6e ANNÉE. - N° 569. INTÉRIEUR. DIMANCHE, 18 OCTOBRE 1816 JOURNAL D'YPRES ET DE L'ARRONDISSEMENT. Feuilleton. IPMEGœ mOUT®!K}B Ou s'abonne Ypres, Marché au Beurre, 21,et chez tous les per- aepteurs des pustes du royaume. PRIX DE L'ABONNEMENT, par trimestre.. Potir ïpresfr. 5-00 Pour les autres localités 6-00 Pria d'un numéro 0-25 Tout ce qui concerne la rédac tion doit être adressé, franco, l'éditeur du journal, Yprea. Le Progrès parait le Diman che et le Jeudi de chaque semaine, PRIX DES INSERTIONS. Quinze centimes par ligne. VIRES ACQUIRIT EUNDO. YPRE8, le 17 Octobre. LA THEOCRATIE ET LA VILLE D'ÏPRES. Le thème du Journal des Baziles s'est sen siblement modifié. L'audace pour continuer sa polémique anli-civique lui fait défaut. 11 se donne, dans son dernier article, un air paterne qui contraste étrangement avec les sauvages inspirations de ce fanatisme clérical, dont il est si fier et qu'il n'a pu dissimuler entièrement dans son dernier faclum. Examinons les assertions et les conseils si bénins de celle feuille qui se dit si modérée, l'adresse de l'administration communale. Depuis longtemps, dit-ellenous avons signalé les effets immédiats de celte lèpre libérale et nous avons certifié, quelle ne pouvait amener que le déshonneur et la ruine du royaume et des cités. Elle se plaint d'avoir rencontré dans le Progrès, un contradicteur aveugle, acharné et opiniâtreet nous espérons le rester encore longtemps, aussi longtemps du moins, que la lèpre jésuitique continuera étendre ses effets délétères sur notre pays. Nous pouvons parler avec plus d'assurance des résultais de la domi nation théocralique, de la ruine et de la misère qu'elle entraîne nécessairement sa suite. Des preuves sont faciles trouver; qu'on s'enquière de la situation de I Italie et de l'Espagne, quand ces pays étaient courbés sous le joug des moi nes, et on pourra prévoir la position de la Belgique, si un jour, ce qu'à Dieu ne plaise, l'influence théocralique régnait sans partage. Il fallait que le véridique Journal des Baziles délirât de colère, quand il a lancé celte accu sation mensongère au libéralisme. Jamais, que nous sachions, la prépondérance des principes libéraux 'n'a réduit un pays un élal aussi dé plorable et ces sottes déclamations pour inspirer quelque confiance, devraient être débi tées par une feuille moins tarée dans l'opinion publique. L'administration communale de la ville est libéraleet dévouéeaux principes qui constituent le libéralisme; elle peut s'en glorifier, comme la ville d'Yprès peut .tenir honneur d'avoir dans la gestion des affaires communales, réduit l'in fluence cléricale néant. Jusqu'ici, il faut bien que ses actes aient toujours été dirigés parun es prit de vigilanceet d'équité, puisque les suppôts des jésuites les plus experts en fait de calomnie, n'y aient rien trouvé mordre. Nous en excep tons toutefois la fusion des deux collèges qu'on préconise, mais il faudrait connaître les conditions. Si, comme nous en sommes cer tains, il faut que le pouvoir communal se laisse absorber par le clergé pour qu'un tel arrange ment soit possible loin de pouvoir blâmer la régence, nous lui devons de la reconnaissance, pour avoir opposé une digue aux empiéte ments du parti-prêtre sur le domaine du pou voir civil. Les conditions qu'on a voulu impo ser, n'ont été acceptées ni Tournai, ni Chimay, ni Verviers, et nous croyons qu'elles ne seraient pas acceptables Ypres. C'est une amère sottise que de reprocher l'autorité communale de subsidier un établisse ment d'instruction secondaire au profit des libéraux seuls, l'exclusion des catholiques. Personne n'est exclu du collège communal; si des pères de famille, influencés par le clergé ne veulent pas en profiter, il faut déplorer leur aveuglement, mais on ne peut, sans dire la chose qui n'est pas, avancer que leurs enfants en sont exclus. Probablement dans la belle envie de déni grer, la feuille cléricale laisse échapper un aveu qui est précieux. Une portion notable de la jeunesse aisée est chassée de la ville, dit-elle. Eh! pourquoi? Les pères de famille n'ont-ils pas le choix? Parmi les libéraux, les hommes qui peuvent le mieux apprécier la valeur de l'instruction qu'on donne au collège communal, n'y envoient-ils pas leurs enfants? Si, dans les rangs de nos adversairesbeaucoup reculent devant la nécessité de mettre leurs enfants