime toute particulière pour M. le duc d Orléanset on rapporte que dans une conversation tenue Oslende, l'an passé, avec le roi Léopold, le roi de Prusse aurait dit que, selon lui, le prince royal de France était, de tous les princes héré ditaires, le seul la hauteur de sa mission. On ne pense pas que les vérifications des pou voirs de la chambre des députés puissent être terminées pour les cérémonies funèbres. Ce sera par conséquent M. Laffitte qui sera la tête de la dépulation de la chambre des députés en sa qualité de président d'âge. Le roi ayant prononcé un discours pour l'ouverture de la sessionles deux chambres ne peuvent se dispenser de faire une adresse mais les ministres doivent demander que la ré ponse soit aussi courte que le discours du trône et que l'on s'abstienne de toute espèce d'allu sion politique. Dans ce cas l'adresse pourrait être proposée et votée en deux séances moins que la question ministérielle ne soit soulevée cette occasion par l'opposition. La réunion des membres de la gauche d'hier a adopté M. Gdillon-Barrot pour son candidat la présidence de la chambre. Il a été décidé en outre que l'opposition maintiendrait avec soin la question de Régence en dehors de la question ministérielle, mais qu'elle chercherait soulever celte dernière question avant la prorogation de la session. La salle des séances du palais Bourbon était disposée comme l'ouverture des précé dentes sessions. Les drapeaux tricolores disposés en faisceaux ont tous une cravate de crêpe noir. A droite, et gauche du ti'ôtié sont quatre pla ces destinées aux princes. De très-bonne heure des places réservées sont envahies. Tout lemonde est en noir, ce qui donne la salle un aspect sombre et sévère. On remarque que la tribune ordinairement réservée la reine et aux prin cesses, est occupée par d'autres personnes, midi les députés et les pairs arrivent suc- cessivement. Legénéral Petit, l'amiral Rosamel, M. Vincent, M. d'Argout, M. Portalis et M. le baron Séguier arrivent des premiers aux ban quettes réservées MM. les Pairs. Parmi les déT putés nous remarquons quelques nouveaux élus, MM. Cremieux, Garnier-Pagès, Belhmont, etc.; rassemblée devient de plus en plus nom breuse et enfin une heure elle est tellement compacte, qu'un certain nombre dedéputés.ne trouvant plus de place sur les banquettes, res tent debout ou s'assoient sur les gradins inter médiaires. M. Molé est entré des derniers dans la salle au point qu'il n'y avait plus de banquette dis ponible. M. d'Argout lui désigne en riantlé banc des ministres qui estencore vacant. A une heure et demie le canon des Invalides se fait en tendre, les tambours battent aux champs. Des cris de Vive le Roi retentissent; les ministres, les maréchaux, le conseil d'Etat et les deux dé- putations de la chambre des pairs "et de la chambre des députés sont successivement intro duits, enfin un huissier de là'.éliarmbre dit d'une voix forte: Le Roi. L'assemblée toute entière se lève. Le Roi gravit péniblement l'estrade, il a l'air abattu. A sa vue, pairs et ministres crient Vive le Roi! avec une ardeur et une émotion in dicibles. Le roi, succombant en quelque sorte son trouble, s'arrête presque chancelant. Les cris redoublent. Le roi arrive enfin son fau teuil, il est entouré du duc de Nemours, du prince de Joinville des ducs d'Aumale et de Montpensier. Il prononce le discours suivant d'une voix entrecoupée Messieurs les pairs Messieurs les députés Dans la douleur qui m'accable, privé de ce fils chéri que j'avais cru destiné me remplacer sur le trône et qui était la gloire et la consola tion de mes vieux jours j'ai éprouvé le besoin de hâter le moment de votre réunion autour de moi. Nous avons ensemble un grand devoir remplir. Quand il plaira Dieu de m'appeler lui, il faut que la France, que la monarchie con stitutionnelle ne soient pas un moment exposées une interruption dans l'exercice de l'autorité royale Vous aurez donc délibérer sur les me sures nécessaires pour prévenir pendant la mi norité de mon bien-aimé petit-fils cet immense danger. Le coup qui vient de me frapper ne me rend pas ingrat envers la Providence qui me conserve encore dés enfants si dignes de toute ma tendresse et de la confiance de la France. Messieurs, assurons aujourd hui le repos et la sécurité de notre patrie. Plus tard je vous appellerai repreudre sur les affaires de l'état le cours accoutumé de vos travaux. Après ce discours auquel ont répondu de nouvelles acclamations le ministre de l'inté- rieur lit la formule du serment des députés pré sents. Parmi ceux qui n'ont pas répondu, nous avons remarqué MM. Cormenin Dupont de l'Eure, Gras-Préyille, Duvergier de Hauranne Grasch LabourdonnayeLa Rochejacquelin etc. Cette opération terminée, M. le garde-des- sceaux annonce au nom du roi que la session est ouverte. Le roi se lève et de nouvelles acclamations accompagnent son départ. Adeux heures S. M. était de retour aux Tujleries, où elle était arri vée de Neuilly onze heures et demie. -Par ordonnance du roi du 18 juillet, il est ouvert au ministère de l'intérieur un crédit ex traordinaire dp 400,000 francs pour la dépense des obsèques du duc d'Orléans. La régularisa tion de ce crédit sera proposée aux chambres lors de leur prochaine session. Une autre ordonnance du 20 juillet ouvre un crédit defr. 139,166-66 c. applicable au douaire de la duchesse d'Orléans. Cette dépense sera l'objet d un chapitre spécial au budget de 1841. On ne croit pas que la session qui s'ouvre aujourd'hui doive durer plus d'un mois. Car les chambres n'auront pas s'occuper d'autre chose que de la question de la régence et elles seront ajournées