qui, ne possède une passoire, avec laquelle on
peut obtenir, quoique plus lentement, le même
résultat.
NOUVELLES DIVERSES.
Un fait curieux se passe en ce moment de
l'autre côté de la Manche. Un magistrat de
comté, M. Watson, avait été destitué pour
avoir assisté au meeting d Enniskellen. Aussitôt
vingt autres magistrats offrent leur démission
que le gouvernement refuse. Alors ils convo
quent des meetings et s'y font remarquer par
la violence de leur langage et la virulence de
leurs attaques contre le ministère. Celui-ci
bravé ainsi ouvertement, ne peut se dispenser
d'agir et prononce la destitution des récalci
trants; mais aussitôt d'autres.surgissent et ré
clament les honneurs du martyre. L épidémie qui
avait gagné seulement les partisans du rappel et
provoqué la destitu tion de plusieurs de ses prin
cipaux chefs, commence également s'éten
dre aux lords-lieutenants et députés-lieutenants
des comtés anglais. Le comte de Winchelsea
vient de donner sa démission des fonctions de
député-lieutenant des comtés de Nôrthampton,
Kent et Lincoln, en déclarant injuste et arbi
traire la mesure qui a frappé M. Watson.
L'enquête sur les événements de Leipzig
est terminée. Elle a donné pour résultat qu il
n'existait aucune préméditationni coalition
des partis. La circulaire ministérielle relative
aux réunions des catholiques irrite les esprits.
On présume que le gouvernement prendra des
mesures encore plus sévères pour empêcher le
mouvement religieux de se propager.
Les journaux hollandais disent aujour
d'hui que lors de l'arrivée Flessingue du yacht
Victoria and Albertdimanche malin dix
heures, le vice-amiral hollandais Lucas, s'élant
rendu bord pour complimenter la reine, n'a
pu être admis, S. M. ne recevant pas par suite
des fatigues du voyage. Aucun navire de guerre
hollandais n'a arboré le pavillon pour saluer le
steamer royal qui est resté 7 heures sur l'Escaut
sans voir flotter le drapeau hollandais.'
Tout cela est assez significatif et trahit la
froideur qui semble régner depuis quelque
temps entre les cours d'Angleterre et des l'ays-
Bas.
On sait que la reine Victoria n'a pu se
rendre plus populaire en Allemagne quen Bel
gique. Les correspondances de ce premier pays
en fournissent plus d'une preuve. En voici une
nouvelle qui est assez singulière. On sait que
S. M. britannique a donné.ToOO lhalers(13,300
fr. pour l'achèvement du Dôme de Cologne
il vient de se former dans celte ville une société
qui ouvre une souscription afin de rembourser
celte somme la reine, sous prétexte que la
somme est trop faible, et que S. M. ne s'est
d'ailleurs pas montrée assez polie envers les en
fants de la Germanie.
Suivant une lettre de Berlin, le roi de
Prusse, son retour dans cette capitale, convo
quera une réunion des notables des provinces
pour travailler avec eux A l'œuvre de la consti
tution. (La Gazette de Coloijne semble douter
beaucoup de l'exactitude de cette nouvelle).
On écrit du Danube, 4 septembre, la
Gazette de Cologne:
Le bruit du mariage de la Reine d'Espagne
avec le prince Léopotd de Saxe-Cobourgest
de nouveau sur le tapis; depuis que la Heine
d Angleterre est venue en Allemagne, elle sem
ble avoir pris ce projet fort cœur. Ou doute,
je ne sais sur quels motifs, que le cabinet fran
çais donne son consentement ce mariage; on
assure même que la rencontre de la reine Isa
belle avec le duc de Nemours Pampelune,
aura une influence décisive pour la solution de
celte grave question. On ajoute que le duc Fer
dinand ira avec son fils Londres dans le cou
rant du mois prochain.
On dit que la Reine et le prince Albert
leur retour de leur voyage sur le continent
iront rendre une visite au comte d Aberdeen,
son domaine de Hàddo-House en Ecosse.
Les dernières nouvelles du Pérou annon
cent que le différend entre l'Angleterre et celte
république a été réglé l'amiable, les autorités
péruviennesontaccordé la satisfaction réclamée
pour l'insulte qui avait-failli amener de graves
hostilités; pour célébrer la conclusion de la
paix, le président de la république péruvienne
a été invité un grand banquet bord du
vaisseau anglais le Colljmgwood.
On écrit de Brunswick, le 1er septembre
Dans notre pays, non-seulement on s'obstine
conserver la procédure secrète en matière
criminelle, mais depuis quelque temps on y
ajoute même la torture pour arracher des aveux
des accusés.
