5e ANNÉE. N° 485. INTERIEUR. DIMANCHE, 28 DÉCEMBRE 1845. JOURNAL DYPRES ET DE L'ARRONDISSEMENT. Quelques questions a. Mgr Morel, Feuilleton. On s'abonne Ypres Marché au Beurre, et chez tous les per cepteurs des postes du royaume. PRIX DE L'ABONNEMENT, par trimestre. PourVprestr. 5-00 Pour les autres localités 6-00 Prix d'un numéro0-25 LePro Tout ce (joî concerne la rédac tion doit être adressé, franco, l'éditeur du journal, Yprea. Le Progrès parait le Diman che et le Jeudi de chaque semaine. PRIX DES INSERTIONS. Quinze centimes par ligne. TIRES ACQUIRIT EDNDO. VFRES, le 27 Décembre. La Société des Chœurs vient également de payer son tribut l'indigence; unsalutàgrand orchestre, organisé par elle, avait attiré une foule compacte dans l'église de S'-Marlin. Aussi le choix des morceaux et l'exécution ont dé passé toute attente. Dans le Stabat de Rossini, qu'on entend toujours avec un sentiment d ad miration, on a surtout remarqué la voix pure et sonore du petit Breyne, qui, par son chant plein d'âme eld'expression, a su émouvoir grand nom bre d'auditeurs. M. Edm. B***a admirablement chanté dans un trio qui a produit le meilleur effet il chante avec beaucoup de goût et pos sède une grande aisance de vocalisation. Les chœurs ont été exécutés avec beaucoup d'aplomb et de précision, ou s'est aperçu qu'en général, ces messieurs possèdent (habitude du chant d'ensemble. Payons ici un tribut de reconnaissance et de justes éloges au directeur zélé de la société, qui par son talent et sa méthode est parvenu en grande partie obtenir les succès que nous aimons signaler ici. Par les soins dè Messieurs tes MafgUillierstlne collecte a été faite pendant le salut au profit des indigents de la ville et nous sommes persuadés qu'on n'aura qu'à se louer du succès, car ceux qui se laissent impressionner par la musique ont un cœur généreux, une âme qui sait compâlir au malheur. On nous prie d'insérer l'avis suivant Les personnes dont les noms suivent, voulant s'affranchir d'un usageridicule eten même temps contribuer au soulagement de la classe nécessi teuse, ont résolu de verser dans la caisse du Co mité des subsistances le montant de la dépense, que les visites de nouvel-an leur occasionnent. Elles prient ceux qui adoptent leurs vues de vouloir joindre leurs signatures celles qui se trou vent déjà sur celle liste, déposée au bureau du Journal et de verser leur offrande dans la dite caisse. Alph. Vanden Peereboom, échevin; Legrave- rand,Th. Vanden Bogaerde, A. DeGhelcke, Ern. Merghelynck, Ch. VandebroukeH. Iweins- Fonteyne, Spillebout. Boedt, Lameere, Ham- melrath, Carpenlier, Geurls. Le produit de la liste était hier soir de 125 francs. Le 23 de ce mois, le cadavre de Philippe Sys, marchand de porcs, demeurant Coukelaere, a été trouvé dans un fossé, près de la commune de Wercken. D'après la déclaration du médecin légiste, la mort est accidentelle. On écrit de Merckem que le débordement des eaux est tellement fort en ce moment, que déjà plusieurs maisons sont endommagées. L'Impartial de Bruges, avait promis denou- veaux renseignements sur l'affaire scandaleuse de l'évêché de Gand. Nous n'avons rien perdu pour avoir attendu. Ils sont complets. chanoine de lévéché de gand, {En réponse au Nouvelliste, qui prétend que les au mônes fuites r église sont toujours religieusement employées.) Un journal de Gand, dont le propriétaire ne saurait nier les relations {finïcrct <juî lui eom— mandenlde ménager ceux qu'en toute autre cir constance ce journal ménage fort peu n'a ré pondu la lettre de M. l'abbé Beeckman que par de plates injures et de grossiers quolibets, réponse ordinaire de ceux qui n'ont fournir aucune bonne raison. Aujourd'hui pour venir en aide cette feuille, le Nouvelliste, a bavé un iugnominieux article qui accuse d'un bout 1 autre chez son auteur la rage impuissante d un de ces infâmes hypocrites que nous démas quons chaquejour, d un deces misérables dont tous les nerfs se crispent, qui l'écume vient la bouche en voyant que nous osons porter une main hardie sur la source de leurs richesses en démontrant que les aumônes qui leur sont confiées ne sont pas toujours employées con- formémentaux intentions des bienfaiteurs; nous ne répondrons cet ignoble article que par des faits que nous articulerons jour par jour, et puisqu'on nous a défiés, on en subira les con séquences. Seulement nous ferons remarquer, propos de M. le chanoine Morel, qu'il est assez singu lier de voir le Nouvelliste et le Messager de Gand se donnant la main. C'est le casjde dire ou jamais, comme Figaro: Voyez donc com me le besoin rapproche les distances. Maintenant, allons au but Les faits ci-après, Monseigneur Morel, sont- ils vrais oui ou non? Oseriez-vous leur don ner un démenti judiciaire? Pendant que vous jouissiez de la protection de Monseigneur l'évêque de Gandn'avez-vous pas fait du palaisépiscopal un véritable lupanar Des centaines de mille francs, destinées par les donateurs des œuvres de charité, ne sont- elles pas devenues la proie des courlisannes n'ont-elles pas disparu en débauches poussées un tel point qu'elles ont altéré votre santé N eprouvez-vous pas une certaine appréhen sion qu'on ne vienne nommer quelques-unes de ces dames de haute qualité que vous rece viez clandestinement dans un appartement