INTÉRIEUR.
5* ANNÉE. N° 425.
JOURNAL D YPRES ET DE L'ARRONDISSEMENT.
JEUDI, 29 MAI 1845.
Nous devons rendre grâce la Providence, de
ce que parmi les collèges électoraux des autres
provinces, les grands centres de population ont
une action plus forte et un plus grand pouvoir
d assimilation sur les communes de leur rayon
électoral, que dans la Flandre occidentale. Car
s il en était autrement, on devrait désespérer
des destinées de la Belgique. Quand on examine
cette loi électorale, chef-d'œuvre de rouerie po
litique el de jésuitisme, on doit convenir qu'elle
est magnifiquement combinée, pour inféoder le
pouvoir entre les mains du clergé.
Si la ville d Ypres avait choisir ses repré
sentants, quand même on attacherait encore
quelques communes ses flancs, pour lui dis
puter la victoirecertes le résultat du scrutin
serait entièrement différent. En citant les élec
tions provinciales, on en donne la preuve car
on a lutte une seule fois, mais alors la partie a
éleabandonnee. On acquit la conviction qu'on ne
pouvait remporter la victoire sur les électeurs
de la ville, si le cens campagnard ne venait en
aide la faction réactionnaire.
Mais pour les élections générales jamais
collège électoral île la Belgique, j
de difficultés pour le parti libéral. Sur 1,009
électeurs, deux cent cinquante environ ap
partiennent la ville d'Ypres. Ajoutez cela
que dans nos contréesles mœurs politiques
n'existent pas. La langue qu'on y parle, empê
che l'électeur campagnard de lire les journaux
exceptés ceux qui sont fabriqués expressément
pour eux dans l'officine cléricale du chef-lieu.
A peine si dans les villages, on sait que la
majorité éclairée de la nation professe des opi
nions politiques qui ne ressemblent nullement
celles de leur curé, l'oracle de la commune.
Les explications sont inutiles, on ne les com
prendrait pas. Si le parti libéral avait égalité de
position, s'il avait le confessionnal son service,
si le bourgmestre, le percepteur des contribu
tions et l'instiluteur de la commune travaillaient
la matière électorale dans son sens, certes on
pourrait défier tous les pouvoirs du monde de
lui enlever de haute lutte cette forte position.
Oui le parti libéral pourrait défier ses adver
saires de le débusquer, parce que dans les
principes, qu il défend, il y a quelque chose de
sympathique qui plail aux peuples et que ne
possèdent pas les principes des rétrogrades, qui
ne veulent procéder que par voie d'autorité.
Quelques détails particuliers sur la compo
sition du collège électoral feront encore mieux
comprendre combien la lutte est difficile. La
ville de l'operinghe se trouve comprise parmi
les communes qui forment le rayon électoral
d Ypres. Eh bien! toujours il y a eu entre ces
deux villes, une antipathiesourde et sans mo
tifs avouésjamais elles n'ont pu s'entendre;
d un autre côté, le bon accord est pour ainsi
dire impossible. Ypres est libérale et il serait
difficile de rencontrer une ville plus servilement
dévouée au clergé que Poperinghe. Elle compte
peu près cent quarante électeurs et qui votent,
pour ainsi dire, comme un seul homme, inutile
de dire dans quel sens.
Malgré la position exceptionnelle de l'arron
dissement, nous sommes loin de convenir que
la lutte soit impossible, ni qu'elle ne puisse de
venir égale, mais il faut qu'elle soit organisée. A
tous les moyens d'action que possèdent nos ad
versaires la campagne, il faut en opposer d'au
tres qui puissent contre-balancer leur influence.
Mais il faut du temps el ce n'est pas l'ap
proche d'une élection qu'on peut imprimer
des dévoués séides du clergé. D'ailleurs, le can
didat libéral qui paraissait vouloir se mettre
sur les rangs et que nous aurions voulu soutenir
de toutes nos forces, s'est retiré devant des diffi
cultés qu'on ne pouvait prévoir. Le parti libé
ral, pensons-nous, se trouve dans la situation
de devoir s'abstenir aux prochaines élections et
de laisser nommer les hommes du clergé et du
gouvernement, unis dans une entente cordiale
qui ne laisse pas que d'être excessivement mo
rale et d'un parfait bon exemple.
