5e ANNÉE. - N° 446.
INTÉRIEUR.
DIMANCHE, 10 AOUT 1846.
JOURNAL D'APRES ET DE L'ARRONDISSEMENT.
Distribution des prix au^ élèves de l'académie de
dessin et d'architecture DE la ville d'ïPRES.
Feuilleton.
ONDIÎJE.
On s'abonne Ypres, Marché
au Beurre, et chez. tous les per
cepteurs des postes du royaume.
prix de L'ABONNEMENT,
par trimestre.
Pour Ypresfr. 5-00
Pour les autres localités 6-00
Prix d'un numéro0-25
Le Progrès
Tout ce qui concerne la rédac-
tion doit être adressé, franco
l'éditeur du journal, Ypres.
Le Progrès paraît le Diman
che et le Jeudi de chaque semaine,
PRIX DES INSERTIONS»
Quinze centimes par ligne.
VIRES ACQUIR1T ECNDO.
YFKES, le 9 Août.
Les applaudissements qui ont accueilli le re
maniement du ministère mixle dans la presse
catholique, ne laissent plus aucun doute sur
l'impulsion que suivra la nouvelle administra
tion, dans la direction des affaires du pays. Ce
cabinet est catholique et entièrement dévoué
au parti cléricalquoiqu'il compte dans son
sein quelques soi-disant libéraux. A défaut de
connaître les antécédents de MM. Dechamps,
Malou d'Hoffschmidtetc. on doit être con
vaincu, que ces honorables députés sont les
hommes du parti-prêtre, rien qu entendre les
cris de joie frénétiques que poussent les feuilles
vertueuses.
Ouiil est vrai que ce sont les battus qui
triomphent. Le parti quidans les dernières
élections, a laissé sept des siens sur le champ de
bataille, vient de former un ministère dune
nuance plus foncée que celui qui a dû se re
tirer. Nous ne nous en plaignons pas. Si, comme
on le reproche souvent l'opinion libérale,
nous étions des anarchistes des révolution
naires, nous devions nous réjouir de la compo
sition du nouveau ministère, qui est une insulte
jetée la face du pays légal. Mais nous ne sommes
ni découragés, ni abattus, parce qu'actuellement
nos amis politiques n'ont pas saisi les rênes du
pouvoir.
11 n'en pouvait être autrement, du moment
que le parti catholique prétendait avoir la ma
jorité la chambre. Si, par les élections, elle
n'était pas déplacée, c'était lui prendre pos
session du gouvernement. Mais nous croyons, de
la manière dont la chambre est fract ionnée, qu'on
y compte plus de libéraux incorruptibles que de
calholiquespurs. 11 reste, il est vrai, un parti flot
tant composé en majorité de fonctionnaires qui
volent avec toutes les opinions au pouvoir et
qu'on appelle le bagage ministériel. Jusqu'ici le
ministère mixtepréférailce»hommesà conscience
timorée, attachés surtout leurs appointements,
et favorisait leur entrée la chambre; ligne
de conduite qui ne tendait rien moins qu'à
faire végéter la Belgique sous le pire des gou
vernements, celui de la faveur et des coteries.
Nous n'en voulons nullement au parti ca
tholique, d'avoir formé un ministère qui ne
devra plus cacher sa bannière et qui laissera de
côté toutes les hypocrisies de la mixture. Mais
nous combattrons toujours un cabinet qui doit
introduire dans le gouvernement, l'état de
lois, les vœux et tendances du parti-piètre, et
nous croyons que le ministère actuel est chargé
de celte mission. Du reste, cela nous effraye
médiocrement; qu'on essaie encore des mesures
réactionnaires, la nation en aura facilement rai
son. D'ailleurs les ultra-cathoiiques ne seraient
plus soutenus par ce parti flottant de la cham
bre, qui craindrait de jeter le pays dans une
opposition violente contre des lois odieuses et
imposées par une minorité la majorité. Car,
qu on n oublie jamais, que si tous les électeurs de
la Belgique se trouvaient réunis en un seul
collège électoral, on compterait un tiers de plus
d'électeurs libéraux, que de machines voter
dans le sens calholique.