ensuite au mois de novembre suivant les uns, la fin de décembre suivant les autres. Cependant le projet de loi de régence soulèvera nécessairement une discussion très- approfondie et il est difficile de conjecturer quelle époque elle pourra être terminée. On prétend qu'elle comprendra certaines questions d'argent et de dotation qui devront retarder le vote définitif. Quelques personnes prétendent que la loi qui fixait un million la dotation du prince royal avant son mariage et deux mil lions lorsqu'il serait marié, avait été faite pour tout le temps du règne de Louis-Philippe et d'après celte opinion que les miuistres veulent, dit-on, faire prévaloir, on ne croirait pas devoir demander aux chambres une nouvelle dotation pour le comte de Parisauquel on adjugerait tout simplement le bénéfice de la loi volée pour le duc d Orléans. Mais on aura nécessairement présenter aux chambres un nouveau projet toute sa conduite. Sa jambe fracturée avait été mal remise. Une opération extrêmement douloureuse devenait nécessaire pour corriger la faute du premier chirurgien. Ynigo boitait. Soldat, et orgueilleux de sa beauté naturelle, en dépit de ses rêveries pieuses il conservait encore cette fatuité militaire qui ressemble assez la coquetterie féminiue. Il se soumit l'opération dont je viens de parler. On scia une partie du tibia; l'on força une partie de l'os s'étendre au moyen d'une machine disposée pour cet effet, Ynigo aima mieux souffrir cette torture que de rester boiteux. Ce courage et cette résolution, il ne tarda point en faire un autre usage. Ici commence une nouvelle existence pour Loyola. Vous le voyez, Don Quichotte nouveau, prendre pour règle de sa vie une poésie mystique, héroïque et aventareuse, dont les lectures de sa retraite ne cessaient de le pénétrer et de l'enivrer. Il était faible. On le condamnait une diète austère; il pouvait peine marcher. Il de mande des livres Palmcrin d?Angleterre, Amadis de Gauletoutes ces belles épopées de chevalerie, qui le ravissaient d'admiration. Ces livres ne se trouvaient pas chez son pèrei On lui donna une Vie de Jésus-Christpar Landolphe chartreux, et la Vie des Saints. Telle est la ressemblance qui se trouve entre Ynigo, relégué dans son castel, et Don Quichotte solitaire dans son manoir, qu'un écri vain protestant soupçonne Cervantes d'ironie contre le fondateur des jésuites, et d'avoir transporté dans ses pages admirablement co miques, la piquante réalité que lui offrait la vie de Loyola; nous ne le pensons pas Cervantes a puisé dans son siècle et dans les mœurs de son pays les matériaux de son œuvre. Rien de plus commun en Espagne que cette existence farouche, cette exaltation solitaire, cette concentration de toutes les facultés sur un seul point, de toutes les forces de l ame dans une seule pensée. La monomanie d'Ynigose tourna vers la religion, faute de pouvoir s'attacher la chevalerie. Avant sa maladie et l'époque de sa retraite, il avait pour Dulcinée, pour amante platonique, une princesse ou une reine, dont ses bio graphes ont oublié de conserver le nom. No eracondesa ni duquesa, mas era su estado mas alto que ninguna destas. Elle n'était ni com tesse ni duchesse, mais son rang était plus élevé que celui des com tesses et des duchesses. Fait singulier que l'on a essayé d'ensevelir et de cacher aux yeux, de peur de scandaliser les hommes dévots, mais qui révèle d'un trait toute la situation morale et intellectuelle de Loyola. Imaginez ce chevalier étendu sur son lit, dans le silence et le repos, au sein d'une retraite féodale. Privé de ses lectures favorites, il ac cepte, faute de mieux, ces Vies des Saints, aussi fabuleuses que tous les romans apocryphes, mais bien plus touchantes et plus persuasives. Loyola les regarde comme dictées par lEsprit-Saint et croit tous leurs miracles. Quellcpâture pour une imagination enfiévrée! Voici un autre héroïsme. Il est pur de sang et de larmes; il ne commande pas le meurtre et le crime il promet une gloire éclatante et une fé licité éternelle. Ynigo s'arma pour l'Éternel et pour l'église catholi que, comme il se fût armé pour la dame de ses pt nsées. Le rêve ardent de sa convalescence fut le mobile de sa vie l'institut des jésuites sortit de la chambre d'un malade moitié fou. Ce que Saint François et Saint Dominique avaient fait, ne pouvait- il pas le faire Longtemps cette question, déjà résolue dans sa pensée, y fermenta pour porter bientôt toutes ses conséquences. Une image de la Yierge était placée devant son lit, il se leva au milieu de la nuit et se précipita genoux devant elle. Là, il résolut et fit serment d'aller pied Jérusalem, d'étouffer force de macérations et de douleurs, les souvenirs mondains et la voix des passions. Doué d uue persévérance tout espagnole et d'une ferveur concentrée, il se pro mit d'être le chevalier errant de l'Église. Une abstinence pytbagori- que, une abnégation complète, devinrent la règle de sa vie. Bientôt les visions et l'extase, suites nécessaires de cette situation mentale le récompensèrent de son dévouement et aggravèrent sa folie. Il crut voir la vierge qui l encourageait, il entendit des voix cclestes. Ne tournons point en raillerie ces extases; quand la faiblesse de l'homme veut se plonger la source de l'être et dépasser sa propre nature c'est ainsi que Dien la punit une hallucination in vincible détruit cette raison si orgueilleuse; objets de pitié plutôt que d'ironie, les hommes que de telles peusées égarent ent droit n'être pas confondus aveo les fourbes. [La suite au prochain numéro

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Le Progrès (1841-1914) | 1842 | | pagina 3