JEUDI, 29 JANVIER 1846. JOURNAL D'APRES ET DE L'ARRONDISSEMENT. LE LIVRE D'HEURES, par M. Th. Pironon, 1 vol. Bruxelles, chez Melinè, Cans et O. Feuilleton* 5 ANNÉE. N° 494. On s'abonne Ypres, Marché au Beurre, 2Îet chez tous les per cepteurs des postes du royaume. prix de l'abonnement, par trimestre. Pour Yprès fr. 5-00 Pour les autres localités 6-00 Prix d'un numéro 0-25 Tout ce qui concerne ta rédac tion doit être adressé, franc», l'éditeur du journal, Yprès. Lu Progrès parait le Diman che et le Jeudi de chaque semaine! prix DES INSERTIONS. Quinze centimes par ligne. IHTÉRIEUR. l'PRES, le 28 Janvier. Les journaux qui viennent d'arriver, annon cent que M. Mercier, l'ex-ministre des finances gouverneur du Hainaut, est chargé conjointe ment avec le général Wilmar, de rouvrir les né gociations avec la Hollande, pour mettre finaux hostilités douanières qui ont interrompu les re lations commerciales entre la Belgique et la Néerlande. M. Mercier dit-on, serait chargé de pouvoirs les plus étendus et très-larges. Nous croyons que par cette reprise des négo ciations, un grave danger menace la Flandre- occidentale et surtout l'arrondissement d'Ypres. Il est presque certain que si un traité se conclut avec la Hollande, ce sera sur notre dos, c'est-à- dire au dépens de notre industrie agricole, qui est la seule que nous ayons pu conserver. llsuffit pour motiver nos craintes, de rappeler comment la loi du 31 décembre 11135 sur l'en trée du bétail par la frontière hollandaise a élé reçue par nos voisins et quelles plaintes amères ont été élevées contre ces dispositions protec trices de notre agriculture par la Hollande, dans le dernier manifeste qu'elle a lancé pour jueiifier ses mesures agressives. 1,1 faijt seulement se rappeler que M. Mercier, le négociateur qu on vient de charger d'une mission délicate, a élé le ministre signataire du fameux arrêté sur le tran sit du bétail hollandais par le chemin de fer; cet arrêté a été une des mesures les plus désastreu ses pour notre arrondissement, non par,seseffels immédiats, mais par ses conséquences; il a été la cause première de la dépréciation sur le marché français du prix des bestiaux qui ne s'est plus relevé qu'imparfaitement. 11 y a péril en la de meure pour notre industrie agricole car nous avons lieu de croire que M. Mercier et le minis tère peut-être, sont disposés faire bon marché de l'élève du bétail, seule branche de l'agricul ture qui offre ici quelque prospérité. Nous sa vons que déjà la chambre de commerce a fait l'objet de ses délibérations de cette éventualité et peut-être sera-t-il nécessaire, pour prouver au gouvernement toute l'importance du sacri fice qu'on pourrait être disposé faire, qu'un pélilionnement soit organisé dans nos campa gnes contre l'entrée et le transit du bétail hol landais. Tel est le litre du nouveau roman d'un de nos concitoyens et dont nous allons nous oc cuper avec plaisir, car M. Pironon, par sa persé vérance et son talent, pourrait bien ajouter 1 aureole de sa ville natale un rayon de gloire de plus. Déjà, troisième œuvre du même auteur, le Livre d Heures accuse en lui une plus grande maturité de conception et une plus forte puissance dans la peinture des caractères. Certes ses deux romans, Laureet Doua Violeta, h étaient pas sans mérite, mais on pouvait s'aper cevoir que c étaient plutôt des essais faits par un homme qui avait la conviction de pouvoir faire davantage. Décidément M. Pironon paraît s'être voué la carrière d'homme de lettres et en voyant sa dernière œuvre, nous ne devons l'en détourner. Ce roman dune certaine étendue, n'est plus comme ses premiers travaux simplement une peinture de mœurs, il touche par divers côtes aux grands événements politiques qui se sont accomplis au siècle dernier. Quoique déjà celle époque eut élé dépeinte par des hommes d untalenl éminent, M. Pironon, qui s'est borné LSSSfâjSgT* ternir1 tCl lar8es ,lrailS les nages de son ruina. ,e. soulever un parallèle avec d'autres auteurs, qui oui dépeint les sombres épisodes du règne du Comité du salut public. Nous