INTÉRIEUR.
5e ANNÉE. N° 488.
JEUDI, 8 JANVIER 1846.
JOURNAL DYPRES ET DE L'ARRONDISSEMENT.
VILLE D YPRES. CONSEIL COMMUNAL.
On s'abonne Ypres, Marché
au Beurre, 21et chez loua les per
cepteurs des posles du royaume.
PRIX DE L'A BONN EMEUT,
par trimestre.
Pour Ypres ^r« 5-00
Pour les autres localités 6-00
Prix d'un numéro 0-25
Tout ce qui concerne la rédac
tion doit être adressé, franco, h
l'éditeur du journal, Yprea.
Le Progrès parait le Diman
che et le Jeudi de oh aque semaine,
PRIX DES INSERTIONS.
Quinze centimes par ligne.
TIRES ACQDIRIT EDNDO.
YPKES, le 7 Janvier.
INSTALLATION
DES NOUVEAUX ELUS DE LA COMMUNE.
Séance publique du Lundi5' Janvier 1846.
A dix heures et demié, le président déclare
la séance ouverte. Tous les conseillers dont le
mandat n'avait pas été renouvelé, se trouvaient
présents l'exception de M. Théodore Vanden
Bogaerde. Les nouveaux conseillers prennent
place, pour entendre lecture de l'acte d'instal
lation et de prestation de serment. Après que
M. le secrétaire a relu la formule du serment,
les nouveaux élus jurent fidélité au Roi, la
Constitution et aux lois du peuple belge, entre
les mains de M. le président, qui les engage
prendre part aux délibérations de l'assemblée.
M. le secrétaire donne lecture du procès-ver-
bal de la dernière séance. La rédaction en est
approuvée.
Communication est donnée au conseil d'une
dépêche du ministre de la guerre qui autorise
la ville occuper quatre parcelles de terrain
faisant partie des fortifications de la place et
utilisées comme jardin des aubètes de l octroi.
Celte autorisation est accordée moyennant les
conditions suivantes que la ville reconnaisse
que ces parcelles sont la propriété de l'étal,
qu'elle s'engagea ne jamais agrandir ces jar
dins et qu'elle paie un loyer convenir avec
la direction du génie pour récognition. L'as
semblée autorise le collège traiter sur ces ba
ses et comme les terrains dont on demande un
loyer, ne présenlent qu'une superficie de 801
mètres carrés, le conseil est d'avis qu'une somme
de deux francs est suffisante.
L'adjudication faite par le sieur Vandecastelle,
boulanger, pour la fourniture du pain de la salle
syphilitique pour l'année 1846, est approuvée,
puisque la soumission faite par l'adjudicataire
est plus faible que la moyenne des mercuriales
du mois passé.
Le conseil émet'un avis favorable une loca
tion de quelques parcelles de terre faite par
l'administration des hospices. Ces biens loués
un nommé Doolaeghe ont été délaissés par suite
de la déconfiture de cet occupeur et le bail a
été repris par M. Verleure. Les formalités vou
lues par la loi n'ayant pas été observées, l'ad
ministration les poursuit maintenant et agira
comme si aucune convention n'était intervenue.
L'assemblée se constitue en comité secret et la
séance continue.
i
M. Louis Herman, membre sortant de l'admi
nistration des hospices a été réélu l'unani
mité dans la dernière séance du conseil.
Nous avons reçu un opuscule de M. H.Coppé,
auditeur militaire de la Flandre occidentale,
offrant un projet de loi organique des tribunaux
militaires, suivi d'un projet du code pénal mili
taire. Nous aurions désiré pouvoir rendre
compte de cet ouvrage qui attirera l'attention
sur les lacunes et anomalies du code pénal mi
litaire en vigueur. Nous nous en occuperons
dans un de nos prochains"numéros.
