INTÉRIEUR.
5e ANNÉE. - N° 461.
JEUDI, 2 OCTOBRE 1845.
JOURNAL DYPRES ET DE L'ARRONDISSEMENT.
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TIRES ACQUIRIT EUNDO.
YPRES, le 1" Octobre.
La prépondérance du parti catholique-poli
tique en Belgique, paraît, bien des personnes,
êtresansracinesetpourainsi dire phénoménale.
Et si l'on y songela force de ce parti ne dé
pend que de son organisation. Dans la majorité
de la nation, la théocratie telle que veulent l'im
poser au pays. Nos Seigneurs les Evêques, comp
te peu d'adhérents. C'est, quoiqu'on en dise,
subrepticement que le clergé en est venu s'em
parer de toutes les issues du pouvoir et celte
domination viendra cesser, du jour, où le parti
libéral uni de vues et de principes, pourra se
compter et se présenter dans la lice avec une
organisation étendue et puissante.
Cette idée de former une vaste association
libérale qui couvrirait le pays et permettrait de
lutter avec avantage contre la hiérarchie cléri
cale, commence gagner du terrain. Il est po
sitif que les doctrines politiques de nos adver
saires sont loin d'être populaires et ce n'est
souvent que par force qu'on parvient les im
poser. Intrigues, promesses, corruption, places,
toutesl moyen de grossir la phalange catholique
et nos adversaires en usent effrontément, tandis
que l'opinion libérale n'a pour elle que la per
suasion et la sympathie qu'inspire ses principes.
Nous trouvons dans le Journal de Louoain
lin article excellent qui démontre que pour lut
ter avec l'organisation cléricale, il faut s'asso
cier sur une large échelle et discipliner l'opinion
libérale: c'est là un plan qu'on devrait lâcher
de mettre en exécution. Voici du reste comment
s'exprime le Journal de Louvain:
Ce qui constitue la force du parti catholique,
c'est son admirable unilë. Unité de vues, unité de
conduite. Jamais, entre les adeptes, de discussions
de principes ou de personnes. Chacun sacrifie vo
lontiers ses préférences et ses aversions. Lorsque des
divisions se manifestent, elles sont intestines, et, au
moment suprême, tout rentre dans l'ordre. A cela,
rien de comparable, si ce n'est le patriotisme fran
çais, combattant l'ennemi extérieur.
Chez nous, c'est souvent le contraire, sauf
NOUVELLE.
DEUXIÈME PARTES.
I. Suite.
Madame Roland n'était pas seulement une ardente républicaine
qui rêvait la gloire de son pays et la voulait pure et grande, c'était
encore une femme du moude, du commerce le plus agréable, et qui
réunissait chez elle les femmes les plus distinguées de l'époque. Ma
dame Tallien et Madame Joséphine Beauharnais, depuis impératrice
des Français, étaient de ce nombre. La société de ces femmes si ai
mables, si spirituelles, exerça uue influence singulièrement favorable
sur le caractère d'Albert jusqu'alors trop sérieux, trop coucentré,
parce qu il n'avait connu de la vie que les tourments. 11 devint plus
ouvert, plus commuuioatif, et parvint revêtir de dehors enjoués, un
fond grave et austère.
La maison de Madame Roland semblait destinée procurer A
Albert les rencontres les plus inattendues et les plus singulières.
Un soir que le ministre avait réuni chez lui tout ce que le parti
Girondin renfermait d hommes distingués et de femmes charmantes,
une jeune étrangère attira parlioulièremeut l'attention d'Albert.
C était une personne d une grande beauté et d'une rare distinction.
Au premier regard jete sur elle, ou comprenait au feu de ses yeux,
la magnificence de son front, que des sentiments élevés devaient
seuls trouver place sous cette admirable enveloppe.
quelques rares exceptions, exceptions que l'on peut
réduire deux ou trois localités, nous ne sacriliotis
ni nos intérêts, ni nos opinions, ni même nos ran
cunes personnelles. Ce mal est profond et sérieux,
il menace le parti libéral dans ce qu'il a d'élevé, de
nécessaire sa durée et ses succès. Ce que nous
disions, bon nombre d'esprits sérieux le répètent et
le déplorent, mais voix basse on dirait qu'on
guérit le mal en le couvrant. Là, cependant est notre
endroit faible. A cela il y a un remède et c'est aux
hommes influents du parti libéral méditer et
l'employer au plus tôt.
Ce qui manque au parti libéral, c'est une con
stitution. Jusqu'à présent nous savons parfaitement
ce que nous ne voulons pas. 11 n'en est pas positive
ment de même de ce que nous voulons. A Liège, par
exemple, on ne veut pas toujours la même chose
que l'on désire Bruxelles. Les libéraux d'Anvers,
deGand, ne sont pas entièrement d'accord avec ceux
du Haiuaut. A Liège, n'avons-nous pas vu deux ma
nifestes partis l'un et l'autre du camp libéral et pro
clamant des nécessités différentes? A Bruxelles, nous
avons vu la société de l'Alliance publier un pro
gramme et exiger de ses candidats qu'ils y adhèrent.
Mais ce programme est-il adopté par tous les libé
raux? Fonne-t-il le code libéral de la Belgique?
Jusqu'ici il lui manque évidemment la sanction du
pays.
Dans le parti catholique, nous voyons tous les
ans une réunion des évêques dans laquelle la poli
tique joue un grand rôle. Là, si nos informations
sont exactes, on arrête la règle de conduite qui sera
tenue dans la période qui suivra. Chez nous, chaque
ville, chaque arrondissement, chaque organe dans
la presse, eu est réduit suivre ses propres impul
sions, consulter ses- sentiments individuels et
agir en conséquence. De là, la division qui détruit
les forces au lieu de l'unité qui les féconde et les
multiplie.
