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JOFMAL D'YPRES ET DE L'ARRONDISSEMENT.
INTÉRIEUR.
A
3e ANNÉE. N° 213.
DIMANCIIE, 21 MAI 1843.
l'université de france et les jésuites.
un mot concernant le marché au rois.
FEUILLETON.
On s'abonne A Yfres, rue du
Temple, 6, et chez tous les per
cepteurs des postes du royaume.
PRIX DE L'ABONNEMENT
par trimettre.
Pour Ypresfr. 5-00
Pour les autres localités 6-00
Prix d'un numéro 0-25
Tout ce qui concerne la ré^-.
daction doit être adressé,franco,
A l'éditeur du journal, A Ypres.
Lt Progrès paraît le Dimanche
et le Jeudi de chaque semaine^
PRIX DES INSERTIONS.
Quinze centimes par ligpe.
YPRES, le 20 IHai.
Le Siècle publie depuis quelque temps une
série d'articles desquels il appert, que la Société
de Jésus se montre de nouveau hostile l'Uni
versité de France. Mais aujourd'hui, ce n'est plus
par les armes légales de la controverse que les
Jésuites procèdent leurs fins, c'est par le scan
dale, c'est en organisant le tumulte et l'émeute
au sein de l'auditoire des professeurs, c'est en
allant siffler dans leurs leçons, les hommes dont
le talent honore le plus l'Université. Le cours
de Michelet a été dernièrement le théâtre
de semblables manifestations. L'illustre auteur
du Précis de l'histoire de France, convaincu,
comqffi il le dit lui-même, que les Jésuites ap-
parlim.ienl l'histoire, comme les Templiers,
traçait le tableau des faits et gestes des enfants
de Loyola, lorsqu'il fut interrompu par des sif
flets et des vociférations. Toutefois, il faut le
dire en l honneur de la génération nouvelle, les
élèves qui viennent puiser la science aux leçons
du célèbre professeur, oflt proteslé par d'éner
giques et d'unanimes applaudissements contre
les stupides clameurs d'énergumènes, qui avaient
reçu pour mot d'ordre d'entraver la libre ma
nifestation de la vérité.
Le clergé français ne peut tolérer l'état d'a
baissement où il se croit réduit; non appelé,
comme ici régenter la société, il perd le repos
la vue des trophées de son confière de Bel
gique, voilà une des causes de ses attaques contre
lUniversilé.
Mais, nous dira-t-on, le clergé français pour
suit un droit que la société"ne peut lui dénier,
sans commettre un crime de léze-liberté il re
vendique l'enseignement de la jeunesse au nom
de la morale et de la religion. Ce sont là des
raisons spécieuses; un point dominera toujours
la question, point fatal, point culminant, de-*,
vant lequel doivent s'évanouir des théories men
songères, qu'on essaya de substituer la vérité
historique.
Jamais le clergé n'a su se renfermer franche
ment dans les limites que son intérêt, celui du
culte et celui de la société prescrivent de tracer
son action soumis la loi commune, il a
bientôt franchi les bornes qui lui sont assignées;
c'est ainsi qu'en Belgique, où l'on a commis l'é
norme faute de lui laisser prendre trop d'ascen
dant, il est déjà une distance effrayante de son
point de départ.
Quesi, au contraire, la loi, sage et prévoyante,
contrarie ses projets ambitieux, on le voit in
continent se poser en victime il s'efforce alors,
dans son intérêt propre, de semer l'irritation et
la discorde au sein de la société. C'est ce qui
arrive aujourd'hui en France, leclergés'y essaye,
et si, ce qu'à Diru ne plaise, il parvenait réa
liser ses projets, l'expérience nous a mis même
de prédire l'avenir de nos voisins.
Quel spectacle offre en effet aujourd'hui la
Belgique? Ministère et chambres y sont la
dévotion du parti du rebroussement, et notre
pacte social déchiré en lambeaux, atteste le res
pect du clergé pour les lois organiques du peu
ple, lorsqu'elles entravent sa marche envahis
sante, et qu'il se croit assez fort, pour les fouler
impunément aux pieds.
La Constitution avait proclamé la liberté
d'enseignementcelle de la pressecelle des
associations, et, quoique ces garanties fussent
de nature satisfaire pleinement le clergé, quoi-
,que la prudence dût lui commander de s'effacer
désormais et de jouir en paix du beau lot qui
lui était octroyé, il n'en a point agi ainsi le
monstre hideux de la réaction est venu dévorer
nos libertés les plus précieuses, et le parti-prêtre
assis sur les ruines de la loi des lois, menace de
démolir jusqties dans ses fondements, l'arche
sainte de notre charte constitutionnelle.
Que les hommes auxquels la providence a
confié les destinées du peuple français jettent
les yeux sur ce qui se passe, en ce moment, en
Belgique, et ils se garderont de laisser la fac
tion rétrograde prendre pied chez eux, et trans
former en une capucinière, cette belle contrée,
d'oùil y a un demi siècle peine est parti ce
cri, avant coureur d'une nouvelle ère euro
péenne Guerre aux vieux abus.
Bien que ce ne soit qu'à regret qu'on use
parfois du privilège constitutionnel d'émettre
des observations critiques au sujet de certains
actes administratifssurtout lorsque ces actes
émanent d'une autorité qui ne cesse de fournir
des preuves de zèle et d'activité, pour tout ce
qui louche le bien être l'utilité et l'embellis
sement de la ville, on ne peut néanmoins se
dispenser de faire la remarque, qu'il est incom
préhensible que l'administration municipale
puisse larder aussi longtemps restituer une
des belles rues d'Y prèsla vie et l'éclat dont
celte rue se trouve privée depuis près de deux
cent cinquante années.
