5e ANNÉE. - N° 458.
INTÉRIEUR.
DIMANCHE, 21 SEPTEMBRE 1845.
JOURNAL DYPRES ET DE L'ARRONDISSEMENT.
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VIRES ACQUIRIT EUNDO.
1TPKES, le 20 Septembre.
LES PREMIERES SEANCES DE PARLEMENT.
Convoquées dans des circonstances graves et
dont les conséquences ne peuvent être prévues
par la prescience humaine, les chambres se
sont montrées la hauteur de leur mission. A
peine réunies, elles ont déjà constitué leur bu
reau après avoir au préalable vérifié les pou
voirs des nouveaux membres.
Déjà les sections sont formées, et les mesures
soumises par le ministère de la Saint-Ignace
l'approbation de la chambre des représentants se
ront examinées par elles, avant d'être débattues
en séance publique. Aucune discussion politique
n'a été soulevée, non pas faute de motifs, mais
parce que les députés de toutes les nuances
sentaient le besoin de s'occuper des remèdes
porter aux souffrances, que doit amener pour
les classes indigentes la récolte manquée des
pommes de terre. On a d'autant mieux fait de
ne pas s'enquérir de la formation de ce ministère
hétérogène, qui compte dans son sein des repré
sentants d'autant de nuances politiques, que
l'habit d'Arlequin de couleurs, que les féaux
catholiques en eussent pris texte, pour crier
tinhumanité de l'opinion libérale, qui, au lieu
de s occuper de la subsistance du peuple, per
dait son temps en discussions oiseuses.
D'ailleurs une levée de boucliers était parfai
tement inutile. Au choix du bureau définitif de
la chambre, on a pu se convaincre que le mi
nistère de la Saint-Ignace ne vaudra pas mieux
que son aîné, qu'il continuera se traîner dans
l'ornière de la mixturesyslèmesolennellement
condamné par les électeurs de la capitale poli
tique et de la métropole commerciale de la Bel
gique.
M. Liedts, gouverneur du Brabantqui a
remplacé M. De Viron Bruxelles, afin de
pouvoir caser l'apostat politique Mercier au
gouvernement du Hainaut, a été nommé prési
dent de la chambre. 11 était porté par tous les
partis et par le ministère. Mais une lutte au
scrutin secret a eu lieu pour le choix des
vice-présidents. L'opposition désirait la nomina
tion de MM. Fleussu et Osy. Le parti catholique
et le ministère portaient au fauteuil de la vice-
présidence MM. Vilain XIV etDolez. Au premier
tour de scrutin, M. Vilain" XIV a obtenu la ma
jorité avec les 40 voix catholiques et ministé
rielles. M. Fleussu n'en avait obtenu que 32, M.
Osy 31 et M. Dolez 23. Au second tour de
scrutin les voles du bagage ministériel et des
ultra-catholiques se sont reportés sur M. Dolez
qui, quoique libérala été élu en son absence
et son insçuvice-président de la chambre
par 42 voixtandis que M. Fleussu a conservé
les 32 suffrages de l'opposition.
Quant la nomination des secrétaires de la
chambre, trois députés catholiques ont été choi
sis, mais des faibles majorités. M. De Vil—
légas, qui, il y a quatre ans, avait été repoussé
par la majoritéparce qu'il était libérala été
renommé secrétaire, au scrutin de ballottage, par
36 voix contre 33 données M. Van Cutsem
qui s'est rangé décidément sous la bannière clé
ricale.
Comme on peut s'en convaincre, les choix
faits par la majorité guidée par le ministère ou
forcément acceptés par ce dernier trainé la
remorque par la majorité, sont pour le moins
aussi significatifs qu'une discussion politique,
qui eut forcé le cabinet prendre couleur. On
ne doit plus en douter maintenant, le parti
clérical battu aux élections, s'est maintenu au
pouvoir par un effort désespéréet se trouve
condamné louvoyer entre la fraction ullra-
calholique qui, avec l appoint des votes minis
tériels quand-rnême, donne la majoriléau cabinet
et l'opposition libérale renforcée par les derniè
res élections. Il est constaté maintenant par le
scrutin, que les libéraux peuvent compter sur
trente deux trente trois voix la chambre.
Avec une minorité aussi forte, aussi compacte,
nous sommes assez curieux de savoir, si on
osera irriter davantage le pays légal et avoir
l'audace de continuer la réaction dans le sens
de l'opinion ullramontaine.
Si souvent nous avons rompu des lances pour
défendre 1 institution d enseignement secon
daire de la ville d'Ypres, au moins l'appui de
l'éloge que nous eu faisions, nous pouvions
fournir des preuves, que la réputation dont jouit
le collège d Ypres, n'est pas usurpée. Souvent
nous avons eu mentionner les palmes rempor
tées par des élèves de l'institution communale au
jury d examen. Depuis 1826, les jeunes gens qui
y ont fait leurs éludes, sont eu général tous bien
placés. Ils vivent parmi nous, on les connaît,
on peut les apprécier et nous ne croyons pas
que les détracteurs de cet établissement aient
rougir, ni de la conduite, ni de l'éducation de
la génération qui a fréquenté, depuis 1826, le
collège communal.
Nous avons encore un succès annoncer,
l'appui de ce que nous avons proclamé si sou
vent. M. Benoit Annoot qui a fini ses études au
collège d'Ypres, vient de passer avec distinction,
touchant de très-près la grande distinction
son examen de docteur en sciences. M. Benoît
Annoot a toujours été un jeune homme studieux
et un élève remarquable. Après avoir fini ses
éludes l'institution communale, il a suivi les
classes de hautes mathématiques l'école cen
trale de commerce Bruxelles, et plus tard les
cours de l'Université Libre.
