JOURNAL D'YPRES ET DE L'ARRONDISSEMENT.
INTÉRIEUR.
3a ANNÉE. N° 227.
FEUILLETON.
DIMANCHE, 2 JULLET 184&
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YPRES, le 1" Juillet.
CONSEIL PROVINCIAL DE LA FLANDRE
OCCIDENTALE.
Sous peu de jours, les conseils de toutes les
provinces commenceront leurs travaux. Le pre
mier mardi de juillet est l'époque fixée par la
loi pour l'ouverture de la session des conseils
provinciaux.
Il n'est point inutile d'appeler l'attention sur
les actes du conseil de notre province. On
pourrait lui adresser plus d'un reproche fon
dé. Souvent les conseillers se voient forcés
de décider des questions qu'ils n'ont pu étu
dier, parce que le conseil ne tient point la
main, ce qu'on envoie les projets qui seront
agités pendant la session, au moins trois semai
nes avant l'ouverture, au domicile de chaque
conseiller. Alors au moins il pourrait étudier la
matière et nous pourrions espérer de ne plus
voir voler des règlements d'une exécution im
possible, comme celui de la vaccine, ou nuisibles,
comme celui pour l'amélioration de la race
bovine.
Des réclamations contre ce dernier règlement
ont été signées et adressées au conseil par grand
nombre cl herbagers et de propriétaires dé tous
les arrondissements agricoles de la province. On
en demande la modification, parce que, loin d'a
méliorer la race bovine, il aura pour effet d'em-
pécherqu'on puisse désormais la propager, faute
de taureaux. Nous espérons bien que le conseil
écoulera les vœux de grand nombre de ses ad
ministrés et s'empressera de changer ce règle
ment qui peutavoirun certain mérite en théorie,
mais qui, dans la pratique a donné lieu une
foule d'inconvénients.
Peu de questions de travaux publics se pré
sentent celte année. Seulement l'instruction du
tracé de quelques pavés communaux sera mis
l'ordre du jour. Dès que les communes'peu
vent prendre leur charge les deux tiers des
dépenses évaluées par devis, la province y ajoute
le dernier tiers, sans aucupe difficulté.
Il est cependant une route dont la construc
tion est nécessaire et utile, nous devons l'avouer,
quoiqu'elle n'appartienne point au territoire de
l'arrondissement d'Y près, c'est celle qui joindrait
le village de Reningheau pavé de Dixmude. Celte
commune, pendant six mois de l'année, se voit
sans aucune communication avecles localités voi
sines, par suite de l'impraticabilité absolue des
chemins pendant la saison pluvieuse. Cependant
elle est grande, riche, possède un territoire
fertile et qui le deviendrait encore davantage,
si des voies meilleures favorisaient le transport
des engrais. Les immenses prairies situées au
nord de cette commune, acquerraient, par la
facilité des communications, une valeur plus
grande; car souvent, pendant un été pluvieux,
le transport du foin est impossible et on se voit
forcé de le laisser pourrir en meules sur place.
Si nous devons en croire nos renseignements,
la députation aurait biffé du budget, tout ce
qui a rapport au bassin du canal d'Ypres. Ce
pendant de grandes réparations y sont d'une
nécessité absolue. Nous ne pouvons compren
dre quels ont été les motifs de la députation. Ce
canal a été conslruitaux frais de la ville d'Ypres,
et cédé seulement pour l'entretien, la pro
vince. D'ailleurs il n'est point sans rapporter un
certain revenu, et nous pourrions évaluer les
bénéfices que fait la province en droits de quai,
de navigation et décluse, une somme de
7,000 francs.
Malgré que-la province a eu cet ouvrage d'u
tilité publique gratis, elle refuse les réparations
nécessaires aux accotements du bassin, après
les avoir même rebâtis et entretenus pendant lon
gues années. Le quai ne se trouve pas dans
l'enceinte de la ville, et malgré cet inconvénient,
on voudrait mettre charge de la commune,
l'entretien des chemins qui ne sont unique
ment utiles qu'à l'exploitation d'une propriété
de la province
Nous espérons bien que nos conseillers pro
vinciaux sauront combattre ce mauvais vouloir
de l'autorité provinciale l'égard de la ville
d'Ypres et, soutenus par leur bon droit, ils ne
peuvent succomber.
Un projet de règlement sur les chiens sera
présenté au conseil. Il paraît que les dépenses
nécessitées par la loi sur l'instruction primaire
devrontêtre supportées par ces intéressants ani
maux. Une taxe de trois francs devra être payée
par le propriétaire d'un sujet de la race canine.
La moitié sera prélevée en faveur de la pro
vince, l'autre moitié appartiendra la com
mune.
Ce projet n'a point été communiqué aux con
seillers avant l'ouverture de la session. Le con
seil devrait en finir une bonne fois et refuser de
discuter tout projet qui n'aurait point été
communiqué aux conseillers domicile. Il ne
lui arriverait plus de voler ainsi de confiance,
des règlements dans le genre de celui destiné
améliorer la race bovine et qui a été envisagé
par les hommes spéciaux, comme l'œuvre de
quelques rêveurs qui ont surpris la religion du
conseil.
