INTÉRIEUR.
ASSOCIATION ÉLECTORALE.
Tous les électeurs libéraux de l'arron
dissement sont invités se réunir au
Salon d'Apollon, Mardi, 26 Mai 1846,
six heures du soir.
Le but de la réunion est de nommer
un bureau provisoire, de discuter et
d'adopter les statuts de l'association, de
faire choix d'une commission définitive
et des délégués envoyer au Congrès
libéral, Bruxelles.
JOURNAL D'Y PRES ET DE L'ARRONDISSEMENT.
JEUDI, 21 MAI 1846.
TPRES, le 20 lllai.
la convention de tournay.
Les difficultés qui ont surgi Tournay entre
l'autorité communale et l'évéque de celle ville
ne sont pas s^ns précédents; Ypres nous en
avons eu un exemple. On se souvient encore du
refus fait par l'évéque de Bruges de désigner un
prêtre qui fut autorisé remplir les fonctions
d'aumônier au collège communal. Personne ne
se trompa sur les motifs qui avaient engagé
l'autorité ecclésiastique poser un acte aussi
insolite. Quoiqu'on invoquât l'intérêt de la
religion pour pallier ce qu'un refus aussi extraor
dinaire avait d'odieuxtout le monde comprit
que ce fait était la conséquence d'une conven
tion conclue entre les évêques, pour forcer les
institutions laïques d'instruction secondaire,
se mettre, pieds et poings liés, la tendre merci
de nos ambitieux prélats. Les plans du clergé,
pour absorber l'enseignement public, se dérou
lèrent avec le temps, et cette opinion qui fut
pour ainsi dire partagée généralement, acquit
la consistance d'une vérité démontrée. A Tour
nay, Liège, l'autorité ecclésiastique se crut en
droit d'agir de la même façon qu'à Ypres, et les
aumôniers en exercice furent révoqués. En
refusant leur coopération aux institutions laï
ques, les évêques nourrissaient l'espoir d'amener
leur ruine.C'est leseul motif plausiblequ'on peut
alléguer, pour expliquer la conduite des prélats
belges dans cette croisade contre l'enseignement
public communal.
Le 9 novembre 1837, l'administration de la
ville de Tournay avait prié l'évéque de désigner
un prêtre de la ville qu'il autoriserait dire la
messe quatre fois chaque semaine, dans l'église
de l'athénée.
Par sa réponse du 16dit le rapport de
M. le comte LehonMonseigneur, tout en
approuvant les intentions louables qui avaient
inspiré celle démarche, annonça l'autorité
communale que ce qui lui était demandé
n'était pas en son pouvoir. Outre l impossi-
bilité, dit l'évéque, de rencontrer dans le clergé
de Tournay, un prêtre qui puisse rendre
l'athénée les services que vous sollicitez, une
autre raison, non moins puissante, vient en-
core s'opposer l'accomplissement de vos
désirs C'est la résolution que les évêques ont
prise d'un commun accordde se séparer
entièrement des établissements dans lesquels
la religion ne serait pas la base de l'ensei-
gnemcnt et où ils n'auraient pas la part
d'autorité laquelle ils ont droit de pré-
tendre.
On voit que c'est absolument comme dans
la lettre par laquelle l'évéque de Bruges faisait
connaître son refus de désigner le nouvel au
mônier du collège comm'anal d'Ypres. L'intérêt
de la religion se trouvait alléguée comme pré
texte, pour masquer les vues ambitieuses du
clergé. Les conditions qu'on voulait imposer
l'autorité communale de Tournay était une
intervention active de l'évéque dans la nomi-
nation du corps enseignantc'était là une
condition sine quanon, dont l'évéque ne pou-
voit pas se départir.
En réalitéla coopération du clergé ne peut
s'obtenir aujourd'hui qu'au prix de la complète
abdication du pouvoir civil, L'épiscopat lient
ferme et actuellement un ministère clérical pur-
sang est appelé faire passer ces principes dans
la loi sur l'enseignement moyen.
Des réflexions d'une haute portée terminent
le travail de M. Lehon, sur la question de la
convention relaliveàl'athénéedeTournay.«Dans
la série des faits graves que nous venons de par
courir, dit le rapport, «le clergé n'a-t-ilcraint
de justifier ce reproche qu'après s'être emparé
presque partout de l'enseignement privéil
poursuivait sans relâche le dessein de dominer
l'enseignement public et de rétablir pour lui-
même un monopole qu'il a toujours combattu
comme oppressif, et flétri comme immoral,
quand il ne l'exerçait pas.
Ne craint-il pas surtout de compromettre
son caractère et son influence légitime, quand
il offre au pays, l'affligeant spectacle d'une
coalition, disons le mot, où tous les évêques
non contents d'une indépendance absolue et
respectée dans le domaine de leurs pouvoirs
spirituels, se seraient engagés entre eux faire
servir les choses saintes de la religion et de la
conscience l'envahissement du domaine de la
puissance civile, quant aux droits qu'elle tient
de la constitution et de la loi sur l'enseignement
public?
projet de loi sur le notariat.
Le projet de loi portant modification la loi
du 23 ventôse an XI, qui institue le notariat,
soulève de toutes parts les plus légitimes appré
hensions. Non-seulement les intéressés se met
tent partout en mesure de parer le coup qui les
menace mais tous ceux qui ont pu apprécier
la portée des dispositions sur le notariat, que ce
projet a pour but de consacrer, ne peuvent
assez flétrir le ministre qui ose convertir les
institutions les plus respectables en roueries
électorales.
