6e ANNÉE. N° 541.
INTÉRIEUR.
DIMANCHE, 12 JUILLET 1846*.
JOURNAL D'YPRES ET DE L'ARRONDISSEMENT.
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VIRES ACQtIRIT EUNDO.
YPRES, le II Juillet.
CONTENTION DU 13 DÉCEMBRE.
La Chambre, après une discussion vive et ani
mée, a adopté le nouveau traité avec la France.
11 serait difficile d'expliquer comment des hom
mes d'état belges y aient pu donner leur assen
timent, car cette convention est honteuse pour
la Belgique. La France nous dépouille pièce par
pièce de toutes les concessions qu'elle nous a
faites et pour obtenir leur maintien, nous fai
sons de notre côté des concessions toujours nou
velles. Ce nouvel acte de notre habile diplomatie
vient cepeoda ni d'obtenir la sanction de la cham
bre des représentants et la majorité tout en dé
plorant la contrainte morale qui la forçait
approuvern'a osé refuser sou adhésion ce
traité ruineux pour la Belgique.
M. Vande Casteele, dout une première lettre
M. Dechamps a fait beaucoup de bruit, vient
d'en publier une seconde, sur la manière dont
les négociations ont été menées Caris L'au
teur doit être bien informé, puisque lui-même a
été envoyé en mission pour défendre les intérêts
de l'ancienne industrie linière. Quelques révé
lations de celte brochure sont curieuses et dé
voilent des tiraillements intérieurs au sein de
ce ministère De Theux si homogène.
Les instructions que vous m'avez données, dit
M. Vande Casteplesont un témoignage irrécu
sable que vous vouliez seconder les bonnes inten
tions de M. de Mueienaere pour venir au secours
de nos populations souffrantes. Malheureusement
pour vous et pour ces malheureux vous n'avez pas
le pouvoir de suivre vos propres inspirations, vous
ne pouvez faire le bien que vous voudriezparce
que vous n'êtes pas libre et que vous êtes dominé
par votre position.
Je viens donc M. le Minisire, moins vous ac
cuser que vous plaindre de ce que vous avez déua-
turé et changé complètement les instructions arrêtées
en présence et de concert avec M. le comte de Mue
ienaere, Ministre d'État, qui m'autorisaient faire
des sacrifices sur les fils pour obtenir de meilleures
conditions sur les tissus de lin, et au besoin sacri
fier même la filature,
Si vous n'aviez pas changé, M. le Ministre, ma
mission en une simple promenade, les grands per
sonnages actionnaires des filatures mécaniques vous
feraient peut-être aujourd'hui la grimace, mais vous
auriez au moins la conscience d'avoir fait quelque
chose pour adoucir le sort si déplorable de ceux
pour qui le traité actuel est un arrêt de mort.
h Vous n'ignorez pas, M. le Ministre, que le gou
vernement français instruit des conséquences dé
sastreuses qu'avait eues l'art. 2 de la convention du
xG juillet iG4.2, était tout disposé supprimer cette
partie de l'article i qui concerne les fils de lin et de
chanvre et accorder la Belgique la faculté de ré
gler elle-niêuieces importations comme elle le croi
rait uLile et convenable ses intérêts, si,de son côté,
elle renonçait au traitement de faveur sur les fils.
C'est faire restituer la Belgique un droit
qu'elle n'aurait pas dû aliéner, c'est ce but, que se
sont bornés mes efforts et j'ose l'affirmer j'avais
complètement réussi autant au moins que le com
portait ma mission quelque peu bizarre lorsque
par une maladresse inconcevable de la pari d'un
homme d'État aussi intelligent, vous avez brouillé
les caries en chargeant M. le prince de Ligne d'une
ouverture qui ne pouvait conduire, et vous le saviez
d avance, qu'à taire avorter toute la négociation.
Vous dites pour votre excuse que vous aviez
chargé le priiicede Ligne de me voir etde s'entendre
avec moi sur cette falale ouverture.
