JOURNAL D'YPRES ET DE L'ARRONDISSEMENT.
DITÉRIEDR.
DIMANCHE, 14 MAI 1843.
3" ANNÉE. N° 213.
FEUILLETON.
Tout ce qui concerne U ré
daction doit être idresaéjjfranco,
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Prix d'un numéro 0-35
bientôt appelé modifier par ses choix, la mar
che du pouvoir qui conduit si malheureusement
les destinées de la Belgique, peut juger de quel
mépris pour nos libertés sont animés nos mi
nistres et comme on mutilerait la Constitution,
si le parti qui est aux affaires venait prévaloir
dans les prochaines élections.
Le ministère a trouvé la question assez grave
pour daigner entrer en explication. L'Indépen
dant a cru pouvoir assurer que le ministère n'a
fait aucune menace au propriétaire du Précur
seur. Mais, dit le journal semi-officiel, les pays
qui lui ont confié des fonctions diplomatiques
sont éminemment catholiques et n'ont peut-
être point approuvé leur consul, d'avoir défendu
en Belgique les libertés .de son pays attaquées
par une caste cléricale, semblable celle qui
domine en Sardaigne et,en Toscane.
Voilà de belles explications, mais qui sont
loin de suffire. Puisque S Indépendant était en
veine de s'expliquer, que ne nous a-t-il dit qui
avait provoqué cette censure de M. Morel par
les cours de Toscane et de Sardaigne. Si le mi
nistère n'a fait aucune démarche près de M.
Morel, peut-être en a-t-il conseillé une aux évè-
ques, et entre pays éminemment catholiquesle
clergé fait un échange de services. Voilà com
ment les explications de XIndépendant peuvent
être commentées. Il s'en suit que le parti cléri
cal exige non-seulement, que les fonctionnai
res du pays fassent profession d'un dévouement
servile son égard, mais encore, que ceux qui
sont investis de pouvoirs diplomatiques par
des puissances étrangères, sont traqués et per
sécutés, s'ils osent se permettre de prouver par
écrit, que la Belgique gémit sous l'oppression
cléricale et que la révolution n'a été faite qu'au
profit du clergé.
Le rôle joué par M. Nothomb n'est point
encore fini. Il est toujours digne d ètre l'homme
d'affaires des honnêtes Messieurs du clergé et
de leurs moraux et nullement ambitieux adhé
rents. Nous venons d'en avoir une nouvelle
preuve.
Une brochure vient d'être distribuée aux ad
ministrations communales. Elle contient le dis
cours prononcé par M. Nothomb, l'occasion
des fraudes électorales. On n'a point encore
oublié celte fameuse homélie, sur la belle inven
tion des ministères mixtes si favorables tous
les hommes d'état sans foi ni conviction politi
ques. Le ministre de l'intérieur y débutait par
dire, qu'il avait perdu ses amis, mais non ses
principes. Pour ces derniers, il n'a jamais pu les
perdre et pour cause. Quant ses amis, ce sont
eux qui ont rompu toule liaison avec lui, quand
après avoir vu voter M. Nothomb en faveur du
ministère libéral, ils l'ont trouvé dans les rangs
de ceux qui ont poussé le sénat voter la fa
meuse adresse.
Mais la tâche de l'homme d'affaires du clergé
était bièri plus noble. Il s'agissait de prouver, en
dénaturant les faits, que ceux qu'il appelait au
trefois ses amis, avaient gouverné le pays aide
d'une majorité mixte. Oui. elle était mixte, par
la couleur que les députés qui en faisaient
partie, ont adoptée depuis, mais nullement par
leurs opinions sur les questions l'ordre du
jour, celte époque. Alors, il s'agissait de finir
la question extérieure et les partis pouvaient se
classer en modéré et belliqueux. Le ministère
de 1833 croyait que notre indépendance pou
vait courir les plus grands dangers, par suite
d'un conflit avec la Hollande.
En ce temps, la question intérieure-n',était
qu'accessoire. Le clergé et ses adhérents ne pré
tendaient point confisquer les libertés garantit,^
par la Constitution. Un parti national ne devait
point combattre les tendances liberticides de
ces hommes, qui n'avaientque momentanément
YPRES, le 13 liai.
PREMIERE ATTEINTE A EA LIBERTE DE LA
PRESSE.
On pouvait tenir pour certain, que le minis
tère, par suite des éléments dont il est formé, au
rait bientôt pris partie cette liberté de la
presse, pessima libertas, comme dit l'encycli
que. Rien en effet, n'est plus antipathique nos
ennemis politiques, que cette lutte de tous les
jours, polémique. Le parti clérical ac
coutumé procéder par voie dautorilé, ne
souffre point la contradiction. Ses projets ne
sont point trop purs et doivent, pour réussir,
être tenus dans l'ombre. Les journaux de l'ôppo-
silion les dévoilent. Son ambition est insatiable,
les feuilles libérales le prouvent. La domination
du clergé en Belgique, est le but secret de toutes
les entreprises du parti. Cette tendance a été
mi$e nu, parce que les moraux el\e$ honnêtes
gens par excellence appellent la mauvaise presse.
Doit-on être étonné si la liberté de la presse est
celle qui aura supporter les premières atta-
|ues de ce parti haineux et destructeur de nos
nslitutions?