Lundi, 26 Mai, a eu lieu l'élection d'un con
seiller provincial Messines. Ainsi qu'il était
facile de le prévoir, M. Ernest De Gheus, juge
d'instruction, Ypres, a été élu par 103 suf
frages, sur 103 électeurs présents.
Hier, M. l'évêque de Bruges a administré le
sacrement de la Confirmation dans l'église de
S1 Martin, Ypres. Ce haut dignitaire ecclé
siastique s'est rendu processionnellement de la
maison de M. le doyen l'église. Le dais était
porté par MM. De Moucheron, marguillier et
membre de la commission des Hospices civils,
Grandjean et Lagrange, conseillers de fabrique,
et Léon Mulle, conseiller de fabrique et membre
de la Chambre de commerce.
Samedi matin, 24 de ce mois, midi la
nommée Pélagie Bail, épouse Baelde a subi
Brugessur la place du Bourgla peine de
l'exposition.
Ainsi que le bruit en courait depuis quelque
temps, M. De Prey, député deFurnes, renonce
la candidature. M. Joseph Clep, membre de
la dépulation permanente se met sur les rangs.
Onavail parlé de M Yandevelde, procureur du
roi Furnes, mais il paraît que le ministère lui
a intimé l'ordre de se désister de sa candidature.
Voici un on-dit assez curieux et qui peint
l'homme. M. Clep, en annonçant qu'il sollicitait
le mandai de représentant, laissa échapper son
élonnement de ce que le clergé ne s'y opposait
pas. Ce trait est d'un jésuitisme charmant, car
M. Clep a constamment été un des protégés du
parti catholique qui a toujours pu compter sur
lui. D'ailleurs n'empêchera-t-il pas l'élection de
M. Vandevelde, qui passe pour être moins mal-
ecclésiastique
YILLE D'YPRES. conseil communal.
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YPRES, le 23 Mai.
LE COLLEGE ÉLECTORAL DE L'ARRONDISSEMENT
D'YPRES.
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l'^nfnrifrt
Séance publique du Jeudi 2g mai 18 5, deux
heuret et demie de relevée.
tCommunication de pièces.
2J Délibérer sur la demande du S1 Taccoeu, boulanger en cette
ville, l'elfe t d'être autorisé établir une fabrique d'amidon, dan»
la rue des Palissades.
5" Aviser sor une requête adressée M. le ministre de l'intérieur,
par le sieur Valcke-Itage, sollicitant l'autorisation de placer dans sa
maison, rue des Chiens n" 17, un appareil fabriquer le gaz.
4" Fixer la somme dépenser du chef des fêtes de la Tuyndag
5° Délibérer sur la cérémonie de la pose de la première pierre de
la route pavée d Ypres vers la froutière de France, par Kemmel e'
Neuve-Église.
C° Émettre un avis 1° sur le procès-verbal de vente de trois mai
sons provenant de la fondation du S'-Esprit, dépendante de 1 admi
nistration des hospices. 2o Sur le procès-verbal de la vente de bois
taillis et chêoeaux de la coupe de 1845, tenue sur la propriété des
ho<pioes, le 8 février 1845. 3» Sur le cahier de location de plusieurs
biens ruraux appartenants la dite administration.
(Suite.)
VIII. LA COUPE.
Celle apparition que le duo de Guise voyait lout-à-coup se dresser
devant lui, ce n'était point une ombre se montrant ses yeux triste
et plaintive, pour faire naître le remords en son âme, c'était bien
Béatrice sa femme, la douoe maîtresse de la vallée d'Odessa.
Monseigneur, dit-elle, je vous supplie de ne point vous irriter
de ma présence que vous n'avez ni attendue, ni désirée, et je vous
jure, si vous voulez bien la supporter avec bonté, de vous en délivrer
bientôt.
Elle s'arrêta ces mots, car la crainte brisait sa voix dans sa poi
trine.