Le lait est que je n'ai connu la bévue que lors
qu'elle était fui te et qu'il n'était plus temps de la
réparer. Car, bien certainementsi j'avais eu la
moindre connaissance de vos dernières instructions,
j'aurais engagé vivement le prince de Ligne les
réserver pour un temps plus opportun et n'en
faire usage que lorsque l'obstacle insurmontable qui
existait alors, et qui existe encore aujourd'hui, mais
qui doit naturellement disparaître dans quelques
semaines, aurait cessé de se trouver en travers des
intérêts de notre tissage.
Je me plais ici rendre justice au zèle et l'ac
tivité même qu'a déployée l'ambassadeur belge dans
les négociations avec la Fi'ance, mais malheureuse
ment cet ambassadeur tout prince qu'il est est
assez modeste pour ne se croire que l'agent et l'in
strument de son gouvernement.
Il serait, je crois, préférable que M. l'ambassa
deur, plus même par sa présence sur les lieux de
juger la question s'en rapportât davantage ses
propres lumières, qui nesoutni toujours éclairées,
ni toujours opportunes.
M. Vande Casteele est partisan de l'union
douanière et croit que la Belgique se trouvera
forcée par la nécessité, de subir les conditions
que la France voudra lui imposer. Si tel doit
être l'avenir de noire pays, nous plaignons la
nation Belge, car un peuple ne mérite pas l'in
dépendance, si pour la maintenir, il ne supporte
tous les maux plutôt que de 1 aliéner. Admettre
les bases que la France propose pour l'union
douanière, serait vendre au prix d'avantages
matériels, qu'on pourrait avec de l'activité et
de l'énergie obtenir ailleurs, celle indépendance
nationale après laquelle les Belges ont soupiré
pendant des siècles.
)U
CONSEIL PROVINCIAL.
La première séance a été ouverte par un
discours de M. le gouverneur-ministre d'état,
comte de Mueienaere. Après quelques phrases
mélodieuses sur l'union et la concorde, la con
ciliation et la modérationet quelques argu
ments l'appui de l'utilité et des bons effets
de la somnolenceM. le commissaire du roi a
fait l'oraison funèbre de M. Jean Debrock eu
très-bons termes et a fini par déclarer ouverte
la session de 18-46 du conseil provincial de la
Flandre-Occidentale.
L'assemblée a procédé immédiatement la
vérification des pouvoirs des membres nouvel
lement élus. Tous ont été admis. Le conseil a
fait choix de son bureau définitif. MM. le baron
Pecsleen et Charles Van Severen ont été nom
més président et vice-président. MM. Alphonse
Vanden Peereboom et R. Deprey ont été élus
secrétaires. La séance a été levée et renvoyée
jeudi 10 heures.
Nous apprenons avec plaisir que de grands
préparatifs se font l'occasion de la réception
Vlamertinghe de Mr Malou, de Dickebusch
et de Mme son épouse. Elle aura lieu dimanche
12 Juillet, 4 heures de l'après-midi.
Le concert qui sera donné par M"° Henriette
Hitzemann, âgée de 7 ans, pianiste distinguée,
fille de M. le chef de musique de la garde-na
tionale de Bailleulest définitivement fixé au
lundi, 13 juillet prochain. Ce concert aura lieu
en la salle de spectacle, avec l'assistance de
MM. les artistes du 5° régiment, et sous la
direction de M. Istas. (Voir aux annonces.)
Les listes de souscription circulentet se
couvrent déjà de nombreuses signatures.
Lundi matin au marché de Courlray, on a
arrêté la mère abbesse de la fameuse bande des
coupeurs de bourse de Meulebeke, dite la
bande du hameau Turkyen (la Turquie). Voici
comment cette arrestation s'est opérée.
Une femme d'une mine suspecte, se trouvant
Feuilleton.
BIANCHË.
i.