au collège épiscopalparce qu'ils n'ont pas con fiance dans l'enseignement qui s'y donne, est-ce la faute du libéralisme? Pourquoi les patrons laïcs de cette institution cléricale n'y placent-ils pas leurs fils et les envoient-ils dans d'autres villes C'est là un coté de la question que la béate feuille pourrait expliquer avec détail, pour l'édification des fidèles et non pour nous car notre conviction est faite cet égard. Si les détaillantsles louagersles hotclliers, les libraires et beaucoup d'autres marchands et industriels ne trouvent pas dans le collège communal une source plus étendue de béné fices, qui la faute, si ce u'esl vos patrons, clercs et laïcs qui le déprécient près des bonnes âmes, parce qu'ils convoitent ardemment le monopole de l'instruction tous ses dégrés, pour le remettre entre les mains des ordres enseignants et adieu alors tous ces profits car tout ce dont les élèves peuvent avoir besoin est fourni par l'établissement mêmeen con currence avec les marchands de la ville et les bénéfices sont escamotés, comme œuvre pie, au grand dommage de ceux dont on invoquait naguère les intérêts. Dans son réquisitoire contre le libéralisme, le Journal des bedeauxle rend responsable de la non-exécution du raihvay de Courtrai sur Ypres et cependant là encore, il cède son habitude de calomnier, quand il prétend que la bonne harmonie ne règne pas entre l'autorité communale et la Compagnie. 1! a été impossible qu'elle fut brisée, puisque la Société concession naire n'a jamais été en relation avec l'adminis tration communale et qu'elle a toujours agi comme s'il n'y en avait pas. Quand il a été fait des démarches pour pousserau commencement des travaux, on n'a rien obtenu de la Compa gnie, qui cependant a trouvé moyen de para chever line section en peu de temps tandis qu'ici, on fait plans sur plans; mais là se bor nent tous les travaux. Ce n'est pas vis-à-vis du gouvernement que la régence affecte des antipathies déplacées mais l'égard du ministère, tel qu'il est com posé maintenant. L'on doit en convenir, s'il y avait encore des habitants de la ville qui fussent restés indifférents, a près l'application de ce mode de donner la férule nos concitoyens, ce cabinet doit être détesté, car il est partial et inique dans ses actes et abuse du pouvoir qu'il délient titre précaire afin, de l'aveu de ses défenseurs, de satisfaire ses mauvaises passions. Quant au patriotisme et au dévoûmentà la dy nastie nous croyons que le parti clérical n'en a pas concentré dans ses rangs le monopole, et que ces insinuations ne sont jetées là que pour embellirel orner l'acte d'accusation de la feuille jésuitique contre le libéralisme. Nous accordons que le gouvernement du roi n'est pas obligé répartir les cantonnements de l'armée d'après une règle établie, mais nous maintenons que sans motifs graves il est ab surde d'enlever la garnison d'une ville fortifiée, pour la placer dans une cité ouverte. Quant au réproche qu'on adresse l'administration de ne pas avoir tenté de réduire le nombre des maisons de prostitution, ni d'extirper la débauche, nous croyons que ce sont des allégations qu'un slu- pide fanatisme peut seul se permettre. D'un autre côté, nous avons lieu de croire que les grandes villes qui ont des troupes ne savoir où les loger sont sous le rapport des mœurs des foyers de pestilence autrement dangereux XIII. le combat. L'apparition de Point-du-Jour, au moment où Pierre le croyait muré et enseveli dans le caveau est un incident trop inattendu pour qu'une explication ne soit pas nécessaire. La blessure du Provençal n'avait qu'une gravité apparente. La balle d irigée obliquementavait glissé entre les chairs, et les pre miers symptômes, quoique d'un caractère fâcheux, étaient moins le résultat d une lésion profonde que d'une hémorragie abondante. Le malheureux sentait peu peu ses forces s'en aller avec son sang et quand on le scella dans la tombe un évanouissement complet lui déroba le spectacle^ de ce dernier supplice. Ce ne fut qu'au bout de quelques heures qu il recouvra l'usage de ses sens. Les torches que l'on avait laissées dans le caveau brûlaient encore et d'un coup d'oeil il put envisager toute l'horreur de sa situation. Deux cadavres peine refroidis reposaient ses côtés; c'étaient ceux du capitaine Maxime et du bandit imiiiolé en l'honneur de la discipline. Plus