pouvons parler de quelques personnages principaux du Livre d'Heures, puisque les deux premières parties ont été offertes en prémices aux lecteurs du Progrès. Ceux qui liront at tentivement le nouveau roman de notre conci toyen, seront frappés de la rapidité de l'action, tandis que ses premiers ouvrages laissaient dé sirer sous ce rapport. Aucun épisode ne vient distraire le lecteur du fait principalpas de remplissage, il y a enfin de l'unité dans celte œuvre et jusquà la fin, le volume se trouve rempli par l hisloired'Afôerê Fortin et d'Estelle d'Ambez que l'amour devait unir, mais que des préjugés de caste ont séparé. Puisque nous avons nommé les principaux personnages du roman, parlons de la manière dont ces caractères sont tracés et prouvons que le talent de M. Pironon est devenu plus mûr, plus puissant. Le type de l'homme fort, attaché invariablement ses devoirs et que rien ne fe rait dévier de la droite ligne, est présenté avec entraînement. Celui de la femme aimante, fai ble, mais chez qui la dignité et la vertu aident triompher d'un attachement qui ne saurait être que criminel, est tracé d'une manière éner gique et saisissante. Les personnages accessoires qui entourent les héros du roman, offrent des caractères variésmais qui dans l'œuvre de M. Pironon restent les mêmes jusqu'à la fin, sans qu'on puisse remarquer la moindre déviation. Sous le rapport du style, une grande lucidité et un brillant naturel et sans efforts, sont les qualités distinclives du nouvel ouvrage de notre auteur. On dirait en lisant ce style simple et clair, qui ne vise pas l'effet, que rien n'est aussi facile que de traduire ainsi ses idées sur le pa pier, et cependant notre avis, quand on y par vient, c'est le comble de l'habilité. Nous croyons que tous les grands écrivains qui, ayant acquis cette simplicité et celte justesse dans l'expression sont devenus des modèles, ne doivent attribuer le plaisir qu'inspire la lecture de leurs ouvrages qu'à ces qualités remarquables du style. Nous croyons inutile de donner des exemples l'appui des éloges que nous faisons du style de notre concitoyen, on en a pu juger par les feuilletons du même auteur insérés dans le Progrès. Cependant nous devons avouer que mériter le plus aetujje-ooJ^i—narn que nous avons dit de la maturité de concep tion de celte œuvrepeut s'appliquer aussi juste titre au style qui est plus formé et moins inégal que dans les romans précédents du même auteur. Nous devons féliciter M. Pironon de ce qu'il parait décidé se consacrer entièrement la carrière d homme de lettres. Si par le temps dans lequel nous vivons, ce n'est pas souvent un moyen d'arriver la richesse, les succès qu on peut obtenir, offrent une ample compensation et récompensent souvent et au-delà, l'homme dé sintéressé qui préfère les plaisirs intellectuels aux délices de la fortune. On lit dans la correspondance ordinaire du Journal des Flandres Comme je vous l'ai dit, il y a quelque temps, plusieurs fois déjà la question de l'enseignement moyen a été l'objet d'une discussion assez vive parmi les ministres. M. Vande Weyer ne veut sous aucun rapport aliéner le droit que doit 2,2 (S®2i®2ï22i SD3 3^S"v?22I2I2* II, les deux amis, (Suite.) Le colonel était d'une taille moyenne, pleine de souplesse et de grâce. Ses yeux noirs et brillants donuaient sa noble physionomie une expression remplie d esprit et de vivacité. Ses cheveux châtains étaient soyeux et bouclés, ses lèvres vermeilles presque toujours, souriantes, laissaient voir des dents d'un émail éblouissant. Un riebè et élégant uniforme d aide de camp de l'Empereur, vert et or, faisait enoore valoir ce charmant extérieur. Ce bon Anaoharsis! Ce cher Raoul! répétèrent les deux amis en s'examiuant avec intérêt. --Qu'est-ce donc que ton vieux Dau phin vient de me conter?... Vraiment tu pars?... Et ce soir encore? sans ine donner un jour, dit Boisseau.