68 ANNÉE. N° 556. I INTÉRIEUR. JEUDI, 3 SEPTEMBRE 1846- JOURNAL D'TPRES ET DE L'ARRONDISSEMENT. On s'abonne Ypres, Marché au Beurre, 21et chez tous les per cepteurs des postes du royaume. PRIX DE L'ABONNEMENT, par trimestre. Pour Ypres. fr* 5-00 Pour les autres localités 6-00 Prix d'un numéro0-25 LePro Tout ce qui concerne la rédac tion doit être adressé, franco, l'éditeur du journal, Yprea. Le Progrès parait le Diman che et le Jeudidecbaquesemaine. prix des insertions. Quinze centimes par ligua. vires acquirit eundo. VPREN, le 2 Septembre. LE PARTI SOI-DISANT CONSERVATEUR. La presse cléricale est dans la jubilation les journaux de celte couleur ne peuvent s'adresser trop de félicitations sur la victoire que le minis tère Guizot en France vient de remporter sur l'opposition aux dernières élections. Ce succès leur paraît si remarquable, qu'ils désirent assi miler le système rétrograde qu'ils sont chargés de prôner, au système du parti conservateur français, dans le but probable de poqvoir acca bler l'opposition belge par la majorité que M. Guizot s'est acquise dans la chambre des dépu tés. Les feuilles du clergé ont reçu le mot d'ordre de présenter les dévoués séides du parti- prêtre la chambre, comme animés des mêmes sentiments et des mêmes idées que les conser vateurs français. C'est ainsi que les chefs du parti clérical espèrent pouvoir faire quelques dupes, et avec une effronterie digne de plus de succès, ils s'emparent d'une phrase du discours de M. Guizot adressé aux électeurs de Lisieux Tous les partis vous promettront le progrèsles conservateurs seuls vous le donneront. Mais quel point de similitude y a-t-il entre le parti rétrograde qui déshonore la Belgique et le parti conservateur français si éclairési ferme, et qui sans doute a sauvé la révolution de juillet? M. Guizot, l'illustre chef de l'opinion gouvernementale en France, a-t-il quelque chose de commun avec M. de Theux ou M. Duchâtel avec M. Malou? M. Guizot ne veut-il pas que l'enseignement public soit laïc, et M. de Theux ne s'apprête-t-il pas le remettre entre les mains du clergé? L'opinion conservatrice n'a- t-elle pas applaudi la dissolution des jésui- tières françaiseset le parti clérical 11'a-t-il pas appelé de tous ses vœux les Frères de la Foi en Belgique, dans le but de leur confier I instruc tion publique? M. Guizot n'a-t-il pas tenu tête aux clameurs poussées par quelques évêques, et l'un d'entre eux n'a-t-il pas vu son mandement blâmé par une sentence du conseil d'élat, tan dis qu'en Belgique les décisions du synode épis- copal ont force de loi et porteraient malheur au ministre qui oserait les transgresser. Onlevoit, le parti clérical n'offre aucun point de similitude avec la marche de l'opinion con servatrice française qui plus d'un titre est représentée en Belgique par l'opposition belge. Ce que le parti ministériel en France est par venu maintenir est l'objet des vœux des libéraux belges et le but de leurs efforts. Le parti clé rical proprement dit n'existe pas en France, mais les légitimistes assez communément sont les organes des prétentiôus cléricales et les ad hérents des doctrines théocraliques. Eh! bien, comment cette nuance de l'opposition a-t-elle réussi dans l'épreuvesolennelle qui vient d'avoir lieu? l'ancienne chambre comptait dans son sein vingt trois légitimistes; dans la nouvelle, celte fraction est réduite onze membres qui ont eu beaucoup de peine se faire élire! Quand les journaux de la sacristie se félici tent de la victoire que vient de remporter M. Guizot, ils tirent boulets rouges sur leurs propres adhérents et ils le savent bien mais on ne pouvait laisser échapper l'occasion de présenter les faits sous un faux jour. C'eût été un coup de maître jésuite, s'ils arrivaient faire accepter le parti clérical, comme l'opinion qui joue en Belgique le rôle des conservateurs fran çaistandis qu'il ne rêve que la conservation des positions qu'il occupe et la liberté de les exploiter, dût-il s'en suivre des bouleversements. M. De