JOURNAL D'YPRES ET DE L'ARRONDISSEMENT.
2' ANNÉE. N° 207.
DIMANCHE, 23 AVRIL 1843.
zr n»
INTERIEUR.
FEUILLETON.
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YPRES, le 22 Avril.
LE COLLEGE COMMUNAL.
Nous revenons encore aujourd'hui sur un
sujet déjà traité par nous, parce que nous avons
cru devoir émettre quelques réflexions que
nous a suggérées la lecture du rapport, sur le
concours entre les athénées et les collèges nous
avons d'ailleurs peu de chose ajouter ce que
nous avons dit d'abord.
Le rapport exprime le vœu que l'on établisse
deux catégories de collèges c'est aussi notre
avis, attendu qu'e4i..j3êi peut raisonnablement
faire concourir entWeux des athénées et de sim
ples collèges, des établissements qui possèdent
une Septième,.avec d'autres qui n'en ont pas,
des établissements enfin qui ont une population
scolaire nombreuse, avec d'autres où elle est
moindre. Ces motifs militent certainement en
faveur du projet du gouvernement, et si la me
sure qu'on invoque aujourd'hui eût été prise
l'année dernière, le collège communal eût été
couronné, car il marche la tête de tous les
établissements du second ordre.
Ce résultat doit être, pour les jeune# gens qui
fréquentent les cours de notre collège, un puis
sant motif d'émulation, en même temps qu'un
avertissement pour les pères de famille circon
venus par des émissaires qui ne cessent de tra
vailler sourdement auprès d'eux, pour arracher
leurs enfants l'établissement de la commune;
qu'ils repoussent d'odieuses obsessions, il y va
de l'intérêt même de leurs enfants en un mot,
qu'ils ferment l'oreille aux mensonges et aux
calomnies que les affidés de certain parti pro
diguent, afin de noircir un établissement auquel
on ne déniera plus maintenant, ce nous sembla
le droit de révendiquer, juste titre, la cd&-*
fiance de nos concitoyens.
Professeurs et élèves doivent rivaliser de zèle
et d'efforts, et si le projet du gouvernement
s'exécute, nous avons l'espoir fondé que notre
collège se montrera avec distinction dans les
luttes qui vont s'ouvrir c'est le moyen le plus
sûr d'imposer silence la calomnie, et de dé
jouer des intrigues peu compatibles, il est vrai,
avec le principe de liberté d'enseignement, mais
auxquelles ne se fait pas scrupule de recourir
un parti qui, tantôt, sait revêtir la fraude des
formes de la légalité, tantôt, vicier les lois, en
faisant servir ce qu'elles ont de plus respectable
au triomphe de l'iniquité.
L'EGLISE DE S4 NICOLAS.
Les travaux de construction de la nouvelle
église de S4 Nicolas se poursuivent avec activité,
et tout nous fait présager <jue la campagne ne
se terminera passans que le monument soit
achevé, ou peu s'en faut.
Nous avons vu celte occasion, un écrit où
force louanges sont adressées aux personnes
qui, par des dons pécuniaires sont venues au-
devant des dépenses nécessitées par l'érection
du nouvel édifice, rien de plus juste, notre
avis mais ce qui ne l'est pas, c'est que l'auteur
du panégyrique en question ait rayé de son
éloge notre autorité communale qui méritait
d'y avoir part en effet., elle aussi a coopéré
puissamment parfaire Jes fonds de premier
établissement.
C'est sur l'initiative du eonseil de régence, que
la province a voté un subside, et ce n'est qu'alors
que l'état secondant le zèfe des fidèles, celui de
la comtaune et celui de là province, intervint
son tour il en résulta que la paroisse put dis
poser d'une somme de 29,000 francs, dans
laquelle,
La ville donna5,000 fr.
La province. 8,000
L'état16.000
Total 29,000 francs.
Ce chiffre n'est pas, ce nous semble, si minime,
qu'il ne méritât aucune mention d'ailleurs
l'équité n'ordonne-t-elle pas de rendre César
ce qui appartient Gésar, Dieu ce qui appar
tient Dieu? Mais quoi bon insister sur ce
point? C'est bien d'équité qu'il s'agit chez nos
adversaires Ne sait-on pas que les magistrats
au vote desquels ils sont redevables d'une
somme de 29,000 fr. ont encouru leur colère
le jour où ils refusèrent de subsidier deux établis
sements d'instruction alors qu'il était évident
qu'un seul devait suffire? Ne sait-on pas que,
par suite de leur vote consciencieux, ils se virent
en butte aux injures et aux sarcasmes de nos
adversaires qu'ils furent dépeints par eux
comme des ennemis de la foi, comme des démo
lisseurs, qu'on essaya même, par des placards
incendiaires de les vouer la vindicte des brutes,
enfin que ce ne fut point la faute de nos pré
tendus modérés, s'ils ne furent point proscrits
tout jamais, lors des dernières élections?