Au commencement du mois de mars dernier,
une jeune fille de seize ans, Jeanne-Marie Staats,
servante chez les époux Lagermann, au village
de Weigenan, dans le bailliage de Vechelde,
fut arrêtée par la maréchaussée en station dans
Ceuilletou.
Il IN g Kl I A,
[Suite.)
v ii.
UNE RANÇON.
Le surlendemain au soir, Rocco et Jacopo causaient ensemble
assis la même table dans une hôtellerie de chétive apparence.
Cette maison, isolée au bord de la route, servait de halte aux
malheureux piétons qui se rendaient Chiezza. Rarement ils y
passaient la nuit,repoussés sans doute parle dénûment et la mau
vaise mine de 1 hôtelier.
C'était un homme petit et trapu, la barbe rousse, aux yeux
creux et fauves. Il avait pour compagne une vieille feoune louche,
la voix cassée, qui hurlait parfois une chanson grotesque et s'as
seyait dans un coin quand les jambes lui manquaient.
Que notre saint patron nous protège, Rocco 1 disait Jacopo; tu
joues là un jeu qui n'est pas sur... Mais raconte-moi toujours l'aven
ture.
C'était sur la route de Trévise. Je n'avais pris personne avec
moi parce que tu n'étais pas là, et que Mateo n avait confié qu'à nous
deux l'affaire; il m'avait prévenu que le Vénitien passerait sur la
lisière du bois. J'avais l'ordre d'attaquer avec la pointe, Mateo ayant
défendu le pistolet cause des soldats, qui, depuis plusieurs jours,
rôdent la nuit dans les environs. Surtout, avait-il dit, point de
quartier... La nuit était sombre... Le voyageur parait. Je m'avance...
Signor, lui dis-je, j'ai perdu mon chemin.
-n Je vais vous l'enseigner, mon brave.
Mais j'ai aussi perdu ma bourse...
Tà-dessus il me regarda et vit qui il avait affaire. Il piqua sa
monture; mais je tenais ferme en le priant poliment de descendre.
Il tira son poignard; je pris le mien... Je reçus un coup l'épaule;
mais je lui fis vider l'étrier, et j'allais terminer la discussion, lors-
qu'en me jetant sur lui...
Ecoule, Jacopo, reprit Rocco en s interrompant. Tu m'as sauvé
une fois des mains des sbires; tu ne peux être mon ennemi. Jure-
moi de ne pas trahir le secret que je vais le confier.
Je serai muet comme un mort; je le jure par l ame de ma
mère.
Eh bien! sache qu'avant d'entrer dans la bande de Mateo,
jetais au service du comte de Ruggieri, un brave et digne jeune
homme, uu véritable agneau qu il semblait être dans ma destinée
d'égorger un jour après l avoir tondu pendant dix ans... Eh bien! ce
comte de Ruggieri, que je n'avais pas reconnu, c'était notre Véni
tien!... Je fus un peu ému, je l'avoue, quand je l'entendis m'appeler
par mon nom. Michèle, me dit-il, j'aurais pu le faire arrêter pour
ton dernier vol; laisse-moi la vie. Je vais me marier; je t'enricherai;
et si ma fortune ne suffit pas pour ma rançon, la siguora Costano,
ma fiancée, la complétera.
La proposition méritait d'être examinée. J'hésitais... Signor
comte, lui dis-je, vous auriez mieux fait pour vous, et peut-être
pour moi, de me faire arrêter cette époque, comme vous en aviez
le droit. N'importe, je vous crois sur parole. Sauvez-vous et tenez-
vous caché jusqu'à ce que je vous avertisse... Il l'a promis... Main
tenant, veux-tu nous sauver tous les deux, Jacopo? J'aurai, par le
comte, ta grâce et la mienne.
Soit, je m'attache ta fortune, Rocco; nous lâcherons de nous
tirer de là.
Pendant que les deux hommes parlaient, la lune s'élevant au-
dessus de la forêt, versait sur toute la campagne sa lumière blanche
et douce. La vieille ouvrit la fenêtre étroite pour examiner si aucun
voyageur ne paraissait sur la route, ferma le volet, ranima la lampe
accrochée la muraille et vint s'asseoir auprès des buveurs, les
mains jointes sur ses genoux.
-n Rena, demanda l'un des hommes, Mateo est-il passé par ici
aujourd'hui?
Voilà bientôt quinze jours qu'il n'est venu, et pour peu qu'il
tarde encore, je crains bien qu'il ne trouve plus ici un verre de
cetle localité, sous la prévention d'avoir incen
dié une grange appartenant ses maîtres.