Lacoste, le nouveau gouverneur de la province de Liègevient de faire preuve d'un manque de tact, qui doit étonner de la part d'un homme qui n'a pas mal joué de rôles. Dans la circulaire qu il adresse aux employés provin ciaux, l occasion de sa nomination de gouver neur, il rappelle qu'il a été, en d'autres temps appelé exercer les mêmes fonctions Anvers. Nous trouvons celte réminiscence du plus mau vais goût et elle doit produire ud effet défavo rable M. DeLacoste. Ou ne pourra manquer de faire la réflexion, que c'était comme libéral que M. De Lacoste était appelé au gouverne ment de la province d'Anvers et qu'il est gou verneur de la province de Liège un tout autre titre. Voudrait-on par hasard seglorifier d'avoir renié ses principes d'autre-fois? Ce serait du cy nisme. Un Belge, né Ypres, officier au service des Colonies néerlandaises est de retour dans ses foyers, après une bien longue absence. Le sieur Désiré DeGroote quitta la ville d'Ypresen 1822 ou 23 et s'engagea comme volontaire. En 1830, peu de temps avant qu'éclata la révolution il s'embarqua pour les Indes hollandaises comme caporal et parvint successivement par sa bonne conduite, sa vigilance et son courage, s'élever jusqu'au grade de premier lieutenant. En 1836, comme sergent il fut décoré de l'ordre mili taire du Lion néerlandais. Un congé de deux ans lui a été accordé par le gouvernement hol landais et il a obtenu une permission de séjour Ypres pour six mois. Le lieutenant De Groote rapporte avec lui une grande quantité d'objets riches et curieux des pays où il a résidé pendant plus de dix- sept ans. Une collection dont on se rappelle en core et qui a été offerte l'examen du public il y a deux ans, si nous ne nous trompons, avait élé envoyée par lui son frère. On nous assure que sa ville uatale ne sera pas oubliée et que le Musée des beaux-arts recevra quelques dons remarquables qui enrichiront la collection d'ob jets rares et curieux. fiqqçusbrr M. Eugène De Pruyssenaere, d'Ypres, élève de l'Université de Gand, vient de subir sou examen de candidat en droit avec distinction. Par arrêté royal en date du 27 août 1846, la démission du sieur Ch.-Victor de Coninck, de ses fonctions de juge au tribunal de lre instance d'Ypres, est acceptée. M. Verfaillie, employé de l'agent de la ban que surnuméraire au bureau de l'inspection des contributions directes douanes et accises est appelé Thourout comme chef du service des contributions indirectes. Lundi dans l'après-dinersur la route de la commune de Ghyverinckhove, au pavé de Fur- nes, est mort subitement M. Beke, ancien sé nateur pour l'arrondissement d'Ypres, aurte conseiller communal et ex-membre de la cham bre de commerce. Il était très-âgé puisqu feuilleton. y. la baume noire. A mesure que Pierre et son compagnon pénétraient plus avant dans le défilé souterrain les bruits partis de l'intérieur leur parve naient d'une manière plus distincte. Les coups de feu se succédaient aveo ces vibrations sonores et ces roulements prolongés qu'occasionne la répercussion des voûtes. On ne pouvait s'y méprendre le repaire des bandits était devenu un champ de bataille des cris bruyants des plaintes déchirantes se mêlaient aux décharges et en remplis saient les intervalles. Pierre hâta le pas et arriva sur le lieu de la scène. Une mêlée affreuse y était engagée et des torches de résine fixées dans les rochers en éclairaient les incidents. Deux cadavres couchés sur les bords du lac et demi submergés attestaient que le combat avait été long et sanglant. Dans un coin couvert par un abri naturelBouton-de-Rose tenait tête une partie de la bande on avait quitté les armes feu pour l'arme blanche et le brave lieutenant se défendait l'aide d'un moulinet brillantCQntre huit sabres levés sur sa tête. Des jurons des imprécations énergiques accompagnaient cc duel inégal et se mariaient au cliquetis du fer. Brigands assassins lâches 1 gibiers de potence 1 s'écriait le vaillant athlete. Ah vous vous révoltez faillis-chiens