loin rangés sur deux files et éclairés par des lueurs lugubrespa raissaient les débris de ces hommes qui depuis deux siècles dor maient sous cette voûte du sommeil étemel. A l'aspect de cette sombre fantasmagorie, le désespoir et l'clfroi du Provençal éclatè rent eu plaintes et en imprécations furieuses. Il se roula sur le sol, gagna tâtons l'issue du caveau et chercha ébranler les énormes îochts qui avaient été entassées. Il y épuisa ses forces, il s'y déchira les mains mais ce fut vainement la barrière était trop solide l'obstacle trop puissant. Il voyait s'approcher une agonie lente sans pouvoir ni la conjurer ni l'abréger. On ne lui avait pas même laissé une arme pour qu'il pût mettre fin cette torture. Peu. peu les torches de résine se consumaient la nuit se faisait dans le caveau. La clarté devenait de plus eu plus confuse, et jetait sur ces corps étendus de reflets vacillants et blafards la couleur funèbre de cette scène s'en augmentait encore. Point-du-Jour en était accablé; il se débattait sous les étreintes de l'épouvante et dans les angoisses d'une destruction prochaine. Enfin le dernier flam beau s'éteignit et l'obscurité la plus complète régna autour de lui ce fut un moment terrible. Par un mouvement de colère et d'em portement, le bandit se mit alors parcourir le caveau en rampant, en se traînant d'un angle l'autre il franchit les cadavres dont les os craquaient sous le poids de ses genoux, brisant avec fureur ce qui lui faisait obstacle, s'agitant d'une manière convulsive et boulever sant tout ce qui se trouvait sous sa main, comme s'il eût voulu faire acte de vie dans ce séjour de mort. Cette crise, cet efTort désordonné, cette protestation frénétique, se prolongèrent jusqu'au moment où, épuisé de nouveau il retomba dans un paroxisme d'abattement et d'insensibilité. Peut-être cette sincope eût-elle été la dernière si un air plus vif ne fût parvenu alors a ses poumons il se remit sur son séant et sentit courir sur soii^ visage une brise fraîche et pénétrante. Cette circonstance éveilla son attention; il examina les lieux. Derrière un cadavre qu'il venait de déplacer, existait une ouverture qui semblait faile de main d'homme. Probablement le malheureux qui l'obstruait de son corps avait péri avant de pouvoir l'agrandir suipris ainsi au moment de sa délivrance. Puiul-du-Jour écarta les débris amon celés et marcha dans la direction du vent. Pendant l'espace de quelques pieds, il s'avança avec liberté mais bientôt un nouvel ob stacle vint l'arrêter c'était un autre cadavre comprimé entre les rochers et couché dans un rétrécissement de l'issue. Cet homme avait dû expirer au moment où il cherchait foroer le passage. Ar rivé au point où il ne pouvait avancer ni reculer, une fin cruelle l'avait surpris et frappé. Point-du-Jour ne se laissa point abattre par cette perspective; il arracha, fragment par fragment, les débris de ce squelette, et déblaya le conduit étroit dans lequel il était en gagé. Recommencer l'expérience était une entreprise audacieuse cependant le Provençal n'hésita pas un moment. Que risquait-il condamné une mort lente, ne valait-il pas mieux rassembler toute son énergie pour un dernier effort, et pousser jusqu au bout l'aven ture Il entra donc en rempanl dans le boyau qui s'ofTrait lui. A peine pouvait-il y pénétrer et ce ne fut qu'en se couchant entièrement plat ventre et ens'aidant de ses mains qu'il parvint y avancer. Au lieu de s'élargir, l'espace allait toujours en diminuant, et rien ne prouvait qu'il n'y eût pas un point où il deviendrait insuffisant pour livrer passage l'homme. Le Provençal ne s'en émut pas; il s'arma de toute sa vigueur et continua son travail de reptile. Un instant il crut que c'en était fait de lui les parois du rocher se resserraient de toutes parts, 1 étouffaientl'enlaçaient les saillies de la pierre labouraient et entamaient ses chairs; la montagne entière semblait peser sur ses larges épaules. D'un autre côté, les efforts qu'il venait de faire l'avaient épuisé sa blessure s'était rouverte et inondait de sang le conduit souterraiu. Sans une énergie surhumaine le mal heureux était perdu. Il rappela ses forces et par un dernier jeu de muscles, franchit ce passage étranglé qui allait devenir sou tombeau. i Y

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Le Progrès (1841-1914) | 1846 | | pagina 1