Une première atteinte vient d'être portée la
oresse. Un journal d'Anvers, le Précurseur
vient d'être en butte aux persécutions sourdes
et voilées du parti clérical. M. Morel, son pro
priétaire, consul de Sardaigne et de Toscane
vient d'être menacé de voir ses exequatur reti
rés par le roi des Belges, moins qu'il ne sou
tienne quand même, le ministère mixte de la
façon de M. Nothomb. On lui a laissé la faculté
d'opter entre la propriété du Précurseurou le
rappel de ses pouvoirs diplomatiques. M. Morel
a pris soin de révéler lui-même au pays.cette
tentative immorale et corruptrice. La presse
s'en est émue, et le corps électoral qui ser%
f- i
JOURNAL RU LIEUTENANT EYRE,
L'un des prisonniers faits par les Afghans récit de la retraite et
de la destruction de Varmée anglaise, en janvier 1$42.
{JSuite.)
Le traité avait été accepté et lé capitaine Skinner donné en"otage
comme garantie de la bonne foi des Anglais; cependant on ne voyait
arriver ni les vivres, ni les animaux, promis et les Afghans conti
nuaient tenir le camp bloqué; aux demaud es pressantes de sir W.
Mao-Naghten, ils ne faisaient que des réponses évasives. Enfin, le
22, pendant la soirée, le capitaine Skinnér vint, dé la part d Akbar-
Kan, remettre au plénipotentiaire anglais une lettre qui contenait
des propositions bien étranges, mais en même temps si-séduisantes,
qu'il s'y laissa prendre. Akbar-Kan offrait aux Anglais de faire al
liance avec lui; il s'engageait leur livrer Amin-Oullah-Kau, le chef
de l'insurrection, et 4 faire rentrer les tribus dans l'obéissance, pourvu
qu'on lui promit, en retour, de le nommer vizir de Shah-Sboudja,
c'est-à-dire premier ministre. La lettre se terminait par la demande
d'une entrevue pour le lendemain matin.
a Le 25, dit le capitaine Lawrence, qui accompagna .sir W. Mac-
Naghten dans cette triste circonstance, nous partîmes midi suivis
de MM. Trevorset Mackensie et escortés d une quinzaine de cava
liers. Dans la route il nous communiqua les propositions qui lui
avaient été faites, et, l'observation de l'un de nous, qui dit que ce
projet lui paraissait bien dangereux et cachait peut-être quelque
trahison, il répondit et Dangereux, c'est possible; mais, s'il réussit,
je ne saurais avoir couru trop de risques. Les rebelles n'ont, je le sais
bien, encore exécuté«aucuu des articles du traité, et je n'ai aucune
confiance en eux. mais c'est le seul moyen de sauVer notre honneur.
D'ailleurs j'aimerais mieux souffrir mille .morts plutôt que de vivre
encore six semaines comme celles que je viens de passer. En arri
vant au lieu où s'étaieut tenues les précédentes conférences, nous y
trouvâmes Akbar-Kan entouré des principaux chefs Ghildjis, et il
commença par remercier l'envoyé du cadeau d'une paire de pistolets
doubles, qui m'avaient élé achetés moi-même tout exprès pour en
faire hommage Akhar-Kan. Ce sont les pistolets qui ont servi
l'assassinat. Nous mîmes pied terre, et l'on étendit les housses des
chevaux sur une petite élévation qui nous empêchait d'être vus du
cantonnement anglais, et qu'on avait choisie, disait-on, parce qu'un
de ses côtés n'était pas couvert de neige. L'envoyé s'assit côte côte
auprès d'Akbar Kau, MM. Trevors et Mackeuzie se tenaient quel
ques pas, et moi je restais debout derrière sir W. Mac-Nagbten, lors
que Akbar-Kan insista pour me faire asseoir. J obéis, et, me baissant,
j'appelai l'attention de sir William sur le nombre des Afghans qui
nous entouraient. Mon observation fut communiquée AiCbar-Kan,
qui répondit que tous étaient dans le secret. 11 avait peine achevé,
que je fus tout coup lerras et désarmé par Mahomed-Sha-Kan,
qui me dit Ne bouge pas ou tu es mort. Je jetai les yeux du
côté de sir W. Mac-Nagbten; il était au pouvoir d'Akbar-Kan, ter-
'V-rv y.
rassé par lui; l'horreur et la consternation étaient peintes sur son
visage. Alors Mahoraed-Shah-Kan m'enleva et me jeta Sur la croupe
de son cheval j'entendis plusieurs coups de pistolets, mais le cheval
S'éloignait au galop* Sir W. Mao-Naghten avait été tué.
Cet affreux événement jeta la consternation dans le camp anglais
Après deux jours de délibérations inutiles, on ne savait encore quel
parti s'arrêter, lorsque 4e 26, on reçut un nouveau message des chefs
Afghans. Ils demandaient comme articles additionnels au traité déjà
accepté: 1° qu'on leur rendit tous les calions, moins six; 2" qu'on
leur remit tout l'argent qu'on avait encore; 5° enfin qu'on leur
donnât pour otages quatre officiers mariés, avec leurs femmes et leurs
enfants. Le général Elphinstone assembla encore son conseil, et»il fut
résolu de se soumettre ces nouvelles conditions. Le major Pottin-
ger, qui les pouvoirs politiques appartenaient après la mort de
sir W. Mac-Nagbten et du colonel Bu mes, fut le seul déclarer que
ces exigences cachaient encore de nouvelles trahisons, et qae ce qu'il
y avait faire, c'était ou d'essayer de tenir pendant tout l'hiver, ou
de tenter immédiatement la retraite sur Djellatabad. Le conseil ré
solut cependant l'unanimité qu'aucune de ces deux alternatives
n'était praticable, et il ordonna au major de négocier incontinent-
Le général Elphiuslope fit donc demander par le camp quatre offi
ciers de bonne volonté qui voulussent bien se dévouer, eux et leurs
familles, pour le salut public. Il ne s'en présenta que deux, malgré,
la promesse de 2,000 roupies (5,000 fr.) par mois pendant tout
temps de la captivité qui était offerte ceux qui oseraient t*ntj