— Malheureuseini nt, il m es! impossible de retarder mon départ d'une heure.... Je viens des Tui leries où j ai reçu les derniers ordres de l'empereur je dois être Vienne le 5 mars au plus tard car le prince de Neufchâtel y arri vera le 5 ou le 6. Mon pauvre Anacharsis, si tu savais combien je regrette ce contre-temps! Commeut aussi ne m'as-tu pas écrit un mot Que diable veux-tu je te ménageais une surprise... Tiens j'aurais dû m'en defier, car les surprises ne m'out jamais réussi... Te fouviens-tu il y a deux ans, ton retour d'Italie Je te prends au déboîter ,je te dis Raoul, il faut que je le mène souper chez M1,e INanteuilpremière cantatrice du Théâtre de l'Impératrice ça sera unecharmante surprise, car elle ne m'attend pas. Oui et je me souviens que ce fut au contraire toi qui fus fort surpris de ce que tu vis chez elle... Mais je te croyais èn Espagne, en mission... —Raoul, dit gravement Boisseau, en montrant ses tempes grisonnantes, vois tu cette blancheur prématurée?— Eu effet, mon pauvre Anacharsis, lorsqu'il y a un an je te quittavrieu n'annonçait cet hiver précoce! Eh bien mon ami, cette gelée blanche pour me servir de ta com paraison est le fruit d'une nuit d'uue seule nuit,... dans un pays terriblement ohaod pourtant. —Gomment cela, Anacharsis?ex plique-moi ce phénomène.... Est-ce l'émotion?.... l'amour un ja loux espagnol? quelque danger?...—Oui, mon ami, un danger, un grand danger; mais dans lequel il n'y avait hélas pas la moindre jalousie. Voici le fait Tu sais qu'il y a deux ans, je ai ennuyais connue un mort, malgré mon imaieuse fortune; grâce ta recom mandation, je fus nommé auditeur au conseil d'état attaché la section des affaires étrangères.... J'assistais mou tour aux séances que présidait I empereur... Un jour le grand homme, après avoir beaucoup parlé, eu tailladant sou ordinaire sa table grands coups de canif, s était un tartinent appesanti, comme cela lui arrivait quel quefois en se courbant sur son pupitre et en appuyant sa tete sur ses deux bras; la discussion avait continué, malgré son sommeil. 11 s'a gissait des affaires d Espagne. Au bout d un quart d heure le grand homme se réveille, reprend la discussion où il l'avait laissée,.,, et la question qu'on agitait est résolue.... Je te parle du sommeil de 1 em pereur parce que c'est sou assoupissement passager,..» bien par- donnable d'ailleurs que j'attribue l'étrange aberration dont j ai été Victime! Ab! mon Dieu! tu m'épouvantes.... Ecoute,... écoule, la séance terminée, l'empereur se relire dans son cabinet un quart d'heure après l'huissier de service vient de la part de S. M. m» chercher la buvette où on nous traitait du reste merveille. Je ma souviens même que je mangeais une aile de bartavelle; je laisse mon aille sur mon assiette. Je suis l'huissier, et je me trouve en face du grand homme. J étais aussi près de lui que je le suis de toi. Il me regarde de son oeil gris véritable oeil d'aigle, en se fourrant trois ou quatre prises de tabao dans le nez. Après m avoir un iustaut con templé en silence, il me dit: Je ne vous avais pas encore vu, o est étonnant; vous n'avez pas la physionomie que je vous supposais. Je saluais profondément, me trouvant très-bonoré de ce que legrand homme se fut donné la peine de me supposer une physionomie. Enfin, il me dit de voix brève, en me montrant un paquet cacheté: Vous partirez l'instant pour Madrid avec ces dépèches; cousez- les cachez-les bien dans la doublure de votre habit; si vous étei attaqué par une guérilla et que vous y restiez, oes papiers ne lom- berout pas au pouvoir de l'ennemi.... Le roi d Espagne vous don— nera des ordres ultérieurs. C'est une mission périlleuse très-pé- rilleuse maisajouta le grand homme d un air riant, en me pin- çant l'oreille gauche, cette mission vous va comme un gant tous êtes un vrai brûlot vous avez fait vos preuves en Tyrol. Ah ça quelle preuve avais-tu donc faite eu Tyrol Aucune mon ami, aucune, mais attend la tin. Etourdi de ce que j'entendais, incapable de répondre un seul mot, je balbutiai quelques paroles inintelligibles; je saluai denouveautrès-profoudéineutetjallau ino

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Le Progrès (1841-1914) | 1846 | | pagina 1