Comment qualifier ce projet de loi de M .d'Ane-
than qui dispense le candidat notaire du stage
et qui accorde aux plus infimes employés ad
ministratifs, la faculté de faire concurrence aux
aspirants-notaires Combien ce projet ne doit-il
pas être fatal, si l'on songe qu'il aura pour con
séquence d'introduire une concurrence désor
donnée parmi les titulaires et qu'il les forcera
recourir des opérations licites peut-être, mais
peu délicates, par suite de l'extension hors de
toute mesure avec les besoins de la population
du nombre des éludes?
Déjà les notaires de certaines localités avaient
peine pouvoir suffire une existence honora-
Fcuillctoii.
histoire du xvi» siecle.
I.
Cinq heures Venaient de sonner l'église Saint-Honoré. On était
au mois de septembre; la nuit avait été belle, et les dernières étoiles
pâlissaient au ciel où couraient ça et là quelques légers nuages,
chassés par une fraîche brise. Déjà, cependant, dans la rue Saint-
Honoré et dans tout le quartier de ce nom. de lourdes charrettes
chargées de fruits et de légumes se rendaient aux halles, faisant re
sentir au loin l'étroite chaussée et ébranlant la fois les maisons et
le sommeil des habitants. Les passants commençaient circuler,
d abord rares, de longs intervalles, puis, plus pressés, puis enfin,
riant, causant, jurant... tout le bruit et le mouvement de la popula
tion parisienne.
11 y avait pourtant, cette heure, au rez-de-chaussée d'une maison
de mesquine apparence, peu près l'embouchure de la rue Saint-
Nicaise, un homme dont ce bruit ne dut pas agiter les songes. Assis
en silence auprès d une lampe dont la lumière douteuse éclairait
peine un établi couvert de menus outils de cuivre et d'acier, il sem
blait absorbé dans la confection d'une de ces œuvres de prédilection
auxquelles l'artiste attache une pensée plus haute que celle du gain.
Ses traits fatigués et ses paupières rougies par l'insomnie prouvaient
assez, du reste, qu'il était là depuis la veille. Les rayons du jour qui
pénétraient par les fentes de la porte ayant fait blanchir peu peu
la lueur de la lampe, l'artiste releva la tète avec surprise, puis passant
lentement la main sur ses yeux, il écouta un instant la rumeur nais
sante de la rue, comme pour se convaincre qu'il n'était pas le jouet
d'une de ces hallucinations particulières aux personnes dont les
veilles laborieuses ont enflammé le cerveau et brûlé les yeux.
En ce moment, la cloche de l'église sonnait VAngélus, jetant les
sons au vent comme une chanteuse folle. Samuel, c'était le nom de
l'artiste, se leva vivement, se découvrit et récita dévotement son
oraison. Ce mouvement et cette attitude pieuse firent voir une tète
de jeune homme noble et expressive. Son front pâle où brillait une
pensée ardente était couvert de cheveux noirs, et il y avait sur ses
traits réguliers et beaux une gravité prématurée. Dieu, cependant,
n'occupait pas seul l'espiit et le cœur de cet homme. Une image et un
nom tout profanes troublaient sa méditation et se mêlaient sa prière.
Quelques minutes après Samuel se rassit.
Maintenant, dit-il, que mon cœur est purifié et plusdigned'elle,
je puis l'y enfermer de nouveau sans 1 oflenser.
En disant ces mots, le jeune enlhousiaste appuya la main sur sa
poitrine comme pour y retenir une pensée chérie et pencha la tête
dans une profonde rêverie.
Samuel était un de ces enfants de la Providence qui n'ont point
de famille parmi les hommes. Longtemps il avait erré par le monde,
pauvre, ignoré, repoussé de tous... excepté d'un seul...
C'était un vieillard, isolé aussi, et de plus, avare, égoïste, maniant
tout le jour l'or et les diamants et manquant de pain! 11 s'appelait
Christophe, le plus riche et un des plus renommés joailliers de ce
temps-là. Christophe avait senti le besoin d'un aide pour augmenter
ses profits sans doubler ses dépenses, et il donna la préférence
l'orphelin sans appui et sans ressources. Samuel était intelligent; il
apprit vite les plus difficiles travaux de la joaillerie; en peu d'années
son habileté et son dévouaient payèrent largement son maître son
apprentissage et sa portion de pain dur. Christophe, de son côté,
s'attacha son élève il l'aurait aimé, s il eût pu aimer autre chose
que le métal précieux et les pierreries qui avaient été l'occupation
et l'ambition de toute sa vie. Un jour vint cependant où il la sentit
lui échapper, et, avec elle les inestimables bagatelles qui lui avaient
coûté tant de privations et de tourments. Il se résigna alors, faute
d héritier, laisser ses richesses aux mains de celui qui avait puis
samment contribué les accroître.
Samuel, vingt-cinq ans, succéda donc légitimement la clien*
tèle, la réputation et la fortune de Christophe. Celle-ci consistait
principalement en une collection de pierres fines et rares, fruit de
longues recherches et de ses connaissances supérieures dans cette
branche fort ignorée alors de la minéralogie. Le prix seul de ces va
leurs eût suffi Samuel pour le faire vivre dans l'abondance; mais
sans ambition, sous ce rapport, il avait le goût de son art et obéissait
instinctivement ce besoin de renommée qui est un des signes gé
néraux, sinon infaillibles, du talent.
A ce désir naturel de parvenir, Samuel joignait une grande ardeur
de volonté. Il travailla avec zèle, mais ces occupations purement
manuelles ne pouvaient suffire l'activité incessante de son me. Ses
On s'abonne Ypreb, Marché
au Beurre, 21et chez tous les per
cepteurs des postes du royaume.
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