Sur les confins de la Champagne et de la Bourgogne, au sommet
d'une colline escarpée, s'élevait dans le quinzième siècle un manoir
appelé Uurtevent, sans doute parce que sa position l'exposait de
fréquentes tempêtes. Ce manoir ne présentait au dehors qu'une
masse lourde et nue de murailles couronnées de ciéneaux et de mâ-
checoulis couverte de barbacaues et de meurtrières semblables
des yeux peifides et toujours ouverts. Au-dessus envoyait bien le
faîte de quelques tourelles aiguës et surmontées des girouettes féo
dales, mais elles n'étaient ni assez gracieuses ni assez variées de
formes et de détails pour diminuer la monotonie de ce bloc de pierre
jeté sur un rocher non moins lourd, non moins dépouillé, non moins
triste. Si aucune fenêtre du château ne s'ouvrait sur la magnifique
vallée qui s'étendait ses pieds c'est que l'époque malheureuse
dans laquelle vivaient les seigneurs qui le firent construire, avait
exigé d'eux qu'ils fussent indifférents aux charmes d'e La nature et
qu'ils élevaient, avant tout, de bonnes murailles capables deïé-
«ister aux plus vigoureux assauts. Aussi l'artiste, pour compenser
sans doute l'admirable vue dont ils étaient privés, avait prodigue au
dedans un luxe inoui d'architecture il avait manié pétri la pierre
au gré de son caprice, mais tout son art n'avait abouti qu'à faire une
prison. Certes, sous le marquis du Pont qui en était le seigneur en
1400 cette dernière dénomination était parfaitement justifiée.
Vassal de Jean-sans-Peur, duc de Bourgogne, et son meilleur capi
taine la fois le seigneur de Hurtevent n'avait pas le loisir de
déposer sa cuirasse pour donner desfetes son château. Loin de là,
son séjour y imposait le silence le plus profond et la contrainte la
plus pénible. Chacun alors remplissait avec sévérité la tâohe que le
devoir ou l'habitude lui avait assiguée ce qui n'empêchait pas le
marquis de trouver redire partout et de quereller ses valets, ses
pages, et même madame la marquise, son epouse, femme timide et
résiguée. Sa fille, seule, était l'abri de ses boutades et n'avait pas
souffrir de son humeur inégale et farouche, et néanmoins la pauvre
enfant tremblait de tous ses membres, dès qu'elle entendait retentir
les talons éperonnés de son père.
La marquise du Pont, assez longtemps stérile avait essuyé pen
dant ses premières années de mariage les mépris et les mauvais
traitemens de son époux dout le désir état de se voir père d un
gros garçon qui put, en guerroyant comme lui, soutenir convenable*
ment l'éclat de son nom. Il ne changea de procédé et ne deyi»1
aussi aimable qu'un homme de sa trempe pouvait l'êtrequ'à la
première grossesse de la marquise. Mais quand au lieu d'un gros
garçon qu'il attendait elle ne lui eut donné qu'une petite fille, si
frêle qu'elle ne paraissait pas devoir vivre, il voulut divorcer! De*
raisons suffisantes et plausibles lui ayant manqué, il eut uu moment
l'envie d'en finir sa manière..... Il n'alla pas jusqu'au crime pour
tant, soit que la résignation de son épouse l'eut désarmé, soit qu'il
n'eut pas perdu l'espoir de la voir mettre au jour le digue héritier
qu'il attendait.
Cependant sa fille, qu'on avait baptisée du nom de Blanche, avait
grandi comme une ileur qui s'entrouvre lentement, parce qu'elle est
privée des rayons du soleil et des mauvais vents qui pourraient
l'effeuiller. Elle se développait sous les yeux de sa mère, qui l'eu-
tourait de tout cet amour, de toute cette affection qu'elle ne pouvait
épancher ailleurs, taudis que son père, quand il était dans ses foyera,
ne. lui adressait jamais un mot bienveillautni un sourire pas plus
qu'une parole arrière ou brutale. Le manoir de Hurteveut était doue
pour elle une véritable prison, adoucie seulement par les caressesde
sa mère car elle avait toujours été sevrée, la pauvre eufaut, des
amusements et des plaisirs que réclame le jeune âge. Celte vie coa*
centrée et vide d'émotions, cette-absence d'air et de liberté n'avaient
influé en rien jusqu'alors sur sa beauté aai*»au'.e. Sjjoue »'airoudu-