Pourquoi n'imiterions-nous pas nos adversaires
politiques? Pourquoi n'organiserions-nous pas une
vaste association nationale? Pourquoi ne provoque
rait-on pas une assemblée publique, une réunion de
tous les libéraux du pays, dans laquelle serait pro
posée, discutée et arrêtée une constitution libérale
qui serait donnée au pays comme le pacte qu'il fau
drait défendre. A celte condition, bien des gens in
décis et pour lesquels le libéralisme est encore un
épouvantai], se rallieraient franchement une cause
dont il leur serait dès lor» facile de sonder la pro-
Albert se pencha vers Madame Roland, laquelle il demanda
mi-voix le nom de cette belle personne.
C'est une étrangère, lui répondit la femme du ministre, mais
bien que née eu Espagne, il serait difficile de ne pas la oroire fran
çaise sou langage. Elle a reçu ici une éducatiou toute parisienne,
parce que son père, seigneur espagnol du plus haut rang, s'est trouvé
forcé par sa position diplomatique de passer plusieurs années en
France.
Mais comment la nommez-vous? reprit Albert avec la plus vive
curiosité.
Doua Juana de Las Sierras.
Jeanne de Las Sierras! s'écria le secrétaire dans le plus grand
trouble, cela est-il possible!
Et sans y songer, il avait élevé la voix et la jeune fille avait en
tendu son exclamation.
Dès cet instant, Albert fixa aussi l'attention de Jeanne. Mais il
retrouva promptemeut son sang-froid:
Vous connaissez donc cette personne? lui demanda madame
Roland, étonnée son tour.
De nom seulement} mais oomment dona Juana vous est-elle
connue?
Mon amie, madame Tallien me l'a présentée comme une amie
d'enfance elles ont été élevées daps le même pensionnat et se sont
rencontrées depuis dans le monde. Madame Tallien est trop prudente
pour présenter dans notre société une personne dont elle ne serait
pas sure.
fondeur. On ne va jamais si loin que quand on ne
sait pas où l'on va. Nous disons, nous, on ne va
jamais aussi sûrement que quand on sait où l'on
s'arrêtera.
AVIS.
A dater du 2 de ce mois, la Bibliothèque
communale sera ouverte au public, le Mardi et
Jeudi de chaque semaine, de 2 5 heures.
La disette des pommes de terre, a tout natu
rellement porté la spéculation un pharma
cien et plusieurs autres habitants de Roubaix,
viennent de fréter Dunkerque un navire de 3
400 tonneaux pour en aller chercher au
Canada, déjà une Ie expédition a eu lieu, et un
bateau doit prochainement arriver Croix ve
nant de Cherbourg, de telle sorte que le prix
de ce tubercule ne sera pas aussi élevé cet hiver
qu'on ne le craignait.
On écrit de Gand, 29 septembre:
Nous annonçons avec plaisir que, malgré les
prédictions les plus sinistres sur des désordres
qui devaient éclater aujourd'hui, la tranquillité
la plus complète n'a pas cessé de régner durant
toute la journée; c'est tout au plus si quelques
curieuxen très-petit nombreont passé sur
les places désignées comme lieu de rassemble
ment. Comme nous l'avons dit avant-hierles
autorités avaient pris des mesures énergiques
pour assurer le bon ordre; ces mesures avaient
été organisées sans bruit, sans ostensalion, mais
elles étaient combinées de manière réprimer
sur le champ toute tentative de désordre. Nos
fabricants ont aussi admirablement secondé les
autorités car la plupart d'entr'eux ont, contre
l'habitude du lundi, fait travailler leurs ouvriers
jusqu'à 10 heures du soir; ordinairement le
lundi, le travail cesse 3 heures de relevée.
L'annonce de troubles prochains a été accueillie
par notre population en général avec une aver
sion non équivoque, et n'a pu être encouragée
que par ceux qui, n'ayant rien perdre, cher
chent pêcher en eau trouble.
La police est toujours la recherche de
Pendant que ceci se passait entre madame Roland et Albert,
Jeanne interrogeait madame Tallien
►- Quel est ce jeune homme qui parle voix basse votre amie,
et dont les regards se diligent vers nous avec tant de curiosité? lui
demanda-t-elle.
C'est M. Albert Fortin, secrétaire du ministre de la justice.
Un jeune homme de grande espérance, entré récemment aux affaires
publiques.
L'étonnement de Jeanne fut aussi grand, que l'avait été celui
d'Albert, car, instruite par Estelle d'Ambez de tout leur passé, le
rival de son frère n'était plus un inconnu pour elle.
Un même intérêt les rapprocha quelques instants après.
Yous avez habité le château de M. d'Ambez près de la Réole,
mademoiselle? dit Albert en s'avançant résolument vers Jeanne.
En effet, monsieur, répondit-elle sans paraître s'étonner de
cette question, laquelle elle s'attendait.
Don Fernand de Las Sierras, qui vient d'épouser la fille de M.
d'Ambez, vous a-t-il accompagnée Paris, mademoiselle?
Mon frère est parti pour Madrid.
11 y eut un silence pendant lequel tous deux semblaient s inter—
roger du regard. Albert le rompit
Ainsi donc, reprit-il, le château du marquis se trouve aujour
d'hui entièrement abandonné? Des hôtes distingues qui 1 habitaient
aucun n'y est resté?
A l'exception de la duchesse de Las Sierras, répondit Jeanne
»rec un calme parfait.