Nous ne croyons pas que, depuis l'institution
du jury, il ail été reçu des docteurs en sciences
mathématiques avec distinction. Honneur donc
M. Annoot qui le premier, si nous ne nous
trompons, a subi cette épreuve difficile et de
manière faire prévoir quedans la carrière
qu'il a choisie, il trouvera moyen de se faire
remarquer.
Depuis longtemps on s'était plaint juste
titre, que des établissements placés sous la tu
telle de l'autorité supérieure aliénaient vil
prix ou laissaient détériorer les objets d'art dont
ils étaient propriétaires.
Le conseil provincialdans sa dernière ses
sion^ arrêté un règlement propre faire cesser
ces abus souvent irréparables. Un article de ce
règlement porte, que dans chaque arrondisse
ment une commission sera instituée l'effet de
veiller la conservation des objets d'art, dont
nous venons de parler,
La députation permanente, par arrêté du 12
de ce mois, vient de désigner les membres qui
sont priés de vouloir bien faire partie de la com
mission, pour l'arrondissement d'Ypres.
Cette commission se compose de:
MM. Vauderstichele de Maubus, bourgmestre;
J.-B. Van den Peereboom vice-président de la
Cominissiondes Beaux-arts; Désiré Vandermeersch,
membre de la même commission Diegerick, pro-
lesseur aucollége communal,et membre de la même
commission; Th. De Glieus, membre de la com
mission de la Bibliothèque; Vandeputte, curé
Feuilleton.
a Kl 1 Kl IL A.
(Suite.)
IX.
le noeud gordien.
Après le dénouaient inattendu de leur trahison, Rocco et Jacopo,
restés seuls dans la salle, attendaient, avec un calme apparent, les
effets de la vengeance de Mateo. L'anneau par lequel chacun d'eux
était attaché avait la forme d'un cercle plat et leur serrait le poignet.
"Un bras restait entièrement libre. Celle sorte de douceur dans la
yiolence, d'humanité dans le supplice, avait pour but de laisser aux
prisonniers la liberté de mouvements dont ils avaient besoin. La
vieille Rena, seule chargée de pourvoir leurs besoins, avait ce
jour-là, par un surcroît de zèle dans l'exercice de sa charge, ou
peut-être par une compassion qui ne lui était pas ordinaire, allumé
lin peu de branches inertes dans la haute cheminée. A peine fut-
elle sortie, que Rocco, qui avait suivi tous ses mouvements avec la
plus grande anxiété,bondit S u lui-mcuie avec l'agilité d'un jaguar.
Sa figure rayonnait d'une joie insensée. Jacopo, en suivant la dirço-
tion que lui indiquait le regard de son compagnon, aperçut, près du
feu, une hache oubliée par Rena. Soupçonnant, sans la comprendre,
la cause de l'exaltation extraordinaire de Rocco, dont la main éten
due et tremblante moutrait l'instrument laissé par la vieille: Eh
mon brave, dit tranquillement Jacopo, répondant ainsi la pensée
exprimée par cette pantomine éloquente, penses-lu attirer toi
celte hache par tes regards? Et, d'ailleurs, qu'en ferais-tu A moins
que lu ne veuilles t'en servir pour envoyer un peu plus tôt son
compère, l'âme et le corps de Rena.
Rocco, sans répondre, se coucha par terre en rampant sur son
ventre. Tout près de la hache était uue branche d'arbre, longue,
moitié brisée, et dont une extrémité était tournée du côté du pri
sonnier. Rocco allongea le bras, ses membres se distendirent par un
violent effort... Ses doigts effleuraient la branche il y enfonça ses
ongles, l'attira doucement vers lui, puis, la saisissant avec force, il
s'en servit pour atteindre la hache... Cette opération, si simple en
apparence, fut longue et difficile. Rocco proferait d'horribles blas
phèmes. Enfin, il s'elança par un mouvement violent comme s'il eût
voulu ébranler la muraille. Ses articulations craquèrent.... La hache
glissa enfin vers ses doigts crispés. Il se releva alors en la brandissant
autour de lui en signe de triomphe. Nous sommes sauvés! s'écria-t-il
Jacopo le crut fou.
Au même instant et avant qu'il eût eu le temps de comprendre
l'étrange scène qui se passait sous ses yeux, la hache s'abattit avec
une force terrible contre le mur où était attaché Rocco. Le sang
jaillit jusque sur la figure de Jacopo... L'anneau de fer serrait encore
la main sanglante, mais le bras en était séparé.
As-tu cœur? demanda Rocco en s'approchant de son compa
gnon, la hacbe levée.
Jacopo se recula avec terreur.
Au revoir donc, dit Rocco, je te sauverai malgré loi.
Et il disparut dans l'obscurité.
L'impression de l'air extérieur rendit l'intrépide bandit l'éner
gie physique qu'avait failli lui enlever l'opération terrible qu il ve
nait de se faire subir lui-même. Une pensée ardente le soutenait...
En quelques instants il eut gagné Venise où il se fit conduire par le
ohef suprême de la police.
Qui es-tu dit le magistrat effrayé la vue de cet homme dont
la figure était Lvide et les babils souillés de sang.
On m'appelle Rocco. J'appartiens la bande de Mateo.
Quel motif t'amène ici
-< La Vengeance.