Par décision du département de la guerre,
les réduits des cinq lunettes qui garnissent au
nord et nord-ouest la place d Ypres, seront
rasés. La démolition de ces ouvrages est d'au
tant plus nécessaire qu'ils sont incapables de
rendre le moindre service et que leur délabre
ment est arrivé tel point, qu'ils ne peuvent
sans danger être d'aucune utilité.
On écrit de Rome
La chambre héraldique belge aura bientôt
enregistrer un nom jusqu'ici inconnu dans les
fastes nobiliaires. M. Hyelandt-Yan Naemen, de
votre ville, sera incessamment nommé comte
du S'-Empire. Journal de Bruges
A sa réception officielle du jour de l'an, M.
De Muelenaere, a pris pour thème invariable
les inondations dans les Flandres. Par le temps
qui court, il n'y a pas moyen de s'échauffer sur
un pareil sujet. Impartial de Bruges.
A la soirée de M. De Muelenaere, on a re
marqué un personnage qui, chaque fois qu'on
lui demandait Aimez-vous telle chose?
Répondait: Non, c'est le chat. Est-ce que par
hasard ce Monsieur voulait faire une méchante
allusion certain chat éeorcbévendu pour
un lapin, certaine grande dame qui ne dédai
gne pas de faire elle-même son marché?(/£/e»iJ.
Un crime affreux a eu lieu Rolleghem
jeudi 1er janvier. En faisant connaître aux lec
teurs de la Chronique les détails et les circon
stances qui ont précédé et suivi ce crime, nous
ne pouvons nuire en rien aux investigations
auxquelles se livre la justice pour parvenir la
connaissance des auteurs d'un crime aussi bar
bare qu'atroce, et dont nous avons été informés,
ainsi que de tous les détails relatifs celte san
glante catastrophepar une personne notable
des lieux même du crime.
Le sieur P. Ghesquiere, célibataire, occupe
avec sa sœur, âgée de 52 ans, une ferme située
dans là commune de Rolleghem. Le 1er de l'an
il se rendit la grand'messe, avec ses domesti
ques, et laissa sa sœur la maison pour soigner
le ménage et garder la ferme. Dans un temps
d'affreuse misère et une époque où les crimes
de tout genre se multiplient dans une effrayante
proportion, c'est pour des fermiers une grande
imprudence de laisser leurs demeures, souvent
situées l'écart, sous la garde d'une seule per
sonne, la plupart du temps sous la garde d'une
vieille servante d'une vieille mère ou d'une
vieille sœur pour aller passer avec leurs do
mestiques une couple d'heures la grand'messe
et au sermon car c'est souvent ce moment-là
que les malfaiteurs choisissent pour commettre
des meurtres et des vols. Ce fut pendant que le
fermier Ghesquiere obéissait un des premiers
commandements de l'église que sa malheureuse
sœur tomba sous les coups meurtriers d'un
lTciiilIetoii.
histoire d'une loge d'opéra.
[Suite.)
Aî-je besoin de te le dire, la soirée fut bien triste et bien longue
pour la pauvre Hélène. Le général s'endormit en lisant son Spec-
tateur militaire. M. de Sérigny ne vint pas le soir; le lendemain
avant huit heures il était aux. ordres du général mais il ne vit pas
Hélène et quitta l'hôtel avant l'heure du déjeuner. Le soir sur les
sept heures il revint.
Généraldit-il M. de Saint-Géran, je vais vous quitter.
Me quitter dit le général, et comment? J'ai vu aujourd'hui le
ministre de la guerre, et j'ai obtenu de lui d'être envoyé en Afrique
pour faire partie de l'expédition qui se prépare.