Jeudi dernier a eu lieu, devant un nombreux
concours de monde, la distribution des récom
penses aux élèves Je l'académie Je dessin et
d'architecture Les prix consistaient en médailles,
dont un certain nombre donné par le gou
vernement.
M. le secrétaire de la direction, De Patin a
prononcé un discours, traitant des améliorations
introduites dans l'institution depuis quelques an-
nées. Aussi a-t-on été récompensé par un plus
grand nombre d'élèves qui l'ont fréquentée. Il
s est élevé pour 1844-45 246. Outre les cours
de dessin et d'architecture proprement dits, di
vers cours accessoires sont donnés: comme celui
d'expression et de composition, les leçons daua-
tomie et de perspective et le cours de propor
tion.
Une amélioration notable a pu être introduite.
Un cours nouveau y est donné, celui des solides
d'après la méthode de Dupuis. Enfin, après avoir
énuméré dans une brillante péroraison tout
ce que le gouvernement et l'administration
communal, font en faveur des beaux-arts, l'ho
norable secrétaire a engagé les élèves continuer
avec zèle leurs travaux de manière ce que
les palmes mérités aujourd liui, ne soient que
le prélude des triomphes qui les attendent dans
la carrière qu'ils auront choisie.
A l'appel de son nom, chaque élève est monté
sur l'estrade et a reçu des membres de l'admi
nistration, de la direction ou d'autres personnes
distinguées de la ville, la médaille qui devait le
récompenser de son aptitude au travail.
Voici la liste de ceux qui ont obtenu des prix
Classe d'après nature. i. De Thoor, Benoit.
2. Bouillet, Benoit.
Bosse, r" classe. Caille t, Charles. a.Titeca,
Julien.
Bosse, système Dupuis). Dezultere, Charles.
2. Caplaiu, Charles.
i™ classe, d'après l'estampe. i. De Grootef
Théodore. i. De Coetie, Auguste.
2° classe, d'après l'estampe. i. Verbrugge.
2. Podevyri, Edouard.
Dessin linéaire, i™ classe. i. Ciroux. 2.
Contrez, Jean.
Dessin linéaire, 1' classe. 1. Vuylsteke. a.
Cherf.
Architecture, 1" classe. 1. Vuylsteke, de
Boesiughe. 1. Angillis, Auguste.
copie. 1. Barbier, Auguste. 2. Pelgrim.
3m° ordre. 1. LegonLucien. 2. Dael,
Auguste.
ordre, 1. Dauchez, Adolphe. 2. Dael,
Louis.
Prix d'honneur. Blieck.
Classe supplémentaire.
Composition selon programme. De Thoor, Be
noit.
Anatomie. Bourry, Auguste.
Perspective, 1" cours. Bouillet, Benoit.
Perspective, 2n,° cours. De Coninck, Pierre.
Proportion, 1" cours. Bourry, Auguste.
Proportion, 2me cours. De Thoor, Edouard.
Géométrie pratique, 1 "cours. Angillis, Auguste.
Géométrie, ime cours. Douchez, Adolphe.
La cour d'assises du Brabant, statuant sur
une fin de non-recevoir, invoquée incidemment
111.
une fête. {Suite.)
Le lendemain fut un jour de réjouissance au château de Cœuvres.
Le marquis, voulant célébrer la présence du roi, avait fait inviter,
la veille, toutes les nobles familles qui résidaient dans les caslels
quatre lieues la roude. Les invités accoururent en foule cet appel,
et la fête fut des plus brillantes.