La rue du Marché au Bois aboutissant d'un
côté la rue capitale et très-passagère de Dix-
mude,el, du côté'opposé, la place du Marché
au Bétailfut sacrifiée en faveur du jardin de
l'Évêché, vu que la clôture de ce jardin consiste
en une morte muraille, dont la longueur occupe
peu près la moitié méridionale de cette
grande rue.
Ne pourrait-on pas dire, d'après cet état des
choses, qu'il eut valu infiniment mieux employer
les fonds destinés au placement d'une grille
de clôture au jardin public du côté deja rue
de Sl-Martin, l'établissement d'une balustrade
du même prix, du côté du Marché au Bois, en-
face du Palais. Car aussi bien, le grillage de ca
côté devant nécessairement se diviser en com
partiments soutenus et séparés par des pilastres
rien n'eût empêché d établir un ou plusieurs
de ces compartiments jusqu'à concurrence de
la somme disponiblepour y ajouter ensuite
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Au milieu du golfe de Naples s1 élève une petite île dont norrn-
mélodieux et poétique éveille les plus^ doux souvenirs. C'est une
corbeille de verdure et de Heurs, posée par la main d'une .fée sur
une nappe d'argent, une colline boisée d'orangers, de grenadiers et
de lauriers roses, couronnée au sommet d'un château de marbre.
Tout autour, s'étend la perspeolive magique de cet immense amphi-'
théâtre, une des plus puissantes merveilles de la création. C'est Na
ples, la voluptueuse syrène, couchée nonchalamment au l>ord de la
mer; c'est Portici, Castellamare, Sorrente, dont les bords touffus, les
valléesseci êtes, les-grottes mystérieuses, semblent créés pour l'amour
c'est le Pausilippe Baja, Pouzzoles et ces vastes campagnes où les
anciens avaient rêvé leur Élysée, solitudes sacrées qu'on dirait peu
plées par les hommes d'autrefois, où la terre retentit sous les pas,
comme un tombeau vide; où l'air a des sons inconnus et des mélo
dies étranges.
En 1822, la. petite île d'Ischia appartenait comme toujours Sa
Majesté Sicilienne; mais c'était un Titre purement et simplement
honorifique, comme celui de roi de Jérusalem que ladite majesté se
plaît ajouter son noirf.'La domination réelle en était dévolue un
vieux pêcheur, nommé Prospéro, qui régnait et gouvernait par le
fait.
Le palais qu'habitait cette royauté populaire était une petitè mai
sonnette qu'on aurait eu de la peine découvrir, enfoncée qu'elle
était dans le plus délicieux recoin, dans l'endroit le plus caché de
l'île. Rien n'était plus simple et plus gai. Des murs de briques tapissés
de lierre plus vert que l'émeraude, et émaillés de blanches clochettes
au rez-de-cbaùssée, une pièce assez large où couchaient les hommes,
et où la famille prenait ses repas; au premier étage, la chambrette
virginale de la fille du pêcheur, véritable nid d oiseau, éclairé par
une seule croisée donnant sur le golfe au-dessus de la chambre, une
terrasse la manière italienne, avec ses quatre piliers festonnés de
pampres, son berceau de vigne, et son large parapet couvert de
mousse et de fleurs naturelles.
Une petite haie d'aubépine, respectée avec une vénération sécu
laire, traçait une espèce de rempart autour de la propriété de Pros
péro, et défendait sa maison mieux que n'auraient pu le faire des
fossés profouds et des murs crénelés. Les plus hardis tapageurs eus
sent préféré de se battre devant le presbytère et sur le parvis de l'é
glise que devant la petite cour du pécheur. C'était, du reste, le
heure, les bonnes femmes du voisinage y venaient tricoter leurs bon
nets de laine et débiter leurs nouvelles. Des groupes de petits enfants
nus, bâlés, espiègles comme de petits démons, prenaient joyeusement
leurs ébats, se roulaient sur le gazon, se jetaieut des poignées de sable
dans les yeux, au risque de s'aveugler, tandis que leurs mères se li
vraient ce bavardage sérieux qui caractérise les habitants des vil
lages. On se ressemblait ainsi tous les jours devant la maison du pc*
oheur: C'était un hommage muet et presque involontaire, consacré
par l'habitude, et dont personne ne s'était rendu compte; l'envie
qui règue dans les petites communautés en eut fait prompte justice.
L'ascendant qUe Prospéro avait sur ses égaux s'était accru (l'une
manière si simple et si naturelle, que personne n'y trouvait rien
redire, fcon pouvoir avait grandi de jour en jour, insensiblement, et
on ne l'avait remarqué que lorsque tout le monde eu lirait sou profit»
comme ces beaux arbres dont on n'aperçoit l'élévation que lorsqu'on
jouit de leur ombre. Si quelque dispute s'élevait dans 1 Ile, les deux
adversaires aimaient mieux s'en remettre au jugement du pécheur
que de plaider en justice; il avait te bonheur ou le talent de ren
voyer les deux parties contentes. 11 savait prescrire des remèdes
mieux que tout autre médecin, car il arrivait rarement que lui-même
ou quelqu'un de sa famille n'eût éprouvé les mêmes maux, et sa
rendez-vous de l'île entière. Tous les soirs, exactement Ja même science s appuyant sur sa propre expérience, obtenait les plus heu-