Vous vous mettez dix contre un Eh bien on vous les réglera vos comp tes Tiens Rossignoleinbourse ce coup de manchette toi Belle-de-Mairamasse ta joue, mon garçon. Ah vous en mangez 1 mes amours. A la bonne heure Ou s'y conformera. Ce n'était là qu'une partie du drame. A l'angle opposé de la ca verne, des cris douloureux attiraient les regards vers une autre scène de violence. Une femme les oheveux épars les vêtements en dé sordre, se débattait contre trois bandits qui cherchaient l'assujétir. Le désespoir et la pudeur lui donnaient une telle force que ces hommes ne pouvaient venir bout de sa résistance. C'est une véritable anguille disait l'un d'eux. Allons, petite ne nous effarouchons pas. On ne vous fera point de mal bagasse. Allons voyons Pas de bêtises Pierre eut peine jeté un coup d'œil sur cette soène que déjà il y était intervenu Va dégager Bouton-de-Rose dit-il demi-voix Zéphyr je te rejoins. Suffit, capitaine. Le sabre aux dents et les pistolets au poing, ils entrèrent en lice deux minutes aprèsl'aspect du champ de bataille avait changé. Point-du-Jour roulait sur le sol avec une balle dans l'épaule tous les autres assaillants s'étaient rendus discrétion. Pour opérer ce changement, il avait suffi d'un mot répété la ronde Le capitaine le capitaine Les yeux du capitaine lançaient des éclairs, ses lèvres se contrac taient d'une manière effrayante il était beau de fureur et de colère. Quand il vit qu'il n y avait plus frapper et que les révoltés detnan* daient grâce il piomena autour de lui des regards inquiets et fa rouches- Ah! c'est ainsi que vousle prenez! dit-il d'une voix tonnante.... Tous jouez des couleaux quand je n'y suis pas vous traitez vos chefs sous jambe vous br ûlez votre poudre sans commandement. Il me prend des envies de vous hacher tous lâches que vous êtes Dix contre un mais vous êtes donc des gendarmes Ici, tout le monde, et que 1 on s explique. Il y en a parmi vous qui peuvent recoiu- xplique. il y mander leur âme Dieu. Pendant que Pierre prononçait ces terribles paroles personne n'o sait élever la voix. Dans ces occasions, la troupe l'avait appris ses dépens, le capitaine n'avait qu'un interlocuteur le pistolet. Les bandits arrivèrent un un l'oreille basse, dans la partie du souter rain que le chef avait désignée du geste c'était l'endroit où Pierre tenait ordinairement ses lits de justioe; il débouchait sur une grotte basse et sombre que l'on nommait la Salle des AJorts. En avant de la grotte régnait un espace circulaire, dominé par un siège naturel que formait le rocher; des peaux d'agneaux marquaient la place où se tenait le juge. Les bandits étaient habitués ces actes de justice expéditive ils portèrent les torches sur ce point, qui fut rempli d'une vive lumière, tandis que les autres parties du souter rain demeuraient dans l'obscurité. Personne ne devait manquer ces assises lugubres. Quoique griè vement blessé,Point-du-Jour s'y traîna. Comme pièce de conviction, on y apporta aussi les deux cadavres qui gisaient sur le sol. L'un était celui de Maxime Grandval mort l'épée la main l'autre celui d'un bandit, qui avait été tué au début de la révolte. Pendant que ces préparatifs s'achevaientPierre s'approcha de la prisonnière, si heureusement sauvée du dernier des outrages. Mademoiselle lui dit-il, vous aliex être vengée. Laure Grandval n'élait point une femme ordinaire. Fille et soeur d'oHicier elle avait dans le caraotère quelque chose de hardi et de viril. Depuis trois jours elle avait passé par des épreuves auxquelles toute autre eût succombé son courage n'avait pas faibli un instant. Ni les larmes ni les évanouissements n'étaient des moyens son usage; de la femme elle n'avait que la beauté son cccur valait celui d'un homme. Quoique son frère vint d'être massacré sous ses yeux et que son honneur eût couru de terribles chances elle garda la présence d'es prit nécessaire pour suivre les détails de la scène qui allait se dé-

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