ad hoc que vous aviez chez un tapissier en ville N'y a-t- il pas, Gand, un tapissier dont vous avez conduit la nièce Aix-la-Chapelle pour y rétablir sa faiblesseet par suite ce ta pissier n"a-t-il pas obtenu la préférence pour la fourniture des tapis, papiers-meuble, et rideaux de fenêtres du nouveau palais épiscopal four nitures, qui, pour quelques salons seulement, car le plus grand nombre n'estpas encore meu blé, ne se sont élevées qu'à la bagatelle de soixante mille francs, afin de donner un bel exemple de celte humilité tant recommandée par Jésus ses apôtres. Et alors que se dissipaient ainsi, en dépenses tantôt fastueuses, tantôt crapuleuses, des som mes énormes, l'évêché n'a-t-il pas laissé, mou rant dans la plus affligeante misère, sans jamais lui faire l'aumône d'un centime, un pauvre prê tre paralysé depuis cinq ans, etdonteependant tous les membres de l'évêché connaissaint la déplorable position. Ne pourrait-on pas citer un notaire de cam pagne qui a prêté monseigneur Delebecque quelques dizaines de mille francs, devenues né cessaires pour combler le vuide existant dans la caisse du chapitre, au moment de votre dé part, Monseigneur l'économe? SU 2 2l m 2Î 2a histoire d'une loge d'opéra. [Suite.) Nous avions repris noire conversation le colonel me racon tait ses campagnes, et je réécoutais avec distraction. Jamais son aspect ne m'avait paru plus' froidement sévère; jamais je n'avais mieux senti quelle atmosphère de gtace cet homme répandait autour de lui. Tout-à-coup je vis de loin passer, dans les allées du jardin, deux femmes que les buissons tour tour me cachaient ou me lais saient voir. Cétaient sans nu! doute la femme et la belle-sœur du colonel qui étaient descendues du cabinet de travail daus le jardin. Je les examinai avec attention. L'une paraissait avoir trente ans elle était brune, grande, un peu pâle, et quelque chose de souflrant et de maladif était répandu sur toute sa personne. Sur son bras s ap puyait une jeune fille dont la ravissante image ne s'effacera jamais de mon souvenir, quoique je puisse croire aujourd'hui que je l'ai rêvée, et qu'elle n'a jamais existé. Représente-toi une femme de dix-huit ans peine, svelte, élau- cée, graoieuse, blauche comme l'albâtre, mai» en même temps rosée comme lespremières aubépines du printemps. Un nuage de cheveux blonds entourait sa délicieuse figure j je dis un nuage, car ses che veux étaient si légers, si soyeux, si aériens, que si ce n'eût été leur reflet doré, brillant comme le soleil, on les eût comparés ces fils de la vierge qu'un souffle emporte dans les airs. Cette jeune fille portait uue robe blanche arrêtée autour de sa taille par une ceinture blanche comme la robe; elle souriait, elle chantait demi-voix, elle cueillait des fleurs tantôt sur le gazon en s'inclinant vers lui,taulôt dans les arbustes en s'élevant jusqu'à eux; et ses boucles blondes s'écartaient tour tour en arrière en laissant voir ses tempes azurées, ou retombaient sur son front en voilant son visage. Je la contemplai avec admiration et le colonel continuait tran quillement le récit de je ue sais quelle manœuvre militaire qui ne m'intéressait nullement, et que je me gardai bien d'écouter. Enfin il se tut et suivant sans doute la direction de mon regardil me dit Il faut que je vous présente ma femme... Hélène, s'écria-t-il de cette voix fortement accentuée qui fai sait si souvent trembler tousses inférieurs. Je regardai du côté où élaient les deux femmes pour voir laquelle tressaillerait ce nom, comme un pi isonnier tressaille au bruit de sa chaîne; mais ni 1 une ni l'autre ne firent un mouvement. Hélène!.... Hélène.... répéta le colonel. Et cette fois, je vis accourir tenant pêle-mcle dans ses bras un amas de fleurs, la ravissante créature que j'ayais tant admirée. C'é tait la femme du eolonel. Au moment où elle me vit, elle s'arrêta, rougit, laissa tomber ses fleurs, et prit un petit air digne et posé qni me fit sourire. Elle était ainsi plus charmante encore. Le colonel m'invita déjeuner. Hélène en fit les honneurs avec une grâce ravissanteet je l'observai pendant ce temps avec le plus vif intérêt: je cherchai deviner dans la voix ou dans le regard la pensée de cette jeune fille. Hélène était heureuse, elle n'avait encore rien entrevu dans la vie, elle lui souriait, elle l'attendait avec espé rance; enfin elle conservait encore^toute l'insouciance du jeuue âge et n'avait nulle crainte de cet homme si sévère et si froid. Que pou vait-elle redouter avec son cœur naïf et pur ni Dieu ni les hom mes ne pouvaient lui interdire ce bonheur pour elle si facile, et qui rayouuait sur son front comme le soleil aux cieux. A la voir ainsi, je perdis cette tristesse involontaire qui s'était em parée de moi, et je me dis qu'il était sans doute pour certaines âmes un bonheur calme, simple, tranquille et doux qui prenait sa source au plus pur des cieux et traversait sans les regarder ou les compren dre les joies et les douleurs de la vie. Je me dis que la jeune Hélène serait heureuse au moins, ignorée et confiante, loin de ce monde dont l'haleiue flétrit si souvent les plus blanches ailes, et voile de larmes douloureuses le regard qui s'élèye yers Dieu ou s'inoline yers a terre.

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