Nous avons rapporté dans notre dernier N°
l'accident arrivé M. Liebaert et sa famille.
Il paraît que cet événement a été causé par les
tambours du 5me qui, en s'exerçant sur les glacis
de la place, ont effrayé le cheval. M. le colonel du
5mo régiment, dès qu'il a eu connaissance de la
cause de cet accident, s'est empressé de désigner
aux tambours, pour faire leur exercice, un
endroit moins dangereux et assez éloigné de la
voie publique, pour quede pareils malheurs ne
puissent plus avoir lieu.
Dimanche dr, une jolie fêle a été don niée la
Société de l'Union. La commission avait invité
les amateurs du jeu de boule un concours
solennel. Les prix étaient donnés par la société.
M. Louj,s Bouckenaere a gagné le premier prix,
en dépassant de beaucoup le nombre de points
gagnés par ses concurrents. MM. Baert, De
Bouck, et l'ierre Verschaeve, ont gagné les trois
prix suivants. Un officier du 5me dont nous igno
rons le nom, a remporté pour prix d'encoura
gement, un objet qui ne pouvait être mieux
LES DAMES PARISIENNES AU MARCHÉ.
Les dames de Paris vont au marché, et cela fait leur éloge, car
cela prouve qu'elles s'occupent de leur ménage et des détails inté
rieurs de leur maison. Des femmes de riches, capitalistes, de com
merçants,de banquiers, de rentiers, de marchands, d'artistes, ne
craignent point de se rendre elles-mêmes le matin au marché le plus
voisin de leur demeure pour y faire leurs provisions. Quelques-unes
y vont seules, un gr$nd panier sous le bras; lorsque après le marché
fait, le panier leur semble trop lourd, elles prennent un commission
naire pour le lui faire porter.
D'autres amènent leur bonne, qui naturellement porte le panier.
Mais alors elles s'exposent dans le marché recevoir les sottises des
marchandes auxquelles elles n'achètent point, et qui ne manquent
pas de crier la bonne qui trotte côté de-sa maîtresse.
Ah voyez donc c'te grande seriue qu'on mène l'école!...
Tu ne peux dono pas venir au marché toute seule, grosse bête?
Ahl on a peur qu'elle ne fasse danser l'anse du panier.
Ah comment peux-lu rester dans line baraque où la maîtresse
vient avec toi au marché etc.
Et une foule d'autres gentillesses du même genre. Mais les dames
qui vont au marché sont tellement habituées eutendre ces propos,
qu'elles n'y prêtent plus aucune attention. Quant la bonne, elle
jette la marchande un regard en dessogs qui signifie
Allez!... tapez ferme!,., dites toujours! ça fait qu'on me laissera
venir seule une autre fois.
Les dames qui vont souvent au marchéont leurs marchandes d'ha
bitude, de prédilection ce qui n'empêche pas toutes les autres de
crier lorsqu elles passent
Venez donc me voir, mon cœur!... Achetez-moi donc, mon
bijou. Eh ben! est-ce que nous passons nère comme ça aujour-
dhui? —«Venez donc que je vous arrange. Étreunez-moi, mon
chou, vous me porterez bonheur. Ah! la méchante qui s'en va
sans me rien acheter Eli ben! on ne me dit don cri en moi,
mignonne?
Au marché il est rare que les dames ne rencontrent point de leurs
connaissances. Qn s'aborde, on se dit bonjour, cl l'on cause tout en
cherchant, en marchandant ce dont on a besoin.
Eh! c'est Mme Benjamin-!.;.Bonjour, Mme Legras, comment
vous portez-vous 11 ne faut pas vous demander cela vous, ma
dame, vous êtes fraîche comme une rose! Oh! ne me regardez pas»
je vous en prie... Je suis faire peur... une vieille robe que je mets
les malins... voilà deux ans que je l'ai... Je vous assure qu'elle est
enoore tiès-bien. D'ailleurs, pour venir faire ses provisiousdu malin,
est-ce que ion voudrait s'habiller Votre robe est charmante co-'
pendant!... Oui... elle est assez gentille... mais si vous saviez eu
qu'elle m'a coûté... trente-cinq sous, madame... et c'est bon teint.
Ah! mon Dieu, mais c'est pour rien... vous me donnerez l'adresse
n'est-ce pas? Mon Dieu, chez Auberlot, rue Poissonnière, tout près
du boulevard... Voyons votre saumon, est-il frais?
Comme vous et moi, ma petite mère... Mettez votre nez dessus,
vous m'en direz de nouvelles...
Vous achetez du poisson? dit Mme Benjamin l'autre dame.
Il est horriblement cher aujourd'hui... et la volaille! on ne p*ut
pas y aborder
Mais savez-vous que c'est terrible tout devient hors de prix
Aussi je dis tous les jours rnon mari Mon ami, tu augmenteras la
somme des frais du ménage, sans quoi je ne vais plus au marché.