JOURNAL D'YPRES ET DE L'ARRONDISSEMENT.
INTÉRIEUR.
3e ANNÉE. N° 246.
JEUDI, 7 SEPTEMBRE 1843.
FEUILLETON.
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YPRES, le 6 Septembre.
Il paraît que malgré les justes réclamations
des voyageurs, M. le ministre des travaux pu
blics s'obstine n'employer que des waggons
découverts. Nous en sommes bien fâchésvmais
nos ministres paraissent avoir oublié que la ré
volution de 1830, a .été éminemment populaire
et non uniquement faite dans l'intérêt des clas
ses élevées. Nous ne voyons par trop pourquoi
on ne composerait pas les convois de waggons
couverts et découverts. Libre alors ceux qui
aiix)#ên't d'être "exposés aux intempéries de l'air,
de,se servir de ces waggons que M. Deschamps
padhît chérir.au-delà de toute expression, mais
qu'l se garde bien d'employer personnellement.
- Nos ministres ne ressemblent pas mal une
divinité de la fable. Son adorateur, malgré grand
nombre de sacrifices, ne pouvait rien en obtènir.
Un jour,,il la brisa et se trouva récompensé.
Nos dieux ministériels sont intraitables quand
le prolétaire réclame, mais que quelques élec
teurs influents d'un canton s'en mêlent jus
tice sera bientôt failè. La crainte et la peur font
tout obtenir d-un ministère qui n'est franche
ment soutenu par aucun parti et qui ne peut
se maintenir qu'à force de concessions.
Voici un article du Précurseur d'Anvers qui
réclame contre les waggons découverts
Il y a bien longtemps déjà que le public, que la
presse réclament contre la maladroite innovation de
M. Deschamps qui s'est imaginé un beau jour de
remplacer les waggons ôouverls de la voie ferrée,
par des waggons découverts. M. Deschamps qui pa
raît avoir plus de sens et de raison que tout le monde,
ce qui ferait mentir l'illustre auteur du siècle de
Louis XIV, n'a pas tenu le moindre compte de ces
plaintes aussi unanimes qu'incessantes.
Non, et M. le ministre des travaux publics pré
fère laisser les waggons couverts dans les magasins et
abandonnés la pourriture, plutôt que de les remet
tre en usage. Cependant,aujourd'hui tous ceux que
leurs moyens ne permettent guère de se servir a-uns
cliar-à-bancs,sont exposés dansdes waggons toutes
les intempéries de l'aircirconstance qui peut avoir
pour x'ésultat une belle et bonne fluxion de poitrine,
rien qu'en faisant le trajet d'ici Malines.
Pas plus tard qu'un des derniers jours de la se
maine passée, on a vu descendre (c'était un jour de
pluie}, des waggons, la station d'Anvers, un grand
nombre de gens mouillés des pieds jusqu'à la tête,
dans un état enfin faire pitié.
«M. Deschamps ne songe nullement cela. On
oublie si vite les souffrancesde ses semblables, quand
on jouît d'un traitement de 2 i ,000 francs
■naXgXE*
On nous prie d insérer l'article suivant
La fête d'Inghelmunster a rappelé le souvenir
de ces fêtes remarquables des antiques villages
flamands. Un tirage magnifique avait été orga
nisé par la Société de S'-Sébastien sous les aus
pices de M. le baron de Montblanc, protecteur
et chef-homme de la confrérie d'Inghelmunster.
Un cortège magnifiquemusique en tête, a
défilé par le village. Quelques sociétés en uni
forme, avec drapeaux déployés, ont surtout con
tribué l'embellir. La perche se trouve établie
en face du château d'Inghelmunster, au milieu
d'une belle prairie arrosée par la Mandel. Un
monde extraordinaire assistait ce tirage, 383
tireurs s'y étaient donnés reindez-vous.
Aux prix donnés par les confrères, le Baron
d'Inghelmunster avait ajouté un premier prix
de douze couverts en argent ciselé, renfermés
dans un écrin garni en veloursd'une valeur de
600 francs; ce prix a été.remporté par le Sr
Huyghebaert, de Roulers.
Les autres consistaient en une cafetière ga
gnée par la société de Ledeberg lez-Gand. Le
troisième en deux chandeliers, par celle deNVe-
velghem. Le quatrième en une théière, par la
société de Ste-Croix de Bruges, et le cinquième
en un pot au lait, par celle de Templeuve.
Au premier tour, quatre des oiseaux supé
rieurs se trouvaient abattus. Le lundi malin,
trois nouveaux oiseaux ont été placés, dont le
premier aété gagné par la société de Huysselede,
le second tiré par M. Papillon, confrère de la
société de S'-Sébastien d'Yprès, et le troisième
par la société de S'-André lez-Bruges. Enfin le
dernier oiseau a été abattu par M. Van Gheluwe,
qui a gagné une louche en argent.
Ces derniers prix consistaient en quatre cou
verts filets pour le coq et trois couverts pour
chaque poule. Les médailles ont été distribuées
le lundi matin, ainsi que les prix, par M. de
Montblanc en personnequi a fait les hon
neurs de celte fête avec la plus grande amabi
lité et l'urbanité la plus exquise.
La médaille de belle tenue pour les villesa
été remportée par la société de S'-Sébastien
d'Ypres. Celle pour les communes, par Sl-André
lez-Bruges, qui a en même temps, reçu la mé
daille destinée la société la plus nombreuse.