Eu achevant sa phrase, Osmond regarda Hélène, et ce regard lui
disait Vous voyez que j'ai tenu ma parole. Hélène baissa les yeux,
et le long de ses cils deux larmes brillèrent et tombèrent sur ses
maius jointes elle n'osait regarder Osmond car elle se sentit tres
saillir jusqu'au fond du cœur. C'est bien; dit-elle en elle-même,
c est d une âme noble et généreuse
Ah ali fit Je généralvous allez en Afrique. Bravo Je
conçois, mon ami, qu'il soit un peu dur pour vous, votre âge, d'ê
tre ainsi les bras croisés et l'épée au fourreau, faire votre service
sur le pavé de Paris comme ces militaires de boudoirs qui ne met
tent leur uniforme que pour aller au bal de la cour, Je vous ap
prouve, allez me travailler rudement ces Arabes qui nous donnent
du fil retordre, et revenez-nous avec un grade de plus. Je ferai
mon possible, généraldit Osmond en essayant de sourire. sur
tout, si vous avez besoin de moi écrivez-moi je parlerai au mi
nistre; c'est un de mes vieux camarades, et nous ne sommes pas mal
ensemble.
Le jeune homme ne répondit pas il regardait Hélène, qui avait
détourné la tête sans doute pour cacher les larmes qu'elle versait.
Il ne les vit pas mais il les devina. Pauvre Hélène! ses forces tra
hissaient son conrage.
Quand partez-vous, Osmond Cela ne vous empêchera pas
de venir avec nous ce soir l'Opéra
Osmoud lie put réprimer un mouvement involontaire il ne s'at
tendait pas cette proposition du généralet il balbitua quelques
paroles inintelligibles.
Nous passerons au moins notre dernière soirée ensemble.
Merci,... général,., dit enfin Osmond,... mais je... Je... n'admets
pas d excuse... N est-ce pas, Helène, il faut qu'il vienne avec nous.
Qu'allait répondre Uélène?... Osmond l'attendait. Oh si elle
aussi lui avait demandé de venir, avec quel empressementavec
quelle joie il eût accepté Puisqu il partait le lendemain, pourquoi
lui refuserait-elle ce dernier bonheur?
Peut-être, dit Hélene, M. de Sérigny a-t-il ce soir des occupa
tions que son départ de demain rend indispensables
Elle ne veut pas que j'accepte, pensa Osmond. Et cependant
cette dernière soirée, la passer loin d'elle, ne pas la voir I c'était un
supplice affreux. 11 ne sentait ni la force ni le courage nécessaires.
Ma foi, général, répondit-il, ce matin nous avons eu ce qu'il
paraît, la même idéeet j'ai été retenir une stalle. C'est diffé
rent, dit M. de Sainl-Géran.
Et il n'en fut plus question.
Uu quart d'heure après tous trois partirent pour l'Opéra. On jouait
comme aujourd'hui, les Huguenots. Il y avait, comme aujourd hui,
beaucoup de monde, et le bonheur voulut que M. de Sérigny pût
trouver une stalle de galerie qui n'était éloignée que de quelques pas
de la loge de Mme de Saint-Geran; ce qui montre bien clairement
la vérité du proverbe Il y a un Dieu pour les amants. Donc M. de
Sérigny se plaça. 11 était bien heureux de ce bonheur, qui allait lui
être enlevé pour toujours, sans doute; il était bien heureux de cette:
dernière joie. N'avait-il pas déjà fait un assez grand sacrifice en re
fusant d'aller dans la loge du général? Mais le regard d'Hélène avait
été si reconnaissant que le pauvre Osmond s'en était senti les larmes
au cœur et dans les yeux.
Le lendemain tout devait finir, et il ne lui restait plus que celte
dernière soirée pour vivre et aimer. Aussi, tu dois bien le penser, il
écouta les Huguenots aussi peu ou aussi mal que tu les écoutes aujour
d'hui, et il regarda le triste et pâle visage d'Hélène, oomme toi tu le
regardes ce soir. Plus que jamais il fut abattu et consterné de l'em
preinte douloureuse qui sillonnait déjà cette jeune tête penchée,
vers la terre, elle semblait une fleur demi brisée de sa tige. Lepau*
yre jeune homme souffrait pour elle et pour lui d'autres viendront,
pensait-il, cruels et implacables, qui remueront les cendres dcccUç