J'ai appris, continua«t-elle, que vous aviez adressé une demande
au Saint-Père pour qu'il lui pl£t de rompre noire mariage, étant
dans l'intention d élever une autre femme la place que vous ru aviez
donnée. Je viens vous supplier, au nom de votre honneur même, de
ne pas accomplir cet acte de déloyauté. Béatrice, lui répondit
froidement le duc de Guise, car il avait déjà eu le temps de se re
mettre, si la plus absolue nécessité ne m'y avait forcé, je n'aurais
amais songé accomplir une rupture dont je souffre cruellement
moi-même; mais vous savez que dans l'état complet de dénument où
je me trouvais, il m était impossible de ne pas accepter la chance de
salut qui s'offrait moi, et je n'ai pu obtenir le rang où vous me
voyez qu'à la condition de le payer par le don de ma main ma cou
sine Anne de Mantoue. Je sais tout ce que se doit lui-même celui
qui a reçu du ciel de grandes facultés utiliser pour sa gloire et pour
celle des peuples qu il est appelé gouverner; je sais qu'un homme
doué d'une vaste intelligence et de hautes puissances morales, ne doit
peut-être pas donner beaucoup de son âme l'amour d une faible
femme, qui ne lui rend en retour que ce que renferme un cœur
d'épouse, la tendresse et le dévoùment. Aussi, ce n'est point votre
tendresse que je viens réclamer, mais seulement la réhabilitation qui
m'est due, après quoi je me retirerai dans un couvent et vous serez
délivré de moi pour toute la vie. Je n'ai voulu paraître devant vous
que dans ce vêtement de cloître, afin qu'aussitôt en me voyant, vous
fussiez assuré de mes intentions. Madame, votre demande est lé
gitime, elle est sainte, mais vous venez me l'adresser quand il n'est
plus temps de suivre mon cœur qui me porterait l'écouter, quand
j'ai pris ailleurs des engagements irrévocables. J'ai assez compté
sur votre grandeur d'âme pou* croire qu en vous remettant sous les
yeux la femme que vous avez aimée et les serments que vous lui avez
faits, il ne serait jamais trop tard, quelque point que vous fussiez
arrivé de ce fuueste projet, pour cousentir lui rendre la réputation
qu'elle a perdue... Ah! seigneur! uii mot de vous suffirait pour m'ar-
racher mes ennemis, pour réduire au silence leurs ironiques ca
lomnies.., Hélasîjemesuis perdue moi-même: partout dans le monde»
je cherchais vos regards, je vous suivais des yeux, je me laissais aller
la joie quand vous étiez là, je ne cachais pas ma tristesse pendant
votre absence; je sentais bieu que je devais ainsi éveiller les soupçon#
et le blâme, mais je croyais chaque jour que votre voix allait dire
u Son amour est légitime, elle est duchesse de Guise. -• Vouj
savez que je l'aurais voulu et que je redoutais seulement de vous faire
partager ma triste destinée. Oh! si j'étais une femme sans famille»
j'irais mourir de honte dans quelque coin ignoré de la terre, et tout
serait fini. Mais, vous le savez, seigneur, ma maison est grande, Jac
ques III en est sorti, des ducs de Brabant et des chevaliers de la
Toison-d'Or l'ont illustrée. N'avilissez pas cette antique race, ne
jetez pas sur ce noble écusson, que jamais aucune tache n a souillé,
une tache d'affront respectez ces nobles dans leur tombeau; laissez
leur l'honneur; bêlas! les morts ne conservent que cela. Béatrice,
je vénère leurs cendres non moins que celles de mes aïeux. ou*
avez vu notre arbre généalogique, vous avez vu dans les inscription#
des lombes de notre église, cette longue suite de femmes qui ont
vécu dans la maison de Bei ghes. Eh bien, pas une d'elles n'a mis le
pied hors de la voie du devoir, pas une n'a trahi ses serments Dieu
et son époux il est saus exemple dans notre famille que la vertu
ait faibli devant la passion. Et moi, grand Dieu! moi la première je
romps celte chaîne d'anneaux si purs, j'apporte la souillure jur celte