Celle d eloignement, a été décernée la société
de Malines.
La société de S'-Sébastien d'Ypres, qui s'é
tait rendue en costume et drapeau déployé ce
tirage, n'en est point revenue sans s'y être distin
guée. Un oiseau de côté a été remporté par elle,
ainsi qu'une médaille-d'honneur. Mais ee dont
les confrères de la société d'Ypres ne peuvent
assez se louer c'est de la manière dont ils ont
été accueillis par les habitants d'Inghelmunster.
Us conserveront longtemps un souvenir recon
naissant de l'accueil qui leur a été fait par la
société d'Inghelmunster et surtout par son digne
premier chef-hommel'honofNljpie baron de
Montblanc.
Un tout petit bateau de pêche du port d'Os-
tende nommé Columbuspatron Demeyne, est
venu le 30 août la côte près de la commupe
de Clemskerke. i
Ce bateau péchant ordinairement du pqisson
frais en vue de la côtemonté de trois hom
mes, est une légère embarcation non pontée,
dans le genre de celles de Blanckenberghe, qui
se mettent sur la plage volonté et s'en relèvent
aussi facilement, il n'y a donc rien d'extraordi
naire l'échouement de ce bateau qûj le len
demain se trouvait au port d'Ostende. v.«
Mercredi. drun allemand, qui se baignait
dans la Meuse, fut entraîné par le courant eltétait
en danger de se noyer, lorsque M. Baudriùaye,
LA FIANCÉE DE MADRID.
(Suite.)
IX.
avant l'exécution.
L'existence deRodericJ dont l'influence occulte fut si puissante en
Espagne, après la disgrâce du duc de Lerme, avait présenté depuis
son commencement jusqu'à sa fin, tous les caractères étranges d'une
mystérieuse fatalité.
Né d'un pauvre.soldat, espagnol 09 garnison Anvers, François
Calderone, et d'une-ce pays, nommée Maria Saladin, il fut
maudit en naissant parsônpè.re qui, pour se débarrasser d'une charge
que la misère lui reqdâliqdus s'ensible, résolut de se défaire de cet
enfant. Un soir le soldat se rendit aux murailles d'Anvers, et, renfer
mant le petit Roderic dans un sac-, le descendit ainsi hors de la ville.
Cependant «n remoritesôudain s'empara de lui. Le père eut horreur
de son crime, et; couryt en toute hâte rouvrir 1& sac et délivrer l'en-
fant. Par un hasard inconcevable, Roderic n'avait pas soufFert de sa
chute, et le grossier espagnol, convaincu de l'intervention du ciel en
cette occurrence, rentra Anvers les yeux baissés, son (ils dans les
bras, et marmottant des prières pour demander grâce Dieu du pé
ché qu'il avait commis.
Il fit mieux; il alla consulter un frère de l'ordre des Bénédictins
auquel il avoua tout, sous le sceau de la confession, en s'informant
quel serait le moyen le plus agréable Dieu de réparer son crime. Le
frère lui commanda, au nom du ciel, d'épouser Marie, et de légitimer
Roderic. François Calderone obéit, et Roderic eut un nom.
Devenu veuf, le vieux François vint rejoindre sa famille Valia-
dolid. C'est là seulement que les dispositions de Roderic commencè
rent se révéler. Placé en qualité de page chez le vice-chancelier
d'Aragon, il se sentit bientôt mal 1 aise et comme emprisonné dans
cette position secoi^iaire, qui ne répondait ni aux inspirations de son
orgueil, ni aux élans secrets de son ambition.
Déjà souple comme le valet le plus adroit, flatteur comme le cour
tisan le mieux informé, il avait conquis les bonnes grâces de quelques
seigneurs influents au conseil du roi. Parmi ces seigneurs, il en était
un qui tenait le sceptre de la faveur royale, et dont l'astre brillait,
d'un vif éclat auprès du soleil de l'Espagne j c'était don François
Saudeyal, marqufS de Deuia, duc de Lerme.
Ce fut sur cet homme que Roderic prit exemple, ce fut sur sa for-
lune qu'il résolut de bâtir la sienne. L*événement ne faillit point
6es espérances. Letluc de Lerme était-l'àme damnée iWPhilir
Roderic se fît 1 âme damnée du duc de Lerme. Il aida plus-
sonne la fortune de ce favori, afin fte.le prendre'plus sûr
contribua l'élever le plus haut possible .pour qu^
celles dont on ne se relève pas. II avait compris le
fque la faveur des^roîs ressemble une grande éclj
quelle on est solide tant qu'on peut s'y mainteij
mains, mais dont le dernier échelon doit^ejre fat
n'ayant plus d'appui que sous ses pieds'ét ne pq
mains pour garder l'équilibre, tiemblc^ch»»<îelfej|
Son élévation fut rapide et étonna l'Esppgne «1
tout d'abord don Pedro de Frauqueza^imte a
remplissait la charge de secrétaire d'étSlyWlater
qui ouvrit Roderic Calderone la-^arfièij des bonnet
cherchés, lui seul eut le maniement des, îrtîtR^iaux.
publiques. Les grâces, les bicnfaits»leAécumpenseS M
tice s'expédiaient par son ordre et dépendaient de-}
discrétion. Une si merveilleuse fortune, jointe aux cj