Qu'ils se consolent du reste, il y a quelque
chose de plu&puissant que de vaines diatribes,
c'est le bon serisjbublic, ét la faction l a éprouvé
le jour où la iq^jorité de nos concitoyens réha
bilita ses magistrats communaux, et sut déjouer
d'une manière exemplaire des machinations
ourdies de longue main.
Nous ne terminerons pas cet articlesans
donner nos adversaires un conseil que nous
croyons sensé, c'est de ne pas inscrire sur le
frontispice du temple que la date dé sa construc
tion coïncide avec la promulgation de la loi du
23 Septembre çe serait là une légende qui sen
tirait par trop son parti, et vous savez leuas que
l'on fait en certaines circonstances, des inscrip
tions qui jurent avec l'époque qu'elles sont des-
tinée^ rappeler.
C'est abusivement que, dans le N°du Progrès,
du 9 du courant, article communiqué par uu
Campagnard, il est fait allusion la commune"
de Wytschaete. C'est K.EMMELque les événements
signalés ont eu lieu. Suiirn cuique.
LAMAIN DE LA MADONE.
chronique vénitienne (1700).
I. [Suite.)
Au bout de quelques minutes la siguora reconnut au clapotement
de Lcau contre les murs et au retentissement des coups de l'aviron,
que la gondole entrait sous une voûte. On lui fit bientôt monter un
escalier qui lui sembla de marbre; puis elle fut confiée par le marin
aux soins d'un autre domestique, et après avoir marché longtemps
travers des appartements qui s'ouvraient et se refermaient sous ses
pas, on détaohtt son bandeau et elle se trouva dans un salon tellement
éclairé que ses yeux éblouis ne pouvaient distinguer qu'avec peine
les somptueuses tentures dont il était orné. Un vieillard se tenait
debout devant elle; sa figure était demi cachée sous un masque
noir, et il était revêtu d'un simple et riche manteau de velours
fourrures d'hermine.
Femme,» lui dit-il d'une voix impérieuse, tout cft que tuf vas
voir ici te semblera peut-être bizarre; mais, si lu fais cas de la vie,
tu te garderas d'émettre Ion avis avant qu'il te soit- formellement
demandé. La dame laquelle lu vas donner tes soins est d'une santé
délicate; ses jours me sont précieux millefois plus que ceux de l'en
fant dont elle sera mère.'Pour peu que le moindre danger se déclare,
n'hésite pas sacrifier laft faible et'inutile créature qui n'aura pas
encore vécu. Je te donne ma parole de noble vénitien qu'il ne te
sera demandé aucun compte ce sujet; Opère dono sans scrupule et
compte sur ma libéralité.
Le vieillard appuya sur ces mots sans scrupuleavec une inflexion
de vo^l qui semblait leur.donner une tout autre signification.
Sainte mère de Dieu pensa matrone, est-ce un meurtre
que me demande ce terrible vieillard Ensuite elle dit haute
voix Avec l'assistance du ciel, illustre seigneur, je ferai de mon
mieux. Puis, remarquant uu étrange mouvement d'impatiencé
queJit le vieux praticien, elle ajouta: v Oui, seigneur, pour la sûreté
de la noble dame.
Le vieillard remua la tête en signe de satisfactiou et la matrone
fut introduite auprès de la dame souffrante. Le costume de celle-ci
était un simple déshabillé et il était impossible déjuger de son rang
d'après les traits de sa figure, car un masque mentonnière de soie
la couvrait entièrement. Le vieillard était là impassible. Au moment
où l'enfant allait recevoir la vie, la matrone se sentit saisir au bras,
mais 1 instinct de sa profession et la droiture de son cœur ne lui per
mirent pas de traduire ce mouvement, si toutefois il devait avoir
une criminelle interprétation.
Que va devenir l'innocente créature? dit la matrone en cher
chant machinalement autour d'elle ce qu'elle était habituée trou
ver, même dans les chaumières, pour les premiers besoins d'un nou
veau-né. -
Le vieux seigneur ne répondit cette question que par uu gcsle
horriblement significatif il fit signe la praticienne, qui prit l'enfant
dans ses bras et le suivit dans un autre appartement.
Il s'agit maintenant, dit l'incpimu d'une voix sevère et dé
daigneuse, t« de trouver une noiirrice cet enfant c'est un soin qui
doit être facile une femme de ta profession. Prends celte bourse
et garde ton fardeau tu auras bientôt de mes nouvelles.
Le vieillard frappa dans ses mains. Un domestique parut; il re
plaça sur les yeux de la matrone le bandeau qui lui avâil été enlevé
dans ce même appartement. Poursortir du palais, elle ne revint point-
sur ses pas, car elle sentit en sortant du salon l'air tiède et embaumé
d'une serre chaude; elle réjoignit plus promptement la voûte où la
gondole était amarrée. Elle sentit bientôt le grand air des laguues.
alors un faux mouvement lui ût perdre l'équilibre, et elle étendit les
bras pour se soutenir. Sa main rencontra l'angle de la muraille et
porta sur la petite statuette en marbre d'une de ces madones que les
Vénitiens plaçaient ordinairement devant leur porte pour en faire
le paljadium de leurs demeures, La signera Barilella s'aperçut Tju'un