Le commandant de celte troupe, au lieu de
faire conduire la prévenue devant un magistrat
de I ordre judiciaire, comme cela se pratique
toujours en pareil cas, l'interrogea lui-même;
et comme elle persistait affirmer qu'elle était
innocente du crime qu'on lui imputait, il ap
pela un sous-officier, lequel, surun signe donné
par le commandant, tira de sa poche un étau
en fer, plaça les pouces des deux mains de
Jeanne entre les mâchoires de cet instrument,
et, après avoir serré celles-ci autant que possi
ble il les arrêta dans cette position l'aide
d'une clef. La jeune fille continuant encore
dire qu'elle était étrangère l'incendie de la
grange, le sous-officier, sur l'injonction que lui
fit son chef, se mil la frapper sur le dos et
sur la poitrine avec une baguette de fusil, jus
qu'à ce (pie cetle malheureuse, vaincue par la
douleur, s'avouât coupable du crime qu'on lui
reprochait.
Alors on lui ôta l'étau des deux doigts, et on
la transporta en prison, où on lui mit les fers
aux mains et aux pieds et on l'enchaîna au mur.
Dans les nombreux interrogatoires qu'elle.subit,
on lui fermait la bouche chaque fois qu'elle allé
guait la moindre circonstance tendant établir
son innocence; et pour peu qu'elle y insistât,
on la menaçait de l'enfermer dans un cachot au
pain et l'eau.
Le tribunal du bailliage de Vechelde, jugeant,
suivant notre code de procédure, sur le vu des
actes seuls et en absence de l'accusée, déclara
Jeanne-Marie Staats coupable d'avoir malicieu
sement mis le feu la grange appartenant aux
époux Lagerman ses maîtres, et la condamna
la peine capitale, sentence qui fut confirmée en
deuxième et en dernière instance.
Par un hasard providentiel, pendant que
l'ecclésiastique de la prison préparait Jeanne
la mort, ce qui chez nous dure toujours envi
ron une quinzaine de jours, deux brigands fu
rent arrêtés, qui avouèrent qu'ils avaient incen
dié la la grange des anciens maîtres de Jeanne.
L'exactitude de cet aveu ayant été constatée par
les preuves les plus évidentes, Jeanne fut remise
en liberté.
Un avocat du barreau de Brunswick, M.
Edouard Gotlhard, adressa, au nom de Jeanne-
Marie Staats, une supplique au gouvernement
afin qu'il fût accordé celle jeune fille une in
demnité pour la condamnation infamante indû-
sondrio ou un morceau de parmesan son service.. Les provisions
s'épuisent, et je serai bien forcée d'aller lui rappeler qu'on ne vit
pas plus ici d'air pur qu'à Venise,
Tiens, voilà pour te donner de la patience.
En disant cela, l'un des hôtes jeta un double sequin dans le ta
blier de Rena. Au fait, dit-elle en examinant la pièce d'or d'un air
de satisfaction la fois et de doute, le séjour des villes n'est pas si
sûr pour nous autres pauvres vieilles gens que les quatre murailles
protégées par la relique enfermée dans la croix d'argent de mon cha
pelet.
Vieille folle! cela ne t'empêchera pas d'être brûlée sur les fa
gots, et j'irai souffler le feu, moi, ajouta 1 hôte en ricanant.
Tu seras peudu auparavant, et c'est moi qui tirerai la corde,
répliqua Rena, avec un sourire hargneux et méchant.
Oh! pour toi, tu n'as rien craindre de ce côté; on ne pend pas
les squelettes; les corbeaux n'y trouveraient pas leur compte.
Cette fois, les trois interlocuteurs se mirent rire ensemble. Mais
l'hôtelier rentrant dans ce moment jeta un regard de côté sur
le groupe,et poussant Rena par 1 épaule. Proposde femme, temps
perdu, dit-il, va travailler, vieille chouette, et qu'on ne me dise
plus que les gobelets d'étain ne sont pas luisants... Mais tu sais mieux
vider les brocs que les remplir.
Ah! j aimerais mieux une geôle que celte maison.*. Qui est-ce
qui parle ici de travail, quand, malgré mes soixante ans?...
Eh! c'est justement pour les soixante ans que je te déteste. Si
tii es en retard avec le diamant, tant pis pour toi.
Ne voilà-t-ii pas un beau cavalier, pour trouver qu'on ne le
vaut pas, répliqua Rena avec ironie, en désignant l'hôtelier aux
deux témoins de cette scène burlesque. Mais ceux-ci s'étant levés
sans répondre, venaient de disparaître par une porte cachée dans le
mur, en apercevant l'entrée de la cabane la figure pâle de
Mateo.
[La suite au proehain n°.)