Situé au milieu d'un site enchanteur et sur l'une des rives de
l'Aisne qui s'élargissait comme un lac devant lui, le château de
Cœuvres avait un aspect doux et gracieux. Son parc, qui s'étendait
le long de la rivière, était semé d'arbres haut lancés, formant d'épais
couverts que le soleil pénétrait avec peine. Le terrain, arlistement
accidenté, tcu va liait l'agrément. Nulle part on n'eut trouvé de plus
belle mousse, une herbe plus verte, une fraîcheur plus vivifiante. De
jolis bateaux étaient amarrés d ordinaire dans une petite crique na
turelle au pied des bâtiments. Oudine les appelait sa flottille. Il y
en avait un Qu'elle conduisait toute seule et qui portait sou mytho
logique surnonr. TJne grande île bien boisée et quelques monticules
lointains formaient l'horizon du château et lui prêtaient leur physio
nomie romau tique.
Le marquis de Cœuvres fit faire ses conviés une promenade sur
l'Aisne. Les bateaux, chargés d'élégantes dames et de beaux cava-
tirr*) glissèrent en tous sens sur la rivière, sous un ciel blanchâtre
qui interceptait les rayons trop ardents. Dans l'un de ces bateaux
étaient le marquis de Cœuvres, de Villars, Ondine et le roi.
Une barque remplie de musiciens suivait répandant une délicieuse
harmonie. Bellegarde, placé dans un autre bateau, avait la mortifi
cation de voir son rival couronné s'entretenir assidûment avec
la belle Ondine.
Vêtue avec plus de soin mais avec autant de simplicité que la
veille, Ondine était saisissaute comme une déesse. Ses yeux bleus
réfléchissaient d ineffables clartés; ses joues étaient plus fraîches
qu'une lose de Bengale, et seséoaules brillaient pour ainsi dire d'un
éclat satiné, écrasant la blancheur de neige de sa robe de crêpe.
Henri IV la contemplait avec un enthousiasme peine contenu. Il
lui demanda de vouloir bien ramer un peu pour qu'il pût juger si
elle était aussi bonne marinière qu'on le lui avait dit. Ondine, sans
se faire prier, prit les rames et les manœuvra avec une grâce, une
énergie, une précision vraiment étonnantes.
Si j avais une pareille batelière mon service, s'écria le roi, je
Voudrais être toujours sur l'eau!
Ce serait un peu fatigant pour moi, Sire, répartit Ondine en
cédant les rames au marinier.
O11 débarqua bientôt devant une grotte artificielle otnée de lierre,
de clématite et de chèvre-feuille. Un goûlei spleiiilide y était servi»
Après le goûter on se répandit dans le parc. Henri IV proposa
Ondine de s'asseoir sur un tel lie gazouné au milieu d'un des plus
jolis sites de oette nabi talion seigucuiiaie. Les daines et les seigneurs
vinrent se ranger autour du roi, mais une respectueuse distance.
Bellegarde, singulièrement préoccupé, se mit roder devant le
tertre; il s'approcha même si près d'Ondine qu'il pouvait entendre
ce que disait le roi. Madame de Villars remarqua son manège et,
sous prétexte de causer avec lui, le prit par le bras et l'éloigna»
Henri IV, tout entier ses pensées d'amour, n'avait point re
marqué cet incident. Il s efforçait, avec une loyauté fort peu édi
fiante, d'enlever Bellegarde le cœur de la belle Ondine. Il lui dé
clara avec véhémence la passion qu'elle lui inspirait, mais il ne dut
pas être enchanté de son succès. Ondine légèrement embarrassée
garda le silence.
Eh bien! reprit-il, ne me répondez-vous pas?
Que vous répondrais-je, Sire, siuon que je regrette d'avoir biea
involontairement éveillé..
Ah! quelle froideur! interrompit le roi, vous anrais-je offensé®
dans 1 expression de mes sentiments? Telle n était certes pas mon
intention.
Vous ne m'avez point ofTensée, Sire, je ne dois sans doute
qu'être flattée de l'attention que vous voulez bien m'accorder, mais..»
Mais?....
Faut-il vous parler franchement?
Ah! veutre-saiul-gris! voilà une franchise dont j'ai peur
l'avance.
peur? vous avez pourtant, Sire, la réputation d'être très-brave.
»- Pas ta amour, répliqua Le roi eu soiuiaut, voyci, je tremble un